N° 230
Septembre

https://piednoir.fr
    carte de M. Bartolini J.P.
     Les Bords de la SEYBOUSE à HIPPONE
1er Septembre 2022
jean-pierre.bartolini@wanadoo.fr
https://www.seybouse.info/
Création de M. Bonemaint
LA SEYBOUSE
La petite Gazette de BÔNE la COQUETTE
Le site des Bônois en particulier et des Pieds-Noirs en Général
l'histoire de ce journal racontée par Louis ARNAUD
se trouve dans la page: La Seybouse,

Écusson de Bône généreusement offert au site de Bône par M. Bonemaint
Les Textes, photos ou images sont protégés par un copyright et ne doivent pas être utilisés
à des fins commerciales ou sur d'autres sites et publications sans avoir obtenu
l'autorisation écrite du Webmaster de ce site.
Copyright©seybouse.info

Les derniers Numéros : 220, 221, 222, 223, 224, 225, 226, 227, 228, 229,

EDITO

LES VACANCES SONT FINIES

        Comme dirait le poète chanteur Pierre Lozère, " C'est la rentrée ! Pour les petits et les grands ! " Je vous souhaite une bonne rentrée.

         Après un été caniculaire, souhaitons retrouver un peu de fraîcheur. J'espère que votre reprise se passe très bien, parce que le président micron a dit que l'abondance et l'insouciance sont finies, nous allons en baver car c'est la cause à la météo. Comme l'Ukraine, elle a bon dos la météo ainsi que le changement climatique qui est une véritable escroquerie dans laquelle tombent la majorité des citoyens qui ne connaissent pas l'histoire de la géologie et de la climatologie terrienne.

        C'est une longue histoire où même les spécialistes s'entremêlent les guiboles et les neurones sans trop parler des médias qui ne savent faire que de la " broderie " au service de l'état maquereau. (Qui prostitue les citoyens et vit de l'argent qu'ils gagnent à la manière d'un proxénète ou souteneur.)

         Nous, avec la Seybouse, qui ne se tarie pas, ni à Bône ni pour le journal, nous continuons ce travail de mémoire qui n'intéresse plus certaines associations, mais dont les particuliers sont friands.
        Une mémoire dont seuls les P.N. sont porteurs et redevables envers nos ancêtres, ne la laissons pas enterrée par les " déformateurs " en tout genre qui nous ont fait quitter notre terre de naissance.

        En faisant vivre cette mémoire, espérons que nos enfants et petits enfants sauront s'en servir, pour sauver leur peau, lorsque interviendra le grand chamboulement voulu par des envahisseurs aidés par les " déformateurs " ou plus terre à terre les traîtres à leur pays qui n'est pas le mien puisqu'il me considère comme étranger.

         Bonne rentrée à Tout le Monde
Jean Pierre Bartolini          
        Diobône,         
         A tchao.



