N° 239
Juin

https://piednoir.fr
    carte de M. Bartolini J.P.
     Les Bords de la SEYBOUSE à HIPPONE
1er Juin 2023
jean-pierre.bartolini@wanadoo.fr
https://www.seybouse.info/
Création de M. Bonemaint
LA SEYBOUSE
La petite Gazette de BÔNE la COQUETTE
Le site des Bônois en particulier et des Pieds-Noirs en Général
l'histoire de ce journal racontée par Louis ARNAUD
se trouve dans la page: La Seybouse,
Écusson de Bône généreusement offert au site de Bône par M. Bonemaint
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EDITO

LE CIMETIERE DE BÔNE,
ENVIE DE VOMIR Y TE DONNE


En Algérie, les cimetières pieds-noirs
meurent doucement mais sûrement.

        Lors de notre exode, les Pieds-Noirs ont laissés derrière eux, leurs cimetières et leurs morts. Les Etats Français et Algériens qui ont en charge la maintenance et l'entretien de ces lieux de mémoire et de respect ne font pas grand chose pour leur préservation. Ces états ne mettent pas en place les vrais moyens nécessaires.

        Avec un groupe d'amis, je viens de faire un séjour en Algérie et notamment à Bône (Annaba) ou nous avons trouvé le cimetière dans un état de désolation inimaginable. C'est plus que de la profanation, c'est un saccage dont nous pensons qu'il est organisé. En 20 ans de voyages, c'est la première fois que nous voyons ce spectacle.

        Des milliers de tombes sont éventrées (environ 70 %), certaines remplies de terre et de cailloux, recouvertes de ronces, enfouies sous les mauvaises herbes et les broussailles. Des cercueils ouverts, des corps sortis par morceaux, des cranes jetés dans les herbes pour les chiens. Les troncs d'arbres et les branches coupées bouchent les allées. Les canettes de bière et les mégots de cigarettes s'étalent à côté des épitaphes cassées et plaques de marbre.

        Un rehaussement de la clôture a été fait récemment, mais en dépit du bon sens. Les vandales entrent et sortent après leurs méfaits aux yeux du poste de police à 15 m en face de l'entrée du cimetière.

        Le gardien aussi se tient à l'extérieur sur un petit mur en face de l'entrée du cimetière, il aurait peur des vandales.

        La mairie et la Willaya ont été averti par M. le Consul et par l'association In Mémoriam, mais rien ne bouge car cela fait des mois que ça dure. Même les islamistes n'en ont pas fait autant.

        Bien entendu, nous ne sommes pas dupes et nous avons compris qu'il y a une volonté spéculatrice de récupération des terrains.

        Dans la presse algérienne, des articles publiés, accusent la "mafia du béton" de s'attaquer désormais aux morts, dans plusieurs communes. "Les habitants seraient abasourdis par le sort réservé aux cimetières chrétien et juif", ont-t-il dénoncé. Ces affaires, d'une rare inhumanité, ont provoqué une véritable vague d'indignation au sein de la population.

        La presse française a été alertée et informée de ces faits, bouche cousue et lunettes de soudeur, quand cela touche les lieux sacrés des Pieds-Noirs.

        En France, quand cela touche la communauté musulmane et pour de petites profanations, que ça se passe à Carpentras, ou à Arras, ou ailleurs en France, là, pendant des jours et des semaines par des médias destructeurs de nos mémoires, nous y avons droit plein les oreilles et les reportages non-stop !

        Profaner un cimetière est honteux à plus d'un titre, ce, quelque soit le cimetière visé : musulman, chrétien, juif… ou autres. Le non-respect des morts est odieux, c'est un crime, c'est les tuer une fois de plus.

        J'ai eu un entretien de plus d'une heure avec : M. le Consul, La Présidente de l'association d'In Mémoriam et notre entrepreneur qui s'occupe de nos tombes. Je dois préciser que personne d'autre n'y assistait contrairement aux propos qui sont avancés par des vantards sur les réseaux sociaux et qui m'ont été rapporté et envoyé.

        M. le Consul aimerait faire reboucher les tombes, mais il se trouve démuni financièrement. Avant d'entreprendre de tels travaux, il faut que l'état algérien mettent au moins deux à trois gardiens assermentés (même une entreprise privée de gardiennage) dans le cimetière ; qu'il protége efficacement les enceintes avec des barbelés électrifiés comme pour le pacage des animaux ; qu'un éclairage soit réalisé sur l'ensemble accompagné de caméras ; que le nettoyage soit fait régulièrement par de vrais entreprises sensibilisées aux problèmes du cimetière.

        Il y a eu la visite du 19 au 21 mai, du Sénateur des français de l'étranger, Olivier Cadic, à Annaba et je n'étais pas en état de le rencontrer, pourtant j'avais été invité par un ami, Conseiller FDE.
        Son compte rendu : http://www.oliviercadic.com/en-circonscription/ en-circonscription-en-algerie-2-3-annaba-19-21-mai-2023/

        Pour Bône, cela fait des années que j'ai alerté sur la nécessité d'entretenir les tombes, mais nous avons été environ 150 à le faire pendant que d'autres se contentaient de nous critiquer ou à faire semblant de pleurer.

        Ce mois-ci, je ne mettrai pas de photos, je n'en enverrai pas non plus, et je ne communiquerai pas, mais le mois prochain vous verrez les résultats.

        Ceux qui voudront avoir des renseignements sur leurs tombes, peuvent prendre contact avec L'Association IN MEMORIAM à Annaba
        Rue Gouta Sebti 23.000 Annaba Algérie,
        Mme Marie MENAR, Présidente, N° tel : 00 213 552 14 94 00
        Une petite participation de votre part ne serait pas superflue pour les remercier de leurs recherches qui ne seront pas faciles.


        Que la France prenne garde, ce qui se passe à Annaba, et dans l'Est Algérien, se passera bientôt en France.
        Bonne lecture et bonne reflexion
Jean Pierre Bartolini          
        Diobône,         
         A tchao.



L'AÏD CITY….. (Laïcité )
Envoyé par M. Georges Barbara
QUAND TU NOUS TIENS !
            - " " O Nano, te connais pas la dernière ?
            - " "Et ça y'est le P'Tit Reveil Bonois y rocommence à sortir….Je m'la voyais venir celle la ! Aller frade fais vite que moi j'ai pas beaucoup le temps à cause que ce matin je dois aller me chercher un travail, pourquoi ça qu'tu sais pas toi, et ben y m'ont menacé de me jeter du chomage. Y z'ont un putain de culot ces mecs de nos jours. Y faut le faire te sais. Et quand je pense que depuis le temps que je suis dans leur maison, y me connaissent bien non? Te veux que je te dis entre nous, et ben c'est juste au moment ou j'allais me prendre une bagnole d'occase... Diocane à Madone te t'rends compte méténan c'est nous qu'on doit se chercher le travail….un monde à l'envers.. ! Bon aller sorts moi ton caldi tout chaud…; C'est encore a'c tes elections je parie ?

            - " " Non même si Pantaloni qu'y l'a pris la Mairie, y t'est resté en travers de la gorge. Ca fait rien, ça j'le sais ! Mais ça que j'va te raconter et ben a court pas les rues o frade. Alors écoute moi bien pour une fois... Te sais depuis que le promier Ministre Monsieur ...Comment y s'appelle çuila déjà... A oui Monsieur Latex comme le preservatif, y l'a dit que tous on devait porter le masque à cause de cette maladie qu'elle nous a attaqués. C'est comme à la guerre qu'y z'ont dit. Et même qu'on sait métenan, quelle vient de Chine, et ben moi comme je suis disciplinaire, j'le mets et ça me fait plusque plaisir et même beaucoup plaisir, à cause que je trouve que ça me va bien. Ya même des enfants au quartier qu'y m'appellent Zorro. Te veux que j'te dise, des fois ça m'arrive que j't'oublie même de l'enlever pour dormir. Comme hier au soir que je voulais dire bonsoir à Germaine ma femme ; ...Et oui te peux rire...ça arrive…. Et ben j'me suis trouvé 'ac ce morceau de chiffon dans la bouche ! Te t'rends compte un peu toi ?

            - " "O frade t'yes entrain de t'la porter à la longue je 'ois. Mets tout parterre si te veux et après on va trier !
            - " "Ouais comme j'te disais et ben moi depuis ce jour je peux marcher la tête haute. Avant Diocane j'faisais toujours entention dans quelle rue il fallait que je passe à cause des ardoises que ma femme a te laissait dans tous les magasins d'la colonne. Et même chez Aquilina le charcutier d'la rue Bugeaud, que c'était un copain de l'école ; Et ben te sais çuila j'te le rotiens. Te sais pas toi il a eut le courage de nous envoyer Mazouz son p'tit arabe à la maison pour demander que Germaine a lui paie les deux francs cinquante qu'elle lui devait pour quatre Merguez depuis deux mois seulement…. Y'avait pas le feu non ? Mais le plusque c'est à la grande épicerie Morali d'la rue Bugeaud à coté du temple là où y vont les Protestants. Chez lui et ben le carnet de crédit il avait plus des pages pour marquer ça qu'on lui devait des commissions ! Alors te vois le cirque que c'est moi le tchoutche que je dois faire enttention par où que je dois passer pour prendre un peu l'air ! C'est pas un monde ça ? Mais depuis qu'y zont inventé le masque je peux dire merci mon Dieu !

            - " " Et alors t'yes venu exprés ce matin pour me faire croire qu'un bout de chiffon y peut te faire marcher la tête haute, et qu'y va payer à ta place tous les crédit que cette effrontée de Germaine elle t'a fait ?
            - " " Attends, Attends un peu et rogards ça que j'va te dire. Hier matin y m'est venu une madone d'envie de me manger une côtelette de cochon dans les chines t'sur le grill, alors je me suis fait courage, j'ai fait le mort bien sur et j'ai été chez Aquilina le charcutier comme si de rien il en était !
            - " " Et alors te vois pas ousqu'il est le miracle non des fois ?
            - " "Le miracle, et oui le miracle comme tu dis o frade et à debon le vieux Aquilina y m'a pas roconnu avec mon masque bien sur, et en plusque y m'a mis un morceau cadeau pour les enfants à cause qu'y te croyais que j'étais un nouveau client. Te connais les Maltais ça qu'y font à chaque fois pour t'attraper la clientèle ? Leurs petits cadeaux c'est comme tu dirais le bromèdge. Et moi a'c la fatche de merlan frit que mon père y m'a fait, J'te lui ai dit au plaisir Monsieur Aquilina, je roviendrai ! Te 'ois d'ici un peu le cinéma ?

            - " " Te sais Doumé, moi j'va te dire une chose, c'est que tu pries le bon Dieu et tout le sacramente, que cette Pantomine a part plus, comme ça te pourras aller pêcher aux p'tites pierres au bout des quais du matin au soir ! Mais te crois pas qu'ils vont continuer ac leur politique de ça qu'ça coute jusqu'a Azraïne des fois ? Entention Doumé tout ça y va finir, moi j't'le dis.
            - " " O Nano ! Toi te veux que j't'le dise, et ben on sait jamais de quel coté du canote que t'yes. Mais pisqu'on parle des masques depuis un moment, splique moi une chose qu'elle est étrange.

            - " " Aller te 'oila te veux que je joue metenan à la Madame Soleil tout d'un coup ?
            - " "Déconne, déconne o frade te vas prendre des galons….. Mais moi ça qu'voudrais sa'oir, c'est pourquoi pour rentrer dans les Galeries d'France t'sur le cours, l'année derniere on t'obligeait les Mouquères à s'enlever les morceaux de chiffon qu'a portaient t'sur la fugure, et que métenan c'est tout le contraire ?
            - " "A sa o frade c'est la loi à chez nous et te cherches pas à comprendre …. C'est ça que ça s'appelle :
            LA LAÏD CITY ...ET OILA !

Georges Barbara, août 2022


LES RAISINS DE LA COLERE.
Envoyé par Jean-Claude PUGLISI.

            Mes Frères ! Aujourd'hui je n'sais pas pourquoi ? Il me vient l'idée, d'un p'tit peu rigoler en contant une bien drôle d'histoire, qu'autrefois au Bastion de la France il s'est passé.
            Pour planter le décor, rappelons sans pour cela se vanter, que chez-nous à La Calle l'hospitalité était innée et cela nul ne pourrait le contester ! Mais se laisser marcher sur les pieds - surtout par des étrangers ! - était à l'évidence et de tout temps un incident très mal supporté...
            Ce n'est sûrement pas vous qui me contredirez ! ?

            Ce devait être en plein été ! ? Au Marché couvert pour ne rien vous cacher... puisque, des tas de Melons et Pastèques bien rangés, encerclaient hauts et fiers le pavé de l'arène, où, ce soir-là, des Callois qui ne voulaient pas s'en laisser raconter, affrontèrent vaillamment une Légion entraînée, de gladiateurs d'Extrême-Orient fraîchement débarqués.
            Souvenez-vous Frères du Bastion de France ! C'était au bal du Marché un soir où rien n'annonçait, un bon coup de Bafoungne énervé à souhait, balayant le Simoun qui en tempête venait brutalement de se lever : il était blond le légionnaire et peut-être très beau le mercenaire, mais, une Miss belle grappe de notre treille, préféra visiblement au sable chaud les cordages attirants, d'un enfant du pays qui sentait bon la Marine.
            Voilà pourquoi Frères du Bastion de France, comment un beau soir au bal du marché éclatèrent les hostilités.
            Romulus très courroucé et de ses compagnons assistés, de la douce pervenche à chaque refus d'une danse, par une piécette rageuse remerciait la bêcheuse. Devant la monnaie qui sur le sol s'étalait, Amor le Maure - Grand Sommelier chez Antoine " aux Palmiers " ! -, à tout moment déviait son trajet, pour venir d'une main délicate et sans remercier, encaisser sur les lieux les sonnantes offrandes des Légions médusées.
            Combien de temps dura cette grotesque pantomime ! ? A vraie dire, jamais je ne le su… Mais manifestement c'en était que de trop ! Car déjà depuis un bon moment, de son fiel la coupe bien pleine laissait dégouliner : d'une poigne vengeresse le troupier irrité, entraîna tout-à-coup la divine donzelle dans une danse forcée... Aussitôt alerté son chéri de Pierrot, en moussaillon courageux sur le pont du navire ballotté par l'orage, tenta un instant d'arrêter courageusement l'abordage... Mais la charge était trop rude pour le frêle défenseur et petit Pierre à son tour violemment bousculé, vers un injuste naufrage s'en allait droit au vent malmené par l'orage.
            Heureusement pour lui car croisant dans les parages, Cap'tain Gennaro - un fidèle des lieux et enfant du pays ! - de loin aperçut la bataille et d'emblée sans dérapages, fonça courageusement dans la mitraille, criant très fort à l'excité que Mademoiselle était sa Dulcinée... Mais hélas pour le courageux Cap'tain ! Trop grosse était la lame et l'on vit alors secoué à son tour, le pauvre Gennaro dans l'arène faire un prompt retour, s'écroulant lourdement au milieu de la lice, où déjà le Bafoungne s'était mis à gronder... C'est alors que s'élança tel un diable énervé, grand Robert, frère aîné de p'tit Pierre par Goliath agressé : d'un Catsotte bien dosé étala l'animal, mais la bête était dure et le coup trop tassé, voilà pourquoi ce soir là grand Robert se brisa le poignet ! ..

            Alors, mes Frères, les légions attaquèrent !
            Primum en bons mercenaires, aucune stratégie ne négligèrent : comme une souricière les lourdes grilles du marché bouclèrent, de deux petits tours d'une clé qui se voulait vengeresse. Ainsi pensaient-ils, qu'en gladiateurs aguerris ils n'auraient aucune peine, pour assommer ces païens sur les lieux de la fête... Mais du Bastion de France, bien mal c'était connaître les sujets, qui, d'un même élan, sortirent d'un coup leur armement : une magistrale Bafoungnade qui envoya savamment Catsottes et coups de citron, rafraîchissant cette nuit là les ardeurs des petits soldats ! ..
            Un instant surpris par la riposte adverse, l'aigle toujours rageur la tête ne baissait pas... C'est alors que soudain l'on vit au milieu de la lice, tout prés de Samson qui cognait de bon cœur, petit mais trapu, Gaston, le Lion du Bastion, armé jusqu'aux dents d'une chaise, qui sur son passage faisait des ravages parmi les pâturages ! Heureusement les portes étaient bouclées, sinon, un peu plus au Moulin Gaston il montait, décimer la légion au milieu de son quartier, encore un peu rejoint par les marins-pêcheurs du port, qui, à la main bidons d'essence prêts, partaient pour incendier toute la caserne des enragés !
            Pendant la bataille sur la touche se tenait, courageux, mais pas très téméraire, Toinou dit la Rose, qui, un instant effrayé, fonça vers les grilles qu'il franchit d'un seul coup imitant les anguilles... A côté mais pas loin dans un coin réfugié, Coco dit bel-Œil, qui pour sa fine beauté le beurre noir il craignait, préféra vous pensez laisser faire ses aînés, qui du reste pour se batailler ne semblaient pas se faire prier... Et là-bas, bien à l'abri derrière son bar, on pouvait voir cogner fort Amor des Palmiers, sur le crâne des forbans qui à proximité osaient s'aventurer, à coups de bouteille remerciait des pourboires sans même rendre la monnaie... Sans compter qu'au milieu de l'arène et sans aucune façon, une bande de marsouins du R.C.L.C. n'en finissait plus de bien se régaler : Corners... Coups francs... Penalty... Il y est ! … Tiens voilà du boudin... Des catchoutchels et des pichecatriches... Des gatsoumarines, des merguez et des saucisses de sanglier !… A nous autres les oualiounes et en avant la musique ! Et puis, on recommence de nouveau à marquer... Il y est !... Coups de sifflet strident ! Coups de sifflet quand même ! ? Mais... Coups sifflés par une patrouille de la légion, qui ce soir-là mit fin à la joute et des képis blancs la danse fût enfin terminée.
            Attila et de sa horde d'enragée, le Phœnix du marché n'ayant point effrayé, décidé alors il fût, de poursuivre le lendemain le programme des festivités... Il était donc à peu prés certain, que le bal allait reprendre de plus belle et avec beaucoup plus d'entrain !…
            Le fier adversaire par la Bafoungnade de la veille ébranlé, alors changea de tactique certain du succès. Peut-être craignait-t-il au sein du marché, un nouveau penalty fatal à ses armées ! ? Aussi à l'entrée, il posta Barbe bleue et ses sbires, qui d'un œil d'aigle dans le noir à chercher se mirent, petit mais trapu Gaston le Lion l'assommeur des légions... C'est alors que surgit des ténèbres de la nuit, petit mais trapu Gennaro le coquet par le bal alléché. Aussitôt le moujik mal-voyant dans le noir, pour Gaston le prenant s'empressa sur l'innocent de foncer sans façon... Courageux mais prudent d'un arrière toute très savant, Gennaro vivement évita de justesse la collision, en fonçant droit devant cap la presque Île évidemment, entraînant dans son sillage toute une meute de chacals, un instant arrêtée par des tas de melons qu'ils ne purent éviter. Et alors notre pauvre ami poursuivi de plus belle, des Germains aux longs pieds qui avaient bonnes ailes, à l'école des filles barre à droite il vira pour se réfugier en hurlant, à la porte de l'antre d'Athos et Portos capitaines du Bastion, qui, des combats de la veille au courant, artillerie à la main refoulèrent les mutins.
            C'était trop dur mes Frères pour les armées conquérantes et Néron leur Tribun par ces autochtones courroucé, décida illico de montrer la puissance de ses armées par un défilé triomphant... Au cours Barris vous vous souvenez ! ? Malgré l'éclatante parade personne ce jour-là, se crût sur les Champs Elysées pour un 14 juillet ! Et puis les troupiers sur la même lancée, de la cité les rues se mirent à sillonner baladant une Miss Carnaval de chiffon, que bricolé par dépit ils avaient... Encore une fois personne ce jour-là ne crût, au Carnaval de Nice sur la promenade des Anglais !...
            Fou de rage et blessé au plus profond de son être, mais ne pouvant cependant comme dans l'antique Rome incendier toute la cité, Néron l'excité vint s'en prendre à Auguste notre bon Suzerain respecté... Tout haut le défiant en combat singulier, où royal il laissait à Auguste notre Maître, le choix des armes et le lieu qu'il voulait... Quand il lui fût proposé un duel particulier à dos de bourrique et la main d'un nerf de bœuf armée... Néron un moment désorienté et d'ignare ne voulant passer, très longtemps l'explication il chercha dans tous les traités des écoles d'officiers, de ce combat très particulier que nos voisins les Khroumirs, auraient pu à leur façon se faire un plaisir de lui expliquer... Mais je pense que des Légions au Bastion hébergées, leur chef suprême a très vite déclaré forfait lorsque son orgueil fut enfin rectifié par de plus hautes autorités !…

            Et voilà comment mes Frères un beau jour de l'été, pour une jolie fleurs du Bastion de France, de vaillantes armées se virent sur-le-champ indiquer, une autre contrée pour aller reposer leurs héros fatigués.
            Pour être franc humblement je vous l'avoue, qu'à aucun moment je n'y ai même un peu assisté, vu que sur les lieux je n'y étais. Alors ce récit que j'ai bien sûr un peu arrangé, où diable ai-je été le dénicher ! ? Aujourd'hui bien obligé, je suis de tout vous avouer ! Mais surtout ne le dites pas... A personne... Enfin et seulement - si par hasard on vous le demande ! Alors, envoyez les curieux prendre avis chez Cap'tain Gennaro +, notre célèbre Consul de La Calle sis à Port-la-Nouvelle, qui à sa manière et mieux que personne, vous contera volontiers une bonne fois du marché la célèbre bataille et chantera les glorieuses louanges d'une belle victoire Calloise autrefois remportée... Et puis s'il est de bonne humeur, en conclusion et sur un air connu vous aurez peut-être la chance unique, de l'entendre fredonner de sa plus belle voix :

- On a beau dire,
On a beau faire,
contre
Auguste y a rien à faire.

- Ils ont le Saucisson,
vive
ceux d'La Calle...
- Ils ont le Saucisson,
à bas
les légions... etc, etc ! ..."

- Quant à moi,
la chansonnette,
j'vous l'ai poussée à ma façon...
En l'ayant
un peu beaucoup arrangée...
Mais,
il fallait bien un peu rigoler
pour dédramatiser
ce bal
du Marché !

            Pour terminer, soyons justes mes Frères pour nos braves Légionnaires et avouons tout de même qu'une jolie grappe bien mûre et particulièrement exquise, ne peut ce me semble refuser sur la place du marché, le bourdon de passage même s'il est étranger !
            Mais alors ? il n'y aurait pas eu d'hostilités et moi dans l'affaire pas d'histoire à raconter ! Mais qu'importe car je n'aurais eu aucune peine de retrouver dans le fond de mes poches, un p'tit bout de papier pour y lire un autre récit quelque peu relevé !
            Mais de grâce, mes Frères !
            Surtout, n'oublions jamais... Que, c'est pour RIGOLER ! ! !
Jean-Claude PUGLISI
- de La Calle de France.
Paroisse de Saint Cyprien de Carthage
- Septembre 1985
            N.B :
            Cette chronique du Bastion de France est véridique, mais, cependant, lorsque j'ai voulu la raconter, il m'a tout à coup semblé ressentir comme un froid dans notre communauté. M. Auguste DEYMIER + notre maire, lui-même m'avait vivement déconseillé de le faire, puisque, parait-il ce soir là, le bal était organisé par le parti communiste Callois, et il semble que cette bagarre avec les Légionnaires, était mûrement préméditée par ceux du parti contre, dans le bût inavouable d'ennuyer - voire d'emmerder ! - les organisateurs ! ?… C'est, ce qui à l'époque se disait ! …Mais racontars que tout cela.
            Ce conflit devait éclater au Marché un soir de bal - autour des années 1952 / 1953 ! ?

            Ce soir-là, notre Miss La Calle, Mademoiselle Suzanne MUSCAT, superbe créature du Bastion de France, refusa à plusieurs reprises d'un légionnaire une invitation à la danse. Probablement parce qu'elle voulait réserver toutes les danses à son amoureux du moment ! ? Pierrot Maïsto + pour tous ceux qui l'ignore !
            La belle Grappe des raisins de la colère : Suzanne Muscat.
            Cap'tain Gennaro ! ? Allons réfléchissez ! A La Calle, un seul seulement il y en avait et c'était Janvier Olivieri + de la Presqu'île, le fils de Louis, alias, Cinquanta sordo + !
            Grand Robert qui s'est cassé le poignet : Robert Maïsto, le grand frère de Pierrot.
            Gaston le Lion du Bastion : Gaston VINSON +.
            Amor des Palmiers + : fidèle et populaire garçon de café, sis chez Antoine Noto + " aux Palmiers " - Cours Barris.
            Athos et Portos les deux capitaines : Cyrus et son frère Jeannot Maïsto ++.
            Samson de Bastion : Félix COSTANZO +.
            Toinou dit la Rose : Toinou LAROSA.
            Coco dit bel œil : Claude DIMAJO.
            Auguste notre Suzerain : M. Auguste DEYMIER + - Maire de La Calle.
            Goliath : le légionnaire malchanceux, avec qui la belle Suzanne Muscat ne voulait pas danser.
            Attila et ses hordes : les légionnaires et leur meneur.
            L'aigle / les Mercenaires : la bande de légionnaires du marché.
            Barbe bleue : c'était un légionnaire géant et très barbu d'origine russe, d'une force herculéenne au regard farouche. Il n'aimait pas les chats et se promenait toujours avec une carabine, sans manquer de canarder ceux qui par malheur croisaient son chemin.
            Néron le Tribun : Colonel commandant le centre de repos de la Légion étrangère de La Calle.
            Les Khroumirs : tribu de la chaîne montagneuse qui sépare La Calle de Tabarka et qui marque la frontière tunisienne. Bandits notoires et détrousseurs de grands chemins qui autrefois assassinaient froidement les voyageurs traversant leur territoire.
            Et tous ceux qui ont participé à cette histoire et qu'il ne m'est pas possible de mettre à l'honneur.


ET LA LEGION QUITTA SIDI-BEL-ABBES
D'après le témoignage du Général d'armée VAILLANT
ACEP-ENSEMBLE N° 299, mars 2016
               Sidi-Bel-Abbes fut construite par les français sur un pan en damier dans une enceinte rectangulaire, percée de quatre portes, indiquant les points cardinaux.
               Située sur la Mekerra, à 470 mètres d'altitude, au centre d'une vaste plaine comprise entre le djebel Tessala au Nord et les monts de Daya au Sud.
               En 1840, on décida d'installer un terrain de bivouac pour les légionnaires non loin du Marabout de Sidi Bel Abbes. En 1843, le général Bedeau proposa la construction d'un véritable poste qui prit le surnom de Biscuit-ville.

               Le capitaine du Génie Prudon fut chargé de la réalisation du projet : construire une enceinte fortifiée de 42 hectares, coupée de larges rues. La moitié fut réservée aux installations militaires, le reste aux civils.
               Les installations militaires furent octroyées à la Légion Etrangère et à partir de 1847 un vaste quartier de cavalerie abrité les ateliers du Génie.
               Les premiers occupants de la garnison s'emploieront à l'assainissement du pays en drainant les eaux croupissantes vers la Mekerra.

               Les travaux dans les marécages et le climat firent sévir le paludisme : la mortalité monte de 9 hommes en 1843 à 146 en 1846.
               La ville se développe peu à peu. On trouve parmi les légionnaires tous les métiers possibles : ouvriers d'art, mécaniciens, terrassiers, ébénistes...
               L'installation des colons, souvent d'anciens légionnaires et des commerçants, font que la population passe de 431 en 1848 à plus de 5500 en 1859 dont la moitié est espagnole.
               La Légion continue son action et sur l'emplacement des premiers marécages drainés nait la Vallée des Jardins. La richesse des alluvions et la facilité des arrosages inspirent aux légionnaires l'idée de créer une ferme pour la culture des fourrages.


               Dans les centres qui y sont rattachés (Saida, Bedeau etc. ), le séjour des sous-officiers, des chevilles ouvrières et des mainteneurs de la légion n'est pas de tout repos. En effet, les marches forcées, les durs exercices de combat, la pelle et la pioche, la pelote (course au pas gymnastique avec vingt à trente kilos de pierre sur le dos que pratiquaient les légionnaires) auxquels se prêtent les légionnaires qui s'engageaient dans la plupart des cas sous le coup d'une crise, d'un échec ou encore d'une illusion, leur permettaient d'apprendre à tout supporter, à surmonter toutes les difficultés qu'ils peuvent rencontrer, en commençant par la déception des premiers jours et parfois leur révolte Mais les instructions et le broyage n'ont qu'un temps.

               Une fois le terrain déblayé pour former l'esprit légionnaire, le nouveau képi blanc est initié aux mystères. Il acquiert une nouvelle fierté qu'on peut presque qualifier de snobisme, celle d'appartenir à une tribu, à une phalange. Ainsi, tout au long de leur vie, l'ensemble des légionnaires et même les déserteurs restent à jamais marqués par cette grande expérience et gardent pour toujours la fierté d'y avoir participé. Le quartier Viénot est incontestablement le lieu où séjournaient les légionnaires transitaires ou en cours d'incorporation.

               En effet, c'est dans une grande caserne bâtie sur un plan rectangulaire ouvert, tenant de l'hôpital et du lycée, qu'étaient perpétués le culte des morts et le respect des traditions.
               Au fond de la grande cour, on retrouve un monument emblématique : Le monument aux morts, qui se constitue d'un considérable globe terrestre posé sur un socle en onyx, sur lequel veille aux points cardinaux quatre statues de légionnaires. Sur le globe on peut également apercevoir des taches d'or symbolisant tous les pays que la légion a contribué à ouvrir à l'expansion française.

               Après I'indépendance de l'Algérie en 1962, le 1er régiment étranger (la maison mère), s'est replié sur Aubagne dans les Bouches-du-Rhône (le monument aux morts y fut également transféré), où il est toujours implanté.
               29 septembre 1962, 3 corps seulement seront exhumés et rapatriés à Aubagne : Le GénéraI ROLLET, le Prince Aage du Danemark et le légionnaire de 1ère classe ZIMMERMANN, ils reposent tous les 3 au " Carré des Légionnaires " de Puyloubier.


               Photo : Démontage du Monument aux Morts en 1962 et descente de la voie sacrée. Les cercueils sont précédés de la Main du capitaine Danjou et de l'urne funéraire du légionnaire Moll.

               1962...La Légion quitte Sidi-Bel-Abbes

               Avant son départ, la Légion brûle le drapeau des Pavillons Noirs qui, pris en 1884, à Tuyen-Quang ne devait pas quitter Sidi-Bel-Abbes. Elle emporte la main de bois du capitaine Danjou, les reliques du souvenir et exhume les cercueils du Général Rollet, Père de la Légion, du P. Aage de Danemark (1887-1940, petit-fils du roi Christian IX) et, symboliquement du légionnaire Heinz Zimmermann, dernier tué d'Algérie. Les trois cercueils seront transférés à Puyloubier, près de Marseille.
               A la fin de la Guerre d'Algérie, on ne donnait pas cher de la légion.
               Une Légion ?... Pour quoi faire ? me disait un augure influent. A-t-on les moyens de s'offrir des images d'Epinal ?
               (Tenue du légionnaire à son arrivée en Algérie)

               La Légion, par son attitude, a bien contribué à son maintien mais le pari aurait été perdu sans le soutien des généraux Olié et Lefort.
               Pesaient lourd sur le départ d'Algérie, l'ambiance locale, combien déprimante, la précipitation du mouvement qu'on n'avait pas osé évoquer trop tôt, l'incertitude enfin des points de chute et de l'avenir du régiment.
               En juin - juillet 1962,Sidi-Bel-Abbes était le dernier ilot d'agitation.
               Fellaghas, OAS, armée, formaient un imbroglio, heureusement dominé par le général Simon, mais où la gendarmerie elle-même perdait la tête, jusqu'à l'arrivée du Général Chardon qui lui rendit son calme.

               Le jour de l'indépendance fut un jour noir.
               Le Général Simon avait dissuadé les fellaghas d'organiser une prise d'armes devant le quartier Vienot mais ils tinrent à défiler devant les portes closes.
               Derrière elles, j'observais le chef de poste, près de moi, qui serrait nerveusement sa mitraillette.

               La cohabitation était à l'évidence, impossible.
               Le 1er R.E. comptait alors cinq mille hommes et cent cinquante ans d'accumulations diverses. Pour organiser un tel embarquement, le chef d'état-major Bertany, " homme-orchestre ", avait de quoi se multiplier. On était convenu que le Lieutenant-colonel Fuhr avec le Groupement d'Instruction (le 2ème R.E. en 1988), irait en Corse, tandis que ce qui correspond au 1er R.E. actuel resterait en zone marseillaise. Le rôle du Lieutenant-colonel Fuhr était d'autant plus difficile qu'il ne disposait que de dix jours et que rien n'était prêt, ni pour I'embarquer, ni pour l'accueillir en Corse.

               La maison Danzas avait I'exclusivité des déménagements mais ni cadre, ni emballage à pied d'œuvre. La Légion dut en fabriquer en toute hâte ou s'en procurer par débrouillardise.
               Il reviendrait au Général Fuhr de raconter son odyssée de Mascara à Corte et Bonifacio, dans un pêle-mêle de deux mille légionnaires, de cent cinquante familles, de matériels et d'emballages hétéroclites, le tout jeté sur le rivage corse quasiment par surprise.

               En Corse, comme à Bel-Abbès, la Légion montra que bien que quand tout est perdu, Il reste encore la manière de faire face au mauvais sort. Elle sut le faire avec le souci des apparences et de ne rien abandonner.
               On récupéra tous les monuments aux Morts dont, bien entendu, "la boule". Ce fut le plus difficile. Le socle de béton était d'une dureté incroyable. Il fallut dix jours et combien de marteaux-piqueurs, aux braves pionniers. Pour faire table rase.
               La dernière prise d'armes fut celle du départ des trois cercueils du Général Rollet, du Prince Aage et du Légionnaire Zlmmermann.
               On avait étudié le cérémonial pour qu'il soit simple et impressionnant. Il le fut, en présence du commandant en chef, des généraux Simon et Lefort, de tous les chefs de corps et drapeaux de Légion.


               La cérémonie évoquait bien la fin d'un passé et le lien avec un avenir encore incertain. Y assistait également la demi-douzaine de sous-lieutenants de la "Jean-Pierre ", tout juste affectés, et qu'on voulait maintenir à Marseille.
               Nous tenions beaucoup à leur présence.
               Ils seront les derniers à pouvoir évoquer Bel-Abbès et n'étaient-ils pas le point de départ de la nouvelle Légion ?
               Derrière ce décor on clouait des caisses jour et nuit.
               En septembre 1962 vint le tour du dernier carré. La veille au soir on entassa du vieux bois sur I'emplacement du monument disparu. On y mit le feu. Le Lieutenant Selosse déclama tout le poème de Borelli et jeta son fanion dans le brasier.
               Tel était le vœu de Borelli : son fanion ne devait pas quitter Bel Abbès,

               Après quoi, on dansa toute la nuit et on revêtit la tenue de combat au petit jour.
               Devant le dernier carré fut lu I'ordre du jour du Général Lefort. Les camions s'avancèrent dans ce qui avait été la voie sacrée, jeep du colonel en queue et le convoi roula vers Oran où l'attendait le chef de bataillon Arnaud de Foïard et le 2ème R.E.P., et le Sidi-Bel-Abbès, pour la traversée.
               Grâce à l'Amiral Lorrain, qui avait ajouté au tonnage prescrit deux voyages de bateau clandestins, la Légion ne laissa rien derrière elle.