LA RUE A CHEZ NOUS !
Envoyé par M. Georges Barbara

            G - " Allo Francette, Diocane mais où c'est qu'y étais passée, ça fait cinq fois que j'te telephone et ya personne qu'y répond ! T'yes la main'nan?.
            F - " Et oui atso que j'suis là, pisque j'te parle. O Georgette j'étais juste un peu t'sur la terrasse à étendre ces quat' serviettes, où tu veux qu'je suis ? Et Zek ya pas le feu qu'à même ?
            G - " Non mais rogards un peu en bas de ton balcon dans la rue, ya une drôle de Chaklala qu'elle est entrain de se passer.
            F - " C'est quoi ? C'est un accident ?
            G - " Et non, c'est seulement Madame Atanasio qu'elle est entrain de t'lui faire, à Vincent son mari un madonne d'escandale. Tiens Rogards là...Rogards là ! Elle est t'sur le trottoir du café de Bussetta au milieu de tout ce monde, que c'est juste l'entrac du cinéma Olympia. Et entention les 'oitures parce que la miss a'c la saccade de morts qu'elle lui a balancé, à ce Strounze et ben. C'est des pastèques ça qu'elles ont pas froid aux yeux !
            F- " Et lui Diocane y te dit rien ?
            G- " Y te dit rien ? Fallait 'oir le cataplase qu'y t'lui a mis t'sous le menton t'al'heure ! Areusement qu'y les ont séparés, c'est moi qu'y t'le dit !
            F - " Ouais…. Ouais je t'les vois main'nan et pourquoi cette fin du monde tout d'un coup ? A s'les avait à l'envers c'matin ? Miss trou du Cul ?
            G - " Et ben tu sais pas toi, madame Atanasio elle est descendue et comme Vincent il était au comptoir entrain de se boire une anisette...et.…
            F - " Et tout ça pour une anisette qu'y se prend après qu'y rentre du travail ? Lui qui te jette le sang t'sur les quais du matin au soir, venir lui faire tout ce carnaval devant tous ces Gouaïlles du quartier ? Michkine, entention moi j'lai jamais vu de Gaz cet homme !'
            G - " Laisse toi de l'anisette Francette, mais ça qu'tu sais pas, et ben je va t'le dire moi, moi que je fais ensemblant de pas 'voir les choses et que j'te 'ois tout. Hier après-midi, y'en a une que j'te dirais pas son nom, que c'est une langue de Poutanelle que tu la connais bien, elle est venue raconter à Mado sa femme, que Vincent quand y rentrait du travail, y passait un moment à te faire la cour à la nouvelle Barmède qui z'ont fait venir de France pour t'la mettre derrière le comptoir!
            F- " Et celle là aussi, qu'elle va un peu se faire des cages. Te crois qu'elle aurait gardé sa langue de vipère dans sa poche, cette moins que rien. Mais Georgette, avec ça que tu me dis, c'est une autre chanson. Si ce cats méte'nan à presque 60 ans et avec trois oualiounes y te commence à s'la sentir, où c'est qu'nous allons o Georgette. Ya plus d'la morale alors. C'est quoi ce monde que nous vivons. Dieu préserve, que Saint'Thérèse elle fait qu'une caguade comme ça elle nous arrive pas !
            G - " Aouah le mien y l'a pas interet à bouger parcequ' alors j'te le fais neuf neuf en deux coups. Qui se croivent pas les hommes que nous on est juste bon pour leur faire la cuisine et leur faire les enfants,,,,et ou nous s'en allons alors ? Rogars un peu là ça qu'y l'arrive. Pour une affaire de merde 'oila que c'est toute la colonne qu'elle est en dsus 't'sous !
            F - " Putain t'le vois comme moi à debon c'est plein de monde t'sur le trottoir, y manque plus que le jornalisse d'la dépêche de l'Est y se met au milleux que demain tout Bône y va t'en parler !
            G- " Et rogars main'nan ya même l'agent d'police qu'y l'est de service au cinéma qu'y l'est venu dare dare pour'oir ça qu'y l'arrive. Ca le rogard' à cuila méte'nan les affaires de famille ?
            F- "Ah pisque je te tiens Georgette, dis moi un peu, sans être curieuse, Toinou ton dernier y va se faire la comminion avec mon fils cette année ?
            G - " Pas si sur, si on a les sous…. Moi y faut que je t'invite toute cette famille de Norbert, ceusse qui quand y te mange y te mettent les p'tits dans les grands, et pis moi j'peux pas t'les 'oir en peinture... Oui, sinon on laisse tomber ! Juste la cérémonie à l'église et c'est bon ! Déja 'ac le costume et le brassard qu'on va s'acheter chez Laussatte, on va t'être raides comme des passes lacets, c'est pluss'que sur !
            F - " Eh Georgette dis on t'entend plus rien qu'y vient d'en bas, te dirait que tout ce monde y se sont un peu calmé je crois, on l'entend plus crier cette demi-livre de Mado. Pour du bon tu vas 'oir, y doivent t'être entrain de se boire un coup ensemble !
            G - "A là tu m'etonnerais pas, tiens justement rogards, t'ya des paroles d'évangile toi... Atso les 'oila qu'y te sortent du café et j'en crois pas mes yeux, tu le 'ois com'moi. Diocane on aura tout vu y sont même aussi la main dans la main main'nan, ces deux Canemourtes..
            F - "Ah ma fille j'te disais, le monde c'est plus ça qu'c'était ! A debon, si les vieux y te revenaient…..
            G - " Ouais comme tu dis Francette rentrons va, moi je ferme ma fenetre atroment y sont capables de dire que nous sommes des curieux ! Et de toi à moi, entention personne y l'a rien vu, c'est bon ?

            F - " T'ya raison Georgette, on fait les morts et bouche cousue, mais qu'elle heure y l'est que mon Pachcalou à moi y l'est pas encore rentré. Tu 'ois pas que lui aussi cette Alatche de promière y te commence …. ?…..Alors la, j'te lui fais la tête comme un compteur à Gaz ! Allez ne nous la portons pas à la longue, rentrons et bonne soirée Georgette.

Georges Barbara

La Galette des Corailleurs.
Un testament dans une recette.
Un grand vieux chêne m'a dit un jour
qu'il me fallait sans plus attendre,
pour découvrir tous les secrets,
du Bastion et de son histoire,
aller goûter aux doux ombrages
des grands vieux arbres du village.

Mon grand vieux chêne nous a quitté,
en emportant dans ses deux mains,
un peu de terre de son pays.
Mais aujourd'hui c'est la Noël,
je pense beaucoup à mon vieux chêne
à sa sagesse à ses conseils…

Sans plus tarder je suis allé;
sous la ramure d'un autre chêne,
qui toujours clame et dresse la tête,
malgré les ans et la tempête.
Dans son sillage brave et serein,
comme le parfum de son bon pain,
avec respect et humblement je l'ai prié de me conter,
rien qu'une fois quelques secrets.

Avec l'accent de notre Bastion,
tranquillement il devait,
m'expliquer quelques beaux mystères de notre terre.
Cette belle histoire n'est qu'une galette,
ronde et dure
comme le labeur de nos ancêtres,
les fiers Corailleurs.
Ce pain des pauvres de notre cité,
il fallait bien que je le tire,
du four ardent de mon vieux chêne.

Mais au delà d'une galette naïvement peut-être,
je vois,
que ce pain dur de nos ancêtres n'était point banale recette.
Son éternelle longévité voulait-elle dire :
" je survivrai ! ? "
Dans la galette cette devise en héritage de nos anciens,
était déjà inscrite en toute lettre,
bien avant-même de figurer en bonne place sur notre blason.

Écoutez bien ce qui va suivre.
Faisons-le lire à nos enfants,
car ce récit est authentique et la galette cette inconnue,
mérite bien qu'on parle d'elle.

Mais laissons donc parler Horace,
peut-être me donnera-t-il raison ? !
Jean-Claude Puglisi

- de La Calle de France.
Paroisse de Saint Cyprien de Carthage.

**********************
Historique
de la Galette des Corailleurs :

( Propos recueillis auprès de Monsieur Horace SCALA
- boulanger-pâtissier à La Calle de France.)

        Origine de la galette :
        La galette a été importée par les Corailleurs venus de Naples au XVIII° siècle. C'est à La Calle entre 1850 et 1880 qu'un napolitain nommé Vincent TRAMA, lequel, exerçait conjointement les professions de corailleur et de boulanger, qui, semble-t-il, devait introduire la célèbre galette dans notre cité du Corail.

        C'est auprès de M.Vincent TRAMA que le regretté M. Horace SCALA, devait faire le dur apprentissage du métier du pain et dans le même temps son maître - qui était aussi son oncle -, lui enseigna au cours du temps tous les subtils secrets des galettes .

        Mais ne vous y fiez pas ! Car si autrefois le maître boulanger avait consenti à me conter la galette et devait me révéler tous ses secrêts, ce que j'ai pu retenir de cette histoire c'est l'un de ses conseils où il dit en substance : " surtout n'essayez pas de la faire ! "

        Anatomie de la Galette des Corailleurs :
        De forme ronde avec un diamètre de 10 cm et une épaisseur de 2 à 2,5 cm.
        Très légère puisqu'il en fallait de 6 à 7 pour faire 1 kg.
        Percée au centre par 6 ou 7 trous de la grosseur d'un clou.

        Ses qualités étaient nombreuses : une grande dureté - des propriétés de conservation qui la bonifiaient et permettaient sa consommation jusqu'à 6 et même 8 mois après sa fabrication.

        Il est donc aisé de comprendre alors pourquoi, cette galette était très adaptée à la vie des Corailleurs, qui précieusement la stockaient dans des sacs de jute à bord des corallines.

        Composition des Galettes : 2 secrets.
        ( 100 kg de farine donnaient 80 galettes.)

        Très peu d'eau pour la pétrir et levure de boulanger : 15 à 20 litres - soit la moitié de la quantité nécessaire pour faire du pain normal. Cette dose d'eau minimum lui conférait sa dureté, condition nécessaire à sa longévité - c'est là son premier secret.
        Surtout jamais de sel - c'est là son deuxième secret.

        Préparation des Galette : un symbole de solidarité.

        C'était une longue, difficile et très pénible opération, que de pétrir laborieusement pendant 40' une pâte sèche et dure. Le travail de pétrissage se faisait à la force des bras, mais aussi et surtout à l'aide des pieds, tant cette phase de préparation était ingrate.