DE SIDI-BEL-ABBES A
AUBAGNE ET A LA CORSE
par le Général d'armée Albéric Vaillant

               Ceux qui ont vécu la fin de l'Algérie et la transplantation du 1er R.E. ne peuvent assister aux cérémonies de Camerone à Aubagne sans une grande satisfaction. Ils pensent au pari engagé par eux, il y a vingt-cinq ans, et gagné par ceux d'aujourd'hui sur I'avenir de la Légion.
               Le camp de la demande n'avait rien de son allure actuelle. Des baraquements légers et vétustes le remplissaient. Canalisations d'eau crevées... chauffage inexistant, éclairage intermittent... cuisines impraticables... château à I'abandon.., Pour faire bonne mesure, l'hiver s'annonçait rude. Les officiers et leurs familles s'entassaient à Gémenos, chez Mado, vieille chanteuse qui croyait nous remonter le moral en nous chantant " Mon Légionnaire ". Les conditions de vie des familles et des légionnaires, comprimés dans leurs baraques, furent très dures en cet hiver 62-63 et la Corse était encore plus mal lotie.

               Pour les familles, le S.M.O.L.E. (le S.M./F.E.L,E. de l'époque) s'était porté acquéreur de quelques dizaines d'appartements mais ils étaient en construction... le génie n'avait que des plans, vie de bohême ... Mais pour combien de temps ? Le commandement n'en pouvait plus mais... Nous lui posions d'ailleurs des problèmes qui l'offusquaient : nous avions ramené " ces dames " de Sidi-Bel-Abbès. Où les mettre ? Des caïds revendiquaient leur monopole et menaçaient de faire du tapage. La subdivision se disait écœurée par ce genre de problème... On écœura finalement Puyloubier dernier refuge possible.
               Autre embarras, la compagnie de discipline. Il y avait mise en demeure de la dissoudre immédiatement et ce n'était pas le moment ! On transigea sous condition d'une survie très discrète dans un endroit secret à trouver. On trouva le coin très discret en plein Marseille, au haut-fort Saint-Nicolas, où elle survécut calmement, en forgeant par exemple les lustres du château.
               Ce n'était là que du folklore Légion. Le moral subissait d'autres assauts plus sérieux. Une lourde suspicion pesait sur la Légion, due à la fois aux légendes qui l'assimilaient aux " Bat d'Af" et à l'O.A.S. qui ne désarmait pas.
               Le régiment aurait du s'installer à Hyères. Le maire " bien pensant " se récria : " on profanait la cité "
               C'est ainsi qu'Aubagne nous accueillit sans histoire. La sécurité militaire nous suspectait et soulevait de vieux lièvres.
               Préventivement, le Lieutenant Selosse, officier de sécurité, avait opéré une fouille des paquetages et récupéré un véritable arsenal. Qu'en faire ? Le déclarer ? Que d'enquête ! Le jeter à la mer ? Elle rendit tout. On reconstruisait le monument ; on jeta l'arsenal dans le socle de béton, qui est vraiment du béton armé...
               Enfin l'avenir de la Légion, par les commentaires sarcastiques ou apitoyés des médias, était un autre sujet d'énervement, tel ce journaliste qui avait photographié les quatre statues du monument, étendues sous la neige, dans un coin du quartier et un journal titrait : " Ainsi couchées dans leur linceul, elles symbolisent bien le cadavre de la Légion !".
               A relever ces défis, cadres et légionnaires d'alors ont mis toute leur âme et toute leur conviction. Désenchantement mais pas découragement... On marqua des points, Le Lieutenant-colonel Fuhr en marqua un de taille : "près avoir mené l'instruction " un rythme endiablé, le G,I. subissait l'inspection de l'Inspecteur de l'infanterie. Le Général Ducourneau était sans Indulgence. "Bravo, me dit-il, ici c'est du vrai et du solide. J'en rendrai compte à Paris !".
               Cette année-là, notre équipe de pentathlon nous ramena le trophée, grand vainqueur à toutes les épreuves et Marseille ne trouvait même plus d'adversaire à notre champion de boxe...
               A Puits d'Auzon, propriété du S.M.O.L.E., privée d'eau, s'affairait la compagnie d'intervention. Là où avaient échoué, à grands-frais, des techniciens du forage, un légionnaire sourcier fit faillir l'eau et la compagnie quadrupla la valeur du domaine, qui serait plus tard à construire La Malmousque.
               A Aubagne, par-dessus tous les problèmes journaliers, la grande affaire était le prochain Camerone, celui du centenaire. On voulait naturellement qu'il soit très brillant et manifeste avec éclat que la Légion était bien vivante.
               Eriger " la boule ", dégager et bitumer la place d'armes, encombrée de baraques, ravaler et décorer le château... Arfeux et les pionniers s'y acharnèrent sans ménager les efforts et ceux-ci ont été couronnés de succès, puisque tout était prêt pour le 30 avril 1963 et que tout est aujourd'hui tel qu'ils I'ont alors réalisé. Ce Camerone du centenaire répondit à tout ce qu'on souhaitait. La veille au soir, au théâtre de verdure de Gémenos,
               Monsieur Messmer et Monsieur Deferre, au milieu d'une grande foule, assistaient à la veillée préparée, répétée, montée (avec quel soin par !) par Selosse.
               Un disque la perpétue. Le spectacle mérita les plus vifs applaudissements et fit tomber bien des préjugés sur la Légion. La prise d'armes du 30 avril était présidée par le Général Ailleret, chef d'état-major des armées. Là aussi, grande foule et véritable enthousiasme à la fin du défilé. Ces dehors brillants, cet air de fête et de fierté recouvraient beaucoup d'abnégation de la part des cadres et beaucoup de misères endurées en silence par les légionnaires et les chefs de famille, mais la balle n'était plus de notre côté.

               Quand le Général Ailleret, sur le départ, me parla de l'" incomparable disponibilité de la Légion... " je compris que le message avait passé : nous étions une force disponible et non une image d'Epinal, et aujourd'hui, après Kolwezi, qui peut dire encore "une Légion pourquoi faire ?".
               La Légion toujours égale à elle-même, voilà ce qu'on peut retenir de cette période pénible. Dans I'adversité, comme dans le succès, la Légion ne déçoit pas parce qu'elle sait y mettre le prix. Il est bien juste que j'en rende témoignage aux officiers, sous-officiers et légionnaires de cette époque.
Extrait de Képi Blanc N° 479 Avril 1988
    


PHOTOS AVIATION de BÔNE
Envoyées par M. P. JARRIGE




















MUTILE N° 174, 2 janvier 1921

LE SOLDAT INCONNU

O soldat inconnu, héroïque anonyme.
Toi qui jusqu'à la mort, pour nous as combattu,
Martyr de la Patrie, ô Sublime, victime,
Toi que nous honorons, dis-nous, qui donc Es-tu ?

Toi qui fus le Héros du plus sanglant des drames,
Est-ce aux bords de l'Yser, de la Marne, à Verdun,
Aux rires de la Somme, est-ce au Chemin des Dames,
En Champagne, à Arras, que tu fis face au Hun ?

Jamais nous ne saurons sur quel champ de bataille.
Tu fus, fauché, soldat, qui sous l'Arc triomphal.
Reposes désormais, tombeau fait à la taille.
Avec les généraux, toi. Poilu, leur égal !

Mais son ombre dira : je suis soldat de France,
Eh ! qu'importe mon nom!... contenez votre émoi...
Celui que vous pleurez, parents dans la souffrance,
Le croyant disparu... c'est moi... peut-être... moi. !!!
22 novembre 1920.

C. LARDINOIS.
Chef d'escadron en retraite.



LE BAIN
Envoyé par M. Georges Barbara

            - " " Oh ! La madone, ô Mémé ! Te vas continuer longtemps comme ça ? Agas un peu ça qu'y'tes entrain d'me faire ! Métenant j'ai toute la bouche qu'elle est pleine de savon ! Te peux prier l'bon Dieu que je m'affogue pas, parcqu'alors après te vas m'entendre un peu !

            - " " Dis Sauveur pauvre slougi que t'yes, que tu me fais honte quand tu montes t'sur la bascule de monsieur Schciembri l'épicier du quatre chemins, qu'elle te bouge même pas. Et pour pas que tu t'affogues comme tu dis, t'ya qu'a mettre ta bouche au point mort ! En même temps y te sortira moins des conneries.

            - " " Atso m'a c'est pas vrai alors, toi et ton madone de baquet, y'avait que ce moment pour venir me faire le bain. ?

            - " " Tu sais écoute ça qu'je vais te dire Sauveur, que si c'est pas moi qu'y te lave un peu le cul de temps en temps, a debon tu pourrirais dans la crasse c'est moi qu'j'tle dis ! Parcque ta mère elle, cette belle en cuisse, pour se mettre le rouge à z'ongles, là a l'est bonne. Mais pour le reste, male a fare. Jojo ton père ce Daindalon y l'est drôl'ment bien tombé. Quand je lui disais moi, que c'était pas une pastèque pour lui... Mais à qui te parles toi, ça rentre d'une oreille et ça sort de l'autre !

            - " " Mais t'ya vu un peu au reveil quelle heure y l'est, ô Mé ? Et pis d'abord métenan c'est tous les jeudis matin diocane que j'ai pas école et que je pourrais dormir un peu de plusque, ...!

            - " " Et pis ça qu'tu sais pas Sauveur, c'est qu't'ya pas fini. Comme c'est le promier jeudi du mois, faut qu'tu t'avales une cuillère d'huile de Ricin. C'est le jour de la purge t'ya déjà oublié ? Te passeras pas au travers oualio !

            - " " C'est ça juste ce soir que je dois aller a'c les copains du quartier o Lympia pour 'oir le retour de Tarzan que ç'est le dernier jour ! Et.....Ouillle entention métenan ô Mé c'est trop !…. Te cherches quoi dans mon oreille ? Te l'as pris pour un escargot d'la route de Philiville ou quoi ? Moi j'le 'ois que tu les as à l'envers ce matin ! T'yes toute aradjate ! Et pis puisque c'est comme ça, j'te jure t'sur la tombe de tonton Jules qu'y repose en paix, que demain à la sieste te peux courir avant que j'te raconte ça qu'elle a fait Chita la singe de Tarzan !

            - " "Sauveur te sais si la singe de Tarzan a l'est aussi propre que toi, à deux vous vous faites la paire ! Hein !

Georges Barbara, Août 2022



CHRONIQUE CONTEMPORAINE
de GILBERT ESPINAL
Echo de l'ORANIE N" 265, NOVEMBRE/DECEMBRE 1999

UN DINER CHEZ PTIT LOUIS

       - Regarde, amiga, que ma mère et moi on t'en veut à mort : s'écria la Golondrina en ouvrant la porte de son appartement devant le visage réjoui d'une pimpante Angustias.
       - Combien de temps qu'on t'a pas vue ? Renchérit la grand-mère en accourant. Au moins deux mois ! On pensait que t'y avais levé le pied avec un amant !
       - Qué amant ni otcho cuartos ! Répliqua l'arrivante en riant. Vous croyez, vous que j'en ai pas assez de Bigoté que depuis plus de quarante ans il est mon amant, plus pégaloso qu'un papier tue-mouche, à qu'y me laisse sortir ni pour acheter le pain ?
       - Et alors où t'y étais durant tout ce temps ? Sauta la grand-mère ; Je regardais tous les jours sur les journals les décès (que c'est la seule chose qu'y z'écrivent de vrai les paparazzi pour sa'oir si tu te trouvais toujours en ce bas monde !
       - Pos que le gouvern'ment y m'a embauchée pour faire partie des z'officiels quand Clinton et sa femme y sont venus en France !
       - Qué bola ! S'exclama la Golondrina. Toi tu as fait partie des z'officiels pour recevoir le Président des z'U.S.A ? Laisse que je rigole ! Et elle partit d'un rire de phacochère.
       - Rigole tant que tu veux, fit Angustias d'un air pincé, mais ce que je te dis c'est le pur évangile !
       - Dis, Angustias, intervint la grand-mère, je sais que t'y es une femme estraordinaire mais là, tu pousses un peu loin le bouchon !
       - Vous z'avez pas vu expliqua Angustias, sur les magazines, qu'à l'occasion de la venue dans la Capitale du Président Clinton et de sa dame, le restaurant P'Tit Louis y recrutait une personne, "Jeune encore, présentant bien, d'origine paysanne, susceptible d'offrir à une clientèle choisie un menu régional, mettant en valeur la cuisine des provinces de France ?" Pos, Je me suis présentée !
       - D'abord qui c'est P'Tit Louis ?
       - Le propriétaire de l'établissement où Chirac et Bernadette y z'avaient décidé de recevoir à diner, Bill et Hillary.
       - Et toi tu penses que tu présentais assez bien pour servir le repas à ces célébrités ricana encore la Golondrina ?
       - Y faut croire que je présentais bien pasque, sur les cent candidates que y avait, P'Tit Louis y m'a choisie, moi !
       - Et toi t'y es d'origine paysanne ! Ricana à son tour la grand-mère. Si ton père il était halsarabo (1) au marché à bestiaux du Hamri !
       - Et alors quoi ? Se révulsa Angustias, mon père il était halsa rabo et quoi ? C'était pas un paysan peut être ?
       - Ma fi' ! S'exclama la grand-mère, les paysans de France y portent des sabots et ton père y portait des espadrilles en tchanclas ! (2)
       - Les espadrilles elles z'ont rien à 'oir dans cette affaire ! S'insurgea Angustias.
       Après nous avoir inspectées, toutes les cent que nous z'étions, P'Tit Louis y m'a fait sortir du rang et y m'a demandé "De quelle Province de France vous z'êtes vous ? "De l'Oranie Française ! J'ui ai répondu moi ! " Et y m'a déclaré " Pos, à partir d'aujourd'hui vous êtes Rouergate ! Et comme je veux servir aux Clinton un menu typique du Rouergue, c'est vous que j'engage, nourrie, logée et blanchie pour la soirée. Allez essayer vot'costume ! Si Chirac ou Clinton y vous laisse un pourboire ça sera pour vous mais n'y comptez pas trop, pasque ceux-las y z'ont l'habitude de tout recevoir à ouf et y z'attachent les chiens avec de la longanisse !

       Nous, nous contribuerons à faire de not' menu un souvenir inoubliable pour l'homme le plus puissant du monde et son épouse qu'elle a pas froid aux z'yeux. Nous z'allons nous z'y met' tous: P'Tite Louise, ma femme que c'est elle le cordon bleu, P'Tit Louison mon fils et P'Tite Louisette ma fi' qu'y seront les marmitons !".
       - Et t'y as marché ? demanda la grand-mère d'un air sévère.
       - Comme un seul homme ! rétorqua Angustias. "Je sais que vous êtes pieds-noirs il m'a ajouté mon nouveau patron. J'étais gaullâtre moi, (c'est d'ailleurs pour ça, qu'aujourd'hui, Chirac y me renvoie I'ascenseur) mais y faut reconnaître que dans cette bande de bambas que le journaly m'a adressée, vous z'êtes la seule qui pouvez passer pour Rouergate.
       - Et t'y as marché ? répéta la grand-mère. T'y as pas eu peur justement de l'escandale ?
       - Quel escandale ?
       - Toi t'y as pas fait le rapprochement s'exalta la grand-mère, avec le fait que tous les escandales en Amérique y se terminent par gate : le water-gate (que c'était Nixon qu'il a tenté d'abuser d'une fi' dans les toilettes, le Monica-gate (qu'encore on se souvient de la tache sur la robe) et toi, t'y as ajouté le rouer-gate ! Y t'a violée Clinton ou y t'as pas violée? Avoue !
       - Ay Aouella qu'est-ce que vous allez chercher ! cria Angustias, c'est la nourriture qu'elle était Rouergate.
       - Et alors comme ça s'est passé ?
       - Le patron y m'a demandé: "Vous parlez américain ?" "couramment, je l'y ai répondu moi" Dites moi un mot pour voir ! " Yes,"
       Je l'y ai répondu moi "Ca va, y m'a dit le patron, mais sachez aussi dire "no" pasque si Clinton y commence à vous charrier (vous savez que c'est un séducteur) et que vous lui dites "yès" vous risquez de vous retrouver tous les deux au fond d'un placard à fumer le cigare !"
       - Et alors toi t'y as servi le repas ? interrogea avidement la Golondrina.
       - Tout à fait ! répliqua Angustia, en habit de Rouergate avec un jupan ganflont (3) un tablier blanc plissé et coiffée d'un bonnet de dentelles, y avait là Bill, la Première Dame des z'Etats-Unis, Chirac et la Première Dame de France !
       - Et toi t'y étais là toute gracieuse? ironisa la Golondrina.
       - Laisse que je te dise d'abord comme les choses elles se sont passées : quand je suis arrivée dans le restaurant, le grand soir y avait un service d'ordre qu'il était pas piqué des vers, tout le G.I.G.N et le F.B.l il était planqué dans les buffets et sous les tables.
       J'étais un peu en avance. Un garde du corps s'est avancé vers moi et y m'a dit :
       "Déshabillez-vous !". "Pourquoi faire j'ui ai fait moi ?"
       "Pasque je vous ai vu descendre d'une camionnette devant le restaurant dont le chauffeur il avait la trogne d'Houssama Ben Laden" "Si c'était mon gendre Pépico Bolbacet qui m'a conduite jusqu'ici pour pas que mon quartier, où tout le monde sait que je suis oranaise, ça fasse pas une émeute de me voir habillée en
       Rouergate ! Et Houssama Ben Laden il a une barbe qui lui tombe jusqu'au nombri' not' Pépico il est imberbe !" "N'empêche y m'a dit le type en américain, y faut que je vous fouille !". J'ai du obtempérer, mais un peu gênée pasque le gars y parlait sa langue avec un accent marseillais.
       - Ca, c'est un jaiouel (5) d'Oran qu'on avait dû recruter pour faire le F.B.l comme toi on t'avait recrutée pour faire la Rouergate ! s'écria la Grand-mère.
       - Je me suis présentée à l'inspection en tenue d'Eve. Le type il a commencé à palper de ses larges mains toutes les coutures de mon corps. Même mes seins il a soulevé avec délicatesse en attrapant le bout avec le pouce et l'index, le petit doigt relevé, et il a longuement passé sa main libre en dessous pour voir si je cachais pas une grenade, c'était un beau garçon avec des z'yeux qui parlaient pour lui. Tant d'égards ça me changeait de Bigoté qui y va toujours franco de porc et de déballage avec ma poitrine qu'on dirait Kouchner avec ses sacs de riz !
       - Et alors ?
       - Pos, y s'est rendu à l'évidence. Je cachais pas de grenade en mon sein.
       - Et alors ? fit la grand-mère aigrement cette séance de pelotage terminée qu'est-ce qui s'est passé ?
       - On leur a servi le repas. Le Président Chirac il avait voulu que ce soit un menu raffiné qui donne une haute idée de nos plats régionaux... -
        Qu'est ce qu'y a eu de si raffiné ? Interrogea la Golondrina.
       - D'abord, une salade de tomates avec des oeufs durs et des z'olives ; moi je l'y ai donné à P'Tit Louis l'idée d'ajouter des anchois. Hillary elle faisait que dire à son mari "Vous avez vu, Bill, ces oeufs, y sont au moins le double de ceux que nous mangeons à la Maison Blanche !" "Ce sont des oeufs de France, il est intervenu Chirac. Les poules de chez nous, en bonnes républicaines, elles se crèvent la paillasse pour pondre des z'œufs à nuls autres pareils !". "Elles font pas que se crever la paillasse, il a dit Clinton elles se cassent Ie... bol l" "Justement, il a rétorqué Chirac, elles viennent d'un élevage sociétal (6) et spécialisé. Quand elles z'ont chacune pondu un oeuf, un préposé les soigne avec la préparation H, de manière que le lendemain elle soit d'attaque pour en pondre un autre ! " "Et c'est quoi ces petits oeufs verts que y a dans vot' salade elle a interrogé Hillary Vous avez des poules spécialisées dans ces oeufs là" "Ce sont pas des oeufs, elle a répondu Bernadette avec beaucoup de prévenance, ce sont des z'olives, une spécialité qui fleure bon la France méditerranéenne !"
       "Oh ! c'est pas tout à fait ça, j'ai sauté moi que je me tenais respectueusement à juste à côté pour si y manquaient de quelque chose, c'est un pied-noir, Crespo, qui les fabrique !". P'Tit Louis y m'a fait les gros z'yeux. Chirac y se bidonnait : "Vous z'avez là une Rouergate, il a dit à mon patron, qu'elle a pas sa langue dans sa poche !"
       - Et après qu'est-ce qu'y z'ont eu à manger ? interrogea la grand-mère.
       - Andouillette et pomme frites !
       - Et y z'ont aimé ?
       - Adoré ! Hillary elle faisait que dire "Mais qu'est-ce que c'est que cette chose longue et molle, flasque et résistante ? "C'est de l'andouille, elle a précisé, Bernadette. Dedans y a des tripes. " "Des tripes de qui ? Les tripes de vos ennemis ? elle a fait la Première Dame des Etats-Unis, J'aimerais bien que ce soit les tripes à Kenneth Starr qu'il a fait tant de mal à mon mari en rendant publiques des choses que tout le monde savait !
       - Y z'ont mangé du fromage ? demanda la grand-mère.
       - Du roquefort de Rouergue. Bill il a commencé par dire: "Cette moisissure que y a dedans vot' fromage, c'est ce que vous appelez la mal-bouffe ?" "Goûtez, goûtez avant de la ramener ! il a fait Jacques. Je suis sur que vous z'allez en redemander !" Moins cinq Clinton y se mange tout le morceau. "Eh ben ! il a repris Chirac, ce produit que vous semblez tant apprécier, vous l'avez taxé à 100% dans vot' pays ! Y a que les riches qui peuvent s'en payer !"
       "Dès que je serai Présidente des Etats-Unis, elle a sauté Hillary, je mettrai bon ordre dans ces affaires ! Attendez deux ou trois ans, le temps que je me présente, et vous verrez !."
       - Et comme dessert, interrogea la Golondrina, qu'est-ce qu'on leur a servi ?
       - P'Tit Louis y s'était vraiment fendu ! s'exclama Angustias; il avait préparé des ramequins avec de la crème caramel. Quand elle a goûté ça, la First Lady elle a failli tourner de l'œil. "J'ai jamais mangé une chose aussi bonne elle faisait que répéter. Y faut que l'aubergiste y me donne la recette à que je la transmette au chef cuisinier de la Maison Blanche (que tous les jours y sait, à chaque repas) nous préparer que des yaourts aux oignons hachés). Quels ingrédients vous mettez dans cette préparations divine ?" "De l'agar-agar, du sucre et du lait frais, il a espliqué P'Tit Louis. Je devrais pas vous donner ces renseignements qui sont top-secret mais comme c'est en présence de mon Président, je fais une entorse aux règlements!"
       C'est sans doute pasque notre agar-agar n'est pas aussi hagard que le vot' qu'on réussit pas ce met aux States. C'est delichousse ! délichousse ! elle faisait que s'extasier Hillary !" Si vous voulez que je vous traduise ce mot, aouela et Golondrina dear, vous z'avez qu'à me le demander que, comme je vous l'ai dit, je parle couramment l'américain.
       - Angustias, proféra la grand-mère avec agacement, je sais que tu parles bien de la bouche que ce soit en français, en espagnol et maintenant en américain, mais moi aussi j'ai compris délichousse, ça voulait dire: "Je suis en train de boulotter un merveilleux ramequin et j'en prendrai bien un second quand celui-là sera terminé. Et-qu'est-ce qu'on leur a servi comme vin ?
       - Oh ! Jacques il avait bien fait les choses ! Il a choisi un vin qui d'un côté célèbrerait l'amitié franco-américaine et de l'aut' rappellerait un fait historique "château Pickett 1940".

       
       (1) halsarabo = cache Queue = ce terme désignant les maquignons qui aux XXème et XXème siècles revêtaient un sarrau noir qui leur tombait jusqu'au haut des cuisses, on en retrouve encore en France dans les foires.
       (2) Tchanclas - chaussures avec Ie contrefort écrasé.
       (3) mode qu'observaient les jeunes oranais dans les années 50 - le chignan et le jupan ganflont
       (4) Houssama Ben Laden - riche saoudien à l'activité imprécise que les américains rendent responsable des attentats contre leurs ambassades à Nairobi et à Dar es Salam
       (5) Jaiouel - expression oranaise peut se traduire par petit maquereau comme patajarillo, ou encore patito gigolo
       (6) sociétal - expression utilisé par M. Chirac - on ne sait pas exactement ce que cela veut dire et on n'est pas sur qu'il le sache lui-même



Algérie catholique N°7, 1936
Bibliothéque Gallica

Les églises algériennes
La Cathédrale de Constantine


       Lorsque, le 13 octobre 1837, l'armée française s'empara de Constantine, il y avait dans cette ville plusieurs mosquées dont l'une, non la plus vaste mais la plus belle, avoisinait le palais beylical et que, primitivement, l'on nommait " mosquée de Souk-el-Ghezel " à cause du " Marché de la Laine " situé à proximité.

       Bâtie en 1143 de l'Hégire (1730 de notre ère) par le Marocain Abbas ben Alloul Djelloul, secrétaire du bey Hussein bou Kemia, elle formait une salle à cinq travées couvertes de voûtes d'arêtes ; la première de ces travées (face à l'orient) était entièrement tapissée de faïences italiennes et de moulures, aujourd'hui encore bien conservées ; - au-dessus du mihrab s'élevait une coupole octogone qu'accompagnaient, disséminées à travers les voûtes, d'autres coupoles plus petites mais de forme semblable ; - ses vingt-quatre colonnes de granit, hautes de quatre mètres, provenaient d'une ruine romaine, dite Tattoubt, sur la route de Constantine à Batna.


       Cette mosquée (qui, lors de la conquête, s'appelait " mosquée d'Ahmed-bey ", nom du bey de l'époque) devint la première église de Constantine : fin février 1839, le général baron de Galbois l'affectait au culte catholique ; une semaine après, le dimanche 9 mars, M. l'Abbé Suchet, aumônier militaire, procédait à sa bénédiction et y célébrait le Saint Sacrifice en présence de nombreux indigènes et des troupes de la garnison.

       Le 7 avril suivant, Mgr Dupuch, premier évêque d'Alger, venu à Constantine pour confirmer 500 enfants, dédia cette église à Notre-Dame des Sept-Douleurs, probablement sur le désir de Marie-Amélie, épouse de Louis-Philippe ; cette reine, voulant témoigner sa sympathie aux mères des soldats tués durant le siège de l'antique Cirta, offrit la " Pieta " qui, actuellement, domine le maître-autel. A la même époque, M. Suchet, nommé curé, obtint du hakem Sidi Hamouda la chaire, d'un curieux travail, que possédait la Grande Mosquée : soixante arabes, envoyés par Hamouda lui-même, la transportèrent dans le temple chrétien dont elle est toujours l'un des plus beaux ornements.

       Les premiers habitants européens de Constantine, désireux d'avoir dans leur ville une horloge monumentale, lui choisirent comme piédestal le gracieux minaret qui surmontait encore la nouvelle église : las ! le minaret s'écroula sous le poids. Il fut remplacé par un clocher en bois qui lui-même, plus tard, subit un sort identique, brisant dans sa chute deux des trois cloches qu'il supportait.

       Sous l'épiscopat de Mgr Pavy, deuxième évêque d'Alger, on entreprit quelques travaux urgents : la voûte, notamment, reçut plusieurs ajours que rendait nécessaires l'obscurité régnant à l'intérieur.

       Par suite de l'érection de la province de Constantine en diocèse (26 juillet 1866), l'ancienne mosquée de " Souk-el-Chezel " devint cathédrale.

       Comme elle s'avérait insuffisante à cause de l'accroissement de la population, Mgr de Las Cases, premier évêque de Constantine, avait, en 1869, obtenu de l'Etat son agrandissement ; mais les événements retardèrent jusqu'en 1875 l'exécution des plans.

       Sans toucher aux quatre rangées de colonnes et aux voûtes, on ajouta à l'édifice : du côté Sud, à l'emplacement du clocher en bois effondré, le beffroi ou, plus exactement, la gaine de maçonnerie qui se dresse au-dessus du portail principal, - du Sud au Nord, un couloir longeant entièrement la 5e travée, - du côté Nord, un vaste dôme octogonal sous lequel fut et est encore abrité le chœur, flanqué de deux sacristies, - enfin, tout auprès du dôme, un clocher avec abat-sons en bois.


       Ledit clocher renferme quatre cloches dont la plus grosse (bourdon), nommée "Augustin, a été " baptisée " par Mgr de Las Cases, le 8 septembre 1 869 (devise :" Vocem meam audient et fiet unum ovile " ; parrain : L. Battendier, maire de Constantine ; marraine : Rosalie Lavie).

       Mgr. Robert, deuxième évêque de Constantine, bénit les autres cloches le 30 avril 1877 (fête des saints martyrs de Cirta Jacques et Marien) : l'une (demi-bourdon) s'appelle " Félix-Louis " (devise : " Venite, exultemus Domino, jubilenus Deo salutari nostro " ; parrain : Charles de Toustain du Manoir, directeur général des Affaires de l'Algérie ; marraine : Antoinette de Champ, dame de Périgot) ; - l'autre s'appelle " Joséphine-Dolorès " (devise : "Benedicam Dominum in omni tempore, semper laus ejus in ore meo " ; parrain : Joseph Millot, chanoine, vicaire général ; marraine : Jeanne-Marie Grifaud, dame Cambridge) ; - la dernière s'appelle " Emma-Viventia " (devise : " Eamus ad vitam " ; parrain : Charles-Louis-Vivant Laurent, chanoine, archiprêtre de la Cathédrale de Constantine ; marraine : Marie-Nancy-Emma Faure, dame Cauro).

       Il est une de cloche, la petite " rescapée " de l'écroulement du clocher en bois, dont on ne connaît que le nom, gravé sur sa robe de bronze : " Je m'appelle Achille-Louise-Aimée " ; elle a repris sa place, près de l'horloge, au haut du simili beffroi.

       La consécration solennelle de la Cathédrale eut lieu le 8 avril 1878, comme l'atteste l'inscription suivante qui se lit sur la plaque de marbre scellée dans le mur (côté droit) de la chapelle de la Sainte Vierge : " Templum a primo episcopo algeriensi, prisca superstitione sublata, dicatum Deoœterno in honorem Virginis Mariae Perdolentis, absidis substructione prolatum et cura Caroli Laurent archipresbyteri nova forma exornatum, Josephus-Joannes-Ludovicus Robert, episcopus Constantiniensis et Hiponensis VIII kalendas aprilis anni M. DCCC. LXXVIII rite consecravit ".
       Depuis lors, la Cathédrale n'a reçu aucune modification notable.

       Actuellement, le chœur comprend :
       1° dominé par la " Pieta ", le maître-autel (en stuc et de style roman) avec, aux extrémités, deux anges debout et deux grands candélabres électriques ; à même la paroi antérieure du retable, figurent en relief les images réduites des Evangélistes qui, deux à droite, deux à gauche, encadrent celle de Notre-Seigneur placée au-dessus de la porte du tabernacle ; sous la table, une reproduction (1 m. 40) du Christ au tombeau ;

       Comme on le sait, cette chaire fut donnée par les Musulmans. D'après M. l'abbé Suchet, Vicaire général d'Alger, le Hakem et le grand cheikh de Constantine, heureux de céder cette chaire, fournirent soixante arabes pour la faire transporter.

       2° douze stalles, par groupes de trois, aboutissant d'un côté au trône épiscopal qu'ombrage un baldaquin de style mauresque, et, de l'autre côté, au fauteuil du célébrant

       3° au-dessus de ce fauteuil, le blason de S. Exc. Mgr Thiénard, dont voici la traduction héraldique : " Aux champs : chapeau de sinople avec les cordons à trois rangs de houpeps posées 1, 2 et 3, six de chaque côté ; l'écu surmonté de la mitre posée en front à dextre, et à senestre la crosse tournée en dehors ; croix posée en pal derrière l'écu de ses armes ; - écu : d'azur au buste de Notre-Dame des Douleurs d'argent, au chef parti de gueules à un Bon-Pasteur d'argent et à un cœur enflammé du même ; - devise héréditaire : " Adveniatregnum tuum " ; - devise personnelle : " Tuus sum ego ") ;

       4° une galerie en bois, purement décorative, située à trois mètres de la naissance du dôme dont elle épouse la forme octogonale.
       La nef se compose de cinq travées, celles de l'antique mosquée.
       Dans la première (face au levant) se trouvent la chapelle de la Sainte Vierge (statues de Notre-Dame du Rosaire et de l'Enfant-Jésus de Prague, autel en marbre), - à l'emplacement du mihrab, la chapelle du Sacré-Cœur gardée par deux anges debout (avec statue sur autel en onyx d'Algérie), - deux confessionnaux, - et, au fond, un autel en bois dont lé tabernacle sert de piédestal à la statue de Saint Antoine de Padoue.


       Dans la dernière travée se trouvent la chapelle de Saint Joseph (avec autel en marbre et statue du saint), - la magnifique chaire arabe.
       - La chapelle du Souvenir (autel en marbre) ornée d'un grand Christ, lui-même entouré de plaques de marbre portant les noms des soldats de la paroisse morts au Champ d'Honneur durant la guerre 1914-1918, - deux confessionnaux, - et, au bas, les fonts baptismaux qu'adorne une peinture récente, représentant le baptême de Notre-Seigneur, avec, en exergue, la phrase de l'Evangile : " Qui crediderit et baptizatus fuerit salvuserit ".

       - Contre le mur du fond, à mi-hauteur, est adossée la tribune dont les extrémités s'appuient aux murs latéraux tandis que quatre colonnes en fonte soutiennent la partie centrale chargée de l'orgue un peu ancien qui, nonobstant, donne encore de belles et puissantes harmonies. - Aux deux portes d'entrée, un bénitier sur colonne avec ange debout. - Outre les statues déjà mentionnées il y a celles de : Saint François d'Assise, Saint Vincent de Paul, Notre-Dame de Lourdes, Saint Paul de Malte, Sainte Jeanne d'Arc, Sainte Lucie, Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus. Entre ces diverses statues ont pris place les 14 tableaux du Chemin de la Croix érigé canoniquement le 17 mars 1911 : il fut offert par M. le Chanoine Mefsoud, à cette époque aumônier de l'Hôpital civil de Constantine.

       Telle est, sommairement et prosaïquement décrite, notre chère Cathédrale à laquelle se rattachent de si grands souvenirs et que la Direction des Beaux-Arts a classé parmi les monuments historiques.