        La préparation des galettes se faisait le plus souvent une à deux fois par semaine. A cette occasion, il était de coutume que les boulangers du village, viennent prêter leurs mains et pieds pour aider les confrères dans l'accomplissement de cette rude tâche : c'est là que la solidarité se manifestait.

        Cette pâte consciencieusement pétrie, était divisée en pâtons réguliers qui représentaient la valeur d'une galette. Puis chacun de ces pâtons était roulé en boule, puis, aplati et enfin façonné en galette. L'opération se terminait enfin par la réalisation de trous centraux.

        Pendant que le four chauffait, on installait quelques instants les galettes à proximité, ce qui avait pour conséquence de faire légèrement durcir leurs surfaces.

        La cuisson était de 35' à 45' environ et lorsque les galettes avait pris une belle couleur on les retirait du four.

        Le maître boulanger testait alors la parfaite cuisson des galettes, en les heurtant l'une contre l'autre : il en sortait alors un bruit caractéristique, comme si l'on cognait deux morceaux de bois sec. Dans ce cas la fournée était des plus réussie et le boulanger satisfait.

        FACON de CONSOMMER les Galettes :
        - Chaudes ou tièdes avec de l'huile d'olive :
        dés leur sortie de la boulangerie.
        - Froides, sèches et dures :
        Plusieurs jours ou mois après, ce qui était le plus souvent le cas.

        On la brisait en petits morceaux dans la bouillabaisse, dans la soupe de pâtes, mais surtout dans la fameuse castagnade, où la galette cohabitait parfaitement avec les haricots blancs en sauce…
        On raconte qu'autrefois à bord des Corallines, dés que l'équipage jetait les filets à l'eau, le mousse qui était chargé de préparer le repas, s'employait déjà à faire tremper ces dures galettes. C'est dire qu'il fallait un certain temps, pour venir enfin à bout de la dureté des galettes et ainsi pouvoir les consommer.
        Mais plus elles étaient vieilles et dures meilleures elles étaient et Horace devait discrètement me confier, que lorsqu'il désirait une bonne galette pour se régaler, il s'en allait retrouver les pêcheurs sur les quais, pour négocier l'achat de quelques galettes vieilles et dures - celles-là même, qu'il avait depuis longtemps déjà mises sur le marché.

        GRANDEUR et DECADENCE d'une Galette :
        - Comme nous avons pu le noter, la fabrication des galettes nécessitait un travail extrêmement pénible et laborieux. Mais il faut cependant noter qu'à partir d'une certaine époque, on a pu assister avec tristesse au déclin de la pêche du corail et par conséquent à la fuite des corailleurs : ces deux éléments sont à l'origine de l'arrêt quasi total de la fabrication des galettes.
        - Jusqu'en 1950 M. Horace SCALA devait continuer d'en faire, pour être agréable à quelques familles Calloises attachées à ces divines galettes. Mais pour continuer l'histoire il faut savoir que la galette des corailleurs était aussi fabriquée à Bône : M. Horace nous avait révélé que Joseph dit Pépino, un des fils de M. TRAMA qui avait installé sa boulangerie dans cette grande cité, où, à l'instar de son père, il voulut faire des galettes. Mais hélas ! Bien que compétent en la matière à sa grande surprise, jamais il n'a pu réaliser de bonnes galettes comme à La Calle.
        - Et Horace de me dire :
        " Tu comprends ! L'eau de Bône c'est pas la même chose… A La Calle c'est l'eau du BOULIF qui faisait les bonnes galettes. "
**********************
La Galette des Corailleurs.
( Recette de M. Horace SCALA +, Boulanger-Pâtissier à La Calle.)

        Ingrédients :
        - 1 kg de farine = 6 à 7 Galettes.
        - 40 g de levure de boulanger.
        - 1/5 à 1/4 de litre d'eau tiède = 200 à 250 ml

        Préparation de la galette des Corailleurs :
        - Délayez la levure de boulanger dans un peu d'eau tiède.
        - Faire un puits de farine.
        - Mettre au milieu : la levure de boulanger délayée + 200 à 250 ml d'eau tiède.
        - Pétrir longuement sur un plan fariné.
        - Divisez la pâte en 6 ou 7 pâtons.
        - Faire 6 à 7 boules de pâte.
        - Aplatir les boules de pâte pour formez des galettes de 2 à 2,5 cm d'épaisseur et 10 cm de diamètre.
        - Perforez de 6 à 7 trous le centre des galettes à l'aide d'un clou moyen.
        - Laissez un moment les galettes prés de l'entrée du four.
        - Cuire dans le four 35 à 45' environ.