       Onze prêtres en ont eu, successivement, la garde : M. l'Abbé Suchet (pendant quelques mois de 1839), M. l'Abbé Landeman( 1839-1 841 ), le P. Lasserre, S. J. (1841-1844), le P. Rigaud, S. J. (1844-1848), le P. de Bouchand, S. J. (1848-1849), le P. Creuzat, S. J. (1849-1856), M. le Chanoine Laurent (1856-1879), Mgr Millot, protonotaire apostolique (1879-1896), M. le Chanoine Simorre (1896-1898), M. le Chanoine Vergès ( 1898-1902), M. le Chanoine Delenne (1902-1930) ; depuis cette dernière date, l'archiprêtre est M. le Chanoine Bonzon qui, durant les 24 années précédentes, remplit à la Cathédrale les fonctions de vicaire et de maître de chapelle.


       On ne saurait clore cette monographie (très incomplète faute de documents) sans signaler d'un mot les deux plaques de marbre scellées, l'une sur le mur du fond (à droite), l'autre près de la sacristie. La première, érigée sans doute lorsque la mosquée fut convertie en église, porte l'inscription suivante : " Deo omnipotenti sub invocatione SS. Martyrum Cirtensium ".

       Ces martyrs sont le diacre Jacques, le lecteur Marien et leurs compagnons mis à mort le 6 mai 259 par ordre du légat de Numidie ; leurs noms figurent sur la seconde plaque, dans l'inscription ainsi libellée : " + IIII non sept. passione marturorum hortensium Mariani et Iacobi Dati lapin Rustici Crispi Tati Mettuni Bictoris Silbani Egiptii Sci Di memoramini in conspectu DNI cuarum nomina sciT is qui feciT Ind XV ".

       Ce texte reproduit littéralement (y compris la faute " cuarum ", au lieu de "quorum") celui qui fut gravé, dès la fin du VIe siècle, sur un rocher situé à 500 mètres de Cirta, dit "Rocher des Martyrs ", où, fort probablement, Jacques, Mariem et leurs compagnons subirent, sinon la peine capitale, du moins d'atroces tortures. Saints "athlètes du Christ ", ils méritaient bien qu'outre l'inscription des bords du Rhumel, en proie aux injures des éléments... et des hommes, une "memoria", à l'abri du temple sacré, perpétuât leur édifiant et réconfortant souvenir.
J. D.

       Le 11 octobre dernier dans les Salons de l'Evêché de Constantine s'est déroulé une cérémonie tout intime. Mgr Thiénard, évêque de Constantine et d'Hippone, remit à l'Archidiacre Bonzom, de la Cathédrale de Constantine, la Croix de la Légion d'Honneur, en présence des Membres de la grande famille épiscopale et amis personnels.

       L'Algérie Catholique est heureuse de présenter à M. l'Archiprêtre Bonzom ses très respectueuses félicitations.


Poulpes en salade.
( Relevées en partie sur Internet)
par Jean Claude PUGLISI,
        Ingrédients :
        Quelques poulpes bien frais.
        1 hachis d'Ail et persil.
        1 à 2 citrons.
        1 piment de Cayenne ( facultatif ).
        Sel et poivre.

        Préparation : des poulpes en salade :
        Rincez les poulpes à grandes eaux : de préférence à l'eau de mer.
        Cuire les poulpes dans une bonne quantité d'eau fraîche.
        Dés la cuisson terminée, retirez, égouttez et laissez refroidir.
        Découpez les tentacules en plusieurs morceaux et laissez les têtes entières s'il s'agit de petits poulpes.
        Mettre dans un saladier : les poulpes débités en morceaux + un peu d'eau de cuisson + le hachis d'ail et persil + 1 filet d'huile d'olive + le jus de 1 à 2 citrons + sel et poivre + 1 piment de Cayenne ( facultatif ).
        Mettre au frais.

        Conseils culinaires :
        - Pour attendrir un poulpe, et ainsi, rendre sa cuisson moins laborieuse, plusieurs méthodes Calloises sont proposées :
        Mettre un bouchon de liège dans l'eau de cuisson.
        Battre les poulpes avec un bâton avant la cuisson.
        Congeler les poulpes au moins 48 heures à l'avance avant de les cuire.
        - Il semble que cette dernière technique soit la plus efficace ?
        - Cette Salade de poulpes se consomme froide.
        - Le piment de Cayenne est facultatif, mais conseillé pour tous les gourmets qui apprécient des plats un peu relevés.

        Préparation façon Claude Desjardins de La Calle :
        . mettre dans une marmite les poulpes décongelés et rincés à l'eau de mer + 1/2 verre d'eau + thym et laurier.
        . cuire à feu doux et à couvert 45' à 1 heure.
        . retirez les poulpes dans une passoire et laisser refroidir.
        . découpez comme dit ci-dessus.
        . SAUCE accompagnante : huile d'olive + jus de citron + hachis ail et persil + sel et poivre + Feuilles de menthe fraîches + Basilic + 1 tomate bien mûre pelée, épépinée et débitée en petits morceaux + Kamoun + harissa.
        PS = on peut cuire le poulpe sans eau 20' dans un autocuiseur.
Docteur Jean-Claude PUGLISI,
de La Calle de France
Paroisse de Saint Cyprien de Carthage.

Les Ailes Bônoises
BONJOUR N°33 du 21 mai 1933, journal satyrique bônois.

               Si vous ne savez pas ce que c'est que l'aviation, si vous en ignorez l'enthousiasme, cherchez et trouvez l'occasion de bavarder quelques instants avec l'un quelconque de nos aviateurs bônois, que ce soit un Dayre, un Volmerange, un Rolland, un Bouilloux, un Ritoux-Lachaud, un Truchotou n'importe lequel des autres choisi au hasard, et, tout de suite, vous aurez compris. Nos aviateurs ont admirablement travaillé. Ils ont été aidés, on le leur devait. Aujourd'hui, un fait est acquis : Les Ailes Bônoise forment une société agissante qui est à pied d'œuvre des réalisations qu'elle avait souhaitées et conçues.
               En attendant le grand terrain rêvé qui pourra recevoir les avions par n'importe quel temps, il règne à l'Allèlick, une activité joyeuse.
               Les baptêmes se succèdent. Les bônoises, comme les bônois, deviennent chaque jour plus nombreux et plus ardents à rechercher les ivresses de l'envoI. Félicitons, sans restriction, les Maîtres et les élèves.
               Et, déjà, Les Ailes Bônoises, ont reçu le pavé de l'ours. Un journal du Soir - il est inutile de le nommer, tout le monde le reconnaîtra par sa stupide vanité de paraître informé de ce qui est et aussi de ce qui n'est pas, a relaté lourdement un accident qui se serait produit au terrain d'aviation. Il n'y a pas eu d'accident, mais un simple incident de vol, qui ressemble comme un frère à une panne d'automobile, et qui n'a eu aucune conséquence pour personne. Nos avions circulent en l'air avec une garantie de sécurité qui a fait l'admiration de tous ceux de nos concitoyens qui ont déjà volé.
Rédaction de Bonjour.
 


LA SAINT COUFIN
Par Bernard Palomba

             " Toute ressemblance avec des personnages réels ne serait que pure coïncidence "…..Ce que Jean Pierre ne vous a pas dit:
             - Cette histoire est totalement autobiographique :
             - Cette dispute s'est réellement passée
             Elle : c'est Françoise
             - Lui : c'est JP
             Mais çà, c'était avant…. Le couple habite 4, rue Léon Dubois
             A l'issue de la dispute:
             Elle garde l'appartement et lui ira dormir chez ses parents, juste en dessous.
             Après le repas du dimanche soir, Françoise (le cœur serré) regagne leur appartement

Le Groupe : Sebastiani, Cauvin, Xiberras, et Genty Palomba et Allès

             Un peu plus tard, Jean Pierre rencontre un groupe de jeunes du quartier.
             JP a la mine défaite, il est complètement effondré.
             On lui demande ce qui se passe et il nous explique la situation.
             On tente de l'apaiser, et on l'invite avec Françoise pour le pique nique de la St-Couffin à La Patelle avec tous les jeunes du quartier :
             RDV 8h30 devant la villa Dubois
             Réponse de JP :
             " Pas question, c'est trop grave, je viendrai mais seul ".
             Et il rentre chez ses parents…
             On préparait un pique nique pour le lendemain La St Couffin. Il n'arrive pas à dormir :
             - Au cours de la nuit, n'y tenant plus : Gratte à la porte : elle finit par ouvrir et ils se jettent dans les bras l'un de l'autre, tout est oublié et il arriva ce qui arriva :
             Nuit torride !!! Bruit de tonnerre !!! Le pied y s'a cassé !!! Debout les morts !!!
             Conséquences du Grand Vacarme !!! Scènes de panique rue Léon Dubois.
             1) Les parents : contents finalement…
             2) Pépé Bargelot qui avait fait Verdun. Les Bôches ne passeront pas !!!
             3) Les voisins: Pensant à Orléansville
             Heureusement Jean Pierre nous rassure avec :
             " L'Histoire de l'armoire à glace de l'arrière grand-mère "…

             Le lendemain, lundi de Pâques, La Saint Couffin
             - Ils descendent chez Maman Bouchet
             - Avec une faim de loup, et se retrouvent à 8h30 avec la bande du quartier pour partir tous ensemble à La Patelle. MAIS, grèves après les accords d'Evian :
             Pas d'essence…. On avait emprunté la voiture à crottin au laitier Debono

Freddy, Jean Pierre, Françoise B, Jean Z, Bernard, Françoise P, et Flockie, Colette Z, Annie Cauvin, Jean Claude Allès, Marc Z Et les autres …


On arrive à la Patelle…Midi pile: l'apéro 1 heure après : les choses sérieuses….


La macaronnade Bônoise et la Tchaktchouka Plat traditionnel de la St Couffin ?? Le gigot Pascal à la braise.


Les fromages : Sardaigne, Gorgonzola, Provolone ou ???
Cats' cavale. On le trouvait où ? Chez Lo Monaco
Et en dessert : Et… Les figues de Barbarie.


Et puis après, les patisseries : La Pastiera de Ventotene, La couronne de Pâques, Les makrouds de Charlette, Les petites couronnes et les sujets de Pâques
Et pour que ce soit plus digeste……Et bien sûr
C'était le café ???

             Vers 17h : Passage de Gitans avec un grand cylindre vert :
             Et un drôle d'instrument pour faire du bruit !
             J'oubliais…. Oublis Oublis Oublis Oublis àààà la la la la vanille !!! vanille !!! vanille !!! vanille !!!

             Epilogue :
             18h: La journée s'achève,
             Retour joyeux
             On se sépare, nos amoureux sont aux anges
             Seule ombre au tableau :
             Jean-Pierre a pris 5kg, et tout sur la pancia !!!
             Françoise n'en a pris que 3, mais elle aussi sur le ventre…
             Et elle va mettre longtemps à les perdre, car à l'issue de leur nuit de folie, elle attend un heureux - elle attend un heureux - elle attend un heureux - elle attend un heureux éééévvvvèèèènement !!! nement !!! nement !!! nement !!!
             L'accouchement s'est passé comme une lettre à la poste car le petit Ludovic :
             Il avait le " cou… fin "…. " Et ainsi se termine l'histoire qu'ils ont vécue.
             POIL AU ….. " Marcel Pagnol : " La Manon des Sources "
JP Bouchet


LES MAHONNAIS DE FORT DE L'EAU

ACEP-ENSEMBLE N° 299-mars 2016
                  
               Si par leur physique, certains des anciens de ces mahonnais, grands, élancés, blonds aux yeux clairs, rappelaient les vikings qui envahirent les îles Baléares des siècles auparavant, par leurs coutumes, leur mode de vie et l'agencement de leurs maisons, ils se rapprochaient singulièrement plus des anglais et des français que des espagnols. Dominations qui se succédèrent sur les îles avant qu'elles ne retombent dans la Couronne d'Espagne.

                Afin de mieux comprendre ces mahonnais, ces pionniers qui participèrent activement à l'édification de l'Algérie Française, nous nous sommes penchés sur les récits historiques du Père Roger Duvollet. Père Blanc, qui avait fait son noviciat à la Maison des Pères Blancs à Maison Carrée.
                Il accomplit sa mission, jusqu'à l'Indépendance de l'Algérie, pendant plus de quarante ans dans plusieurs villes et notamment 11 ans au Sahara, à Hassi Messaoud et à Ouargla.

                Dans le Tome XIV faisant partie d'une remarquable et impressionnante série de 24 volumes consacrés à toutes les Régions, il s'attarde particulièrement sur les Mahonnais de la région de Fort de l'Eau. Histoire écrite et rédigée d'après des archives anciennes,
                Depuis 1835, de nombreux émigrants espagnols originaires de Fort Mahon, dans I'Ile de Minorque, étaient venus s'installer à Alger et ses environs, à I'instigation du Baron de Vialar.

                NDLR. : Ces mahonnais, laissaient leur maison, arrivaient en famille et souvent en simples barques de pêches, accostaient à Sidi Ferruch, et devaient se présenter pour les formalités de recensement auprès de l'Administration Française Coloniale.
                Ces gens pacifiques, probes, sobres et laborieux en même temps qu'excellents maraîchers, en cultivant de nombreux jardins, réalisèrent des économies qui leur permirent d'acquérir des terres dans les environs de Hussein-Dey et de Maison Carrée.
                Après avoir défiché et mis en valeur ces territoires, ces jardiniers qui commençaient à se trouver très à l'étroit sur leur terre, leur descendance ayant augmenté, demandèrent à I'Administration de leur accorder quelques concessions dans la région de Birkadem.

                La Commission des Centres préféra les installer sur un territoire que les Mahonnais connaissaient bien pour y avoir déjà travaillé comme fermiers, métayers ou ouvriers agricoles depuis 1836.
                Cinq cent hectares situés en arrière du Bordj El Kifan furent attribués à la création d'un village qui prit le nom de Fort de l'Eau.
                Les premiers colons, uniquement des Mahonnais, comprenaient deux cent trente personnes, groupées en quarante cinq familles. Chacune d'elle reçut sept hectares de terres propres à la culture maraîchère, l'eau était abondante à peu de profondeur dans le sous-sol ; quatre-vingt hectares furent réservés pour le communal et soixante-dix autres pour de futures concessions. Tout alors étaient en broussailles, les routes n'étaient encore que des sentiers, et la sécurité aléatoire.

                Mis en possession de leurs lots en juin 1849, les concessionnaires Mahonnais commencèrent par assécher les marais dont la proximité inspirait quelque crainte. En même temps qu'ils construisaient leurs habitations, Les nouveaux colons (mahonnais) construisirent non un gourbi ou une cabane comme le faisaient la plupart des immigrants, mais une véritable maisonnette, la maison mahonnaise, d'apparence proprette, passée du lait de chaud, parfaitement adaptée au climat africain. Bien qu'ils fussent nullement forcés, au lieu d'édifier leur habitation sur leur lot de terrain. Ces jardiniers se regroupèrent en un même point, formant ainsi le futur Fort de l'eau.


                Comme ils se connaissaient tous, parents ou amis, ils pensaient non sans raison, qu'en cette époque où les incursions de pillards étaient encore fréquentes, qu'il était préférable de rester unis plutôt que de s'éparpiller dans de petites fermes isolées. En outre les habitants du Centre, groupés autour du Fort, pouvaient trouver refuge dans ses murailles en cas de nécessité. On leur avait conseillé de construire leurs maisons en lignes parallèles, afin que les premières rangées protègent les suivantes contre le vent de la mer ; en outre, un boulevard planté d'une triple rangée d'arbres devait entourer le village ; les alignements du front maritime devaient faire office de coupe-feu. Le projet d'installation d'un débarcadère à proximité du Centre fut abandonné quand on se rendit compte du fait que la mer trop-forte en ce point de la côte, empêchait la construction d'une jetée.

                Très pieux, les Mahonnais ne manquaient pas d'observer toutes les Fêtes Religieuses, avant apporté avec eux la foi qui, jointe au puissant esprit de famille qui les animait, leur permettait de lutter contre les dures conditions d'existence. Ils eurent dès 1851 leur Chapelle où officiait l'Abbé Castagnet. Le dernier desserrant de cette paroisse exemplaire fut l'Abbé J.P. Toulet. Plus tard une Eglise habita leur piété qui ne se démentit jamais. Soucieux de s'intégrer rapidement aux pays qui les avait accueillis, dès 1856, ils réclamaient à I'Administration un instituteur pour leurs enfants.

                Les concessionnaires ne reçurent aucun subside de l'Administration qui n'eut à exécuter que les travaux publics ordinaires. Chaque attributaire reçut en moyenne un lot à bâtir de 6 ares, un lot de jardin de 20 ares, deux lots de cultures, un de 2 hectares et un de 6 hectares. Cette répartition de la concession se complétait de 45 hectares ; 42 ha affectés au communal, 0,53 ha destiné au cimetière, et enfin 6,26 ha formant deux lots pour la commune.

                Les Mahonnais défrichèrent rapidement leurs lots, vendant les broussailles sous forme de charbon de bois et de fagots aux boulangers d'Alger creusaient des puits, installant des norias, élevant pour protéger leurs productions, des haies de roseaux qui donnèrent son aspect caractéristiques à leurs campagnes.

                Ils prirent eux-mêmes I'initiative de construire une route qui les relia directement à la Maison Carrée (centre commercial où se tenait un immense marché de produits agricoles et de bestiaux, proche d'Alger) ce qui leur permit d'alimenter Alger en primeurs, et grâce à leurs procédés à la fois pacifiques et énergiques, ils surent se concilier les indigènes et s'en faire des auxiliaires. Ils cultivèrent des légumes et des céréales, et dés l'année suivante, la récolte fut très rémunératrice. A dater de ce moment, l'élevage du bétail, la plus ancienne source de production locale, céda progressivement la place aux cultures, les Mahonnais tirant le meilleur parti de leur concession.

                Le 15 septembre suivant le Maire de l'Arba, de passage dans le Centre, constatait que les défrichements marchaient activement et que beaucoup de concessionnaires espéraient qu'ils auraient mis leurs terres en valeur bien avant le terme de trois ans requis par l'Administration.
                Il estimait que 20 hectares autour de Fort de l'Eau avaient déjà été mis en valeur, 17 puits fonctionnaient et les maisons d'habitation étaient presque toutes achevées. Il ajoutait que l'état sanitaire du Centre était satisfaisant, malgré de fortes chaleurs. L'ensemble des Mahonnais, grâce à leur travail acharné comme leur esprit d'économie, purent se libérer rapidement et, très vite, ils furent mis en possession définitive de leurs terres.

                Le 11 janvier 1850, le Centre de Fort de I'Eau était créé par Décret du Président de la république Française, le prince Bonaparte.
                L'année suivante, tout le territoire était défriché et on ne pouvait trouver un seul palmier nain - cette terreur des défricheurs - et déjà la prospérité du village est telle que ses habitants n'avaient d'autres soucis que celui d'agrandir leurs concessions.
                Si avant 1830, les terres de ce territoire n'eussent pas trouvé acquéreur à 30 francs l'hectare, moins de cinq ans après, on les payait 600 francs à l'hectare. À noter que la création du Centre de Fort de l'Eau ne coûta que 7.OOO francs à l'Administration qui, pour ce genre d'opérations en dépensait habituellement entre 40 et 50.000 francs dans les autres territoires de l'Algérie.

                Les premiers concessionnaires s'appelaient alors : ALZINA (Gabriel et Antoine) ; SEGUR ; BARBER ; CARDONA ; COLL (Antoine et Jean) ; CAPO ; CAMPS ; FORNARlA ; FEDELlCH ; GORNES ; GINAR ; JUANEDA ; LUC ; LAURANT ; MONTANER ; MERCADAL ; MARQUES (Mathieu, Joseph, Dominique et Jean) ; MASCARO (Michel et Jean) ; OLIVES ; PONS (Jean, Christophe, Laurent, Barthélémy, Thomas, Joseph, Jacques), SERRA ; SEGUI (Ramon, Laurent ; SINTES Joseph, Laurent, Pierre, Bernard) ; SALORT (jean, Jacques) ; TUDURI (Antoine, François, Joseph), VILLE.

                La cinquantaine de familles installées à Fort de l'Eau, comportait 34 couples, 114 enfants, dont 41 filles, 1O célibataires, et 39 domestiques apparentés et représentant environ 300 individus...
                Ces laborieux pionniers creusèrent des canaux, irriguèrent leurs terres et se livrèrent à la culture maraîchère d'après les méthodes simples apportées des Baléares. Leur production très appréciée contribua notamment à l'approvisionnement en légumes des marchés d'Alger et de Maison Carrée. Enfin plus tard, lorsque des transports plus rapides s'installèrent entre l'Algérie et la Métropole, ces maraîchers pratiquèrent la culture des primeurs : tomates, poivrons, pommes de terre, artichauts, petit pois, choux-fleurs... qu'ils expédièrent en France.
                Un article de I'Akbar (21.8.1854) nous dépeint leur village et ses habitants à leur début ; L'aisance règne dans chaque famille. Elle se traduit par une remarquable propreté au-dehors et en dedans de chaque habitation. La Mahonnaise, spécialement chargée des soIns du ménage et d'élever les enfants, procède chaque samedi à la toilette de la maison, I'extérieur et l'intérieur sont dans les plus petits détails, blanchis à la chaux, les meubles cirés et les ustensiles de ménage coquettement placés dans I'endroit le plus apparent, brillants de propreté, comme des tableaux de Rembrandt.                 Quant aux Mahonnais, à moins que vous ne passiez par-là un Dimanche, ne le cherchez pas dans l'habitation, ni aux alentours, ni encore moins dans un cabaret (Le premier cabaret ouvrit ses portes en 1862, sans grand succès. Les mahonnais n'avaient guère envie de dépenser ainsi leur argent). Il est aux champs avec tous ses fils, travaillant sous le soleil ardent avec cette assiduité et cette persévérance dans lesquelles il n'y a pas de vrais cultivateurs.
                Comme partout en Algérie, la vigne fît son apparition dans la région de Fort de l'Eau. Vers 1880, ce territoire en comprenait 75 ha (Puits 153 ha en 1920), ainsi que 30 hectares de tabac. La prospérité de ces colons fut si rapide que quelques années plus tard, ils réclamaient déjà pour leur fils des terres, dans les villages projetés de Cap Matifou, Aïn-Taya et de Reghaïa.

                Le 2 juin 1881, ils virent leur circonscription érigée en commune de plein exercice, naissance qui provoqua l'effacement du centre de la Rassauta qui avait pendant trente ans figuré sur la liste des communes algériennes. En 1891, I'Administration répartissait les anciens communaux entre les communes de Fort de l'Eau, Maison-Blanche et Rouiba.
                Les Mahonnais étaient bien supérieurs, - comme maraîchers - aux Espagnols et aux Italiens. Ils n'employaient en général que la main-d'œuvre mahonnaise, et les membres d'une même famille presque toujours suffisaient pour cultiver "Exceptionnellement quand les garçons manquaient dans les familles, on employait des indigènes, car I'exploitation d'un lot de sept hectares exigeait quatre ou cinq ouvriers toute l'année.

                C'est à l'élément mahonnais que I'on devait l'opulent ruban de cultures maraîchères qui s'étendait le long du littoral jusqu'à la Réghaïa, sur plus de quarante kilomètres de Fort de l'eau à Surcouf en passant par Cap Matifou, Suffren et Ain Taya. Ces riches villages comptaient, en dernier, près de quatre mille mahonnais, descendants des premiers pionniers.
                Autour de I'agriculture, ses habitants formant une communauté unie par une même activité et une même culture, Fort de l'Eau commença à s'ouvrir vers I'extérieur avec l'établissement d'une petite ligne de chemin de fer d'intérêt local, en 1871.
                Ce système de transport facilita les déplacements des villageois comme la circulation des marchandises. Il disparut dans les années trente, laissant la place à l'automobile, et abandonnant à I'entrée de l'agglomération, sa petite gare, seul vestige dans les dernières années de ce réseau.
                Timidement quelques commerces et quelques petites industries s'étaient implantés dans Fort de l'Eau dont la population croissait rapidement, lorsque vers 1890 sa destinée s'infléchit.

                Le directeur des Annales Africaines frappé par la beauté de la place et par la fraîcheur de la brise marine qui, grâce à l'exposition favorable du centre, souffle avec plus de force qu'à Alger et procure une température agréable pendant les heures chaudes de la journée, émit l'idée d'une station estivale.
                Trois personnes tentèrent de réaliser ce projet, MM. Triay, Henriot et Buisson.
                C'est alors qu'un entrepreneur de travaux publics, M. Gueirrouard, se penchant sur la question, reprit les premiers plans proposés. Après de multiples discussions avec le Conseil Municipal, un accord se fit et, en 1891, les premiers travaux commençaient. Un casino, une quarantaine de villas furent construits, le lotissement aménagé et une route ouverte en bordure de mer.

                A cette époque le conseil municipal réclama un Bureau de Poste à Fort de I'Eau, précisent que sa population avait presque doublé en dix ans, le centre augmentent de vingt-cinq maisons en trois ans et que la création de la station balnéaire avait déjà attiré plus de 300 familles, alors que la localité ne disposait que de peu de logements.
                Un projet de construction d'un chantier naval reçut un début de réalisation : quatre hangars furent élevés avant l'abandon de la tentative et ces locaux servirent d'ateliers et de garages à la Société des Transports tropicaux.
                Bien que déjà enrichie de plus de 100 hectares de maraîchages, la petite cité balnéaire prit rapidement tournure, et déjà, en 1900, on pouvait découvrir le boulevard du front de mer qui longeait la place, bordé de jolies et pimpantes villas. En 1908, Fort de I'Eau fut reconnue officiellement comme station estivale et, en 1920, la municipalité envisage de transformer en station climatique d'été et d'hiver projet, qui ne put aboutir complètement.
                La seconde guerre mondiale devait porter un coup dur a l'ascension de Fort de l'Eau : son casino fut réquisitionné et ses plages abandonnées. Mais le coquet village acquit un regain d'activité, créant de nouvelles plages dans son prolongement maritime, celles du Lido, de Verte-Rive et des Dunes, rapidement bordées de belles villas.

                La période immédiate d'après guerre vit aussi se former un projet d'installation d'un petit aérodrome dont la continuation ne fut jamais menée à bien, malgré un début prometteur. Peu de temps avant la guerre, le cinéaste julien Duvivier utilisa le site de Fort de l'Eau et y créa un studio où, pendant plusieurs mois, le film "Golgotha" se tourna.
                En 1950, Fort de l'Eau avait acquis une physionomie nouvelle qui la rendait méconnaissable pour les descendants des premiers pionniers. Les anciennes maisons rurales avaient disparues, remplacées par de belles ma[sons de campagne, tandis que le Centre et le Front de mer s'enorgueillissaient de ses magnifiques villas, extériorisant ainsi sans complexe la richesse du pays.
                Il faut noter toutefois que les maraîchers minorquins, principaux créateurs de cette réussite, s'abstinrent longtemps de prendre part à la vie moderne de leur cité, vie que dérangeait leur mode d'existence à caractère familial. Mais les petits-fils "(et amères petits-fils) " de ces pionniers ne tardèrent pas à s'intégrer eux à la nouvelle population, s'y plaçant souvent au premier rang.
                Les premiers magistrats municipaux de Fort de l'Eau oeuvrèrent chacun en son temps, à la réussite de cette entreprise. Ce furent, depuis la création du centre en commune de plein exercice ;
                MM. FREY Henri (1882-1889), COURNIER Léon (1886-1898), COSTA Firmin (1898-1901), ALZINA Benoît (1901-1907), PONS Antoine (1907-1903 décédé en fonction), GUERROUARD Gabriel (1908-1911I), de GHEON Victor (1911-1913 décédé en fonction), MAZELLA Joseph (1913-1921), PONS François (1921-1942), MOULIAS Maximilien (1942-1943), SCHEMBRI Michel (1945-1947), NAULIS Robert (1947-1962).

                Jusqu'à la période noire, Fort de l'Eau demeura aux beaux jours et même en hiver, un lieu de rassemblement, une sorte de carrefour où venaient communiquer les familles d'Alger et de cinquante kilomètres à la ronde. En été, après une journée de baignades et de bronzage, on se retrouvait aux tables des nombreux établissements qui étalaient leurs terrasses sur les trottoirs des boulevards du front de mer. On y venait aussi spécialement pour déguster, en même temps que l'inévitable anisette, les brochettes de mouton si réputées, les merguez, et surtout, la fameuse soubressade mahonnaise, mieux réussie qu'ailleurs, accompagnée du non moins réputé pain mahonnais sans levure, à la mie compacte, que beaucoup rapportaient chez eux en partant. Ainsi, en toutes saisons, Fort de I'Eau jouait-il un rôle d'espace-charnière garant de l'équilibre familial.
                Les descendants des Mahonnais fondateurs de Fort de l'Eau et villages avoisinants, se sont ensuite dispersés dans toutes les régions de l'Algérie et dans les villes, notamment dans la capitale Alger.
                En effet, par le jeu des héritages et des divisions territoriales des domaines qui s'ensuivent, certains fils et filles devaient s'installer dans les campagnes d'autres régions ou se mettre à rechercher une situation à ALGER ou dans d'autres villes ou villages. C'est Ainsi que bon nombre de Mahonnais ont pris des fermes importantes en gérance ou en métayage en Basse-Kabylie et dans la Mitidja notamment, pour y cultiver les primeurs, les fruits, les céréales et la vigne principalement.
                Pour une ballade dans Fort de l'Eau d'Hier et d'Aujourd'hui... consultez le site de l'Amicale fortdeleaumonsite.com. Au milieu du rivage, au sommet d'un rocher abrupt le pacha Mohammed Kurdogli fit jeter en 1556, les bases d'un fort sous le règne de Soliman le Magnifique, dixième et plus illustre des sultans ottomans.
    


Les bains maures
Envoyé par M. Christian Graille

                 En France le bain n'est qu'un accessoire de toilette, un moyen de propreté. Nous allons au bain furtivement, nous en sortons en toute hâte.
                 C'est un besoin auquel on sacrifie une heure dérobée, à regret, aux mille soins de notre vie si affairée ; ce n'est pas, comme en Orient, une coutume habituelle générale nécessaire, et pour ainsi dire une obligation sociale et religieuse.
                 Nous nous laissons enfermer dans une petite niche étroite comme la cabine d'un marin ; nous immergeons notre corps dans de l'eau plus ou moins chaude ; nous demeurons là immobiles, regardant les mouches voler en été, ou fixant d'un oeil distrait les arabesques que la vapeur dessine sur le miroir en hiver, lisant quelquefois, impatient toujours.
                 Tandis qu'au contraire, eux, là-bas les heureux et les sages ! Ils ont fait du bain un des grands évènements de la vie, tout un poème !

                 Point de petites cases ; point de ces horribles étuis en zinc ayant toute l'apparence d'un cercueil ; point de solitude, le musulman même au milieu de la foule , n'est-il pas toujours seul avec sa pensée et avec Dieu qui le voit et le juge à chaque instant.
                 Non en Orient le bain est un lieu de délices, un avant-goût de ce paradis merveilleux promis aux croyants par le Prophète ; c'est à la fois une jouissance et une prescription religieuse, et tandis que chez nous le bain emporte une idée très agréable de toilette et d'appropriation, chez les Orientaux, au contraire, il rappelle la plus douce et la plus stricte obligation de la vie musulmane.
                 Voyez ce Turc à tête respectable, la barbe soigneusement peignée, sérieux grave marchant comme le recteur de Boileau ; il va au bain, soyez-en sûr.
                 L'y voilà en effet. Il franchit le vestibule, soulève une lourde portière et pénètre dans une salle immense au milieu de laquelle s'élève une fontaine en marbre.
                 Autour d'une vaste galerie, soutenue par d'élégantes colonnes, sont jetées des nattes en jonc, et sur ces nattes de petits matelas plats et étroits, recouverts de longues pièces de cotonnade velue, souple et blanche.

                 Avant de poser le pied sur cette galerie, il quitte ses babouches et chausse une semelle en bois qui tient au pied par une bande de cuir clouée des deux côtés. Une fois muni de la chaussure de l'établissement, le baigné ne s'appartient plus, il est la propriété du baigneur et il abdique en ses mains le peu de libre-arbitre qu'il avait en entrant. Il dépose sur une étagère circulaire son turban, qu'il ôte avec un soin extrême et qui laisse voir une tête rasée jusqu'autour du sommet, d'où s'échappe une longue mèche de cheveux.
                 Un des baigneurs qui l'accompagnent suspend son burnous et tous ses vêtements dont il se dépouille.
                 Un autre est près de lui, tenant des pièces d'étoffes blanches, et l'enveloppe de la tête au pied avec une décence, une habileté et une prestesse qu'une longue habitude peut seule donner.
                 Semblable à un fantôme, et soutenu par les deux baigneurs, de peur qu'avec ses semelles de bois il ne glisse sur les dalles de marbre, il descend de la galerie et pénètre dans une salle voisine dont la température est plus élevée.
                 Il reste là un instant, puis il entre dans une troisième pièce plus chaude encore, et arrive enfin dans une véritable salle de bain, étuve brûlante où l'on aurait peine à respirer si on arrivait successivement.

                 C'est une vaste pièce sphérique, recevant le jour par des trous pratiqués dans le dôme et hermétiquement bouchés par des blocs de verre qui ne laissent pénétrer qu'une lumière mystérieuse et douce.
                 Au milieu s'élève une plate-forme, haute de deux pieds environ, recouverte de larges plaques de marbre. Au-dessus de cette plate-forme est le foyer de chaleur qui rayonne de là dans toutes les parties de l'établissement ; elle sert de siège et de lit de repos pour les frileux. Autour de la salle, et adossées au mur, sont des fontaines au nombre de dix, douze jusqu'à vingt même, versant en abondance, dans les bassins de marbre, de l'eau chauffée à une température du lieu.

                 Débarrassé successivement des linges dont on l'avait enveloppé, le musulman a fait gravement son entrée dans l'étuve sous le costume qui rappelle exactement, sauf la blancheur de l'étoffe, celui de nos garçons boulangers.
                 Arrivé là, son costume a subi une nouvelle modification, et, après avoir respiré un instant dans cette atmosphère brûlante, il est conduit auprès de l'une des fontaines, et il se couche immobile sur la dalle où le baigneur a d'avance jeté, en guise de martelas, une bande de toile bleue.
                 Il reste là dix minutes ou un quart d'heure, silencieux et rêveur, mais immobile et muet comme un cadavre ; si le baigneur l'oubliait, il y resterait éternellement.

                 Mais le baigneur est trop bien dressé pour lâcher ainsi sa proie. Il arrive, il tapote et presse légèrement toutes les parties musculeuses du corps de sa victime, puis il prend ses bras et les étire, puis il les croise en s'appuyant sur eux de toute sa force, puis il fait craquer ses doigts, ses bras, ses reins ; cela fait se sont les jambes que le bourreau soumet à des contorsions inimaginables, et pendant cet exercice gymnastique auquel la chaleur excessive peut seule prédisposer les membres, le patient ne lâche pas un mot, pas un murmure.
                 C'est à la fois toute la souplesse, toute l'élasticité de la vie et toute l'animation de la mort.

                 Après cet exercice le baigneur laisse son homme au repos ; il l'assoit sur son séant, car, de lui-même, le baigné ne le pourrait pas, et pour le réconforter, il lui apporte une pipe, qu'il lui présente respectueusement et sans mot dire, une main sur la poitrine en signe de soumission et de salut, comme nous portons chez nous la main au chapeau.
                 Pendant que notre musulman lâche en silence les bouffées de son sebsi, n'êtes-vous pas tenté de promener vos regards autour de la salle et de rire en voyant sa physionomie étrange, son aspect burlesque.

                 Dans le costume primitif qui efface si bien les vaines distinctions humaines où le pauvre ressemble si bien au riche, où le courtisan le mieux appris ne remarquerait aucune différence entre le prince et le sujet, il est facile de distinguer, aux traits principaux de leur caractère, les hommes de race et de nationalité différentes.
                 Ainsi, par exemple, si l'on entend des éclats de voix, des rires, des chants des interpellations bruyantes dans la salle sonore, on dit sans hésiter et sans se tromper : ce sont des Français.
                 Voilà des indigènes. Ceux-ci impassibles et graves, sont des Maures.
                 Ceux-là causant entre eux, ce sont des Juifs, et soyez sûr qu'ils parlent d'affaires et d'argent.

                 Mais notre musulman a lâché sa dernière bouffée de sa pipe. Il s'étend de nouveau sur le marbre, et cette fois, deux baigneurs arrivent, munis de gants ou poches tissées en poil de chameau et dont le contact est loin d'être moelleux. Le fumeur redevient cadavre et les baigneurs se partagent son corps.
                 A toi la droite ! A moi la gauche ! Et les voilà aussitôt frottant vigoureusement l'épiderme et la dégageant de tous les corps étrangers que la fatigue du jour et les vêtements y déposent.

                 Cette opération terminée, notre musulman jouit encore d'un moment de repos jusqu'à ce que le baigneur arrive, tenant dans ses mains une sébile de bois où quelques minimes parties de savon se transforment aussitôt en larges flocons de mousse onctueuse, et le corps est lavé de la tête aux pieds.
                 La fontaine est voisine, le baigneur fait couler l'eau chaude à longs flots sur les membres et les débarrassent de toutes les parties du savon.
                 Voilà notre homme en état de grâce. Mais doucement, tout n'est pas encore fini : il vient s'asseoir sur la plate-forme. Là on procède de nouveau à la toilette, toujours avec une décence remarquable.
                 On enveloppe sa tête, on le couvre de tissu de coton blanc ; il chausse de nouveau la sandale bruyante et soutenu toujours par ses baigneurs, il traverse les salles intermédiaires et arrive jusqu'à l'endroit de la galerie où il avait déposé ses vêtements.

                 Quelque graduée que soit cette transition, elle ne laisse pas que d'être désagréable, et les M'zabites de l'établissement rient de bon cœur quand ils entendent des Français, rentrant dans cette dernière salle, les gourmander sur leur lenteur et les couvrir de linges et de draps de coton.
                 Le musulman est plus grave : que la fraîcheur de l'air extérieur l'émoustille ou non, son visage demeure calme et impassible ; il s'étend sur le petit matelas et y demeure immobile.

                 Là commence la dernière, la plus agréable phase du bain.
                 Le corps fatigué repose avec délice, et il est rare qu'un peu de sommeil ne succède aux épuisements causés par le massage et la transpiration ; C'est ce que les Turcs nomment le Kief.
                 Rien ne peut donner une idée du spectacle qu'offre cette galerie, quand on voit tous ces corps enveloppés de longs suaires, couchés les uns auprès des autres dans l'immobilité la plus complète.
                 Les baigneurs n'en ont cependant pas fini avec le baigné ; accroupis auprès de lui, ils le sèchent lentement, et quand le sang a redonné aux membres leur chaleur, ils apportent d'abord : la pipe embrasée puis la tasse de café, puis le sorbet ,puis encore une nouvelle pipe.

                 Et enfin commence la toilette des pieds, sorte de raffinement que les riches musulmans seuls se permettent ; il en est même qui se procure une jouissance plus complète. Deux baigneurs se tiennent debout sur les jambes du baigné, et, se soutenant à l'aide d'une corde pendue au plafond, ils s'y balancent pendant un quart d'heure, appuyant tour à tour le poids de leur corps sur l'une ou l'autre jambe.

                 Celui qui écrit ces lignes se rappelle qu'étendu un jour, en compagnie d'autres Français, auprès d'un cadi qui se donnait le plaisir incompréhensible de ce balancement, la corde qui soutenait les deux M'zabites cassa et ils allèrent rouler à quelques pas de là aux éclats de rire scandaleux des Européens : le cadi ne sourcilla pas et ne fit pas un mouvement.
                 C'est surtout pendant cette dernière période du bain que la verve française s'épanouit en vives moqueries et en rires joyeux, au grand scandale des musulmans.

                 Un jour de jeunes officiers de marine étaient là étendus les uns auprès des autres, riant et plaisantant à tout propos.
                 Non loin d'eux un homme enveloppé était immobile et silencieux, ne laissant voir que son nez et sa moustache, et ce fut sur lui que roula l'avalanche de bons mots de calembours et de railleries.
                 Le lendemain, ils apprirent que l'honnête musulman, objet de leurs plaisanteries n'était autre que l'amiral ... commandant supérieur de la marine à Alger, et ils se défièrent à l'avenir des apparences d'impassibilité et de flegme oriental.
                 L'établissement de bain est ordinairement ouvert aux hommes de huit heures du soir au lendemain midi, et aux femmes de midi à sept heures.
                 Il va sans dire que les masseurs font alors place aux masseuses et jamais l'œil d'un homme n'a pénétré dans les mystères qui s'accomplissent pendant ce temps.
                 Mais pour les femmes le bain a un attrait inexprimable ; les joies que les dames européennes trouvent dans les réunions du monde, dans les spectacles dans les bals dans les églises dans les concerts, se résument toutes, pour les femmes orientales dans le bain.

                 C'est là qu'elles étalent toutes les merveilles de leur toilette c'est là que se colportent tous les caquetages des familles que les mariages se concertent, et disons-le que les infidélités au mariage se nouent ; c'est là que la matrone glisse dans l'oreille de la jeune fille les doux propos qu'un amant lui a confiés c'est là que s'ébruitent toutes les nouvelles.
                 A Alger comme à Constantinople, Smyrne, au Caire à Tunis, le bain est une fête pour les femmes, fête que le caprice jaloux des maris ne peut interdire car le bain est en Orient, un devoir religieux, aussi bien qu'une des premières nécessités de la vie.

L'Algérie, courrier d'Afrique,
d'Orient et de la Méditerranée (06-02-1844)


Les Fêtes de Tlemcen
Envoyé par M. Christian Graille

                 Les fêtes organisées dimanche dernier à Tlemcen, à l'occasion de la cavalcade, avait attiré dans cette ville un grand nombre de visiteurs, venus de tous les points de la province et, principalement, de Bel-Abbès. Les trains de samedi soir et de dimanche matin étaient bondés de voyageurs.
                 Dans un but d'aimable courtoisie, la société de gymnastique la Bel-Abesienne envoyait une délégation, composée d'une quinzaine de pupilles, sous la conduite de MM. Lafosse, vice-président et Lacretelle trésorier.
                 Une douzaine d'amateurs de bicyclettes, accompagnés de M. Charles Roman, président du vélo-club Bel-Abésien, partaient également avec nos jeunes gymnasiarques, pour prêter leur gracieux et bienveillant concours à cette fête de charité.

                 Le train quittait Bel-Abbès dimanche matin à 10 heures précises et arrivait à Tlemcen à 1 heure de l'après-midi où les principaux membres de la commission des Fêtes attendaient impatiemment, avec de magnifiques couronnes de fleurs, tous les membres de nos deux sociétés.
                 Le temps qui, dès le matin, semblait vouloir se gâter s'était remis au beau l'après-midi, et un soleil radieux éclairait de ses chauds et doux rayons la charmante cité Tlemcénienne.
                 A 2 heures, le cortège de la cavalcade se mettait en marche dans un ordre régulier et parcourait toutes les principales rues et places de la ville.
                 Tous les chars étaient décorés et enguirlandés de verdure et de fleurs, avec un goût parfait.

                 Vers 5 heures, le groupe de chars entourait la place des Victoires, où une foule compacte s'était massé et les membres de la Bel-Abbésienne exécutèrent alors des exercices surprenants de toutes sortes, au milieu des applaudissements et des bravos mille fois répétés.
                 Pendant les intervalles, la lyre Tlemcénienne et l'Harmonie faisaient entendre tour à tour, les plus beaux morceaux de leur répertoire.
                 Ce n'est qu'à la nuit tombante que nos gymnasiarques ont dû lâcher les trapèzes les barres-fixes pour aller se réconforter dans un excellent dîner qui les attendaient à l'Hôtel du Nord.

                 Le soir, à 9 heures, un bal plein d'entrain et d'animation avait réuni, sur la grande place d'Alger, une foule d'infatigables danseuses et danseurs qui s'en sont donné jusqu'au jour.
                 Le lundi matin vers 9 heures, une course de bicyclettes avait lieu, sur la route d'El-Manssourah, et tous les cyclistes y prenaient part. La course a été très bien menée, et nos pédaleurs se sont montrés vaillants et courageux au-dessus de tout éloge.
                 La visite des cascades de la Saf-Saf a été très mouvementée. Plusieurs trains légers, toujours bondés, ont fonctionné pendant toute la journée du lundi. Environ deux mille personnes s'y étaient donnée rendez-vous.
                 Là encore on s'est amusé beaucoup, grâce à la lyre Tlemcénienne, les danseurs ont repris leur même entrain de la veille.

                 A 4 heures tous les voyageurs rentraient à Tlemcen pour prendre le train et gagner leur cité ; ils emportaient de ces deux charmantes journées, un excellent souvenir qui, nous l'espérons, ne s'effacera jamais de leur mémoire.
                 En terminant, nous ne saurions trop féliciter tous les membres de la délégation de notre société de gymnastique, des succès qu'ils ont remportés à Tlemcen ; leur présence a contribué, pour une large part, à rehausser l'éclat de la fête. Ils ont acquis, dans un bien court séjour, toutes les marques d'amitié et de sympathie de la population Tlemcénienne.
X..., Voyageur reconnaissant.
Le Progrès de Bel-Abbès (21-05-1893)


Les pages noires
Envoyé par M. Christian Graille

                 Je ne sais rien de plus dramatique, de plus poignant, de cette histoire dont parle, en un de ses échos le Tell de Blidah. Dans cette ville vivent les époux B.... dont le fils partit pour Madagascar, tout au début de l'expédition.
                 Au commencement ce furent des lettres assez fréquentes. Le jeune soldat disait les étapes parcourues et les souffrances éprouvées.
                 On se passait de main en main le griffonnage sur lequel avait coulé tant de larmes, qu'avaient couvert tant de baisers.
                 Mais il y avait quelque fierté aussi de compter son enfant parmi les braves sur lesquels la France avait les yeux fixés.

                 Cependant les lettres se firent plus rares. C'est que les communications étaient plus difficiles. Car, juste à ce moment, la mortalité devenait effrayante et les époux Blidéens sentirent s'accroître leur anxiété.
                 Tout d'un coup plus de nouvelles. Nul doute l'enfant est malade, couché dans un de ces hôpitaux sur lesquels les journaux fournissent de si navrants détails.
                 Malade ! Car on n'ose, sans que le cœur se déchire, penser seulement à la mort.
                 Et pourtant voici une lettre, puis une autre, puis une troisième.

                 C'est de là-bas qu'elles viennent, mais l'adresse porte une écriture inconnue. On hésite à ouvrir l'enveloppe. On s'y résout cependant, Dieu sait avec quel tremblement dans les mains. Hélas les pressentiments ne se justifiaient que trop.
                 Les lettres écrites par des officiers du régiment auquel appartenait le fils, annonçaient la mort du petit soldat.
                 Les vieux parents prirent les vêtements de deuil. Pendant des jours et des nuits ils pleurèrent. On ne les vit plus et l'on savait qu'ils s'étaient murés dans leur douleur. Ah les pauvres et combien à plaindre !

                 On donne son fils à la Patrie on rêve pour lui un peu de cette gloire qui ne va cependant sans sacrifice on se dit que les plus pénibles sont passés, que c'est la fin des épreuves, que le retour est prochain.
                 Et justement c'est à ce moment que la terrible nouvelle parvient ; c'est quand on ouvrait les bras, quand on tendait les lèvres pour embrasser que la vision apparaît, épouvantable, de l'enfant mort loin des siens, au milieu des souffrances et des vains appels !

                 Dimanche dernier la population Blidéenne était conviée à un service religieux pour le repos des morts de Madagascar.
                 Les vieux parents se dirent qu'il fallait y aller. Ce concours du monde, cette réunion de fonctionnaires de tous ordres, d'officiers de tous grades, c'était, n'est-ce pas, autant d'honneurs rendus à des enfants comme le leur tombés pour le pays.
                 Il leur semblerait, à la vue du catafalque et des tentures noires, à l'audition de chants liturgiques, aux paroles consolatrices tombées de la chaire, que leur fils était mort moins loin.
                 Et déjà ils s'acheminaient vers l'église à travers la foule qui, respectueusement leur livrait passage. Or voilà qu'un facteur accourt, les appelant à haute voix : " Une lettre ! Une lettre ! Mais c'est son écriture dit la mère. "
                 La joie est plus terrible que la douleur. (C'est qu'on y est moins fait).

                 Avec quelle peine l'enveloppe est déchirée. Comment rendre compte de la scène survenue !
                 Le fils vit, il est arrivé par le dernier transport il est à Alger. Il attend avec impatience le moment où il pourra embrasser ses parents et oublier, rien qu'à les voir, toutes les souffrances qu'il a endurées.
                 On croirait à une page de roman, c'est hélas une page de la vie, page terrible qui trouvera sa place dans le dossier qui tous les jours grossit.

                 Quelle confusion a donc régné dans le corps expéditionnaire pour que des erreurs de cette force aient été possibles.
                 On avait mentionné jusqu'à ce jour que l'omission des décès et nous en avons parlé à propos de ces malheureux convoyeurs qui dorment depuis des semaines ou des mois leur dernier sommeil et dont les parents non prévenus attendent toujours le retour.
                 Aujourd'hui ce sont des vivants dont on annonce la mort !
                 Quelles révélations nous réserve encore demain ?
                 Quels drames nous fera-t-on connaître ?
                 Il ne me semble pas qu'à aucune époque, pour aucune de nos guères coloniales, pareil dédain de la vie humaine ait été affiché.
                 On parle souvent de responsabilité. Je n'en connais pas de plus lourdes que celles qui proviennent de deuils qu'on pouvait éviter des larmes qu'on pouvait ne pas faire répandre.

Lebrun. Les clochettes algériennes et tunisiennes (22-11-1895)


Ce n'est pas compliqué un homme
Envoyé par Eliane
*Pourquoi les hommes sont les êtres les moins inquiets ?*

         *Ils peuvent ouvrir eux-mêmes leur pot de confiture.*
         *Ils ne peuvent jamais être "enceinte"**.*
         *Leur nom de famille ne change pas.*

         *Les rides leur donnent de la personnalité.*
         *Les gens ne fixent pas leur poitrine quand ils leur parlent.*
         *Les conversations téléphoniques sont finies en 30 secondes.*

         *Ils n'ont besoin que d'une valise pour des vacances de cinq jours.*
         *Ils peuvent pisser à peu près partout.*
         *Ils se fichent de la façon dont les autres hommes s'habillent.*

         *Le moindre geste agréable de leur part leur vaut de la reconnaissance.*
         *Leurs sous-vêtements coûtent au plus 15 euros pour un paquet de 3.*
         *3 paires de chaussures sont plus que suffisantes.*

         *Ils sont incapables de voir si leurs vêtements sont froissés ou tachés.*
         *Tout sur leur visage reste de la même couleur tout le temps.*
         *Ils pensent et communiquent essentiellement au premier degré.*

         *Le programme de la machine à laver le linge reste définitivement incompréhensible.*
         *Ils partagent avec leur chat une peur instinctive de l'aspirateur.*
         *Leurs magasins préférés Casto, Fnac, Décathlon ....*

         *Les frites, le chocolat, les viandes en sauce, la pizza, la charcuterie, ne leur posent aucun problème.*
         *Ils n'ont que leur visage à raser.*
         *Ils peuvent se promener en short, quel que soit l'état de leurs jambes.*

         *Ils peuvent s'arranger les ongles avec un canif de poche.*
         *Ils peuvent faire les courses de Noël pour 25 personnes en 25 minutes le 24 décembre.*
         *Et quand ils voient une jolie poitrine, ils ne comparent pas, ils profitent !*
         *Voilà pourquoi les hommes sont heureux !...*

         *Le pire ... c'est que c'est vrai !*





Les prétentions d'Alger
Envoyé par M. Christian Graille
Oran le 21 septembre 1881

                 -La ville d'Alger se figure sans doute qu'elle a droit de priorité et de préséance sur toutes les autres localités de l'Algérie ; aussi s'empresse-t-elle, par l'organe de son journalisme, de chercher à centraliser et à accaparer dans son enceinte tout ce qui se présente.
                 S'agit-il d'offrir un témoignage de gratitude au colonel Négrier par voie de souscription ? Bien que les faits qui l'ont motivé se soient passés dans la province d'Oran.
                 Que l'initiative de la souscription appartienne à la presse oranaise ; Enfin que notre territoire soit encore le théâtre de la lutte c'est Alger qui veut centraliser les fonds. Faut-il organiser une ligne de reboisement ?

                 C'est Alger, encore Alger qui semble vouloir jouer le rôle du gouffre qui accapare.
                 A elle tous les biens tous les honneurs toutes les initiatives aux autres chefs-lieux ....... Le restant.
                 Cette tendance contre laquelle nous devons réagir toujours et quand même en notre qualité d'autonomiste et d'ennemis des rattachements, nous oblige à repousser tout empiètement.

                 Nous croyons Oran et Constantine qui sont des chefs-lieux de départements, tout aussi bien posés sous tous les rapports et surtout mieux à même que, qui ce soit de mener à bonne fin les affaires de leur province respectives.
                 En Algérie, il n'y a pas de capitale, mais bien trois villes principales, relevant de la métropole toutes trois au même titre.
                 Alger, il est vrai, le siège des gouverneurs, c'est dans son enceinte que se préparent ces grands plans de colonisation éternellement couchés dans les dossiers. C'est elle qui a l'insigne honneur de recueillir les premières paroles les premières promesses de tous les vice-rois qui se sont succédés au palais de Mustapha ; mais je ne crois pas qu'il y ait là un motif assez sérieux pour lui permettre un rôle de suprématie que nous ne pouvons absolument pas admettre.

                 Messieurs les Algériens, avec tous les égards que nous vous devons, vous nous permettez de rester les maîtres chez nous.
                 N'allez pas croire pourtant que nous sommes mus par une idée de séparatisme. Telle n'est pas notre pensée.
                 Et bien que le fédéralisme soit notre base politique, nous acceptons volontiers la collectivité des trois provinces lorsqu'il faut, par exemple, résister à l'ennemi commun lorsqu'il faut concentrer les efforts vers un but profitable à tous lorsque enfin l'intérêt de l'Algérie demande notre entente ; mais nous voulons que cette union se fasse sur le pied d'égalité.

                 Nous voulons avoir, dans le concert colonial, une part égale aux autres, nous voulons enfin le respect du droit et de la justice.
                 Nous avons pris l'initiative d'une souscription, il est juste que ce soit nous qui centralisions les fonds, tout au moins les nôtres.
                 Un comité est déjà formé à Oran ; il est en correspondance avec M. le ministre de la guerre ; c'est donc à lui que doivent être adressées les sommes provenant des diverses souscriptions.
                 Les Constantinois l'ont ainsi compris : ils ont parfaitement apprécié la valeur de nos raisons ; espérons qu'Alger comprendra ce sentiment de dignité, d'indépendance et d'injustice qui nous fait agir, et qu'elle se joindra à nous comme notre sœur de l'Est.
Le Progrès d'Oran (22-09-1881)



L'hôtelier de la Chiffa
Envoyé par M. Christian Graille

                 Entre Blida et Médéa, dans les gorges sauvages que parcourt la Chiffa, un ancien sous-officier de notre armée d'Afrique s'est installé depuis un an avec sa femme et sa jeune fille ; et dans ce lieu très éloigné de nos villes et de nos camps, il a établi une petite auberge pour les colons et les militaires qui vont à Médéa ou qui en reviennent.
                 D'abord, l'aventureux soldat n'avait pour abriter sa petite famille que le feuillage d'un immense olivier, sous lequel il avait établi son fourneau, son cabaret, sa boutique.
                 Bientôt il construisit lui-même une baraque en planches qui le protège un peu mieux contre les intempéries de la saison.

                 L'audace de ce colon perdu ainsi au milieu de peuplades ayant une autre langue, une autre religion, d'autres mœurs est sans doute un fait remarquable, mais ce qu'il comporte surtout de constater, c'est que cet homme, sa femme et son enfant n'ont jamais été inquiétés ou insultés par les indigènes, et chose plus extraordinaire encore, ils n'ont jamais été volés.

                 Un jour leur âne s'était échappé du logis, il leur avait été ramené au moment où il le croyait perdu.
                 Il n'est pas inutile d'ajouter que l'actif et laborieux aubergiste a fait de bonnes affaires, et que sa dépouille aurait pu tenter les voleurs, car au retour de l'expédition d'Aïn-Taguin il avait acheté à nos troupes des tapis des tellis (couvertures), des vêtements d'hommes et de femmes, des bijoux et d'autres objets que les soldats échangeaient contre quelques litres de vin dont ils étaient privés depuis longtemps.

                 Les indigènes fréquentent la boutique du Français. Ils s'y approvisionnent de tabac, de café, de sucre, d'huile et payent toujours ce qu'ils achètent.
                 Sa jeune fille âgée de sept ans et qui parle l'arabe, va, seule dans les tribus voisines.
                 Son père l'envoie sur les marchés acheter des œufs, des poules, du lait, et toujours elle a été respectée comme si elle se trouvait sous la protection des baïonnettes françaises.
                 Les tribus au milieu desquelles cette famille mène une existence si singulière sont des Kabyles assez connus dans l'histoire de nos guerres, les Mouzaïa et les Beni-Salah.
L'Algérie, courrier d'Afrique (22-03-1844)


Maladies à craindre du printemps
Envoyé par M. Christian Graille

                 Avril ! Le printemps ! ... La végétation naissante imprègne l'air d'oxygène pur. Après les lourdes nuits d'hiver, voici l'époque du renouveau que chantent les poètes et les oiseaux. Il semble, qu'à ce moment une infinité de forces latentes d'organismes vivants de la nature prenne son essor.
                  Tout se meut, tout se développe.
                  L'envolée joyeuse de la nouvelle vie nous émeut et nous enchante : Mais soyons prudents ! ... Ce rayonnement ensoleillé, cet épanouissement général, tout diamanté de fleurs est perfide.

                  Le soleil est plus ardent le jour, il est vrai ; mais par suite du rayonnement nocturne, les nuits comme les matinées sont beaucoup plus fraîches ; cette opposition violente (qui se traduit par des variations de 12 à 15 degrés en quelques heures) entraîne forcément un développement extraordinaire de brumes, de brouillards dont il faut se méfier.
                  Les évolutions météorologiques produites par le réchauffement solaire font éclore toute la série de micro-organismes des fièvres éruptives telles la rougeole, la scarlatine, la varicelle etc.

                  Laissons de côté la variole, doit-il est si aisé de se prémunir par une simple vaccination. Aux phénomènes pathologiques qu'engendre le mouvement équinoxial du printemps, il est bon d'ajouter d'autres " causes morbides " qui, celles-là relèvent toujours de l'imprudence humaine.
                  Les premières journées toutes pailletées d'or, et il faut bien le dire aussi, l'entraînement de la mode, nous incitent à endosser hâtivement des vêtements nouveaux.

                  Malgré les gelées nocturnes, malgré les brusques écarts du thermomètre et sans tenir compte de la suractivité vitale de nos fonctions, succédant à l'engourdissement de l'hiver, on s'allège très volontiers, on se découvre et on s'attarde aisément ... " il fait si beau ! " se dit-on ; autant de piège que nous tend le dieu malin de la saison.
                  Dans les poussées pathologiques c'est encore le printemps qui fournit, avec l'automne, le plus fort contingent de maladies.
                  Il serait pourtant aisé, je ne dis pas d'éviter radicalement la maladie, tout au moins de se mettre sérieusement sur la défensive.

                  Voici quelques-unes des formules à indiquer ne pas s'alléger ; sortir le moins possible aux heures de brumes, se méfier des promenades trop prématurées à la campagne, encore humide.
                  Si nous rentrons dans l'examen plus détaillé de la question, nous ne saurions trop recommander de nous habituer (imitant en cela le soleil) à nous lever chaque jour de la meilleure heure. De procéder à quelques nettoyages du tube gastro-intestinal, qu'on emploie les purgatifs drastiques ou bien des purgatifs à répétition. Les amers ayant pour base la gentiane, le quassia amara ; la rhubarbe, seront très opportuns, grâce à leur action antiphlogistique.

                  Au lendemain de Noël des soirées d'hiver des fêtes du nouvel an et des jours gras, il est utile, je dirai même indispensable de faire reposer l'estomac des fatigues qu'on lui a imposées en lui appropriant un régime alimentaire doux léger et rafraîchissant.
                  C'est du reste à ces considérations, fort logiques qu'il faut attribuer l'institution du carême ou du jeûne, établis par les divers cultes, à certaines périodes de l'année. De tout ce qui précède, il résulte que nous devons en premier lieu redoubler de précautions au point de vue de l'hygiène privée.
                  En second lieu, étant donné que nous sommes à l'époque saisonnière des fièvres éruptives, il sera bon, contre celles-ci de prendre certaines précautions, d'ailleurs élémentaires. En général, ce sont les enfants qui sont atteints.

                  Tout d'abord, dès les premiers symptômes, faire coucher le petit malade veiller à la liberté du ventre qu'il sera facile d'obtenir par un petit lavement laxatif, et favoriser immédiatement la poussée éruptive au moyen de boissons sudorifiques très chaudes qu'on sucrera avec du tolu et qu'on additionnera d'un peu d'alcool. En tout cas, quel que soit celui des facteurs de cette vilaine trinité, j'estime qu'il sera toujours plus sage de recourir à l'avis du médecin, le diagnostic différentiel qui sépare la rougeole de la scarlatine, étant notamment parfois des plus délicats.

                  En opposition avec toute la richesse expansive de la nature, le printemps entraîne à sa suite (et cela depuis une dizaine d'années) cette affreuse maladie qui a fait verser déjà des flots d'encre et couler bien des larmes, j'ai nommé l'influenza.
                  L'influenza qui n'est pas à proprement parler une maladie nettement définie, éveille dans les éventualités qu'elle frappe les susceptibilités propres à chacune d'elles.
                  Chez le phtisique, elle accélère souvent de façon foudroyante les désordres du bacille de la tuberculose ; par elle les rhumatisants et les arthritiques voient s'éveiller, avec acuité, leurs symptômes douloureux : presque toujours les désordres intestinaux font partie du tableau morbide : les embarras gastriques sont à l'ordre du jour.
                  Bien souvent, hélas ! l'influenza revêt la forme terrible de grippe infectieuse anéantissant tout en dehors des efforts suprêmes de la science.

                  C'est ici surtout que j'appellerai l'attention du lecteur.
                  Non seulement il faudra se conformer aux indications et aux préceptes énoncés plus haut, relativement à l'hygiène de la saison, mais il faudra, comme un corps d'armée faisant sa veillée d'armes, se mettre sur une défensive minutieuse.
                  Cette défensive consistera dans quelques purgatifs légers, dans un régime régulier autant que modéré, soutenu par toute la gamme des toniques, dont il me suffira d'énoncer ici les bases principales de quinine, fer, glycérophosphate de chaux, huile de foie de morue, arséniate de soude etc. etc. Bien entendu, chacun de ces principes médicamenteux s'appliquera aux individus suivant leur âge, leur sexe et leur tempérament.

Dr X. Les clochettes algériennes et tunisiennes (13-04-1902)


Vingt règles pour les séniors
De Régis

20 règles à appliquer :

         Pour ceux d'entre nous qui ont atteint les années d'or, voici une belle collection de matière à réflexion.

         1. Il est temps d'utiliser l'argent que vous avez économisé, l'utiliser et en profiter :
         - Ne le gardez pas pour ceux qui ne peuvent avoir aucune notion des sacrifices que vous avez faits pour l'obtenir. Profitez donc de l'instant présent.

         2. Arrêtez de vous inquiéter :
         - Au sujet de la situation de vos enfants et petits-enfants. Vous avez pris soin d'eux pendant de nombreuses années, vous leur avez donné une éducation, ils sont maintenant responsables d'eux-mêmes.

         3. Maintenir une vie saine avec un exercice modéré :
         - Bien manger, marcher, respecter votre sommeil, puisqu'il devient plus difficile de rester en parfaite santé, restez informé sans excès...!

         4. Toujours acheter les meilleurs et les plus beaux éléments pour vous :
         - Le principal objectif est de profiter de la vie.

         5. Ne pas insister sur les petites choses :
         - Vous avez déjà surmonté bien des choses dans votre vie, aujourd'hui l'important, c'est le présent. Ne laissez pas l'avenir vous effrayer.

         6. Indépendamment de l'âge, toujours garder l'amour vivant :
         - L'amour de tout, de votre famille, de votre environnement, de votre pays.

         7. Soyez fiers, tant à l'intérieur qu’à l'extérieur :
         - Ne cessez pas vos sorties. Soignez votre corps, vous vous sentirez mieux et plus forts .

         8. Ne perdez pas de vue les tendances de la mode pour votre âge, mais gardez votre sens du style :
         - Vous avez développé votre propre sens de ce qui semble bon pour vous : gardez cette trajectoire et soyez en fier. Gardez votre personnalité.

         9. Lire les journaux, regarder les nouvelles :
         - Écoutez, lisez, assurez-vous que vous avez une messagerie active et essayez d'utiliser certains de ces réseaux sociaux. Vous serez surpris par de nouvelles rencontres.

         10. Respectez les jeunes générations et leurs opinions :
         - Donnez des conseils, non des critiques et essayez de leur rappeler la sagesse d'hier qui s'applique encore aujourd'hui.

         11. Ne jamais utiliser les mots: "de mon temps". Votre temps c'est maintenant :
         - Vous avez été plus jeune, mais vous existez toujours maintenant, amusez-vous et profitez de la vie.

         12. Embrassez votre âge d'or :
         - Passez votre temps avec des gens positifs, joyeux, ils vont déteindre sur vous et vos jours sembleront beaucoup plus agréables.

         13. Ne pas céder à la tentation de vivre avec vos enfants ou petits-enfants :
         - Ils doivent vivre leur vie et vous avez besoin de vivre la vôtre.

         14. N'abandonnez pas vos loisirs :
         - Si vous n’en avez pas, organisez-vous des loisirs. Trouvez quelque chose que vous aimez et passez du bon temps, amusez-vous.

         15. Même si cela ne vous enchante pas toujours, acceptez les invitations :
         - Baptêmes, fêtes, anniversaires, mariages, conférences Allez-y...! La chose importante est de quitter la maison de temps en temps.

         16. Parler moins et écouter davantage :
         - Ne racontez pas d'histoires longues sauf si on vous le demande. Prenez la parole sur un ton courtois et essayez d'être positifs.

         17. Si vous avez été offensé par d'autres, pardonnez-leur :
         - Quelqu'un a dit : « Garder une dent contre l'autre, c'est comme prendre du poison »

         18. Si vous avez une forte conviction, conservez-la :
         - Ne perdez pas votre temps à essayer de convaincre les autres. Vivez en étant fidèle à vos croyances et à vos choix.

         19. Rire. Rire beaucoup. Rire de tout :
         - Persuadez-vous que vous êtes parmi les plus chanceux. Vous avez réussi à avoir une vie, une longue vie.

         20. N'ayez aucune attention de ce que les autres disent :
         - Soyez fier d’être vous-même, fier de ce que vous avez accompli. Il y a encore beaucoup de bonheur à prendre, alors, prenez-le...!

         - ET N'OUBLIEZ PAS : La vie est trop courte pour boire du vin bon marché...!
         - Ce n’est que du bon sens...!
         





Naissance d'un village algérien
Envoyé par M. Christian Graille

                 Il y a un peu plus d'un an, lorsque l'horrible patache qui me faisait faire avec ma famille, la dernière étape de Paris à Frenda s'arrêta à Martinprey, je fus très surpris, je l'avoue, de trouver en pleine campagne des caniveaux et des bordures de trottoir le long desquels aucune habitation n'était construite.
                 C'était par un soir pluvieux, très triste. Dans le ciel aucune étoile ne brillait et des nuages sombres couraient à l'horizon se confondant avec les masses noires des montagnes.

                 La lassitude d'un voyage très long, la désillusion de rencontrer à la place des palmiers rêvés et des orangers en fleurs, des étendues sans fin de chênes-nains, de thuyas rabougris et de lentisques minuscules, l'appréhension de me trouver dans quelques heures en face de l'inconnu et aussi ce regret qu'on éprouve d'avoir laissé loin de soi des êtres qui vous sont chers, m'avaient rempli l'âme d'une mélancolie que je ne pouvais vaincre.

                 Rues, veuves de maisons, ces lots de terrains symétriques où la brousse croissait encore, cette place sur laquelle de pauvres gourbis bâtis de pierres sèches et recouverts d'herbes surgissaient seuls, ajoutèrent encore à l'amertume qui me gonflait le cœur. De suite, je devinai qu'un village allait naître là.
                 Et cependant l'idée de création, de vie qui aurait dû me réconforter ne me vint pas à l'esprit et ce fut la sensation du vide, du néant qui m'envahit.

                 Le voiturier espagnol dételait ses chevaux pour relayer. Autour de la diligence des Arabes sales, déguenillés rôdaient. D'autres dans la baraque d'un juif hideux, achetaient des figues, des dattes. Ils parlaient dans une langue gutturale et rauque, dont je ne saisissais point un mot.
                 De gros bâtons à l'extrémité terminée en massue étaient dans leurs mains et, pendus à leurs cous se balançaient des coutelas dont le manche émergeait des gaines de cuir rouge.

                 Souventefois, je m'étais trouvé à Paris, seul, dans des rues peu sûres, à trois heures du matin, et dans l'ombre des portes cochères, j'avais aperçu de sinistres silhouettes de rôdeurs, guettant le surin à la main, le ponte à dévaliser.
                 Ces gibiers de guillotine avaient fait passer, malgré moi, un frisson sur mon épiderme.
                 Ces bédouins, armés de matraques et de couteaux, barragouinant un idiome incompréhensible et semblant se concerter, par une nuit sans lune, pour l'attaque de la voiture, m'impressionnèrent davantage que jamais n'avaient pu le faire les clients de M. Deibler.

                 Est-ce, parce que j'avais auprès de moi une femme et mon enfant ?
                 Ou bien l'inconnu qui flottait dans les plis de ces burnous et s'exaltait de ses sons de voix jamais entendues, produisait-il sur mes nerfs une sensation plus puissante que la vue de bandits notoires mais vêtus à l'européenne et parlant un langage, sinon académique, du moins familier ? Les deux causes concouraient sans doute à ce déplorable effet.