        Conseils culinaires :
        - Très peu d'eau : comptez la moitié de la quantité nécessaire pour pétrir une pâte à pain normale ( soit pour 1 kg de farine = 1/4 de litre d'eau ).
        - Pas de Sel ( très important ) !
        - Pétrir très longuement.
        - Astuce de M. Horace : pour perforer la partie centrale des galettes, se munir d'une planchette à 6 ou 7 clous.
        - Lorsque les galettes sortent du four, les cogner les unes contre les autres : il doit en sortir un bruit caractéristique, comme lorsque l'on heurte 2 morceaux de bois secs - c'est le meilleur test qui signe l'excellente cuisson !

        Se consomment :
        - Chaudes ou tièdes avec de l'huile d'olive
        - Froides, dures et vieilles de plusieurs jours, voire, de plusieurs mois - avec la bouillabaisse - les pâtes - mais surtout avec la célèbre et fameuse Castagnade.
        - Plus les galettes sont vieilles - bien meilleures elles sont !
        - Peuvent se garder 6 à 8 mois rangées bien au sec et peut-être même plus !
Jean-Claude PUGLISI.
de La Calle de France
83400 - HYERES.


MUTILE N° 144, 6 juin 1920
LES CRIMES DE LA GUERRE
Un Journal du Pas de Calais

CRAIGNANT LES REPRESAILLES ENNEMIES, UN MAIRE DE L'AISNE AURAIT NOYE UN SOLDAT FRANÇAIS

               Des faits dépassent l'imagination et malgré les affirmations formelles apportées dans ceux qui vont être rapportés, nous nous refusons encore à croire à d'aussi épouvantables et stupéfiants agissements.
               Au commencement de septembre 1914, pendant la retraite, de son régiment venant de Belgique, le soldat Letermellier, du 4ème zouaves, fatigué et malade des dures marches qu'il venait de faire, s'arrêtait à Reuilly-Sauvigny, aux environs de Dormans, Mystérieusement, il disparaissait.
               Dernièrement, son père, demeurant au Pré-Saint-Gervais (Seine)," avenue de la République, 10, apprenant que son malheureux fils était inhumé à Reuilly-Sauvigny, se rendait, dans cette commune.

               Là, par la rumeur publique, il apprenait cette épouvantable chose, que pour échapper aux représailles des Allemands, qui arrivaient et menaçaient de mettre tout à feu et à sang, s'ils trouvaient en liberté un seul soldat français dans le pays, le Maire du village, accompagné de deux autres individus, aurait saisi le zouave et l'aurait " supprimé " "en le jetant dans la Marne. Ceci se passait le soir du 3 septembre 1914.
               Après enquête et après avoir pris les renseignements pouvant donner quelques éclaircissements sur cette tragique affaire, M. Letermellier père a déposé une plainte entre les mains de M. le Procureur de la République de Château-Thierry.

               Le Maire et deux autres individus sont inculpés. L'affaire en est là.
               Les faits révélés par notre confrère du Pas-de-Calais et qui n'ont nullement été démentis jusqu'à ce jour, révèlent chez les mauvais Français qui en sont les auteurs une incroyable sauvagerie dont les canaques eux-mêmes rougiraient s'ils le pouvaient.
               Ne pas faire son devoir quand l'ennemi était lai, foulant le sol de France, c'était déjà bas et lâche, mais assassiner froidement un compatriote, un glorieux soldat qui avait traversé la mer pour opposer sa poitrine à la ruée des hordes germaniques, font simplement par représailles des Allemands, cela n'a pas de nom, c'est un crime qui dépasse l'imagination et dont toutes les sévérités de notre code ne puniront jamais assez l'horrible forfait.
               Le cas est, fort, heureusement, sans précédent et contraire aux traditions d'honneur de nos hospitalières et braves populations métropolitaines dont l'admirable dévouement est inoubliable pour ceux, qui ont été leurs hôtes.
               Mais que penser des lenteurs de la justice à châtier les coupables et comment se fait-il qu'il n'y ait qu'inculpation là où depuis longtemps il devrait y avoir arrestation et incarcération ?
R. FRANCE.


PHOTOS de BOU-SAADA
Envoyé par M. Divers contributeurs

Vue générale




Vue générale






Quartier Indigène






Rue Marty






Rue Mouamines






Ecole de garçon





BOUGIE CONNAISSEZ-VOUS CE MOT
Envoyé par M. Louis Aymes
                 

           Pourquoi la capitale de la Kabylie, cette ville qui a vraiment été une Capitale de Royaume, pourquoi s'appelle-t-elle Bougie ?