                 Aujourd'hui, j'ai passé la journée à Martinprey. Le soleil radieux dardait ses chauds rayons sur le sol. Aucun nuage ne troublait l'azur limpide du ciel et, toutes bleues, les hautes montagnes se découpaient à l'horizon, nettement, jour de printemps, jour de jeunesse où le bourgeron pousse, où l'oiseau chante, où la terre bouillonne, où la nature ancienne clame, dans un immense alléluia d'amour, la douceur du renouveau, la joie de vivre !

                 Et maintenant, c'est beau la vie que j'ai autour de moi. Le long des trottoirs qui seuls, il y a un an, marquaient la présence d'un village, des maisons ont surgi, remplaçant les huttes de pailles.
                 Sur les lots de jardin que la pioche a défoncé, les légumes grandissent et la brousse apparaît plus à cet endroit où pendant des siècles elle régna, maîtresse du sol : elle, la grande envahisseuse qui s'étale sur la plaine, borde les oueds, s'accroche aux ravins, grimpe aux flancs des coteaux, se lance à l'escalade des montagnes, s'implante même entre les rochers quand elle trouve un peu de terre pour nourrir ses racines toujours inassouvies !
                 L'homme est passé par-là et sa cognée a fait son œuvre de civilisation.

                 Au lavoir recouvert de tuiles rouges, ouvert de deux côtés et tout pimpant avec ses murs blanchis à la chaux, des femmes, les jupes retroussées, les bras nus, lavent du linge en chantant, tandis que près d'elles, sur un tas de fumier des coqs s'égosillent et des pigeons roucoulent.
                 Plus loin, près de l'abreuvoir, un groupe de colons discute. Impatientés, les chevaux qu'ils tiennent en mains s'ébrouent, frappent le sol de leurs sabots.

                 Des charrues passent sur la route avec leur bruit de ferrailles. Les fouets claquent.
                 Et les roues des charrettes pleines de sarments qui montent vers les vignes futures, ronflent sur la chaussée encore dure d'un empierrement récent.
                 Sur la place une fusée de cris de joie de rires frais, s'élève bientôt suivi d'un chant rythmé d'une ronde populaire :
                 Nous n'irons plus au bois
                 Les lauriers sont coupés
                 La belle que voilà
                 Ira les ramasser.

                 Ce sont les enfants, les " mutchachos ", filles et garçons. Ardéchois, Savoyards, Bourguignons de leur sang naisse l'Algérien.

                 A quelques pas d'eux, de jeunes garçons juchés sur des bourriquots et à cheval sur la croupe selon la mode indigène, s'exercent à de vagues fantasias leurs matraques à la main, leurs couteaux pendus au cou, drapés dans des burnous en guenilles des Arabes se pressent pour acheter des dattes et des figues .....
                 Il y a longtemps que je ne crains plus que leurs poux !

Victor Precy.
Les clochettes algériennes et tunisiennes (21-03-1903)


Remède à la disette
Envoyé par M. Christian Graille

          Il y a des personnages d'une certaine importance en Europe qui croient de bonne foi, que les colons algériens ont accaparé toutes les terres cultivables des indigènes et que telle est la cause de la disette que subissent ces derniers.

          Ils s'attendrissent volontiers sur les infortunés arabes dépouillés de leurs biens par une usurpation incessante, et réduits à cultiver des sables et des escarpements de ravins rocheux dépourvus de toute végétation.
          Sans rien connaître de l'Algérie ils n'en discutent pas moins à la chambre ou au débat des questions se référant à l'administration coloniale ; Dans ses rapports avec les mœurs et coutumes des indigènes, comme dernièrement quand il fut mention de régulariser l'imposition sur les terrains et le bétail si mal réparti dans les tribus.

          Un sénateur prenant le Pirée pour un homme constatait dans un discours à propos de l'évaluation de la richesse territoriale qu'un Arabe pouvait avoir beaucoup de charrues tout en labourant peu de terre tandis qu'un autre pouvait en labourer davantage n'ayant qu'un petit nombre de charrues.
          Le parleur ne savait même pas que " la charrue " était une mesure agraire en Algérie comme en France, le journal, l'aune, l'arpent.

          Cette singulière confusion montre combien ceux qui se chargent de nous tracer des lois sont ignorants sur les sujets qu'ils traitent. Laissons ces gens à leurs promesses oratoires et revenons aux indigènes nos voisins, dont la situation est véritablement pitoyable.
          Dans la plaine du Chélif, plusieurs familles manquent de grains pour manger et pour semer. C'est à peu près la même misère que l'année dernière ; les Arabes vont descendre à Orléansville et dans les villages du Chélif réclamer de l'orge et du blé. Il est à craindre que ça devienne une habitude et que tous les hivers, il faille se mettre en garde contre ces sauterelles de la saison froide.

          Les Arabes de la campagne à l'exception des grands propriétaires, ne travaillent que volontairement que quand ils sont aiguillonnés par la faim. Donnez-leur l'orge et le blé nécessaire à leur nourriture, ils ne feront plus autre chose que garder quelques animaux s'alimentant seuls par le pacage. S'ils viennent à vendre ceux-ci le prix en sera dépassé en jeu ou en frivolité pour les femmes.

          Aucun approvisionnement sérieux ne rentrera dans le douar. Ils comptent beaucoup sur la manne qu'on leur distribue aussi facilement, et ils ne tarderont pas à considérer cette distribution comme une rétribution qui leur est due tous les hivers, car faute à leur nonchalance ; tous les hivers pour eux seront des périodes de disette. Il est assez curieux que ce soit cette saison hivernale qui donne occasion au Sénat de discuter sur les moyens les plus importuns pour régulariser la contribution indigène et lui faire rendre davantage.

          Il est évident que l'arabe : qui paye à l'impôt une répartition six fois moindre que le colon européen, et ne remplit aucun des devoirs sommaires du citoyen français échappe encore par toutes les ruses aux impôts achour et zeccat.
          On voudrait réunir ces contributions en une seule et donner une plus grande facilité à la perception.
          Il y a là, matière à très beaux discours qui n'aboutissent nécessairement à rien ; mais ça ne remédie pas au mal qui reste une invasion périodique des mendiants indigènes dans nos centres coloniaux.

          Ces gens ont des bras, des bêtes de trait au moins, des ânes avec lesquels nous les voyons traîner entre les palmiers nains qu'ils n'arrachent point, un soc rudimentaire ; on leur donne des grains ; ils pourraient donc cultiver un terrain double en étendue que celui qu'ils mesurent à leur strict nécessaire.
          Alors la disette serait conjurée.
          Nous ne pouvons pas avec notre législation forcer un indigène à travailler bien que sa paresse nous vienne à charge ; mais les Caïds les chefs de douars ont sur leurs coreligionnaires une influence suffisante pour vaincre leur nonchalance.

          C'est par eux qu'on pourrait obtenir des tribus un ensemencement double, et par suite une récolte double dont la surabondance mise en réserve préservera de la disette hivernale. Il faut lutter pour la vie !
          En leur fournissant du blé, les Arabes travailleront moins ; en arrondissant les impôts, ils ne payeront rien.

          Si au contraire on peut persuader aux chefs indigènes de faire opérer de grands labours on aura trouvé un remède à la disette et même en grande partie à la criminalité.
J. D. Le Messager de l'Ouest Sidi-Bel-Abbès (02-02-1894)


Opinion du journal " la Presse "
Envoyé par M. Christian Graille

                 Le journal la Presse, dans son numéro du 4 août, démontre que M. le maréchal Bugeaud n'a pas rempli en Algérie le mandat qui lui avait été confié, et que le système de guerre éternelle dont il se déclare le défenseur dans chacun de ses écrits, tend à la destruction de la race indigène et à la ruine de nos finances.
                 Pour mettre fin à un tel état de choses si désastreux, il indique comme remède : le rappel de M. le maréchal Bugeaud et la séparation complète du commandement militaire de l'administration propre du pays.

                 Le rang que ce journal représente dans la presse gouvernementale nous engage à reproduire les passages suivants :
                 En 1838 (le 11 février), M le maréchal Bugeaud avait dit dans le courrier français, qu'avec 90 ou 100.000 hommes judicieusement employés en Algérie, on pourrait dominer les intérêts agricoles des Arabes, et dire à ceux-ci : " vous ne sèmerez pas, vous ne moissonnerez pas, vous ne pâturerez pas sans notre permission " que dès lors ils seraient forcés de se soumettre, ne pouvant pas vivre dans le désert.

                 On conçoit que le ministère du 29 octobre ait eu, dès son avènement, confiance dans les paroles d'un général qui avait eu quelques succès contre Abd-el-Kader ; on le conçoit d'autant mieux que, par une inconcevable incurie, le gouvernement avait toujours considéré la question de l'Algérie comme une affaire très secondaire, qui méritait à peine qu'on l'étudiât ; mais aujourd'hui, que cette petite affaire, qui, avec les crédits supplémentaires ne roule pas sur moins de 100 millions par an et n'absorbe pas loin de 90.000 hommes de notre armée, sans faire entrer en ligne de compte le poids politique de la question.

                 Il ne peut être tolérable que le ministère s'efface plus longtemps et en laisse la gestion à un homme qui ne l'a pas comprise, et dont les tendances sont d'accroître annuellement les sacrifices d'hommes et d'argent que la France s'impose avec tant de peine.
                 Il est donc d'un impérieux devoir pour le gouvernement de s'occuper sérieusement de l'Algérie, d'étudier à fond cette question, de prendre la direction actives des affaires de ce pays, si voisin de la France, et de n'y avoir que des lieutenants dociles, au lieu d'y entretenir un maître absolu, qui, par sa résistance, paralyse les efforts de la métropole, et y rend presque nuls tous ses sacrifices.

                 Depuis bientôt cinq ans M. le maréchal Bugeaud commande en Algérie une armée de 87.000 hommes : a-t-il dominé les intérêts des Arabes ? Non.
                 Les a-t-il empêchés de semer, de moissonner, de pâturer ? Non, certes ; par conséquent, il ne les a pas soumis, puisque la guerre est plus flagrante que jamais.
                 Puisque ses nécessités, dit-il, autorisent des exécutions comme celles des Ouled-Riah puisqu'il demande sans cesse des renforts refusés par les Chambres, mais qu'il saura obtenir en leur absence, en s'engageant de plus en plus dans cette guerre contre les Kabyles, si généralement réprouvée, parce qu'elle est inutile pour l'affermissement de notre domination.

                 Il est donc reconnu aujourd'hui que M. le maréchal Bugeaud n'a pu dominer les intérêts des Arabes avec les incroyables ressources qu'on a mis à sa disposition et que, ne pouvant les dominer, il s'est résolu à les saisir par la razzia, la destruction des arbres, des moissons par l'enlèvement des troupeaux et des populations, ou plutôt pour résumer tous ces moyens, par l'extermination de la race indigène ; car détruire toutes les ressources d'une population c'est la vouer à une mort certaine.
                 Voilà donc comment M. le maréchal Bugeaud a judicieusement employé les 87 mille hommes qu'on lui a confiés.
                 Toute son habileté a consisté à faire une guerre active avec 87.000 hommes sans cesse complétés et avec autant de millions, ce que n'a pu faire M. le maréchal Clauzel qui n'avait en 1835 et 1836, que 31.450 hommes, c'est-à-dire 56.000 hommes de moins que M. le maréchal Bugeaud.

                 Nous livrons ces réflexions impartiales à l'appréciation du gouvernement, et nous le prévenons que nous lui demanderons, un jour, un compte sérieux de l'emploi des immenses ressources qu'il prodigue depuis trop longtemps à un système basé sur l'ignorance la plus vulgaire des faits les plus palpables de l'Algérie.
                 M. le maréchal Bugeaud n'a d'autres combinaisons stratégiques à nous offrir pour dominer l'Algérie, que la nécessité d'une grosse armée et la dévastation du pays.

                 C'est ce qui n'est pas acceptable ; c'est ce qui indique inévitablement que son œuvre est finie et annonce par conséquent le terme prochain de son administration.
                 Louis XIV et Napoléon avaient acquis, en dominant de hauts les évènements, l'expérience que chaque homme avait une œuvre à accomplir, mais qu'une fois cette œuvre avortée, l'homme était usé et devait s'effacer.
                 Nous sommes fatalistes à la façon de Louis XIV et Napoléon, et lors même que M. le maréchal Bugeaud, par un revirement d'opinion, comme cela lui est arrivé si souvent sur les affaires d'Algérie, présenterait un nouveau système, en confessant ses erreurs passées, notre foi en lui n'existe plus, la fortune l'a conduit au fait des grades militaires et l'a abandonné là.
L'Algérie, courrier d'Afrique, d'Orient
et de la Méditerranée (06-08-1845)


ALGER ETUDIANT

N°180, 1934
Source Gallica
Les Turcs et le Savant

      - Hauteur ! Quillage ! Balivage !
      - Pas bonne échappe !
      - A ta tête au carré !
      - Pas bonne arrête !
      - Mort ! - Va, va faire des cages,

      J'a pas vu que tien as bourré ?
      - Dans la mort de tes os ! - Dans les os de tes morts !
      - Ti'as juré des morts, Salvator !
      Y en a des frais dans la famille...
      C'est en ces mots que deux jeunes Bônois
      Se disputoient au jeu de billes.
      Un savant renommé jusque chez les Chinois,
      Auteur d'une Encyclopédie
      Et qui son siège avoit dans mainte Académie,
      Quittoit à l'instant le vaisseau.
      Il venoit chez les Turcs observer leurs coutumes.
      Un tel amusement lui semble si nouveau
      Qu'il réclame aussitôt du papier et des plumes
      Pour en noter les détails avec soin.

      - Qui sait, Se disoit-il, si de cet examen
      Ne résultera point quelque thèse féconde ?
      La terre est-elle pas une machine ronde ?
      Dieu la lança-t-il pas comme font ces gamins ?
      Voyons comme il vont de leurs mains
      Tracer la genèse du monde.
      Tout propose un problème à l'esprit du savant
      Qui le résout incontinent.
      Tandis qu'il fait ces commentaires,
      Un écu de sa bourse échappe et tombe à terre.
      Salvator de dire : " O Bagur !
      A de bon, cet homme il est guitche.
      Tu vas, tu mets le pied dessur.
      Personne il a rien vu.
      T't à l'heure on fait des mitches.
      - Ho ! Ho ! s'exclame le savant,
      C'est le diamant dans la gangue !
      Quelle aubaine, vraiment, d'écouter ces enfants
      Et que le turc est une belle langue !

      Des mitches : à chacun la moitié du butin.
      Vous voyez en ceci le surgeon du latin
      " Dimidia pars ". Je le note !
      Me voici l'égal d'Aristote !
      - Attends, dit Salvator, pour qu'i' se bouge un peu,
      Nous se faisons semblant qu'on se reprend le jeu.
      Hauteur ! Bonne arrête"! Et je plombe !
      Mecieu, vous se poussez pour que je prends l'effet ?...
      Méteunant, diocane ! en bombe
      Si tu pars pas, que le cul i' te tombe
      Dessur un oursin juif, et que le sous-préfet
      De Bône-la-Coquette I' s'le ramasse a'c des pincettes !

      L'Aristote buvoit du lait.
      - C'est merveille, dit-il, de les ouïr parler !
      Que le cul (fondement) il te tombe (t'escape) !
      La réplique est dans Rabelais !
      Il saute, transporté. Mes Bônois rient sous cape.
      Les billes font la chausse-trape,
      L'étaient sur le dos. S'emparant de l'écu,
      Tandis qu'il reprend pied, Salvator crie : " O hisse !
      Aussi dans Rabelais ya pas " tomber de cul " ?

      Le monde à Bône i' dit : " Entention ti glisses ! "
      D'avant, qu'on s'appeloit Thagaste à Souk-Ahras,
      I' faisoit : " Cave ne cadas ! "
      Et Bagur d'ajouter : " Oilà là différence :
      Le pluss cave des deux c'est pas cuilà qu'on pense !... "
Edmond BRUA




PHOTOS AVIATION de BÔNE
Envoyées par M. P. JARRIGE




























PEINTURE
De Jacques Grieu

     
          Je peins et donc je suis , Descartes aurait pu dire
          S'il avait eu en mains, un pinceau à brandir.
          Son Discours eut alors été un beau tableau
          Car on peint ses idées au moyen du cerveau.
          Ah ! Si tous les tableaux, tous ceux de nos musées
          Etaient plus regardés, décryptés, commentés,
          Probablement le monde irait mieux de l'avant,
          S'imprégnant de couleurs, d'éclairages savants.

          On peint ses illusions ; mais rien de plus réel.
          En captant l'invisible, l'absolu se révèle.
          Et parfois on s'étonne en voyant prendre forme,
          Beaucoup de sensations qui au fond de nous, dorment.
          Il ne faut pas confondre et peinture et teinture.
          La lumière et les ombres sont à la peinture,
          Ce que le plomb et l'or sont à un alchimiste.
          Le mystère tremblote au pinceau de l'artiste...

          En pensant sa peinture on a quelquefois peur :
          Celui qui peint la fleur veut peindre son odeur...
          Le langage est au fond peinture des idées ;
          On ne peint pas la chose mais on peint ses effets.
          La musique et le chant sont aux paroles vraies
          Ce que chaque peinture est au dessin et trait.
          On rêve sa peinture : et puis on peint son rêve ;
          Alors, pour la finir, on est son propre élève…

Jacques Grieu                  



Pages sombres oubliées
PUBLIÉ PAR ABBÉ ALAIN RENÉ ARBEZ
Envoyé par Mme Saurel Eliane
Les invasions des Alpes par les musulmans

        Au Moyen-Age, les musulmans sont désignés par le terme de Sarrazins. Durant trois siècles, les incursions islamiques dans les régions alpines Savoie, Suisse, Italie, provoquent la dévastation : les massacres, le pillage, le rançonnage, la mise en esclavage, le contrôle des voies de circulation. Avec une prédilection de ces prédateurs féroces pour les églises, les monastères, les acquis économiques des villages, des places fortes, les trésors communautaires des lieux de culte.
        Cette sombre période est peu décrite dans les médias, et pratiquement passée sous silence. Pourtant les travaux des historiens nous dévoilent à quel point, si peu de temps après la mort du prophète, les assaillants islamiques se sont lancés sans répit à l’assaut des foyers de civilisation de l’Occident chrétien, devenu le dar al harb, domaine de la guerre.

        En 711, les disciples de Mahomet, mort en 632, entrent en Espagne wisigothique et au nombre de plusieurs milliers, les Arabes conquièrent la péninsule où ils s’établissent pour longtemps. Et de là, traversant les Pyrénées, ils envahissent le Languedoc Roussillon appelé Septimanie. Ils dévastent les villes du sud, ravagent Bordeaux et Perpignan, et emmènent en Espagne islamisée et au Maghreb un nombre considérable de femmes, d’enfants et de jeunes hommes en esclavage.

        Narbonne vaincue en 720, tous ses habitants sont passés au fil de l’épée, y compris les réfugiés goths ayant fui l’Espagne en raison des exactions de l’occupant. Cette ville devient la place forte des musulmans à partir de laquelle ils vont lancer de nombreuses expéditions vers le nord, correspondant au Royaume de Burgondie. Incendiées et dépeuplées, ces régions sont ravagées autour de 730 : Mâcon, Châlon, Beaune, Autun… les Arabes s’en prennent également à l’actuelle Franche Comté et au Dauphiné.
        Charles Martel, duc des Francs et maire du Palais, dirige alors la Francie, et apprenant que Abderrhaman ibn Abdallah al Ghafiqi, wali d’Al Andalous, dirige ses troupes vers Tours, la « ville sainte » de la Gaule, il organise l’armée franque pour contrer cette avancée qui vise à s’emparer de l’abbaye St Martin et de ses trésors de haute valeur culturelle, mais aussi à pénétrer plus avant en territoires francs. Les Arabes ravagent le Périgord, la Saintonge, le Poitou. Ils massacrent un nombre considérable de chrétiens, pillent et brûlent l’église de St Hilaire de Poitiers. Entre Tours et Poitiers, en 732, l’affrontement mémorable avec l’armée omeyyade a lieu, connu sous le nom de « bataille de Poitiers » (ou chez les Arabes « maarakat balat ash shuhada » = « bataille du pavé des martyrs »). Abderrahman, chef de guerre musulman est tué sur place.
        Charles Martel (ou Karl Martell) acquiert ainsi une stature fondatrice dans le Moyen Age européen en stoppant l’avancée musulmane au cœur de la Francie. Mais il ne parvient pas à délivrer Narbonne ni à neutraliser la nuisance qui s’étend vers les Alpes à partir de cette place forte de l’islam.
        Lorsque, en 792 le calife de Cordoue, Hescham, envisage de reprendre l’ensemble des territoires languedociens, c’est le petit fils de Charles, Charlemagne, qui met en œuvre la riposte avec succès pour imposer des limites à ces invasions récurrentes. Sans parvenir totalement à empêcher les hordes de pillards musulmans d’écumer durablement les villes et villages méditerranéens, faisant des dégâts considérables en vies humaines et en destructions d’édifices, églises et châteaux. (Les villages perchés et fortifiés en sont encore les traces historiques)

        A partir des années 900, les Sarrazins remontent des côtes de Provence pour se diriger vers le nord par la vallée du Rhône en direction des régions alpines. Après avoir pris les villes de Toulon, Fréjus, et Grenoble, les Arabes parviennent en Savoie et dans le Piémont, ils sèment la désolation et la mort sur leur passage. En 939, la Maurienne est envahie, les Sarrazins parviennent au Grand St Bernard en Valais. Ils y installent un poste de contrôle qui va leur permettre de rançonner tous les voyageurs qui empruntent le col alpin pour aller à Rome. Les Sarrazins présents dans la région de montagne pillent Avenches et Neuchâtel, ils ravagent le monastère hospice de Bourg-St-Pierre et s’attaquent au siège épiscopal de Coire, puis à l’abbaye de St Maurice d’Agaune où ils pillent les pèlerins et s’emparent des antiques trésors liturgiques de la communauté.
        Les Arabes commettent partout des massacres tout en s’emparant des biens des communautés chrétiennes. En 929, près de Suse, ils ravagent et incendient l’abbaye de la Novalaise, et décapitent 500 moines. (Au monastère de St Vincent de Vulturne, 900 moines ont été décapités par les sabres islamiques en une seule nuit, leur église livrée aux flammes) Les musulmans pillent également la prestigieuse abbaye de St Gall. On retrouve des traces de ces tragédies dans les chroniques anciennes, comme celle de Jean Rochex, moine cistercien, qui décrit les Sarrazins comme « hérétiques, cruels, barbares, idolâtres, qui, venant d’Arabie, dévastent des régions entières et font d’innombrables martyrs chez les chrétiens ».

        Depuis le col alpin du Grand St Bernard, les Sarrazins contrôlent les allées et venues des voyageurs et des pèlerins. Ils imposent des taxes et des rançons et se constituent un fructueux trésor de guerre.
        L’abbé de Cluny, dénommé Mayeul, fait route en 972 en direction de Rome. C’est un personnage important, l’abbaye de Cluny étant le monastère le plus puissant et le plus rayonnant de l’époque. Les Sarrazins postés au col le font prisonnier, le prennent en otage et exigent pour le libérer une rançon de mille livres d’argent, une somme considérable. Un moine est envoyé à Cluny pour récolter le prix à payer : les clunysiens doivent alors fondre des calices d’or ancestraux, des œuvres d’art et des objets du culte de valeur pour rassembler les mille livres. Les chroniques décrivent le prisonnier Mayeul enchaîné, affamé et laissé sans soins en attendant le versement de sa rançon.
        Devant ces nombreuses razzias alpines, le roi d’Italie Louis II le jeune et l’empereur germanique Otton III discutent des solutions à trouver. Mayeul de retour dans son abbaye, et apprécié pour ses qualités personnelles, sera sollicité pour devenir pape, ce qu’il refusera. C’est par la suite le pape Urbain II, lui aussi moine de Cluny comme Mayeul, qui lancera la première croisade afin de reprendre les terres chrétiennes spoliées, assurer la sécurité et retrouver la mainmise sur les lieux saints.
        En 973, le comte de Provence Guillaume 1er organise une guerre défensive de libération contre les envahisseurs sarrazins, il le fait « au nom de Mayeul ». Vers 975, l’étau musulman se desserre dans le Sud et les incursions prédatrices reculent. Toutefois, des hordes de pillards se replient vers la piraterie méditerranéenne des barbaresques, maghrébins qui se mettront par la suite au service de la Sublime Porte, après la prise de Constantinople en 1453. Leur occupation principale sera de rançonner les voyageurs et de fournir des esclaves au sultan, ainsi que des prises de guerre substantielles. Plus tard, face à ces exactions perpétrées depuis Alger et Tunis, et les accords toujours transgressés, les Français interviendront par la prise militaire d’Alger en 1830 où plusieurs dizaines de milliers de chrétiens prisonniers des bagnes islamiques seront libérés.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Abbé Alain René Arbez, prêtre catholique, commission judéo-catholique de la conférence des évêques suisses et de la fédération suisse des communautés israélites, pour Dreuz.info.
LE 29 MARS 2023


Tirailleur Algérien,
N° 7, 4 octobre 1899

Source Gallica
Prône Facétieux
du Curé d'Oued-Zeffoun.

            Au nom du Père, du Fische, j'l'Esprit... Ainsi soit-il.

            Mes très chers frères,
            Je vous dirai que ch'est aujourd'hui la feschte de Saint-Michel Archange.
            Ch'est un grand Saint que celui-là qui tient les balanches du Cheigneur...
            (S'interrompent) Eh bien ! qu'est-che que vous faites là-bas ?... oui vous ?...
            Après tout, mes chers frères, il faut que je vous dije une choje, on a volé votre curé. Tous les fruits que j'avais gardé pour la visite de Moncheigneur ont disparu pendant que je dijai la mèche.
            Mes Frères : il faut écouter les concheils de voschtre curé. Je vous répète que je veux pas que vous mettiez votre linge dans le chimetière, cha ch'est pas convenable et la première fois que cha vous arrive, je lève vos jupes à toutes et après nous verrons.
            Mais revenons à Ghaint-Midliel.
            Ch'est plus qu'un ange, chers frères, puisque ch'est un archange. Ch'est lui qui chera, le jour du jugement dernier, achis à la droite du Cheigneur.
            Et moi aussi j'y cherai quand les gens d'Oued-Zefïoun viendront. Et quand notre Cheigneur vous dira : " Gens " d'Oued-Zeffoun, qu'avez-vous fait à votre curé ?
            Il a eu soif et vous lui avez pas donné à boire, il a eu faim et vous lui avez pas donné à manger. Non cheutement vous lui avez pas donné une part de la dîme comme cheia doit che faire, mais encore vous l'avez pillé, volé, fatigué, ennuyé, achommé.
            Alors l'un dira M'chieu le curé par chi, m'chieu le curé par là ! Mais je ne vous écouterai pas.
            Vous vous attacherez tous à mes culottes, mais je lâcherais le bouton... et patatras !... vous irez touch tomber dans les flammes éternelles !... C'est la gràche que je vous chouaite.
            Ainchi choit-il.

E. D



PHOTOS AVIATION de BÔNE
Envoyées par M. P. JARRIGE






































LE SANG DES RACES
Par LOUIS BERTRAND
Source Gallica
LE CHARIOT
X

Pages de 93 à 99

         A travers les plaines d'alfa, les trois équipages de Bacanète cheminaient depuis midi vers Bou-Cedraya. Un soleil de printemps, presque aussi chaud que les soleils d'été, éclairait crûment l'étendue morne.
         - Pour se tenir en éveil et se désennuyer pendant cette étape somnolente, le patron avait demandé au Grand-Philippe de lui faire la lecture. Celui-ci, installé sur le rebord du chariot, à l'ombre de fa bâche, lisait Les Trois Mousquetaires, tandis que Bacanète, le fouet sur l'épaule, l'écoutait tout en marchant. De temps en temps Rafaël, qui surveillait les deux autres équipages, accourait, lorsque la piste était tout à fait belle, pour savoir où en était' l'histoire.
         Jamais il ne s'était senti aussi parfaitement heureux qu'en ce temps-là. Depuis qu'il était revenu chez Bacanète, c'était comme si une seconde jeunesse commençait pour lui. Malgré le rude labeur de l'hiver, son métier l'avait reconquis. Encore une fois il l'aimait. A peine si, de loin en loin, lorsqu'il était tout seul à songer, aux côtés de son chariot, le ressouvenir d'Alger survenant réveillait ses colères et ses rancunes.
         Et lorsqu'il se rappelait ses ambitions déçues, sa piteuse figure dans son rôle de patron, il sentait au fond de lui comme l'humiliation d'une défaite.

         Le soir tomba. A mesure qu'on se rapprochait, les bancs de sable se multipliaient. Il fallait surveiller sans cesse et donner de la voix. Barrant la route, un mamelon apparut, dont la crête semblait la limite extrême d'un rivage ; Bou-Cedraya était derrière. Au loin, semblables à des sphinx, trois montagnes gardaient l'orient plus sombre. De petites étoiles s'allumaient dans les champs clairs de l'occident. Rafaël pensait joyeusement à l'étape finie. Il revoyait encore les aventures du livre que Philippe venait de fermer, et, en même temps, que les belles fermes de la terre et du ciel, des idées de vaillance et d'êtres héroïques occupaient sa pensée. Des femmes vinrent à leur rencontre. Ils entrèrent bruyamment dans la cour, des chiens hurlèrent auprès du puits.

         Une équipe de soldats du train était campée tout proche des écuries. Quelques-uns- passaient, des gamelles à la main. Des Arabes qui venaient pour vendre de l'orge s'approchaient lestement des chariots, le burnous traînant sur les talons. Dans le crépuscule qui endormait les terres, ils glissaient en silence, comme des ombres. La lune montante dorait les murs en pisé des étables. Le front blanc du caravansérail éclairait à l'entour les ténèbres douces.
         A l 'intérieur, emplissant la salle commune, des soldats prenaient l'absinthe. D'autres attendaient des rations de viande, qu'un muchacho, au teint plâtreux, taillait à grands coups dé hachette dans une moitié de bœuf, pendu aux poutres du plafond par un croc. Ta patronne, l'air farouche et soupçonneux, épiait les allées et venues, du seuil de la cuisine, un enfant blotti contre ses mamelles, Patrocinio, le maître du logis, réglait un compte avec des Arabes, son grand livre étendu sur un coin de table.

         Impassible et majestueux comme toujours, il alignait des chiffres, que les Arabes, anxieux, suivaient de l'œil, sans plus bouger que des statues.
         Rafael aimait cette étape de Bou-Cedraya, à cause de l'air paisible et patriarcal de la maison. La nourriture elle-même n'y sentait pas l'auberge, elle lui rappelait les cuisines maternelles. Aussi, quand on les appela pour souper, lui et le Grand-Philippe, s'assit-il avec plaisir devant le potage aux garbanzos, que flanquait un énorme plat de bœuf bouilli et des terrines de couscous.

         Trois puisatiers français et deux manœuvres espagnols qui travaillaient à l'alfa vinrent prendre place à côté des charretiers.
         Le rnachado au teint pâle, un parent récemment arrivé d'Espagne, servait les convives. Lorsque chacun eut rempli son assiette, Patrocinio s'installa au haut bout, ayant Bacanète à sa droite. Celui-ci ne manquait jamais de plaisanter ses grandes bottes de cuir jaune, sa ceinture lâche sur le ventre et plus bourrée qu'une cartouchière.
         - Tu as l'air d'un Calabrais ! Disait Bacanète.
         Patrocinio, se tassant avec dignité dans sa graisse, ne daignait même pas répondre, ou bien il disait une malice en castillan, que personne ne comprenait, mais d'un air si grave qu'on éclatait de rire.
         Sous l'unique lampe à pétrole, c'était vraiment une table de famille. Les fusils de Patrocinio reluisaient aux murs, en panoplie. Des illustrations de journaux espagnols décoraient le coin du comptoir. On causait tranquillement comme entre gens qui se connaissent, sans aucune de ces facéties d'auberge où se complaisait Bacanète.

         Les puisatiers parlaient de leurs sondages, infructueux jusque-là. Mais leur chef, un ouvrier des Cévennes aux yeux d'illuminé, n'admettait pas qu'on pût douter du succès " Il y avait des années et des années qu'il courait le pays. Tous les signes révélant la présence de l'eau, il les avait reconnus. Si l'on trouvait de l'argent, il y avait de quoi inonder toute la région qui s'étend depuis Aïn-Oussera jusqu'au Rocher de sel ; les Arabes propriétaires de troupeaux paieraient tant par tête de bétail pour les abreuvages : c'était une fortune toute prête pour celui qui tenterait l'entreprise ; le pays fertilisé allait produire comme en Amérique..."

         Il montrait les moissons couvrant les plaines, les vignes s'étageant au versant des plateaux et remplaçant l'alfa. Il interpellait Patrocinio, l'engageait à réunir des fonds. Mais celui-ci, leurré cent fois par les chercheurs d'eau, répondait d'un air grognon et à demi incrédule. D'ailleurs il soutenait une vive discussion contre Bacanète, à propos de la guerre de Cuba.
         Le puisatier, tout à son idée, continuait à faire couler l'eau à pleines rigoles il ennoyait le pays. Alors les autres, emportés aussi par ce rêve de l'eau, se mirent à parler de la mer, qu'ils n'avaient pas vue depuis un an. Les Espagnols racontaient leurs pêches dans la baie de Carthagène, leurs prouesses de nageurs, les lieues qu'ils avaient faites d'un promontoire à l'autre.
         Après cette première journée torride, ils éprouvaient comme un besoin de calmer la brûlure de leur corps. Ils se roulaient sur des plages imaginaires et, avides d'espace, ils ouvraient leurs bras aux caresses fraîches de la vague.

         Cependant le muchacho avait versé le café dans les verres. Les puisatiers, Bacanète, Patrocinio, parlaient toujours. Rafaël, engourdi par la chaleur, commençait à s'assoupir. Philippe ayant demandé de l'encre et du papier, s'était installé au bout de la table et s'était mis à écrire une lettre. Comme s'il n'entendait rien autour de lui, il écrivait sans s'arrêter, d'une grande écriture rapide, un peu tremblée. Quand il eut rempli ses quatre pages, il reprit une autre feuille, si bien que Rafael intrigué lui demanda
         - A qui est-ce que tu en écris si long, Philippe ?
         - Tu sais bien que c'est à ma mère !
         - Comment ! Tu ne lui as pas écrit avant-hier à Boghari !...
         - Si ! mais, quand je suis en route, je lui écris aussi souvent que je peux... Ça lui fait plaisir, à la pauvre vieille, de savoir où j'ai couché, comment j'ai mangé, ce que j'ai vu en chemin... Et puis, moi, ça m'amuse ...
         Philippe, rassemblant ses souvenirs, fit de nouveau courir sa plume, au grand ébahissement de Rafael, qui n'avait jamais vu écrire si vite ni si longtemps.

         Les puisatiers et les manœuvres se levèrent. Patrocinio, exalté par la lecture des journaux espagnols, essayait d'éblouir Bacanète, en lui énumérant les armées et les flottes de l'Espagne.
         "On n'avait pas peur des Etats-Unis. On allait leur envoyer des cuirassés, des torpilleurs... il y avait même un fameux bateau sous-marin... "
         Bacanète éclata de rire :
         - Les flottes de l'Espagne ! Je ne les ai jamais vues, moi, dans le port d'Alger.
         Le bateau des gargoulettes oui!... Ah ! Ils vont envoyer le bateau des gargoulettes pour démolir l'Amérique...
         Patrocinio étouffait d'indignation. Rafael, craignant une dispute, quitta brusquement la table, en engageant Philippe à venir se coucher. Mais Philippe écrivait toujours.

         Dans la clarté de la lune, la cour du caravansérail resplendissait comme une eau calme au bord d'une plage, et les grandes ombres qui tombaient des murs semblaient y découper des rives. Rafael, ayant étendu le hamac entre les timons de son chariot, s'y coucha pour dormir. L'air était si doux qu'il fut obligé de rejeter le sac dont il avait enveloppé sa tête.
         Depuis le départ d'Alger, par un soir de ce printemps, le voyage s'était déroulé sans accidents ni surprises. Le contentement intérieur qu'il éprouvait de cette vie tranquille et régulière s'épanouissait alors dans cette paix de Bou-Cedraya. Il songeait à son camarade Philippe; il se rappela les petits services que celui-ci lui avait rendus, chemin faisant, et, dans une pensée fraternelle pour lui, il ferma les yeux.

         Cependant ils avaient beau se connaître depuis longtemps, les allures étranges de Philippe étonnaient toujours Rafael, et il y avait dans sa conduite une foule de choses qu'il ne s'expliquait pas. Ce Philippe était d'origine presque bourgeoise, son père, un Espagnol de Murcie, étant autrefois petit propriétaire aux environs de Miliana. Il s'occupait de roulage aussi, et Philippe avait grandi au milieu des équipages, tout comme Rafael. On l'avait mis en pension chez les Frères d'Alger, mais le regret des attelages et de la vie libre des routes l'avait empêché de s'y plaire, bien qu'il apprît très facilement toutes choses. Son père était mort, alors qu'il avait à peine quinze ans, et un de ses oncles, devenu son tuteur, les avait à peu près dépouillés, lui et ses deux sœurs, de leur petit patrimoine. Alors sa mère l'avait poussé à entrer chez un huissier de leurs amis, en qualité de clerc. La vie misérable qu'il menait l'avait si vite dégoûté qu'au bout d'un mois il allait s'embaucher comme charretier à l'hôtel du roulage. Depuis, il n'avait jamais quitté ce métier, embrassé par une vocation irrésistible.

         Comme s'il se rendait compte que ses camarades, à cause de son éducation, ne le prendraient jamais au sérieux, il s'imposait les plus dures fatigues, sans se reposer ni se plaindre. Il s'attachait même à leur ressembler en tout, parlant leur mauvais français, riant de leurs plaisanteries, s'habillant comme eux. D'ailleurs sa haute taille inspirait le respect. C'était lui qui vérifiait les comptes des patrons, qui faisait la correspondance des fiancés. On le considérait beaucoup à cause de ses capacités, surtout Bacanète qui ne savait ni lire ni écrire, et chacun s'étonnait qu'il ne cherchât pas à devenir patron. Certains même lui avaient proposé des équipages, en lui laissant, pour s'acquitter, tout le temps qu'il voudrait, mais il refusait obstinément, Maintenant il eût été impossible de le distinguer de ses camarades, même des plus anciens de la route. Il s'était endurci à la peine. Sa chair était desséchée, sa peau avait pris la teinte fauve des sables où il roulait depuis si longtemps; ses cheveux grisonnaient autour des tempes. Le front labouré de rides, les sourcils épais, les orbites profondément enfoncées, son maigre et rude visage s'éclairait de deux petits yeux dont la douceur était étrange et attachante ; et sa voix, habituée aux rauques commandements des équipages, avait parfois ce timbre de cristal qui trouble les femmes.

         La fatigue semblait ne plus avoir prise sur lui. Il se jouait du sommeil. A n'importe quelle heure de la nuit, on. Pouvait l'appeler, il était debout. C'était même toujours lui qui réveillait Rafaël, si lent à se lever et que le sommeil alourdissait d'une sorte d'ivresse.
         Cette nuit encore, lorsque Bacanète, pris d'une fantaisie soudaine, décida de se mettre en marche dès une heure du matin, il fut obligé de tirer Rafaël de son hamac.
         La lune empêchait Bacanète de dormir, et, à tout ce qu'on put lui dire pour retarder le départ, il objecta avec entêtement qu'on voyagerait à la fraîcheur.
         Rafaël se passa de l'eau glacée sur la figure, mais comme il restait néanmoins somnolent, Philippe lui conseilla de monter sur son chariot, tandis que lui-même surveillerait les deux attelages. Rafael, piqué d'honneur, déclina l'offre. Il fit claquer son fouet pour se dégourdir les membres, et tous deux se mirent à cheminer en causant.

         La nuit était si limpide qu'on apercevait dans le lointain les montagnes de Guelt-es-Stel.. On voyait même les ombres que projetaient de rares pistachiers sur la steppe toute blanche de lune. Les grelots des mulets accompagnaient de leurs tintements monotones le gémissement des essieux, et, tout en marchant dans cette clarté qui grandissait toute chose, Rafael se sentait entraîné vers Philippe par un sentiment grave et doux, où se mêlait un peu de la solennité de l'heure. Il le revoyait, comme la veille, assis à la table de l'auberge pour écrire à sa mère : cet acte lui était apparu comme quelque chose de si rare et de si beau qu'il l'écoutait avec une docilité d'enfant.
         Ils parlèrent d'abord du voyage et de l'arrivée prochaine à Guelt-es-Stel. Au milieu du silence, ils avaient l'air de chercher leurs paroles, puis tout à coup Rafael dit à Philippe :
         - Comment se fait-il qu'avec l'instruction que tu as tu continues un métier de galérien, comme le nôtre? Moi, je n'en reviens pas de te voir avec nous autres... Il me semble que, si tu voulais, tu pourrais être employé dans des, bureaux, dans une maison de commerce, contremaître dans une ferme...

         - Tu ne sais pas ce que c'est, Rafaelète ! Je les ai connus, moi, ces métiers-là ! Etre esclave, enfermé du matin au soir, ne pas pouvoir sortir quand on veut, mesurer ses paroles... et tout cela pour crever de faim ! Ici, au moins, je gagne ce que je veux, si je sais me débrouiller, je parle au patron en camarade est-ce que Bacanète n'a pas autant besoin de moi que j ai besoin de lui ?...
         Oui !... mais il me semble, à moi, qu'en étant patron...
         - Ah ! Etre patron !... interrompit Philippe d'un ton de dédain. Allons ! je vois que tu regrettes encore ton camion d'Alger...
         Vois-tu, Bacanète a eu bien raison de te le dire, tu n'es pas fait pour ce métier-là, ni moi non plus. En étant patron, il faut se mêler de choses qui nous dégoûtent tous les deux, batailler avec les clients et les hommes d'affaires, se casser la^ tête pour les paiements, l'entretien des chariots, les fournitures des bêtes ; et il faut être voleur, dans ce pays-ci, pour réussir! Moi, je me crois assez malin pour être aussi canaille qu'un autre. Mais je n'ai pas le goût à tout ça, je préfère rester simple ouvrier comme je suis, parce que, nous deux, vois-tu, ce qui nous plaît dans le métier, c'est le travail des équipages...
         - C'est vrai dit Rafael impétueusement, le travail des équipages, c'est ce que j'aime le plus au monde !
         Ils se séparèrent un instant. Les chariots Tenaient d'obliquer à droite, des bancs de sable étaient à craindre. Quand la piste fut redevenue tout à fait sûre, ils se rejoignirent, et Philippe reprit aussitôt :
         - Je suis plus vieux que toi, Rafaelète ! Voilà plus longtemps que je roule, j'en ai souffert des misères de toutes sortes, eh bien ! Crois-moi, il n'y a pas de plus beau métier que le nôtre. Il est dur: c'est le plus dur de tous, mais je suis libre, parce que j'aime mon métier. Et puis, je respire dans le Sud, tandis que j'étouffe à Alger ; je marche ; je dépense ma force ; je vois du nouveau tous les jours. Et il y a encore autre chose que je ne peux pas te dire... le pays, l'air, le soleil... est-ce que je sais, moi ?..
         Alors Philippe s'exaltant se mit à lui parler du Sud, comme de son pays d'élection. Il confia à Rafaël qu'il écrivait sur son calepin une espèce de journal de ses étapes et de ses aventures. Quand il s'ennuyait, il montait sur son chariot et il relisait tout cela.

         Rafael s'étonnait bien un peu de ces fantaisies. Mais, dans tout ce que Philippe disait du métier, il reconnaissait des choses que lui-même pensait confusément et qu'il n'avait pas su exprimer jusque-là. Il aimait davantage ce camarade qui s'unissait à lui dans un même amour pour leur labeur quotidien, et, en même temps, il éprouvait un sentiment vague de respect pour ce grand garçon aux yeux clairs, qui savait écrire et parler comme dans les livres. La marche des chariots s'était ralentie encore. La lune venait de se cacher.
         L'ombre emplissait l'étendue des terres. Ils ne se parlaient plus. Ils allèrent ainsi, songeant tous deux, pendant un long temps.
         Soudain Philipe envoya un coup de fouet vers l'attelage, et il dit à Rafaël :
         - Crois-moi, Rafaelète, fais ton métier sans penser à autre chose et, le plus tôt que tu pourras, marie-toi !
         Rafaël, abasourdi de ce conseil inattendu, riposta en riant
         - Mais toi, qui parles si bien, pourquoi est-ce que tu ne te maries pas ?...
         - Moi, j'ai mal compté ! J'ai trop couru quand j'étais jeune, j'ai cru que ce serait toujours pareil, toujours des femmes et des noces !... Si j'avais voulu me marier avec la fille de mon premier patron, je serais riche aujourd'hui. Maintenant il est trop tard, je suis trop vieux !
         Rafael se récria:
         - Oui, j'ai trente-sept ans, dix ans de plus que toi !

         Il se tut encore. Mais la confiance que lui témoignait Rafael l'enhardit à parler : - Et pourtant, il y en a une !... Elle m'aime, celle-là, je suis sûr qu'elle m'aime ! Je n'aurais qu'un mot à dire, et je l'aurais !... Mais c'est une enfant pour moi : elle a dix-huit ans ! Je l'ai vue grandir.
         Quand elle était toute petite, elle était tout le temps chez nous. Je l'ai fait sauter sur mes genoux, et, à chaque voyage, je lui rapportais des oranges et des dattes de Ghardaïa. Est-ce que j'oserais me marier avec elle, maintenant ?...Et pourtant, Rafaelète ! je te le jure ! je suis sûr qu'elle m'aime ! Je ne suis pas plus tôt de retour à Alger qu'elle arrive à la maison, et, à lui regarder les yeux, je vois bien qu'elle ne pense qu'à moi. Elle me suit à distance dans les rues ; je la retrouve jusqu'aux portes de l'écurie ; et, quand je suis parti, c'est elle qui lit mes lettres à ma mère... Elle est jolie, si tu savais ! Tiens ! regarde son portrait !
         Philippe tira un portefeuille de son gilet, et, s'approchant de la lanterne, il montra à Rafael une photographie enchâssée à l'intérieur de la couverture. Il ne se lassait point de la contempler.
         - Elle m'aime, reprit Philippe: voilà plus de deux ans que je m'en doute. Quand elle est près de moi, je sens qu'elle souffre et qu'elle voudrait parler. Moi. je n'ose rien dire et je repars pour Laghouat, toujours plus triste à cause de la peine que je lui fais... A chaque retour, je me donne ma parole que nous nous marierons. Je sens que nous serions bien heureux ensemble...

         Et puis le courage me manque, j'ai peur pour plus tard, parce que vois-tu, Rafaelète, j'ai des cheveux blancs, moi !
         - Tout de même, tu as déjà les marguerites sur le front !... Mais si tu l'aimes, marie-toi, - insistait Rafaël, qui ne comprenait rien à ces hésitations. - Tu as plus de jeunesse et de force qu'il n'en faut pour contenter une femme. Ça serait un peu drôle qu'un homme comme toi ait peur d'une petite fille de dix-huit ans !...
         Philippe ne répondit pas. Il alla s'installer sur le rebord du chariot, et il resta ainsi, les jambes pendantes, sans plus rien dire.
         Rafael continua à marcher. Il éprouvait une joie égoïste à se sentir plus jeune que son camarade, mieux fait pour être aimé, et il se rait à songer à son mariage comme à une chose possible et peut-être prochaine. Il s'imaginait avec une fiancée, dont il essayait de retrouver la figure parmi les jeunes filles qu'il avait connues. Mais il avait trop peu l'habitude de ces idées pour s'y tenir bien longtemps. Des images de plaisir l'entraînèrent.

         Il vint s'asseoir à côté de Philippe. Il était passé quatre heures, l'aube allait vernir. Les roches dures de Guelt-es-Stel barraient la vue comme un mur. Dans le ciel matinal, une étoile blanche, d'un éclat éblouissant à l'œil brillait presque au ras des crêtes. Ses rayons lui faisaient une tige de diamant qui la portait. Elle se balançait aux faibles souffles du vent, et l'on aurait dit une fleur qui aurait poussé sur la montagne.
         Auprès de Philippe silencieux, Rafaël sentait son énergie grandir avec la chaleur du soleil qui montait. Il se leva précipitamment dans le tumulte de son sang. L'haleine du sirocco tout proche troublait les flammes rouges au bord du ciel. La lumière naissante soulevait les formes, des choses et, du côté de l'orient, des nuages amoncelés s'étendaient en images géantes.

         Au jour, ils joignirent le caravansérail. Mais ils ne firent qu'y passer et ils -se hâtèrent d'arriver au Puits Baba, où Bacanète voulait déjeuner.
         On fit boire les mulets. Bacanète, ravi d'avoir gagné une étape, était encore plus gai que de coutume. Devant le gourbi où l'Espagnol de Carthagène les servait, ils burent du vin de Médéa et, au dessert, des Arabes des tentes voisines leur apportèrent du café dans de petites tasses.
         Malgré la marche forcée et le sirocco qui alourdissait l'air, Rafael retrouvait toute sa vaillance de la veille. Depuis le lever du jour, les idées de Philippe s'éclaircissaient dans sa pensée.

         Peu à peu, le souvenir de cette soirée s'effaça de son esprit, et sa conduite n'en parut pas modifiée. Mais une conscience plus nette accompagna son travail et en doubla pour lui le plaisir" Il aimait son chariot, comme s'il participait à sa propre vie. Sa force s'associait à l'effort du timon, au labeur obstiné des roues énormes dont la pesanteur écrasait les quartiers de roche et labourait les sables. Il comprenait le sens des craquements de la charpente, du gémissement des moyeux, et le fardeau du chargement tout entier eût été imposé à ses propres épaules qu'il n'en eût pas mieux senti l'équilibre, ni mieux prévu, dans les passes difficiles, sur quel point allait retomber tout le poids de la masse. Mais surtout il aimait ses bêtes. Sa volonté soutenait leur aveugle instinct. Les yeux fermés, lien qu'au bruit des pas, il devinait le mulet paresseux, qui se promenait sournoisement entre ses traits détendus. Au seul son de sa voix, ils se précipitaient en avant dans les plaines, ils s'animaient contre les pentes des montées ; et lorsqu'il les avait tous " mis d'aplomb " comme il disait, quand les animaux tiraient, avec un bel ensemble, chacun selon sa force et son rang, il se sentait si joyeux qu'il se mettait à chanter.

         Il avait une poigne formidable qui faisait de lui le premier charretier de la route.
         Lorsqu'il posait sa main sur le cordeau pour lancer l'attelage dans une courbe, il sentait avec orgueil la vigueur de son bras courir jusqu'au bout des guides et la petite mule de volée se jeter brusquement à gauche, labourant le sol de ses quatre pieds, l'échiné tendue, tous ses grelots frissonnants.
         Philippe, le sourire aux lèvres, le regardait souvent avec complaisance, tel Rafael, récompensé par son regard, lui devenait chaque jour plus ami.

         Le soir qu'ils arrivèrent à Djelfa, leur café bu, tandis que Bacanète était à muser à l'écurie, il dit à Philippe qui commençait une lettre sur la table desservie :
         - Tu devrais bien me rapprendre à écrire !.. Je n'ai jamais su beaucoup, du temps que j'étais à l'école, mais je crois qu'avec toi...
         Philippe demanda de nouvelles feuilles de papier. Il remplit pour Rafaël toute une page d'une grosse écriture, comme les modèles qu'on donne aux enfants, et il lui mit la plume dans la main. Mais les doigts gourds, dont le tact s'était émoussé, n'arrivaient pas à la saisir. Rafael se dépita tout de suite.
         - Allons ! essaye, dit Philippe... si tu crois tenir un manche de fouet !...
         Il lui plaça les doigts et lui guida la Main un instant. Au bout de deux lignes, Rafaël m'en pouvait plus, de grosses gouttes de sueur lui perlaient au front.
         - Assez ! Philippe ! la tête m'éclate, je vois tout rouge..
         Mais Philippe, d'un geste autoritaire, étendit sa large main sur la table :
         - Il faut que tu fasses ta demi-page aujourd'hui... Autrement tu restes bourricot toute ta vie !

         Bacanète rentra sur ces entrefaites. Jaloux de voir que Rafael se mettait écrire, il commença à le gouailler. Philippe tint ferme. Il remit la plume dans la main de Rafael :- Laisse-le dire, Rafaelète ! Il voudrait bien en faire autant.
         Bacanète finit par s'asseoir en face d'eux. Ses deux coudes sur la table, il les regardait, bouche ouverte, avec une curiosité d'enfant. Quant la demi-page fut terminée, il dit au Grand-Philippe :
         - Il faut que tu ne sois pas malin, toi !... Moi, si je savais lire et écrire, je serais millionnaire aujourd'hui.

         Dès lors, chaque fois qu'on arriva d'assez bonne heure au caravansérail, comme la route, cette fois, n'était pas fatigante, Rafaël reprit obstinément sa leçon d'écriture.
         Philippe montrait une grande patience, et, quand l'autre était las; il lui racontait, pour le reposer, une de ces histoires romanesques dont il avait la mémoire pleine ; car, à chaque départ d'Alger, il emportait des livres dans son caisson. Presque toujours, il lui parlait avec tristesse de la petite fille qu 'il aimait.

         Rafael éprouvait pour Philippe une affection qu'il n'avait jamais eue pour aucun de ses anciens camarades, ni Pépico, ni Cecco le Piémontais. Il voyait bien que ce sentiment était quelque chose d'infiniment plus sérieux, et cependant il se rendait compte aussi que jamais il n'arriverait à ressembler à Philippe et qu'il y avait en lui des choses qu'il ne pourrait jamais comprendre. Il le lui dit un jour, chemin faisant.
         - Vois-tu, Philippe, tu auras beau faire, tu ne seras jamais un de nous autres !
         Il ne s'expliqua pas, car son camarade ne répondit rien et parut souffrir beaucoup de ce qu'il avait dit.
         Ce voyage fut véritablement la grande étape dans la vie de Rafael. Quand il redescendit de Laghouat, tout lui sembla changé autour de lui. Il voyait tout avec d'autres yeux.

         Plus rien au monde n'existait pour lui que le chariot car enfin, sans son chariot, existait-il seulement, lui, Rafaël ?
         Et si les autres le prisaient si haut, comme Philippe, n'était-ce pas parce qu'il savait conduire des bêtes? Quelque chose de solide lui apparaissait maintenant, autour duquel toute sa vie allait prendre forme. Le reste n'était rien, - les femmes, les noces, les révoltes de son sang et de sa colère. Tout cela passait, apportant moins de plaisir que de regrets. Il se sentait plus sage et il souhaitait de revoir sa mère.

         Sitôt de retour à Alger, Philippe l'entraîna au théâtre où l'on jouait en matinée ces Trois Mousquetaires, dont ils avaient lu l'histoire ensemble. Rafael y emmena son frère Juanète avec la tia Rosa qui, jadis, avait été très friande de spectacles, et qui, depuis la mort de Ramon, en était privée.
         Elle pleurait aux endroits pathétiques et s'indigna contre Rafael, qui riait de ses larmes, et qui ne pouvait admettre qu'on s'attendrît à ce point pour des choses qui n'existaient pas. Même le roman, qui lui avait tant plu à la lecture, lui apparaissait maintenant, sur la scène, comme une ridicule parodie.

         Philippe, au contraire, était très pris par le drame. Aussi, le soir, voulut-il absolument que Rafael vînt voir Carmen, la pièce favorite des Espagnols. Rafael se passionna à cause du nom de l'héroïne et des souvenirs qu'elle lui rappelait. Cependant, quand, la toile tombée, ils descendirent les degrés du théâtre, il éprouva comme un soulagement à se retrouver au milieu de la foule, des tramways et des voitures qui filaient sur la chaussée. Philippe, grisé par la musique, fredonnait la chanson moqueuse de la gitane.
         L'amour est enfant de Bohême...
         Mais Rafael l'interrompit brusquement avec un geste de dédain :
         - Tout cela, vois-tu, Philippe, ça ne vaut pas une nuit de Bougzoul !...

Louis Bertrand




LE PATAOUETE
Par M. Bernard Donville
                Chers amis, Bonjour aux fidèles

            Je vous ai reservé beaucoup de sports sur les pages du lundi de l'Echo d'Alger et même si maintenant à votre âge vous vous dites il tape à coté de la plaque le Bidi il me semble que ça doit vous contenter .
            Mais je compense avec quelques nouvelles de l'enseignement et des examens ; n'était ce pas une bonne époque d'attendre les résultats bien entouré?

            Je poursuis les divertissements annoncés par l'Echo d'Alger par les spectacles et bien évidemment par le plus populaire d'entre eux qui restait le cinema. Mais n'oublions pas les tournées théatrales et j'ai réservé une page aux artistes de chez nous. N'oubliez pas de vous plonger dans les fêtes de fin d'année et retrouvez, peut être, un réveillon qui vous aurait marqué.
            Bonne lecture et amitiés
            Bernard Bernard : bernardonville@free.fr
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A SUIVRE


La Légion, l'honneur et la légende
À travers près de deux siècles d'histoire, voici un voyage au bout du courage, jalonné de combats héroïques et peuplé de personnages mythiques.

Presque un an, jour pour jour, après la publication de l'ordonnance de Louis-Philippe instituant " une légion composée d'étrangers " avec la possibilité - qui prévaut encore aujourd'hui - de s'engager sous " une identité déclarée ", cinq bataillons étrangers sont arrivés en Algérie, en renfort des troupes françaises, soit 78 officiers et 2669 sous-officiers et légionnaires. Des Suisses, des Allemands, des Espagnols, des Sardes, des Italiens, des Belges, des Hollandais. Ce 23 mai 1832, aux portes d'El-Harrach (Maison-Carrée) après un violent affrontement avec une tribu arabe, le lieutenant Louis Châm a le triste privilège d'être le premier officier de la Légion mort au combat.
Prisonnier puis égorgé pour avoir refusé de se convertir à l'islam, précise Patrick de Gmeline dans sa Nouvelle histoire de la Légion étrangère. Plus tard, d'autres gradés et légionnaires perdront la vie face aux cavaliers d'Abd el-Kader. En juin 1835, à Moulay-Ismaël d'abord, puis à la Macta, près de Mascara, les attaques sont fulgurantes et massives. Les Polonais et Italiens qui ouvrent la route à la colonne des chasseurs d'Afrique succombent sous l'assaut des 8000 guerriers de l'émir.
Bilan : une centaine d'hommes de troupe et deux officiers tués. Mais le sang que les soldats étrangers versent, ce jour-là, pour la France et la bravoure dont ils font preuve vont associer définitivement la Légion aux valeurs de courage, d'abnégation et de discipline qui transparaissent au fil des pages du livre de Patrick de Gmeline.

D'autant qu'à leurs qualités de guerrier, les soldats ajoutent celles de bâtisseurs " Au point que certains de leurs ouvrages sont considérés encore aujourd'hui comme des constructions historiques, tel le tunnel du Légionnaire, à Foum Zabel, au Maroc ", ou comme la chaussée de la Légion, route reliant Douera à Boufarik, surélevée à 2 mètres au-dessus d'une zone marécageuse.
Cette première Légion, qui forge sa réputation en Algérie, n'a pas le temps de s'y enraciner. En 1835, une guerre de succession en Espagne contraint la France, liée par un traité d'assistance, à céder ses régiments étrangers en leur retirant drapeau et cocarde tricolores.
Les légionnaires, dont le récit des exploits au Maghreb a traversé la Méditerranée, sont accueillis aux cris de " Vivan los Argelinos ! " ("vive les Algériens !").
Mais, peu à peu, l'enthousiasme s'éteint, brisé par les défaites. Les combats meurtriers déciment les rangs des " vaillantes troupes " offertes par la France.
En 1839, elles disparaissent, rentrent au pays. Oubliées. Remplacées ! Car, en décembre 1835, alors même qu'il cédait sa première Légion à l'Espagne, Louis-Philippe en avait créé une autre par une seconde ordonnance. Une nouvelle Légion qui volait de victoire en victoire.

La Légion à Mostaganem contre Abd el-Kader
(aquarelle du musée de la Légion étrangère, Aubagne).

Le 13 octobre 1837, c'est la prise de Constantine. Au corps-à-corps ! Puis le col de Mouzaïa, Médéa, Miliana... Des combats remarquablement détaillés par Patrick de Gmeline. Des personnalités se révèlent dans le fracas de ces batailles : le lieutenant- colonel Patrice de Mac Mahon, commandant du 2° régiment de la Légion, futur maréchal de France et président de la République (en 1873) ; le duc d'Aumale, fils de Louis-Philippe, promu général à 20 ans, commanda la prise de la smala d'Abd el-Kader, qui lui permit de faire 4000 prisonniers. Pierre-Napoléon Bonaparte, neveu de l'Empereur, ou encore le colonel Jean-Luc de Carbuccia, chef de bataillon à 33 ans, cité à l'ordre de l'armée, l'un des vainqueurs de Zaatcha " où l'horreur répondit à l'horreur ".
Celui-ci préconise l'utilisation de dromadaires par l'infanterie. Il utilise ses compétences d'archéologue pour entreprendre, de 1848 à 1851, des fouilles à Lambèse, ancienne capitale romaine de la Numidie militaire. Il ordonne la restauration de la colonne édifiée à la mémoire du préfet Quintus Flavius Maximus, légat de la légion III Augusta, en y faisant graver l'inscription suivante: " Le colonel Carbuccia à son collègue de la IIIe légion romaine. " Puis il défile avec ses hommes devant le monument. Sous le commandement de Carbuccia, la Légion continue à percer des routes. Notamment celle reliant Sidi Bel-Abbès à Oran. Sidi Bel-Abbès, maison mère de la Légion étrangère de 1843 jusqu'au 24 octobre 1962.

Désormais, c'est de Sidi Bel-Abbès via Oran que la Légion s'embarquera pour les nombreuses campagnes qui jalonnent son histoire. La Crimée, contre les Russes, de 1854 à 1856, l'Italie, contre les Autrichiens, en 1859. Et le Mexique où, le 30 avril 1863, se déroule la bataille de Camerone commémorée chaque année par toutes les unités de la Légion. Soixante-deux légionnaires et leurs trois officiers retranchés dans une hacienda en ruines face à 2000 Mexicains. Encerclés, à court de munitions, refusant de se rendre, les trois officiers vont mourir, l'un après l'autre. Danjou, 35 ans, le premier. Villain, 26 ans, trois heures plus tard. Grièvement blessé, le sous-lieutenant Maudet, 33 ans, succombera dans les jours qui suivront.

Dans les années 1930, les légionnaires du siècle passé honorés parleurs héritiers.

A travers la photo, le cinéma, les documentaires, la télévision, la Légion a toujours su faire sa publicité


En 1867, quittant le Mexique, la Légion se recueille à Camerone. Le général Jean-ningros, six fois blessé au feu, adresse un dernier adieu aux officiers et soldats morts au champ d'honneur. " Votre souvenir ne s'effacera plus de nos cœurs et, un jour, si la France et notre empereur avaient besoin de nous, nous saurions, comme vous, vaincre ou mourir. " Leur courage et leur ardeur ne suffiront pas... Trois ans plus tard, en 1870, la France déclare la guerre à la Prusse et envoie au combat spahis, chasseurs d'Afrique, zouaves, tirailleurs... Mais point de légionnaires : les Allemands représentent 20 % des effectifs ! Après la défaite de Reichshoffen, qui scelle, le 6 août 1870, le sort de l'Alsace et de la Lorraine, annexées par la Prusse, la France décide de lever un bataillon pour incorporer les volontaires européens qui souhaitent se battre. Ils recevront leur baptême du feu à Artenay, près d'Orléans. Mais leur courage et leur ardeur au combat ne suffiront pas.

L'armistice est signé le 26 janvier 1871.

Le 1er mars, les Prussiens entrent dans Paris. La Légion embarque à Toulon et rentre à Sidi Bel-Abbès où les Alsaciens et les Lorrains se pressent au bureau de recrutement.
Déjà, l'aventure tonkinoise se profile sous les encouragements de Jaurès et de Ferry. Le 8 novembre
1883, les légionnaires débarquent au Viêtnam.
Le 7 décembre, deux compagnies du 2e bataillon et une compagnie de tirailleurs tonkinois occupent la citadelle de Tuyên Quang. Les hommes sont malades. La dysenterie fait des ravages.

À partir du 23 novembre 1884, ils sont assiégés par plusieurs milliers de Chinois dont 2000 " pavillons noirs ", des milices de coupeurs de têtes. La garnison compte 620 soldats français dont 390 légionnaires et leurs trois officiers. Trois mois de combats. La Légion va inscrire une nouvelle page de gloire à son histoire.
Puis c'est le Dahomey, de 1892 à 1894, face aux féroces amazones du roi Behanzin. Le Soudan, ensuite. Madagascar, plus tard. Les Balkans, le Maroc avec la guerre du Rif conduite par Abd el-Krim, la Syrie de 1921 à 1939 et la Seconde Guerre mondiale avec la fameuse 13e demi-brigade de Légion étrangère (136 DBLE) engagée dans les combats de Narvik, en Norvège, puis dans le désert d'Afrique du Nord, à Bir Hakeim et à El-Alamein.
L'Indochine, enfin, où la Légion va perdre, de 1945 à 1954, plus de 10 000 hommes: 309 officiers, 1082 sous-officiers et 9092 caporaux et légionnaires. Patrick de Gmeline décrit avec force et émotion les grandes pages de l'aventure indochinoise de la
Légion : les crabes amphibies du 1er régiment étranger de cavalerie, les paras des 1er et 2e bataillons étrangers de parachutistes, Cao Bang, la sanglante RC4, et Diên Biên Phu...

Puis, avant d'évoquer les trente dernières années, du Tchad au Cambodge via le Zaïre et Kolwezi, l'auteur raconte l'Algérie avec un rappel à la mémoire du charismatique colonel Jeanpierre, chef de corps du 1er régiment étranger de parachutistes (le 1er Rep), mort à 46 ans, le 29 mai 1958, dans la chute de son hélicoptère abattu dans la région de Guelma. Il revient sur la semaine des barricades, le putsch des généraux, la rébellion du 1er REP conduit par Hélie Denoix de Saint Marc. La prison pour ces officiers de la révolte. La fin d'un monde.
Jean-Pax Méfret

Nouvelle Histoire de la Légion étrangère, de Patrick de Gmeline,
Perrin, 5930 pages, 26€.

Valeurs Actuelles - 17 novembre 2016

Le 30 avril 1863
CAMERONE
C'est en février 1862 que Napoléon III s'enfonce dans le guêpier mexicain.

Un accord est intervenu entre Juarez, d'une part, l'Angleterre et l'Espagne, de l'autre. Elles décident de rembarquer. L'amiral lurien de La Graviere qui avait adhéré à l'accord est désavoué par l'empereur. Celui-ci, définitivement acquis a son idée de grand empire catholique et latin, " la plus grande pensée du règne ", dira Rouber a la tribune du Corps législatif donne pleins pouvoirs au chargé d'affaires Dubois de Saligny et envoie un renfort de 4 500 bommes commandés par le général Lorencez. La France est désormais seule. Lorencez, dont l'objectif est Mexico, est arrêté en mai par la résistance de " Puebla l'arrogante " et doit battre en retraite
L'échec est vivement ressenti en France. Au Corps législatif Jules Favre évoque les origines troubles de l'entreprise. Napoléon III s'obstine : " Notre honneur militaire engage, l'exigence de notre politique, l'intérêt de notre industrie et de notre commerce... " Il envoie au Mexique le général Forey avec 23 000 bommes. Forey met en avril 1863 le siège devant Puebla ou Bazaine va se rendre célèbre. La ville tombe en mai (ce qui vaudra a Forey et peu après à Bazaine le bâton de maréchal), ouvrant la route de Mexico. Entre-temps s'était déroulée une de ces glorieuses batailles perdues dont la France est si riche.

En avril 1863, les 28 000 hommes de Forey assiègent Puebla, a trois étapes de Mexico, et ils attendent impatiemment un immense convoi qui doit leur apporter plusieurs millions en or, toutes sortes de provisions de guerre et, surtout, les canons lourds absolument nécessaires pour détruire les remparts de la ville, énergiquement défendue. La colonne, formée à Veracruz, devra d'abord traverser les inhospitalières Terres Chaudes par l'unique et dangereuse route qui mène à Puebla. Les Terres Chaudes sont infestées de volontaires mexicains, les " guérilleros", qui vivent en sécurité dans les forets profondes ou nous sommes trop faibles pour les traquer, en sortent soudain pour harceler et détruire nos lentes processions de chariots et de mulets et disparaissent en un clin d'œil, leur coup fait, au galop de leurs petits chevaux. Le corps expéditionnaire périrait, si le ravitaillement n'arrivait pas. La garde de notre ligne de communication, a travers les Terres Chaudes, est donc d'une importance capitale et il ne faut pas s'étonner que l'on ait confié cette mission, obscure mais vitale, à une unité d'élite, le régiment étranger, ancêtre de la légion étrangère.
Tandis que la colonne de ravitaillement sort de Veracruz, tous les postes disséminés le long de la ligne de communication s'agitent. Ill faut se renseigner sur les guérilleros qui sont certainement aux aguets, les tromper, les attirer ailleurs, les retarder, les battre s'ils attaquent. Entre autres mesures, le poste de Chiquihuite enverra une compagnie au-devant du grand convoi, jusqu'a Palo Verde, qui est à 24 kilomètres à l'est. C'est a la 3e compagnie du 1er bataillon du régiment étranger qu'échoit cette mission. Elle est commandée par le capitaine adjudant-major Danjou, un brave qui a perdu la main gauche en Crimée, mais n'a cessé de servir que le temps de se faire ajuster une main de bois articulée. Un magnifique soldat au port altier, au regard clair et fier sous un front haut et droit. Un chef expérimenté et intelligent, un entraineur d'hommes que ses soldats suivraient jusqu'en enfer.
La compagnie ne compte que deux autres officiers, les sous-lieutenants Vilain et Maudet, ce dernier, porte-drapeau du régiment, et 62 hommes de troupe.
C'est très peu pour assurer, dans un tel pays, la sécurité d'un tronçon de route de 24 kilomètres.