           Il y a plus de 2000 ans, des navigateurs intrépides, venus de l'Est de la Méditerranée, fondaient en Afrique du Nord des comptoirs, qui leur permettaient de commercer avec les tribus locales.

           Entre autres points, ils se fixèrent sur une plage auprès d'une rivière qui ne s'appelait pas encore la Soummam. Peut-être étaient-ils poètes, émerveillés par ce site enchanteur à l'abri de la masse puissante du Gouraya face au golfe, au milieu d'une végétation éblouissante !

           Mais ils n'étaient peut-être que des marchands ne voyant là qu'un lieu aux abords faciles, à l'eau fraîche et pure, habité par une population aux mœurs douces avec laquelle il était facile de commercer.

           Comment s'appelait ce lieu à cette époque ? Probablement SALDAE. Plus tard, vinrent les romains. Ils firent de SALDAE une station navale importante et la ville qui recevait l'eau de Toudja par un aqueduc de plus de seize kilomètres aurait reçu le surnom de "Ville Splendissime"
           Mais le règne de Rome s'efface... SALDAE devient peut-être BAGAÏSI sous les rois berbères de Mauritanie. Nous ne savons pas comment se prononçaient ces noms de BAGAÏSI, de BEDJANA, plus tard de BEDJAIA, mais ils se ressemblent.

           Les siècles s'écoulent et GENSERIC, le conquérant vandale fait de BAGAÏSI une capitale. Gloire éphémère ! Bientôt le flot envahisseur des Arabes submerge l'Afrique du Nord et les Kabyles chrétiens doivent accepter le joug de l'Islam. Les Aghlabides de Tunis prennent la ville et l'appellent BEDJANA. Le commerce est important, surtout avec les Maures d'Espagne qui donnent aux peaux de moutons travaillées qu'exporte BEDJANA, le nom de "Gadana", la basane.

           Les villes florissantes ont toujours tenté les envahisseurs ! Obeid Allah, le Fatimide s'empare de BOUGIE et la détruit au début du Xéme siècle. Le silence règne sur les ruines pendant plus de cent cinquante années,' mais la destinée de la ville doit s'accomplir. Au milieu du Xléme siècle, un chef Zirite, ENNACER, quitte la Kalaâ des Beni-Hamad, près de M'SILA et ressuscite BOUGIE de ses cendres.
           II veut donner à la nouvelle ville le nom d'ENNACERIA et promit d'exempter d'impôts ceux qui l'habiteront.

           Les habitants affluent et le commerce reprend : dès l'an 1151, les Pisans, puis bientôt les Marseillais, y installent un agent consulaire, ce qui place notre capitale au premier rang des villes commerçantes d'Afrique du Nord. Mais le rêve d'ENNACER ne s'est pas réalisé : la ville n'a pas conservé son nom et c'est BEDJAIA qu'elle s'appellera désormais.

           Ce nom écorché par les Européens devient BUGGÏA, Bougia puis en français BOUGIE. La cire qu'on expédiait en France servait à faire des chandelles de luxe qu'on appela "bougies".
           Quelle est la ville qui peut se vanter d'avoir donné son nom à deux produits d'exportation - la basane et la bougie de cire ?...
Roger MEUNIER
(Avenir de Bougie) - (19... ?)

Pour voir une page plus complète sur la ville de Bougie :
https://fr.wikipedia.org/wiki/B%C3%A9ja%C3%AFa



LE PAIN DE SUCRE SOUVENIRS ET REGRETS
ECHO D'ORANIE - N° 292

               Petit coin merveilleux plein de charme et de tranquillité mais un peu oublié, situé en bordure de mer dans une crique à un kilomètre environ après le Cap Falcon en direction des Coralettes. Cette anse était bordée de villas en dur, alignées les unes après les autres, faisant face au large de la mer. Les premiers occupants de ces lieux vers 1930 furent mon beau-père M. Sevilla Charles et un parent M. Pomares qui construisirent leur villa de leurs propres mains. Un peu à l'écart existait la petite ferme de M. Salvador puis vinrent petit à petit d'autres riverains dont je cite quelques noms mais non dans l'ordre d'arrivée, les familles Sauve, Personnaux, Lopez, Sadok, Garcia, Rodriguez et Mataix, Roujas, Ribes, Galvez etc...