Capitaine Danjou : " Vous, légionnaires, vous êtes soldats pour mourir. Je vous envoie où l'on meurt."
(Cette phrase ne fut pas prononcée par le Capitaine d'Anjou mais par le Général de Négrier qui avait servi dans la Légion, en 1883, lors des préparatifs de l'attaque de Bac Ninh, aux légionnaires des 1er et 2ème bataillon de la Légion étrangère. Ndlr) (1)

UN CRI : ALERTE !

Le capitaine Danjou quitte Chiquihuite a une heure du matin. Il s'arrête a peine au poste de Paso del Macho (le pas de la Mule) ou il refuse une section du renfort. Qu'importe, que l'on soit soixante ou quatre-vingts, quand il faudrait être mille.
Il repart, au milieu des ténèbres, traversant en aveugle la forêt, serrant sa petite troupe pour avoir tout son monde sous la main en cas de surprise. Ils marchent depuis longtemps quand, au lever du soleil, ils arrivent devant un village abandonné, une douzaine de cases indiennes couvertes de chaume, deux maisons inhabitées et une ancienne " hacienda ", une grande auberge, un peu mieux conservée que le reste, dont le toit de tuiles rougeoie sous les rayons du soleil. C'est Camerone. Apres l'avoir fouillé, ils repartent et arrivent vers sept heures à Palo Verde sans avoir rencontre âme qui vive. La petite colonne s'arrête, déploie des sentinelles et allume le feu pour le café.
Soudain, un cri retentit : " Aux armes ! L'ennemi ! "
En quelques minutes, la 3e compagnie est sous les armes, prête a tout, et attend les ordres de son chef qui a réfléchi. Danjou ignore que le colonel mexicain Millan était dissimule dans la foret à huit kilomètres au nord de la route, avec 800 cavaliers et 1200 fantassins, qu'il a promis au général Ortega, le défenseur de Puebla, que les canons de siège qui démantèleraient les remparts de la place n'arriveront jamais à pied d'œuvre. Par ses espions il a suivi la marche de la compagnie et veut l'anéantir. Danjou devine rapidement la situation. Sa décision est prise. Il s'agit d'empêcher l'ennemi d'attaquer le convoi. La compagnie se met en marche vers Camerone, en s'écartant de la route. Elle progresse à la lisière de la forêt, le long des marécages ou la cavalerie ne pourra charger. L'ennemi à disparu aussi brusquement qu'il était venu. Voici la " 3 " arrivée au seuil du désert de Camerone. Prudence. Des éclaireurs partent en avant.

UNE BALLE SIFFLE

Un sifflement déchire l'air. Un homme tombe. La première balle de la journée vient d'être tirée. Le coup de feu est parti d`une des maisons de Camerone. Au pas de course, la compagnie fonce sur le village, le cerne, y pénètre, le fouille. Les Mexicains l'ont déjà abandonné. On repart. A peine a-t-on fait 300 mètres que les cavaliers ennemis sortent de tous les replis du terrain, des lisières de la forêt, des buissons. Il y en a partout. Avec précision et promptitude des vieilles troupes, la compagnie forme le carré. L`adversaire s'est déployé en un cercle qui se resserre petit a petit, lentement, inexorablement.
" Vous ne tirerez qu'à mon commandement ", ordonne Danjou d'une voix calme. Il a rapidement évalué les effectifs ennemis. Il sait qu'il combat a un contre quinze, mais la partie n'est pas désespérée. Enfin, les Mexicains chargent. Ils ne sont plus qu'a 80 mètres, 60 mètres. Le capitaine Danjou se tait.
Il attend jusqu'a ce que le plus mauvais tireur de la compagnie fasse surement mouche : 50 mètres.
" Feu ! "
Une épouvantable décharge ébranle l'air, suivie du crépitement discontinu du tir à volonté. L'effet en a été foudroyant. Tout ce qui reste, c'est un mince anneau d'hommes inertes et de chevaux couchés. Les autres ont tourné bride et fuient sous le feu qui les poursuit. Ils se reforment, reviennent encore une fois a la charge, vigoureusement. Ils sont de nouveau décimés et rejetés.
Entre-temps, Danjou, qui a gardé la raison froide, réfléchit. Pour retarder un ennemi aussi puissant et l'empêcher d'attaquer le convoi, le mieux est d'atteindre l'hacienda de Camerone.
C'est un bien misérable abri, mais c'est le seul. Derrière ses murs branlants, les pertes seront moins lourdes et on gagnera peut-être le temps nécessaire a l'arrivée d'un secours. Il faut faire une trouée de 300 mètres, a travers la cavalerie ennemie, et, peut-être, prendre d'assaut le bâtiment.
Danjou pointe son épée dans la direction du village.

" En avant, et vive l'empereur ! "
Devant la herse de baïonnettes fulgurantes qui se précipite sur eux, les Mexicains s'écartent en désordre.
La compagnie parvient à l'hacienda... qui se compose d'une cour carrée, un corral d'environ 50 mètres de coté, entouré d'un mur de 3 mètres de haut. A la face nord qui longe la route est adossée l'auberge, un corps de bâtiment partagé en trois chambres. Sur le coté ouest, deux grandes portes cochères. Intérieurement, de vieux hangars délabrés, s'appuyant contre la clôture. Jumelée avec Bône avant 1962.
Il faudrait tout occuper et faire jaillir des quatre faces de cette construction une nappe de feux continue, sans fissure.
Hélas ! Il n'y a pas assez de monde pour cela et d`ailleurs, des guérilleros sont déjà retranchés dans deux des trois pièces de la maison et maitres de l'escalier conduisant à l'unique étage. Les en chasser ? On y laisserait toute la compagnie. Tant pis. On verra bien plus tard.
Deux escouades occupent la seule chambre restée libre, à l'angle nord-ouest. Deux autres gardent les grandes portes. Une cinquième défend une brèche que l'on vient de découvrir dans le mur, à l'angle sud-est de la cour et par laquelle l'ennemi pourrait s'infiltrer, homme par homme, dans un des hangars. Le reste, en réserve, entre les deux portails, prêt à se porter sur tout point menacé. Quelques hommes montent sur les toits et surveillent l'ennemi.
On comprend toute la faiblesse de ce fortin improvisé, ouvert à peu près partout et où l'ennemi à déjà pris pied. Une des chambres qu'il occupe a une fenêtre donnant sur le corral, par laquelle il peut tirer presque à bout portant sur tout Français qui le traverse. Or il faut le traverser pour aller d'un poste à l'autre. Si précaire que soit ce refuge, tout en le barricadant et en le renforçant, on souffle un instant.
Mais aussitôt la faim et la soif oubliées dans la fièvre de l'action assaillent ces hommes qui, depuis la veille, n'ont rien mangé, n'ont bu qu'un peu d'eau, le matin.
Le soleil est déjà accablant, l'air suffocant. Il est seulement neuf heures et demie.
Honteux de sa force, le colonel Millan, qui à l'âme d'un gentilhomme, voudrait éviter une lutte inégale ou il n'a aucun honneur à gagner. Sur son ordre, un de ses officiers crie au sergent Morzicki, qui est de guet sur un toit :
" Dites à votre capitaine, de la part du colonel Millan, qu'il n'a plus qu'à se rendre. "
Puis il ajoute, un ton plus bas, d'homme à homme, d'une voix que l'émotion trouble :
" Vous avez assez prouvé ce dont vous êtes capables, que diable ! Il est des défaites auxquelles il faut se résigner. "

Le sergent transmet la sommation à son chef. Calmement, énergiquement, mais sans forfanterie, Danjou prononce ces mots :
" Dites-leur que nous avons des cartouches. On nous aura seulement quand nous serons tous tués. Tous ! "
Puis, tourné vers le corral, il élève la voix pour que tous les soldats l'entendent :
" Mes enfants, défendez-vous jusqu'a la mort ! "
Des quatre coins de la cour, soixante voix répondent :
" Mon capitaine, jusqu'a la mort ! Nous en faisons le serment ! "

" Le serment ". Camerone. 30 avril 1863. Plus qu'un grand combat ; l'immolation de martyrs de l'honneur.

UNE LUTTE SANS PITIE

Alors, l'assaut commence, sur les quatre faces a la fois. Les Mexicains attaquent à pied. Mais leurs masses compactes viennent se briser et s'écrouler contre le mur d'enceinte où ceux qui ont échappé aux balles tombent, percés de baïonnettes. Non sans pertes de notre coté. Le sergent-major Tonnel, qui se bat comme un lion, dans la chambre d'angle, meurt en hurlant :
" Allons, les enfants ! Courage ! Pour la France et l'honneur de la 3e ! Vous savez la consigne... Jusqu'à la mort ! "
Mais le plus grave danger est au cœur même de la place. Les Mexicains ont percé de meurtrières les deux chambres qu'ils occupent depuis le début et même celles de l'étage, qu'ils ont envahies.
De ces ouvertures, de la fenêtre et même du toit, un feu d'enfer balaie le corral. Deux fusiliers y sont gravement atteints.
Il y a plus d'une heure que dure cette lutte inégale, lorsque la grande voix de Danjou retentit de nouveau :
" Mes enfants, jurez de lutter tant qu'il y aura un homme debout ! "
D'un seul cri, si formidable que pendant plusieurs secondes l'ennemi cesse de tirer, par peur ou par respect, tous les hommes prêtent serment :
" Nous le jurons ! Oui, jusqu'a la mort ! "

On pourrait vraiment croire que le capitaine Danjou a vu la mort arriver et que son dernier mot est un testament sacré : à peine l'écho de ce vœu solennel s'est-il tu qu'il tombe, au beau milieu de la cour qu'il traversait en brandissant son épée.
Une balle l'a frappé en plein cœur. Le regard tourné vers le ciel, il meurt en quelques secondes, dans les bras du sous-lieutenant Maudet, accouru pour le relever.

La Légion : " ... de cet ensemble indéfinissablese dégagent une énergie de fer, l'instinctive passion des aventures, une étonnante fécondité d'initiatives, un suprême dédain de la mort, et toutes les originalités sublimes des vertus guerrières. "

Le sous-lieutenant Vilain prend le commandement. La situation s'est aggravée. Par des trous percés dans les murs et le plafond, les Mexicains tirent maintenant presque a bout portant sur les défenseurs de la chambre d'angle, qui doivent l'évacuer.
Sur les 15 hommes qui y étaient entrés, il n'en sort que 6, presque tous blessés. Les Français n'ont plus, pour s'abriter, que les hangars en ruine. En très peu de temps, une demi-douzaine d'entre eux tombent encore.
Soudain, un espoir fou les redresse. Dans le lointain, on entend des tambours battre, des clairons sonner. Serait-ce une colonne de secours venue de Paso del Macho ?
Hélas ! L'illusion ne dure pas longtemps. Ce sont les renforts ennemis.
Les ennemis sont maintenant 2000. Il va falloir se battre à un contre quarante ou cinquante. A partir de maintenant, Camerone est plus haut et plus grand qu'un combat.
C'est l'immolation de martyrs de l'honneur. Crevant de faim et de fatigue, le corps déchiré par la soif, aveuglés par le soleil tropical, traqués par le feu de l'ennemi qui a fait de nouvelles brèches, les légionnaires tombent, un à un. Les souffrances des blessés sont atroces et l'on ne peut rien pour les alléger. Quelques-uns d'entre eux boivent leur sang, pour tromper la soif. Mais personne ne pense a se rendre.

Aux plus mauvais moments, le sous-lieutenant Vilain, jeune chef à visage d'enfant, enflamme les courages en montrant, d'un geste de son épée, le corps du capitaine, étendu sur le sol, au milieu d'autres cadavres.

" Vous savez ce que nous avons juré à notre capitaine ! "
Il tombe, un instant plus tard, frappé d'une balle au front.
L'ennemi semble être de plus en plus embarrassé de sa victoire sans gloire. Vers deux heures, ayant aperçu le sergent Morzicki perché a son poste d'observation, le colonel Millan lui adresse, pour la seconde fois, la sommation de se rendre.
Cette fois, Morzicki répond lui-même. Mais, comme il est fou de rage, sa réplique est impolie et si... raide que l'on ne peut la reproduire ici. Au moins, elle ne laisse aucune illusion a l'ennemi.
Il semble que ce dernier ait renoncé à s'approcher des démons français. A cinquante contre un, il va lui falloir encore recourir a la ruse. Il met le feu à la maison et, le vent venant du nord, les flammes lèchent bientôt les hangars et la fumée emplit le corral qui devient une fournaise.
Chacun se cramponne à son créneau ou à sa brèche, seul, séparé des camarades que l'on ne voit plus. Par miracle, l'incendie s'éteint de lui-même et son nuage se dissipe avant que l'ennemi en ait profité pour en venir au corps a corps.
Vers cinq heures, il y a un moment de répit et de profond silence.
Puis les échos d'une voix vibrante, martelée, furieuse, parviennent jusqu'aux légionnaires. C'est le colonel Millan qui exhorte ses hommes. Un soldat traduit sa harangue.
" ll faut en finir. Quelle honte ineffaçable, si nous ne pouvions venir a bout de ces quelques hommes épuisés, qui se meurent déjà ! Il faut se hâter. Au nom de la gloire, de l'honneur et de l'indépendance de la patrie, un dernier assaut. Amenez-moi vivants, pour ajouter à votre triomphe, ces hommes qui vous montrent, après tout, ce que peut une volonté invincible. "
Des applaudissements frénétiques prouvent que l'appel a porté. L'infanterie ennemie se masse, en bataillons serrés. Dans le corral, les survivants, 15 a 20 hommes, se regardent et, spontanément, renouvellent le serment de ne pas se rendre. Les Mexicains se ruent sur la cour. C'est une avalanche irrésistible qui enfonce les portes et déborde par toutes les ouvertures. Le sergent Morzicki et plusieurs hommes se font tuer sur place. A la grande porte, le caporal Berg, dernier et seul défenseur, entouré de cent ennemis, est pris. A la brèche de l'angle sud-est, les caporaux Magnin et Pinzinguer, les fusiliers Kunasseck et Gorki se défendent encore, des pieds et des mains.

LES SIX DERNIERS

Il ne reste bientôt plus que le sous-lieutenant Maudet, avec le caporal Maine et les soldats Catteau, Winsel, Constantin et Léonard. Ils se sont retirés dans les débris écroulés d'un hangar fumant, a l'angle sud-ouest du corral. Ils ne sont plus que six et pourtant, l'ennemi n'ose pas encore les aborder. Ils vont tenir pendant un quart d'heure.
" Tirez toutes vos balles, dit l'officier. Toutes, sauf une que vous garderez. "
Ils en sont vite réduits à cette extrémité.
" Attention! s'écrie alors le porte-drapeau, les larmes aux yeux. Vous tirerez la dernière cartouche à mon commandement, puis vous chargerez a la baïonnette derrière moi. Mes enfants, je vous fais mes adieux. "
Quelques secondes d'un silence poignant, qui trompe les Mexicains. Ils se hasardent hors de leurs abris, avancent dans la cour.
" En joue..., feu ! " commande Maudet.
Puis il s'élance, sabre au clair, au-devant de l'ennemi. Léonard le dépasse, le couvre de son corps, s'abat foudroyé. Winsel, blessé, tombe, se relève. Deux balles atteignent Maudet à la hanche. Il mourra huit jours plus tard, à l'hôpital. Les trois derniers se précipitent sur les baïonnettes ennemies qui les cernent.

" Arrétez ! " crie un officier mexicain.
Du sabre, il relève les fusils de ses hommes.
" Et vous, messieurs, rendez-vous ! "dit-il aux Français.
" Nous nous rendrons, répond l'un d'eux, si vous nous promettez de relever et soigner nos blessés, de nous laisser nos armes et de dire, a qui voudra l'entendre, que nous avons fait notre devoir jusqu'au bout. "
" On ne refuse rien a des hommes comme vous. "
Ce noble adversaire, c'est le colonel Combas. Il prend par le bras deux des légionnaires dont les blessures saignent et les aide à gagner l'ambulance. Ainsi finit la 3e compagnie du 1er étranger, le 30 avril 1863, après neuf heures de combat ininterrompu qui coutèrent a l'ennemi 300 à 400 hommes, soit cinq a six fois l'effectif des Francais.
Leur sacrifice sauva probablement le convoi. Bien qu'il fut parvenu à huit kilomètres des forces du colonel Millan, celui-ci ne l'attaqua pas. Tout se passa comme si le chef mexicain hésitait, après ce combat de géants, devant un nouvel effort.
(Pero no sun hombres, sun demonios ! " (" Mais se ne sont pas des hommes, ce sont des démons"), s'exclama le colonel Combas en découvrant le petit nombre de légionnaires ayant tenu tête à l'armée mexicaine lors du combat de Camerone. Ndlr)

  

L'inscription Camerone 1863 figure sur les drapeaux des régiments de la légion étrangère, suivie de celles-ci :
Artois 1915, Champagne 1915, La Somme 1916, Verdun 1917, Picardie 1918, Maroc 1925-1926.
La première est celle d'une défaite, en somme, subie par soixante hommes. Les autres, celles de victoires remportées par des armées entières. Mais il est des défaites aussi glorieuses que des victoires.



PIERRE NORD
"Le journal de la France" Second empire.
Publication Historia - Taillandier N°59 - année 1970

(1) La campagne de Bâc Ninh, qui se déroula du 6 mars au 24 mars 1884, est une offensive terrestre française contre les troupes chinoises de l'armée du Kouang-Si au nord du Viêt Nam pendant la campagne du Tonkin (1883–86). Bac Ninh a été prise le 12 mars, la victoire française déboucha sur la signature de l'accord de Tientsin en mai et du traité de Hué en juin.
http://tous-les-faits.fr/campagne_de_bac_ninhW

NDLR :
Voici donc l'exemple type d'une guerre inutile déclenchée par un homme mû par des motifs politiques, influencé par les lubies de son impératrice d'épouse et par son ambition d'entrer dans l'histoire à l'image de son oncle.
Une guerre où les hommes meurent sans connaître le but ultime de leur sacrifice et les raisons profondes qui les feront périr, mais qui cependant vont jusqu'au bout.
L'honneur de ces hommes, comme d'autres dans l'histoire de France, fut de mourir pour un drapeau.
Cet acte symbolique, à l'heure où celui-ci est brûlé par des écervelés, sans que ceux qui sont en charge de la nation n'émettent la plus élémentaire condamnation, ni par les mots ni par les actes, devrait porter à réflexion.
Certains trouvent l'épisode de Camerone affligeant de bêtise et dénigrent ces militaires aveuglés par la haine et tombés sous les coups de leur propre violence.
Il est souvent facile douillettement installé dans une société d'abondance, de cracher sur ceux qui font le travail à notre place.
Si nous pouvons vivre aujourd'hui quelques instants de paix, c'est parce que, d'autres, moins lâches ou plus ardents ont répandu leur sang pour ceux qui sont leurs juges à présent, et qui les assomment d'une sentence sans appel.
Partout dans le monde des français tombent au service de la France à la place de nos enfants. Il serait bon de s'en souvenir.
Drapeau, Honneur et Patrie sont devenus des mots désuets et tabous. Nos élites assoupies sur de fausses assurances, rayeront très bientôt ces trois termes, pour écrire un nouveau bréviaire doré sur tranche à l'usage du quidam en état de coma dépassé.

Après la prise de l'hacienda de Camerone, les soldats du colonel Millan ont présenté les armes aux légionnaires survivants.
Au Mexique, lorsque des militaires et même des civils se trouvent aux abords de la " tombe des français ", ils se recueillent brièvement dans la dignité. Cet épisode pourtant douloureux, n'est pas oublié.
Les américains, en tournant " Alamo " ont exalté l'oeuvre héroïque de résistants texans contre l'armée de Santa Anna. Si la situation peut par certains aspects, être comparable, le contexte n'était cependant pas le même.
Chaque américain connait l'histoire du fort Alamo. Qui en France connait Camerone ?
Notre pays deviendrait-il celui de l'oubli ?


LE NID

De Jacques Grieu

NID OUI, NID NON

Quand la vieillesse arrive, on se prend à rêver
D'un petit nid douillet où l'on est bien chauffé.
Protégé des tempêtes et frimas de la vie,
On y serait si bien, attendant l'infini…
Celui qui a construit un nid trop haut pour lui
Risque fort de tomber dès que le vent sévit.
Mais pour le nid-de-pie, plus haut il est perché
Et bien mieux sa vigie verra où se guider…

On adapte son nid à ses propres moyens ;
Ce n'est pas dans un houx qu'est le nid du lapin !
Dans un arbre donné, on ne fait qu'un seul nid,
Trop de promiscuité génère des ennuis.
L'oiseau, sortant du nid, pourtant, connaît son chant
Et n'en changera pas même s'il vit longtemps.
Mais celui qui trop chante a oublié son nid
Et ne sait plus bâtir un véritable abri.

La grande solitude est nid à réflexion,
Souvent nid de serpents ou même de frelons.
Le temps tout lentement, en nous, vient s'insinuer
Et c'est son nid fatal qui finit par nous tuer.
Quand le printemps revient, le coucou pond aussi
Mais il a oublié comment on fait son nid.
Alors il met ses œufs au creux d'une pendule
En répétant son nom sans peur du ridicule.

Ecrire, c'est créer des œufs pour la mémoire
Qu'on dépose en un nid comme dans un ciboire…
Nid par ci, nid par là , cela fait trop de nids :
Il faut s'arrêter là. Et donc... pas de deni !

Jacques Grieu                  


KSAR-HANNOUN
Gallica : Revue de l'Orient 1850/2-pages 339 à 346

LES ANTIQUITÉS DE LA PROVINCE D'ORAN.
SUBDIVISION DE TLEMCEN.

                 Le Ksar de Hannon, une ville carthaginoise

                 Pendant que j'étudiais le site de Bou-Djerar avec Larbi-ben-Zouina, nous fûmes accostés par un petit vieillard a la parole rapide, aux gestes animés, qui lui demanda ce que je faisais. Ce Français est venu pour voir Bou-Djerar, et il cherche des pierres écrites. - Tu n'en trouveras pas ici, me dit-il aussitôt ; il n'y en a jamais eu, Bou-Djerar n'est rien. Mais si tu veux venir à Ksar-Hannoun, je te montrerai et des pierres écrites, et une ville, une grande ville, Medina K'bra. - Ksar-H'announ est-il éloigné lui dis-je. --- Non, il y a de Bou-Djerar à cet endroit la même distance que d'Ouzidan à Bou-Djerar. Je pars en avant. "

                 Mon intention première n'était pas d'aller à Ksar-Hannoun, mais il n'y avait véritablement pas dans l'exploration de Bou-Djerar de quoi défrayer le travail d'une journée, surtout dans la position où j'étais, n'ayant rien emporté de ce qui eût été nécessaire pour en lever le plan. Il était â peine midi, la distance était peu considérable, le nom éveillait en moi des idées qui me reportaient aux plus anciennes époques de l'histoire ; je me décidai à aller jusque-là.
                 L'Arbi me reconduisit à sa tente. Je vérifiai avec lui les renseignements que j'avais sur les limites des Beni-Ouâzan avec les tribus voisines, le nom de leurs fractions, celui des montagnes, des ravins, dis rivières, des sources de leur territoire. Les Arabes n'en revenaient pas de nous voir aussi bien renseignés sur ce qui les touchait de si près ; cela fut l'objet de leurs conversations de tout le jour.
                 Après m'être reposé un instant, je partis avec Ali pour Ksar-Hannoun.

                 Reprenant le chemin de Bou-Djerar, nous vînmes passer près de ce lieu pour monter une pente assez allongée et nous retrouver dans l'immense plaine calcaire avec ses guendons, ses palmiers nains et ses sedra, avec ses horizons aux teintes sombres, aux fonds diaprés de jaune clair et de vert noir, noyés dans les brumes légères qui lui donnent quelque chose de vague. Notre marche est à peu près directement vers l'est. Nous traversons successivement sept ravins avant d'atteindre celui dans le fond duquel coule la source de Ksar-Hannoun. Sur la crête orientale du cinquième, celui de Sidi-Daho, s'élève le marabout de ce nom que nous laissons un peu à droite. On le reconnaît difficilement sur la carte du capitaine Karth, parce qu'il y est orthographié S. Dchou.

                 A l'exception de ce ravin, dans lequel les déchirements par leur peu de profondeur n'ont pu Mettre à découvert les formations argileuses, on les voit apparaître dans tous les autres avec plus ou moins d'énergie. Le septième est remarquable par l'importante étendue de ses berges, qui n'offrent qu'un vaste ensemble de terres cultivées, encore couvertes de chaume abattu. A peine avons-nous franchi son flanc Est que nous apercevons K's'ar-H'announ et sa source. Celle-ci sort de terre à une dizaine de mètres en avant de deux gros figuiers; elle est assez abondante et laisse échapper un filet d'eau au moyen duquel on arrose quelques jardins plantés de figuiers.

                 Bien que ces arbres ne soient pas très-nombreux, la vue de grands végétaux et d'un peu de fraîche verdure fait plaisir au milieu de cette terre où l'œil n'aperçoit de toutes parts que la couleur monotone des guérets moissonnés et brûlés par le soleil, que des pierres arides là où cesse la vie de la plante ; partout ailleurs, que des broussailles basses et d'un aspect désagréable.
                 Quelques Arabes devisaient à l'abri de deux gros figuiers ; parmi eux se trouvait notre vieux cicérone. Il m'attendait. Ali lui donna son cheval, et nous montâmes ensemble à Ksar-'announ. On y arrive de ce côté, vis-à-vis de la source, far un défaut que présente ici le Banc du ravin, qui est d'ailleurs très bas et par lequel on a dû de tout temps faire passer le chemin principal venant de l'ouest ; aussi suis-je très-disposé à croire ce chue me disait le bonhomme de l'existence sur ce point d'une des fortes de la ville. On y voit a droite, les restes d'une tour ou d'un bassin en énormes pierres.

                 Tournant obliquement vers le sud, nous atteignîmes bientôt des ruines de murailles placées sur la crête même d'un autre ravin beaucoup plus profond que celui de la source, et qui limite à l'est le plateau sur lequel s'étendait Ksar-Hannoun. A chaque reste un peu considérable, le vieillard s'écriait : " Vois-tu, quelle grande ville ? Veux-tu voir le Bordj (le fort). " Et il me conduisit toujours dans la même direction, jusqu'à une enceinte qui paraît avoir été en effet le réduit de la place. Puis il me montrait d'autres fondations, des grottes creusées sous le sol, les vestiges très-effacés d'un fortin situé un peu en dehors des murs de l'est, en renouvelant à chaque nouvel objet ses exclamations : " Quelle grande ville ! "
                 Et nous redescendions la pente douce que forme le terrain pour nous diriger vers la partie nord de l'ancien établissement; le sol était jonché de pierres. J'examine les bases d'un mur qui m'avait frappé en venant et qui allait de l'est d l'ouest, d'un rempart à l'autre.
                 Ksar-Hannoun occupait l'extrémité de ce que les Arabes appellent drâ, un bras, une sorte de promontoire que les déchirements et l'action des eaux ont coupé dans la masse générale des plaines du Tell, pour en faire quelque chose fui ressemble assez bien à ce membre du corps humain auquel on l'a assimilé. Celui-ci s'allonge du sud au nord entre le Châbat où coule la source de Ksar-Hannoun, à I'ouest, et le Châbat-Tbilemt', à l'est ; les deux vallées se réunissent a son extrémité nord et ne forment dès lors qu'un seul ravin appelé Châbat-Noufoun.

                 Le Châbat de la source est évasé et peu profond ; il a son origine pour ainsi dire sous les murs de la ville même, à peu de distance de sa partie méridionale. C'est de ce côté que devait être la principale défense, et cependant c'est là que les restes de murs sont les plus effacés. Le Châbat-Tbîlemt', qui, au-dessus et tout prés de Ksar-Hannoun, reçoit le Châbat-Andouz, venu de l'est, est profond et très-large; son flanc ouest, celui qui couronnait les anciens remparts, m'a paru en outre très-raide.
                 Le Châbat est un ravin deus lequel il n'y a pas ordinairement d'eau ; cependant cela souffre quelques exceptions qu'il serait trop long d'expliquer ici.

                 Autant que j'ai pu en juger par un examen assez rapide, Ksar-Hannoun n'avait pas une grande étendue. Sa longueur ne m'a pas paru être de plus de 7 à 800 mètres, sa largeur, assez grande au sud, diminue peu â peu et devient très-petite au nord, où elle ne dépasse pas 45 à 50 mètres. Du reste, je ne donne ces chiffres, comme ceux de Bou-Djerar, que sous toute réserve; nous les aurons avec exactitude lorsque j'aurai pu aller lever le plan des deux localités. Les descriptions seront naturellement aussi plus complètes.

                 Ksar-Hannoun était-il un établissement. Carthaginois ou un établissement romain ? Cela est assez difficile à déterminer d'une manière positive. Malgré les premières affirmations de mon guide, démenties par ce qu'il me répondit à plusieurs reprises lorsque je les lui rappelai sur les lieux mêmes, il ne parait pas y exister d'inscriptions. Le nom est, jusqu'à présent, le seul témoignage que l'on fourrait invoquer en faveur de l'opinion qui en faisait remonter la fondation aux temps antérieurs à l'invasion romaine. Ksar-Hannoun signifie bien Ksar de Hannon. Si Tahar, le kadi du bureau arabe de Tlemcen, avait d'abord pensé qua le mot devait s'écrire par un H faible, et que dés lors Ksar-Hannoun signifiait le Ksar du bien-être (matériel) ; mais, indépendamment de ce que cette signification a d'insolite, je lai fis observer que tous ceux qui m'avaient parlé de Ksar-Hannoun avaient sans cessé donné à l'h la forte accentuation de Hhé. On put du reste le vérifier au moyen de plusieurs Beni-Ouâzan qui se trouvaient alors à Tlemcen.

                 M. Theuma, interprète principal du bureau arabe de Tlemcen, qui a bien voulu s'occuper de faire quelques recherches à cet égard, m'a dit qu'il résultait de ses informations que le mot hannoun devait s'écrire par le ItM, que ce n'était pas le mot hannoun, signifiant bien-être, satisfaction, que c'était, d'après les Arabes, un ancien nom berbère. Mais on comprend très-bien qu'un ancien nom berbère ne veut rien dire autre chose qu'un très-ancien nom, c'est-à-dire antérieur à toutes les invasions européennes.
                 Le mot hannoun, hannon, est encore très-usité chez les Berbères et même chez les Arabes comme nom propre. On rencontre souvent à Alger des individus qui le portent.

                 Il me reste une observation à faire. Si, dans ce qui précède, je n'ai pas traduit le mot Ksar, c'est que cela est assez difficile. Le rendre par citadelle ou forteresse, ce serait éveiller chez nous des idées qui ne seraient nullement en rapport avec les faits ; le Ksar n'est pas une citadelle et n'a pas l'importance de nos forteresses, ou du moins ce serait une petite forteresse ; de fait c'est un village ou une petite ville environnée de murs, défendue par des tours, ayant quelquefois une kasbah, un réduit, c'est un ksar en un mot, et nous devons donner droit de préséance dans notre langue à cette expression pour laquelle il n'est guère possible de trouver un équivalent. Le mot ksar, employé dans sa forme plurielle ksour, pour désigner la plupart des villes ou villages du Sahara algérien, est aussi donné à quelques localités du Tell, mais plus souvent dans la province de Constantine que dans les autres; je n'en connais qu'un dans le Tell de la province d'Oran , c'est celui dont il est question ici, le Ksar-Hannoun. Dans l'est, il ne s'applique guère qu'à des localités très-anciennes, comme le Ksar-Ragbrai, l'ancienne Ragas, entre Batna et Tebessa.

                 Du reste, il est indispensable que j'ajoute qu'au moment où je visitai les ruines du Ksar, libre de toute préoccupation, je fus frappe de la différence qu'il y a entre leur aspect et celui que présentent les ruines romaines. Je venais de quitter Bou-Djerar, dont les restes sont peu considérables, il est vrai, mais qui a la même physionomie que toutes les ruines que j'avais vues jusqu'alors ; la comparaison était plus facile et devait être plus juste. Il m'a semble que ces pierres du Ksar-Hannoun, décrépites et comme rongées par le temps, avaient vu passer bien plus de siècles que toutes celles des établissements de Rome ; qu'une suite presque incalculable d'armées y avait laissé chacune une empreinte qui a fini par se traduire en signes propres seulement aux oeuvres de l'homme, marqués d'une interminable vieillesse, comme ces murs cyclopéens, spectateurs des anciens âges du monde.

                 Je ne pourrai m'expliquer catégoriquement au sujet, de l'occupation de Ksar-Hannoun par les Romains qu'après en avoir fait une étude plus approfondie. A première vue, il m'a semblé qu'ils ne s'y étaient pas installés. Mais, je le répète, il faut attendre une exploration attentive. vans un cas comme dans l'autre, il n'y aurait rien d'extraordinaire à ce que l'établissement carthaginois eût transmis son nom intact de Château de Hannon, Hannonis Castellum, à travers l'occupation romaine, puisque les anciens comptoirs puniques de la côte conservèrent tous le leur, Rousaz, Rousoubeser, Rousoukkour (Dellis), Rousikibar, Rousgoun, Rousadir (Mlilia), etc. L'étude de la géographie antique de Maghreb a montré que Rome avait successivement occupé toutes les positions carthaginoises qui se rattachaient directement à son système d'occupation. Mais quelques-unes de ces positions restèrent peut-être en dehors des grandes lignes de son vaste réseau de postes et de places fortes. Si la présence des Romains n'est signalée par rien au Ksar-Hannoun, c'est que ce lieu se sera trouvé dans ce cas. Encore aujourd'hui, il est très-isolé, assez loin de la route de Tlemcen à Bel-Abbès. Cependant on ne peut méconnaître une certaine relation d'ensemble entre Sala ou Pomaria (Tlemcen), Bou-Djerar, Ksar-Hannoun, EI-Bridj (Vasbaria) et Hadjar-Roum (Rubræ).
                 Mais s'il y a eu un établissement carthaginois ici, à quelle cause faut-il attribuer la création ? Nous n'avons que fort peu de détails sur les conquêtes de Carthage dans l'intérieur de la Numidie.

                 Peut-être se sont-elles avancées jusque-là. Leurs relations commerciales, dont nous connaissons l'extension, peuvent aussi les avoir amenés à élever dans l'intérieur des terres quelques comptoirs fortifiés pour faciliter leurs communications avec les indigènes et les villes de la côte. Leurs marchands suivaient habituellement, en s'internant, des voies commerciales dont on connaît vaguement l'existence sans avoir aucun détail sur leur direction. L'une de ces voies traversait incontestablement les plateaux inférieurs du Tell, de manière à leur permettre de réunir facilement les produits des plaines et ceux des montagnes. Elle était jalonnée par une ligne de postes sur lesquels j'ai déjà réuni des données que je ferai connaître lorsqu'elles seront plus complètes. Je dirai seulement que le Ksar-Hannoun vient tout naturellement se placer au nombre des stations de cette grande route qui de Carthage allait vers le couchant se rattacher aux établissements du rivage atlantique de la Mauritanie tingitane.

                 Nous quittâmes Ksar-Hannoun vers quatre heures, et il était à peu près cinq heures et demie passées lorsque nous arrivâmes au douar de Larbi-bou-Zouina. Le vieil Arabe ne m'avait pas trompé : la distance entre Bou-Djerar et Ksar-Hannoun est bien la même que celle de Bou-Djerar à Ouzidaa, 7,000 mètres. D'après la carte du capitaine Kartli, Ksar-Hannoun, qu'il appelle par erreur Ksar-Mimoun après avoir donné à la source son véritable nom, est, à 18.800 mètres (en ligne droite) N. 36° E. de Tlemcen, par 35° 1' 00" de latitude.

                 Je ne voulais pas m'arrêter chez Larbi-bou-Zouina en revenant de cette petite excursion; une circonstance particulière me rappelait à Tlemcen : un convoi du train, avec lequel je devais me rendre à Hadjar-Roum, partait â trois Meures du matin. Mais nous étions dans le Ramadan, et j'engage les explorateurs â tâcher de se passer des Arabes durant ces trente jours, ou de ne pas se mettre en position d'avoir à les employer, car ils sont alors capables de fort peu de chose. Ben-Ali, qui était un jeune homme assez vigoureux, n'allait plus qu'avec peine lorsque nous arrivâmes au douar. Il me fallut le laisser souper, et, après avoir soupé, lui permettre de dormir quelques heures. Encore, après cela, marchait il si lentement qu'à Ouzidan je le laissai derrière moi et que j'arrivai â Tlemcen seul. Mais il était trop tard. Le convoi était parti depuis une demi-heure. Nous avions en tout, aller et revenir, parcouru quarante kilomètres, dix. lieues â peine.
O. MAC CARTHY.
Tlemcen, le 25 août 1850.


EL-ACHOUR
Pieds -Noirs d'Hier et d'Aujourd'hui - N° 206, juillet-août 2012
El-Achour est la plus discrète, la plus petite et la moins peuplée de toutes les communes d'Algérie.
     
                 Historiquement, El-Achour est un village dont la création est annoncée dans le plan Guyot du 12 mars 1842. Voici ce que l'on peut y lire à propos du futur centre de colonisation.
                 " El-Achour est sur un plateau à l'exposition du sud-ouest, et dominant les terres qui seront données aux colons. Ces terres paraissent devoir être fertiles et cultivables surtout en céréales et prairies artificielles. On remédiera par des plantations imposées aux concessionnaires à la nudité du sol. Le territoire se composera d'une ferme domaniale de 100 ha environ appelée El Achour, et de quelques autres propriétés abandonnées d'environ 23 ha appartenant à divers particuliers qui depuis 10 ans n'y ont fait aucun acte de culture. "

                 C'est donc dès sa conception, une commune destinée à connaître un développement limité, car 123 ha, c'est vraiment peu. Il y avait de quoi installer 10 à 20 familles au maximum selon la taille des lots.
                 Par contre le village, si l'on en croit la carte de 1873, paraît avoir été surdimensionné.
                 L'espace protégé est loin d'être entièrement bâti. On voit sur la carte des constructions assez dispersées et non jointives. Un maillage de rues inachevé et de grands espaces nus. L'église est à l'écart du village. Il semble que persiste encore sur la gauche, une tour de guet.

                 Pour éviter des problèmes d'orientation, il faut savoir que, sur cette carte, le " haut" indique le nord-est et non le nord.
                 Le guide Quétin de 1848 signalait une belle fontaine.
                 Les circonstances de cette fondation de village illustrent des principes énumérés dans le plan Guyot, notamment l'un de ceux évoqués dans le paragraphe sur l'origine des terrains ; à savoir confiscation des biens beylicaux et des terres non cultivées.
                 Au début, lors de sa création en 1842, El-Achour avait été rattaché à la commune de Delly Ibrahim. La commune ne devint Commune de plein exercice qu'en 1876.

                 Le territoire communal
                 Il a la forme d'un rectangle de 4,5 km sur moins de 2 km de large : soit au maximum environ 700 ha. Il n'a pas de limites naturelles ; ses limites suivent les routes de Draria et de Douéra.
                 Le territoire s'étend de part et d'autre d'une vallée peu profonde (50m) aux versants en pente modérée. Les habitations sont toutes situées sur les dos de terrains qui limitent la commune ; aucune ferme et aucune mechta dans le fond de la vallée.
                 Les vignes ont été plantées le long de la route de Draria. Ailleurs on ne voit que des broussailles, même en 1935, ou des pâturages ; et on peut imaginer des cultures de céréales ou de pommes de terre.
                 Cette commune d'El-Achour est la plus discrète, la plus petite et la moins peuplée de toutes les communes du Sahel, et même de toutes les communes d'Algérie. C'est aussi l'une des communes les plus européennes.

                 En 1954 il n'y vivait que 526 habitants, dont 224 européens. Le pourcentage de musulmans y était alors relativement faible : 580, contre 690 pour sa voisine de l'ouest (Ouled Fayet) et 89% pour sa voisine de l'est (Draria).
                 Il n'y avait dans cette commune aucun hameau, aucun château, aucune institution originale, aucun monument, hormis un très modeste monument aux morts, surmonté d'un coq en bronze qui s'était posé là à une date inconnue et qui a dû s'envoler en juillet 1962 dans des circonstances tragiques pour Besançon.
                 Je n'ai pas non plus trouvé trace d'une quelconque personnalité de stature nationale.

Le village centre est tout aussi modeste que la commune.

                 Il est un peu à l'écart de la route de Draria.

                 Outre le carrefour en y de la photo ci-contre, il ne possédait guère que 3 rues. Par rapport à 1873, les maisons étaient plus nombreuses et plus jointives, mais l'emprise totale au sol n'avait pas changé ; l'église était toujours isolée, comme en 1873. Le village s'était densifié, mais n'avait pas grandi.
                 La bretelle de la route de Draria arrivait devant le monument aux morts porteur du coq en bronze.
                 La desserte de ce village était assurée par les autobus de la ligne d'Alger à Douéra, et par eux seuls. Ces bus ont d'abord été ceux de la société Seyfried. Cette société fut vendue vers la fin des années 1950 à la société des autocars blidéens.
                 En 1962, c'étaient ses cars Chausson rouges qui faisaient un petit crochet vers le centre d'El-Achour, entre Delly Ibrahim et Baba Hassen.

Supplément historique rapide sur le 13 mai et les CSP (Comités de Salut Public)


                 Quand on évoque le 13 mai sans préciser, il s'agit d'une allusion à une énorme manifestation des partisans de l'Algérie française tenue le 13 mai 1958, à Alger, devant les bureaux du Gouvernement Général. La raison de cette manifestation est l'inquiétude des manifestants face à des rumeurs de " bons offices" anglo-saxons qui risquaient d'être imposés au faible Gouvernement de Pierre Pflimlin en cours de formation à Paris. Cette manifestation eut d'importantes conséquences, à commencer par la naissance d'un CSP (Comité auto-proclamé de Salut Public) présidé par le vainqueur de la " bataille d'Alger ", contre le terrorisme, le Général Massu. Le Général Salan est alors Commandant en Chef des troupes en Algérie. Des gaullistes accourus en hâte à Alger persuadent les deux généraux qu'ils doivent faire appel à De Gaulle, seul capable de sauver l'Algérie française. Les deux généraux obtempèrent, et De Gaulle se dit prêt.


                 Le 28 mai à Paris Pflimlin démissionne. Les gaullistes ont gagné : certains comme Soustelle, croyaient sincèrement que De Gaulle serait le sauveur ; la plupart se moquaient éperdument du sort de l'Algérie.
                 Le 1er juin, De Gaulle est investi Président du Conseil par l'Assemblée Nationale. Le lendemain la même Assemblée lui accorde Ies pleins pouvoirs pour l'Algérie.
                 Le 4 juin, le sauveur arrive à Alger. Ce n'est pas Zorro, mais il masque bien ses intentions, si toutefois il en possédait de claires à l'époque. A la foule des Algérois il dit "je vous ai compris". C'est bref, ça sonne bien, c'est agréable à entendre et ça n'engage à rien.
                 Puis il enchaîne "Je déclare qu'à partir d'aujourd'hui la France considère que dans toute l'Algérie il n'y a qu'une seule catégorie d'habitants, il n'y a que des Français à part entière".

                 En 1919 cette assertion aurait pu avoir des suites heureuses malgré l'oubli de l'existence de deux catégories d'habitants.
                 En 1958 elle est à la fois fausse (s'il n'y avait eu qu'une seule catégorie, il n'y aurait pas eu de problème non plus) et dangereuse pour les 10% d'européens.
                 Que ferait-on des Européens si un jour la majorité des" Français à part entière" décidait démocratiquement de n'être plus française du tout ? L'hypothèse est, en 1958, dans la logique du collège unique et, vu les circonstances, probable.
                 Personne à l'époque n'a osé poser la question iconoclaste et tout le monde a applaudi. Parmi les auditeurs il y avait sûrement des représentants des CSP des villages ; peut-être même de celui d'El Achour.

                 Le CSP du 13 mai, sous la présidence du Général Massu et la vice-présidence du Docteur musulman Sid Cara, avait pris le nom de CSP d'Algérie Sahara. Par la suite, et surtout après l'investiture de De Gaulle comme chef du Gouvernement français, il se créa des CSP dans la plupart des villes et villages d'Algérie, habituellement dirigés par un officier et mêlant Européens et musulmans.
                 Ce fut peine perdue. Dès qu'il sentit son pouvoir affermi, De Gaulle en octobre, ordonna aux officiers de quitter les CSP.
                 L'émotion fut si grande à Alger que le CSP d'Algérie Sahara envoya à Paris une délégation entièrement musulmane. De Gaulle refusa de la recevoir. Les CSP perdirent toute influence, et de facto avant la Noël disparurent 1958.
Georges Bouchet
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Le Coq d'El-Achour

                 Les Pieds-Noirs de Besançon et leurs amis connaissent bien à présent notre Mémorial du Souvenir édifié sur la promenade des Glacis, non loin de la gare Viotte, et la plupart savent également que sur sa face arrière, dans le haut du socle se trouve une niche avec une vitre en plastique qui renferme un coq, aux ailes à peine rognées pour entrer dans la cavité. À ce propos, écoutez donc une histoire, une belle histoire qui finit mal...

                 Il était une fois... N'est-ce point en ces termes que débute une belle histoire ?... Celle que je me propose de raconter s'adresse à nos enfants sur qui repose la continuité, la pérennité de l'entité Pieds-Noirs ; elle s'adresse aussi aux grands, car c'est une histoire vraie, une histoire où le drame côtoie la noblesse. Il était une fois... un coq gaulois dont le tempérament à la fois fougueux et généreux s'accommodait mal des dimensions de la basse-cour. Il apprit à voler avec cette énergie que stimule la volonté créatrice. Notre coq désirait en effet ardemment apporter ce qu'il avait de meilleur en lui là où le besoin s'en faisait sentir.

                 Avec d'autres de sa trempe, il traversa la Méditerranée et choisit de se fixer dans le Sahel algérois où tout était à créer. Son instinct combatif était fort heureusement à la hauteur des circonstances. En effet, s'il avait compris le parti que l'on pouvait tirer de ces coteaux aux terres riches, de ces vallons où régnait une fraîcheur.
                 Le Coq d'El-Achour propice aux cultures, la région était néanmoins recouverte de broussailles.
                 Notre coq se mit de suite au travail et lutta de toute son énergie afin de rendre fertile et salubre cette partie du Sahel. Très vite, la vie apparut, un village venait de naître: "El-Achour". Tellement heureux, tellement fier de son oeuvre, le coq ne songea plus un seul instant à retourner dans sa patrie d'origine. Consciemment ou non, n'en avait-il pas créé un magnifique et moderne prolongement ?
                 Au reste, sa fidélité, son amour pour la France ne se sont jamais démentis chaque fois que l'hexagone fut en danger, il mobilisa ses enfants qui s'en allèrent sans la moindre hésitation donner généreusement leur sang.


                 La guerre de 1914-18 lui fut particulièrement cruelle, et une vingtaine de ses fils périrent au champ d'honneur...
                 C'est à ce moment que le coq devenu vieux songea à se reposer. Il choisit pour cela de se percher au sommet du monument élevé à la gloire des enfants d'El-Achour.
                 Là était sa place naturelle. De là, il pouvait tout observer.
                 Sensible aux joies et aux peines de tout un chacun, il aimait à observer les Jean-Pierre, les yves, les Edgar, les Ramdane, les Liès, les Ali et tant d'autres, sortant de la même école, et s'attardant sur la place pour des jeux de leur âge. Il lui arrivait aussi d'apercevoir d'approuver avec bienveillance. Les jeunes gens dynamiques au front volontaire faisant la cour à des filles élancée espoir de foyers féconds, avenir d' El-Achour

                 D'autres coqs avaient semblablement réussi, et notamment ceux qui, grattant le sol du Sahara avait fait jaillir le pétrole dont on pouvait déjà songer qu'il serait drôlement utile à la France. Tout était sans doute trop beau. C'est alors que certains coqs demeurés dans la basse-cour, peu nombreux, il est vrai, et parmi les plus médiocres d'une catégorie appelée "intellectuelle" - ceux-là même qui n'avaient rien construit, n'avaient pas su ou pas osé voler, décidèrent de s'acharner sur le coq symbole d'une réussite exemplaire, et par-là même, hélas ! propre à déchaîner les jalousies morbides. Savamment insufflées à petites doses régulières par tous les moyens de diffusion, le bruit commença à courir dans toute la France, que le coq avait "volé" des terres ; il se serait enrichi au détriment d'autres habitants du pays arrivés avant lui ; il aurait profité de sa puissance pour établir un affreux, "colonialisme"...
                 Notre coq, par trop candide, se souvenant des broussailles à défricher, revendiquées par personne, observant les rapports entre les différentes communautés, les antennes de télévision naissantes, et les voitures également répandues parmi toutes les couches de la population, ne comprenait pas qu'on put ainsi le mettre en accusation ; il comprenait encore moins qu'on put se battre autrement qu'à la loyale.

                 Une fois de plus, il rassembla ses enfants, et cette fois pour la réhabilitation de la vérité. Un moment l'on put croire qu'il avait gagné... Un certain 13 mai en effet, alors que tout un peuple réagissait instinctivement face au spectre d'un retour moyenâgeux qu'il ne désirait évidemment point, l'on put voir sur le forum d'Alger un européen et un musulman tenant une banderole avec l'inscription ; "El-Achour veut rester français". En haut lieu, on prétendit même l'avoir "compris", l'on avait sans doute parfaitement rien compris, mais également décidé, pour de sordides raisons, d'en finir avec ce coq devenu gênant. L'ultime combat était perdu d'avance ; non pas, et c'est important, que le "vent de l'histoire" fut inévitable (il fallait bien trouver un alibi pour voler au secours des consciences quelque peu ébranlées), mais en fait, les forces occultes tenaient le haut du pavé. Le coq eut la satisfaction de voir certains de ses fils se battre jusqu'au bout. Pour sa part, il avait choisi la seule solution qui correspondît à une longue existence noble et généreuse ; il devait couler pavillon haut... Ce bien triste jour arriva.

                 À la faveur d'une Algérie désorganisée, une équipe de voyous viola sans vergogne le monument aux morts d'El-Achour... Le valeureux coq gisait impuissant, mais toujours aussi fier, couché sur une terre à laquelle il s'était identifié depuis longtemps.
                 L'histoire allait-elle se terminer aussi lamentablement ?
                 Etait-il possible que tant de haine put se manifester aussi ignoblement sans le moindre corollaire alors que le drapeau tricolore flottait encore, ne fut ce que pour quelques jours.

                 Eh bien non ! Le sergent chef Toulis, un sous-officier français pour qui le mot "dignité" avait encore un sens, un "homme" dans tout le sens du terme qui ne pouvait supporter tant de honte, recueillit pieusement le coq symbolique au détriment de sa vie.
                 Le lendemain même de son geste, Toulis fut tué par les nouveaux maîtres de l'Algérie, dans les souffrances les plus atroces.

                 Souvenons-nous toujours du sergent chef Toulis ; comme il est "grand" face aux minables, aux pitoyables qui viennent encore de se manifester à Toulon par crainte d'une vérité qui de toute façon jaillira tôt ou tard.
                 Que dire de la nouvelle traversée de la mer (dans l'autre sens) ?

                 L'exode faisait place à la belle aventure. Mutilé dans sa chair et dans son cœur, le vieux coq songeait à ses enfants nés "là-bas", voués à la dispersion, et il n'avait pas besoin d'avoir lu Barres pour savoir ce que serait le déracinement dans le vieux pays structuré depuis longtemps où El-Achour ne pouvait être reconstruit. Mais il ne se doutait pas cependant que les qualités de ses fils par lui inculquées trouveraient leur point d'application au sein même du désastre.

                 Le peuple de France en effet compris très vite en les observant au labeur que les nouveaux venus n'avaient rien d'exploiteurs affamés, rien de tous les affreux défauts dont la propagande mensongère les avait affublés. Dans leur quasi-totalité, les frères de France offrirent leur hospitalité.

                 De retour du Maghreb, du Maroc plus précisément dont je conserve d'émouvants souvenirs sur tous les plans, je viens à mon tour d'entrer dans notre véritable domaine qui est de"'nulle part" comme l'a si bien défini J. Brune.
                 J'ai revu avec émotion mon fier coq gaulois.
                 À cet instant, j'ai pensé d'abord au sergent chef Toulis. J'aurais voulu pouvoir lui dire tout simplement... " Merci du plus profond de moi-même, mes respects Sergent ! ...".
                 J'ai pensé à la population d'El-Achour dont il avait pendant longtemps été établi un fait bien connu, à savoir qu'elle formait une grande famille. Un des membres de cette famille se trouve à Besançon : notre ami Antoine Bonet, garagiste en cette ville.

                 Bonet figure un de ceux qui 18 ans après sont toujours aussi fiers de leurs origines. Il ne s'en cache pas, bien au contraire, et c'est indéniablement cela qui, joint à une serviabilité légendaire lui a valu l'estime d'un nombre incalculable de bisontins. Quant au coq lui-même, il m'a semblé rajeuni. Ce n'est certes qu'un animal de bronze, mais il demeure pour nous un symbole exaltant.
                 Sa crête altière élancée en un noble "cocorico!" de victoire nous fait immanquablement méditer cette phrase de Bernanos : "La plus haute forme de l'espérance, c'est le désespoir surmonté". J'ai remarqué enfin qu'il n'était pas orienté vers le Sud, et cependant, sur nos cœurs endurcis, le mot " FIN " ne saurait s'inscrire ; la belle histoire n'est point terminée.

                 Yves VERTIE petit-fils de M. Jules Favier, maire d'El-Achour de 1919 à 1959, qui fut justement à l'origine de l'érection du monument aux morts d'El-Achour.

                 Et pour que I'histoire du coq d'El-Achour soit complète, signalons que c'est le chef d'unité du sergent Toulis, le colonel Fuchs qui ramena en métropole, à Besançon, le fameux coq, et qu'il le remit à M. Jean-François Guyormeau, président départemental de l'union nationale des combattants d'AFN, lui-même membre du Comité local de Municipalité et Souvenir qui fut à l'origine de l'érection du mémorial.
 
    


 

LIVRE D'OR de 1914-1918
des BÔNOIS et ALENTOURS

Par J.C. Stella et J.P. Bartolini


                            Tous les morts de 1914-1918 enregistrés sur le Département de Bône méritaient un hommage qui nous avait été demandé et avec Jean Claude Stella nous l'avons mis en oeuvre.
             Jean Claude a effectué toutes les recherches et il continu. J'ai crée les pages nécessaires pour les villes ci-dessous et je viens de faire des mises à jour et d'ajouter Oued-Zenati, des pages qui seront complétées plus tard par les tous actes d'état civil que nous pourrons obtenir.
             Vous, Lecteurs et Amis, vous pouvez nous aider. En effet, vous verrez que quelques fiches sont agrémentées de photos, et si par hasard vous avez des photos de ces morts ou de leurs tombes, nous serions heureux de pouvoir les insérer.

             De même si vous habitez près de Nécropoles où sont enterrés nos morts et si vous avez la possibilité de vous y rendre pour photographier des tombes concernées ou des ossuaires, nous vous en serons très reconnaissant.

             Ce travail fait pour Bône, Aïn-Mokra, Bugeaud, Clauzel, Duvivier, Duzerville, Guelaat-Bou-Sba, Guelma, Helliopolis, Herbillon, Kellermann, Millesimo, Mondovi, Morris, Nechmeya, Oued-Zenati, Penthièvre, Petit et Randon, va être fait pour d'autres communes de la région de Bône.
POUR VISITER le "LIVRE D'OR des BÔNOIS de 1914-1918" et ceux des villages alentours :

    
CLIQUER sur ces adresses : Pour Bône:
http://www.livredor-bonois.net

             Le site officiel de l'Etat a été d'une très grande utilité et nous en remercions ceux qui l'entretiennent ainsi que le ministère des Anciens Combattants qui m'a octroyé la licence parce que le site est à but non lucratif et n'est lié à aucun organisme lucratif, seule la mémoire compte :

http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr
                         J.C. Stella et J.P.Bartolini.
 


NOUVELLES de LÁ-BAS
Envois divers


AÏN-SEFRA

Envoyé par Aubin
https://www.lesoirdalgerie.com/regions/ces-milliards-de-m3-d-eau -qui-se-perdent-dans-l-erg-occidental-99476


Le soir d'Algérie - Par : B. HENINE 21-05-2023

Ces milliards de m3 d’eau qui se perdent dans l’erg occidental !

         L’on assiste à chaque précipitation à de grandes crues des oueds de la région des monts des Ksour.

         À chaque fois donc, ce sont des milliards de m3 d’eau des hautes plaines steppiques septentrionales qui se perdent dans le Sahara par la vallée de Oued-Namous (entre la wilaya de Béchar et l’erg occidental) et s’infiltrent dans le sable des régions de Gourara et Touat.

         D’ailleurs, les oueds de Mouilah et Bridj de Aïn-Sefra et l’oued de Tiout n’ont pas tari depuis les dernières précipitations et continuent à déverser de grandes quantités d’eaux pluviales vers le désert.

         Pas de retenues collinaires, valorisant des eaux superficielles qui peuvent en effet préserver l’activité agricole et l’élevage, améliorer les parcours de transhumance, offrir une meilleure production fourragère, ou encore, améliorer les conditions d’abreuvement du cheptel.

         On devait réaliser un barrage à Oued-Hadjadj (distant de 10 km au sud de Aïn-Sefra) – un projet qui date des années 80, mais qui n’a jamais vu le jour — un lieu où se rencontrent les cours d’eau de plusieurs oueds (appelé couramment Melg-El-Widane), versant des plus grands oueds, ceux de Aïn-Sefra, de Tiout et des hautes plaines.

         À Tiout, une étude de l’aménagement du barrage qui a perdu tout l’aspect de l’oasis et qui faisait la fierté des gens de la région est tombée à l’eau.

         Des barrages, des retenues collinaires ou des digues auraient favorisé sans doute les conditions pour une diversification des activités de la steppe (élevage du cheptel et valorisation de l’agriculture), mais en vain.?Chaque année, des milliards de m3 se perdent dans les sables.

         Par ailleurs, les quantités de pluie relevées le 19 mai 2013 à 18h00 par les services météorologiques sont comme suit : en tête Aïn-Sefra, 28,1 mm, suivie de Skikda, 25,6 mm, Jijel, 24 mm… El-Bayadh, 6,2 mm, Naâma, 6 mm, Béchar, 2 mm.
B. Henine           


Aïn-Témouchent

Envoyé par Françoise
https://www.lesoirdalgerie.com/regions/un-reseau- de-passeurs-de-harragas-demantele-a-el-amria-98672


Le soir d'Algérie - Par : SALAH BELKALLOUCHE 06-05-2023

Un réseau de passeurs de harragas démantelé à El Amria

         La brigade de lutte contre l'émigration clandestine de la Sûreté de la wilaya de Aïn-Témouchent a réussi à mettre fin aux agissements d'une bande criminelle constituée de 10 individus, spécialisée dans l'émigration clandestine.
         L'opération est survenue après des informations parvenues aux services faisant état de la présence d'une bande spécialisée dans l'émigration clandestine vers les côtes européennes, à partir du littoral témouchentois. Les investigations des éléments de la brigade ont conduit à identifier les éléments du réseau et à connaître le lieu de son activité, et un plan a été mis en place en collaboration avec le procureur de la République près le tribunal d'El-Amria. Après une observation minutieuse de leurs mouvements, les policiers procèdent à l'arrestation des dix membres de la bande dont l’âge varie entre 21 et 45 ans, originaires de la wilaya de Aïn-Témouchent et certaines wilayas voisines.

         Les policiers découvrent en possession des passeurs un moteur de marque Yamaha, 3 véhicules touristiques qui servaient à transporter les harragas, 2 masques, une arme blanche, un montant en devise équivalant à 971 euros, des téléphones portables, 8 jerrycans dont trois pleins de carburant.
         Les dix individus ont été présentés devant le procureur de la République près le tribunal d'El-Amria qui a décidé de les placer sous contrôle judiciaire.
SALAH BELKALLOUCHE           


Annaba

Envoyé par Patrice
https://www.lesoirdalgerie.com/regions/pluies-bienfaitrices -malgre-le-retard-99483

Le soir d'Algérie - Par : A. BOUACHA 21-05-2023

Pluies bienfaitrices, malgré le retard

          Les chutes de pluie qui ont arrosé la wilaya de Annaba, presque sans interruption, durant les dernières 48 heures, à l'instar des autres wilayas de l'est du pays, à l’exemple de celle d’El Tarf, ont contribué au remplissage des barrages de Mexa et Bougos, et apporté un plus appréciable à celui de Chefia dont la wilaya de Annaba est en grande partie tributaire.

          Selon nos sources qui n’ont pas encore quantifié la totalité de l’apport à ce dernier barrage, elles estiment qu’avant ces chutes, sa situation était proche de la sécheresse totale avec un minimum de retenues d’eau. Ce qui a créé un début d’angoisse parmi la population qui était alimentée en moyenne 1 jour sur 10 et pour une plage horaire n’excédant pas quelques heures, ces dernières semaines.

          Certes, l’espoir est revenu, mais la situation ne sera totalement maîtrisée qu’avec la station de dessalement d’eau de mer d’une capacité de 300000 mètres cubes et dont les travaux ont été entamés ces derniers mois. Elle apportera une partie appréciable de ces quantités à la population de la wilaya de Annaba.

          Malgré leur côté bénéfique, ces apports de pluie ont quand même provoqué des inondations et des montées des eaux dans certains quartiers et cités, notamment ceux situés à des niveaux bas par rapport à la mer.

          Les éléments de la Protection civile n’ont pas chômé. À l’aide de pompes, ils ont dégagé les eaux qui stagnaient au niveau des rez-de-chaussée de plusieurs immeubles et routes bloquées.

          Les avaloirs étant bouchés pour manque d’entretien durant la période estivale et automnale, en prévision des conditions atmosphériques et intempéries qui marquent, en principe chaque année, la période de chutes de pluies.
A. BOUACHA             


Tebboune

Envoyé par Clémence
https://www.tsa-algerie.com/tebboune-lalgerie -est-grande-cest-nous-qui-sommes-petits/

tsa-algerie.com - Par: Rédaction 06 Mai 2023

« L’Algérie est grande, c’est nous qui sommes petits »

           Le président de la République Abdelmadjid Tebboune a rencontré mercredi 3 mai, à l’occasion de la célébration de la journée mondiale de la liberté de la presse, des représentants de la presse nationale.

           Au cours de cette entrevue, qui sera diffusée ce samedi soir par la télévision algérienne (21h00), le chef de l’Etat a abordé plusieurs questions d’actualité et a fait des déclarations très fortes.

           Le sujet du jour, la liberté de la presse, est bien entendu évoqué. « Nous sommes prêts à mettre les moyens à la disposition de tous les journaux, sans exception », a indiqué Tebboune, dans des extraits de l’intervention ont été mis en ligne sur la page Facebook officielle de la présidence de la République.
           Interpellé sur le classement de l’Algérie (136e) dans le rapport de l’ONG Reporters sans frontières (RSF), rendu public le même jour, le président Tebboune a eu cette réponse : « Le classement que nous devons prendre en compte c’est celui des Nations-Unies. »

           Pour lui, les classements des ONG sont établis « au gré de leurs dirigeants » et que RSF « reste dans les cas une ONG ».
           Avant l’entrevue, le président de la République avait rencontré de nombreux journalistes et acteurs de la scène médiatique algérienne, dont Khaled Drareni, qui a été emprisonné entre mars 2020 et février 2021 et qui est actuellement le représentant de RSF pour l’Afrique du Nord.
           Tebboune : « L’agriculture est une science et non des traditions »
           Drareni a révélé que le chef de l’Etat lui a dit que le secrétaire général de RSF était « le bienvenu » en Algérie. Le représentant de RSF a aussi remis une lettre au président au nom de l’organisation, dans laquelle celle-ci demande notamment la libération du journaliste Kadi Ihsane.

           En annonçant sa disposition à aider la presse, Abdelmadjid Tebboune s’est dit « convaincu » que « sans la presse, on n’ira pas loin ». « Une presse responsable et professionnelle », a-t-il précisé.
           Interrogé sur sa vision pour développer le secteur de l’agriculture, le président Tebboune a répondu que « l’agriculture est une science et non des traditions ».

           Il a par ailleurs réitéré qu’il n’y aura plus d’impunité pour les responsables qui fautent. « La responsabilité, ce n’est pas un fauteuil et un burnous rouge. La responsabilité, c’est protéger le peuple. La responsabilité est difficile. Celui qui faute doit payer, même s’il est ministre », a-t-il assuré.
           Abdelmadjid Tebboune a eu aussi cette déclaration très forte : « L’Algérie est très grande, c’est nous sommes petits. C’est à nous de devenir assez grands pour être au niveau de l’Algérie. »
            



Sûreté de wilaya de Mostaganem

Envoyé par Benjamin
https://www.lesoirdalgerie.com/actualites/demantelement -d-un-reseau-d-organisation-de-traversees-clandestines-par-mer-99743

  - Par lesoirdalgerie - Par: APS 25-05-2023

Démantèlement d'un réseau d’organisation de traversées clandestines par mer

           La brigade de lutte contre le trafic de migrants et la traite d’êtres humains, relevant du service de wilaya de la police judiciaire de la sûreté de wilaya, a réussi à démanteler un réseau spécialisé dans l’organisation de l’émigration clandestine par mer composé de 6 individus, a-t-on appris jeudi de ce corps de sécurité.

           La même source a précisé que l’opération est intervenue suite à une plainte déposée par une personne auprès du groupement territoriale des garde-côtes du port de Mostaganem, faisant état du vol de son embarcation doté d’un moteur d’une puissance de 40 chevaux.

           Exploitant les informations livrées par le plaignant, le procureur de la République territorialement compétent a été informé des faits et une enquête a été ouverte, a ajouté la même source.

           Les investigations enclenchées par les éléments de la brigade ont pu déterminer le lien entre la victime et un certain nombre de candidats à l’émigration clandestine, ainsi que l’identification du passeur, organisant les traversées clandestines, âgé de 30 ans, et ont procédé à son arrestation et celle des autres membres du réseau criminel.

           Les suspects, qui sont des repris de justice, ont reconnu être habitués à organiser des traversées clandestines par mer, avec en moyenne une traversée tous les trois mois, contre la somme de 600.000 dinars pour chaque candidat à l’émigration clandestine, a ajouté la même source.

           L’enquête a révélé que les suspects utilisaient l’internet pour attirer les candidats à l’émigration, à travers des photos et des vidéos trouvées lors des recherches électroniques opérées sur les téléphones mobiles, sous la supervision directe du procureur de la République.

           Selon la même source, l’opération s’est soldée par la saisie d’une embarcation de plaisance rapide, qui faisait l’objet de préparatifs et d’équipement en vue d’une nouvelle traversée clandestine vers l’autre rive de la Méditerranée.

           Sous l’accusation de trafic de migrants, dans le cadre d’une bande criminelle organisée transfrontalière, contre un bénéfice financier, une procédure judiciaire a été engagée contre les suspects, qui ont été présentés devant le procureur de la République près le tribunal de Mostaganem, a-t-on indiqué.


APS                




De M. Pierre Jarrige
Chers Amis
Voici les derniers Diaporamas sur les Aéronefs d'Algérie. A vous de les faire connaître.
    PDF 166A                                                  PDF 167
    PDF 167A                                                  PDF 168
    PDF 168A                                                  PDF 169
    PDF 169A                                                  PDF 170
    PDF 170A                                                  PDF 171
    PDF 171A                                                  PDF 172
Pierre Jarrige

Site Web:http://www.aviation-algerie.com/

Mon adresse : jarrige31@orange.fr


La maman
Envoyé par Eliane

     Un jour, bien lasse, Sarah décida d'aller voir son médecin.
     - Docteur, je ne supporte plus mon mari. Malgré tous mes efforts, mon mari ne me donne pas la moindre importance. Depuis que nous nous sommes mariés, il n'y en a que pour sa mère, sa mère par ci, sa mère par là.
     C'est comme si je n'existais pas.

     - Vous avez déjà tenté de préparer un dîner spécial ?
     - Oui, déjà. Et ça n'a servi à rien... Il a dit que la cuisine de sa mère était meilleure que la mienne !
     - Bien, s'il y a un domaine où votre belle-mère ne pourra pas rivaliser, c'est au lit. Ce soir, vous mettrez une chemise de nuit légère noire et transparente et une petite culotte également noire. La couleur noire est très sexy et très excitante. Mettez également une gaine noire... Il ne va pas résister !

     Ainsi fut fait ! Sarah appliqua au pied de la lettre les bons conseils de son médecin, sans oublier le moindre détail.
     Et quelle transformation ! Elle n'avait jamais été aussi sexy et voluptueuse

     Quand Jacob arriva à la maison, il découvrit son épouse ainsi... dévêtue ! Stupéfait, il mit bien 5 minutes à reprendre ses esprits.
     Il s'épongea le front, s'assit précautionneusement sur un tabouret et s'adressa à son épouse :
     -Sarah, tu es toute en noir... Il est arrivé quelque chose à maman ???




Si vous avez des documents ou photos à partager,
n'hésitez-pas à nous les envoyer. D'avance, Merci.

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Notre liberté de penser, de diffuser et d’informer est grandement menacée, et c’est pourquoi je suis obligé de suivre l’exemple de nombre de Webmasters Amis et de diffuser ce petit paragraphe sur mes envois.
« La liberté d’information (FOI) ... est inhérente au droit fondamental à la liberté d’expression, tel qu’il est reconnu par la Résolution 59 de l’Assemblée générale des Nations Unies adoptée en 1946, ainsi que par les Articles 19 et 30 de la Déclaration universelle des droits de l'homme (1948), qui déclarent que le droit fondamental à la liberté d’expression englobe la liberté de « chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit ».
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