                La villa de mes beaux-parents que j'ai connue en 1949 en même temps que ma future épouse, se trouvait à une cinquantaine de mètres des rochers bordant la mer; une cour intérieure avec un garage, sur la droite deux figuiers de chaque côté de l'entrée qui donnaient des fruits délicieux, à gauche une petite cuisine d'été, à l'intérieur une grande salle à manger avec un petit balcon face à la mer, trois chambres à coucher, sur le côté une petite cuisine avec une petite fenêtre sur le bord duquel se posait notre "frigidaire", une gargoulette en argile remplie d'eau entourée d'un chiffon mouillé pour essayer de maintenir le contenu un peu frais.

               De temps en temps il m'arrivait d'aller au Cap Falcon (chez Marin) à pied chercher une barre de glace et revenir sous la chaleur avec la moitié de la barre. Quelle était bonne à l'arrivée, l'anisette bien fraîche.

               Le soir en été nous jouions aux cartes dans la cour avec une lampe acétylène pour nous éclairer. Nous n'avions ni eau potable, ni électricité mais toutes les installations avaient été prévues, à l'intérieur nous nous éclairions au "butane" avec lampe à pétrole et lampe acétylène en secours. Nous captions l'eau de pluie de la citerne placée sur la terrasse et ramenions d'Oran des bouteilles en bombonne d'eau potable.

                Les villas dessinaient un demi-cercle autour de cette anse, toutes face à la mer. En été, nous empruntions un petit sentier qui nous menait au "Pain de Sucre", énorme amas de rochers formant un pain de sucre que les vendeurs arabes avaient sur leur étal. Après avoir dépassé ce lieu, nous arrivions à la "Gramma" succession de rochers et petites plates formes où les pieds dans l'eau, nous pouvions pêcher face au grand large, que de belles pêches! Aublades, sars, girelles et autres poissons de roche. Sur notre retour, nous croisions de petites colonies de perdreaux, nullement effrayées par notre passage. Nous laissions sur le côté le parc Sauveur et la petite maison de Martinez, la petite plage dite du "Curé" pour arriver à l'heure du bain au Petit Port, lieu de nos baignades, nous plongions dans une mer assez profonde où se retrouvaient tous les jeunes et moins jeunes du coin, que d'amusements et de joies !

                Ce petit port avait un plongeoir en ciment construit par quelques riverains, ainsi que quelques garages à bateaux construits dans la roche où étaient remisés quelques bateaux dont celui de mon beau-père avec lequel nous sortions en mer pour pêcher et ce, à la force du poignet. Nous ramenions des araignées (vives), des "tapas culots", des pageots et vers la tombée de la nuit des "bezougues", quelques rares "peignes" multicolores, plus jamais retrouvés chez nous ni en métropole ni en Espagne.

               Avec le bateau à moteur des Rodriguez, nous allions bien plus loin au large où nous faisions des pêches plus importantes avec nos palangrottes, nous ramenions toujours du poisson que notre "Mam's" nous préparait de façon succulente

                Pour nous rendre au Pain de Sucre, nous empruntions les cars de la "SOTAC" qui nous déposaient au Cap Falcon devant l'épicerie "Marin", ensuite avec mon beau-père dans sa C4, que de voyages mémorables !

               Il nous est souvent arrivé de nous rendre au Pain de Sucre en hiver à l'occasion de week-end ou de vacances, c'étaient des promenades dans les dunes de sable où nous ramassions des fleurs et des escargots quelquefois sous la pluie, avec des moments de solitude et de tranquillité!

                Puis les années se succédant remplies de vacances et de souvenirs, nous avons eu la naissance de notre premier enfant en 1956 qui lui aussi a connu ce petit paradis (ses souvenirs sont très vagues maintenant, le temps ayant fait son cheminement).

               Vers la fin 1959, une mutation en avancement dans ma profession m'a projeté assez loin d'Oran, nos séjours se sont espacés pour en arriver au grand départ que nous avons tous subi. Que de pleurs, que de regrets mais le "Pain de Sucre" est resté gravé à jamais dans nos cœurs et nos mémoires, surtout pour mon épouse qui dès l'âge de 3 ans a passé toutes ses vacances dans ce lieu idyllique.

                Je dédie ce récit à mon épouse née Janine Sevilla à l'occasion de nos 52 ans de mariage (avril 1952), à la mémoire de mes beaux-parents M. et Mme Sevilla Charles, à mes enfants et petits-enfants, à tous les riverains aujourd'hui disparus, à leurs descendants, à tous ceux vivants qui se reconnaîtront et à ceux qui ont passé des séjours ou vacances dans ce petit paradis incomparable.
Henri GARCIA



Cérémonie du 2 juillet 2022
Texte d'Evelyne Joyaux
Envoyé par Mme Bouhier
Cathédrale d'Aix-en-Provence - 150ème anniversaire de la consécration de Notre-Dame d'Afrique à Alger, le 2 juillet 1872.

Introduction à la Messe Notre Dame d'Afrique
Cathédrale d'Aix du 2 juillet 2022

         Le 2 juillet 2022 nous voici réunis à Aix-en-Provence, dans la Cathédrale Saint-Sauveur, pour commémorer l'anniversaire de la consécration de la Basilique de Notre-Dame d'Afrique, à Alger, il y a 150 ans.
         Nous n'oublions pas " 1962 " dont c'est aussi l'anniversaire. " 1962 " n'est plus seulement une date, mais le nom que nous donnons à l'arrachement, à la souffrance, à la solitude de nos parents plus encore qu'aux nôtres.

         A vrai dire chaque année nous recommençons la même traversée. Nous dépassons le 24 janvier, puis le 26 mars, puis le 22 avril, puis le 13 mai. Ces dates, qui sont insignifiantes pour la plupart des Français, constituent pour nous autant de stations avant le 5 juillet, les massacres d'Oran et les centaines d'enlèvements. Ces enlèvements dont nous, les survivants, ne guérissons pas, dont nous ne pouvons pas guérir.
         Alors la noria des dates se poursuit.

         Et voilà qu'à mi-chemin de cette année 2022 particulièrement sombre, nous avons une trouée de ciel bleu, une trouée de paix, une trouée d'espérance.
         Nous ne l'avions pas prévue, nous n'y pensions pas. Marie s'est invitée parmi nous comme elle le faisait en Algérie, que nous soyons croyants ou non. Et finalement cela ne nous étonne pas vraiment.
         Il a fallu qu'une personne que nous ne connaissions pas, mais qui est attaché à NDA nous apporte une aide matérielle. Il a fallu qu'un Père Blanc, le Père Guy qui préside cette messe vienne d'Alger pour nous. Il a fallu qu'un accueil bienveillant nous soit réservé dans la cathédrale Saint Sauveur et qu'il nous soit accordé d'y célébrer cette cérémonie.
         Si bien que ce 2 juillet, dans la cathédrale d'Aix-en-Provence, notre basilique d'Alger est contenue toute entière.

         Que l'on soit croyants ou incroyants, catholiques ou non, nous y retrouvons le souvenir de Marie telle que nous la voyions alors, son doux visage incliné vers nous et les mains ouvertes.

         A Alger, au-dessus de l'autel, Marie souriait à nos robes de communion un peu trop jolies, un peu trop ouvragées, dont les prêtres reprochaient la frivolité à nos mères. Elle souriait à nos rameaux d'enfants empapillotés de papier doré ou argenté, auxquels pendaient des sujets en sucre et en chocolat.

         Derrière Elle, derrière Marie, jusqu'à la fin, c'est-à-dire jusqu'à l'arrachement définitif, l'inscription "Notre-Dame d'Afrique priez pour nous et pour les musulmans " demeura sur la voûte

         Elle demeura même après que la rafale de mitraillette ait fauché les gens sur le trottoir, à quelques mètres de la basilique. Elle demeura, malgré l'égorgement du coiffeur notre voisin ; malgré la bombe posée sur un appui de fenêtre, dans notre école... "
         La demande qui était faite à Marie de prier pour nous et pour les Musulmans n'était pas destinée à servir d'alibi aux Français d'Algérie, face à leurs détracteurs, 150 ans plus tard.

         Cette inscription était là chaque dimanche pour tous les enfants, lorsque le nez en l'air, ils lisaient les ex-voto en pensant aux malheurs que la Vierge avait conjurés. Cette inscription était là lorsqu'ils admiraient les maquettes taillées par les marins que Marie avait gardés de la tempête ; elle était là lorsque les femmes en haïk venaient s'asseoir en silence dans la basilique.

         Dans le Mystère du porche de la Deuxième Vertu, Charles Péguy prétend que l'Espérance étonne Dieu lui-même. Il la compare, cette Espérance, à une petite fille jouant au cerceau entre ses deux grandes sœurs, la Foi et la Charité. C'est une petite fille qui ne calcule rien, n'explique rien, ne choisit pas ses mots.

         N'est-ce pas étrange ? 60 ans après l'exode, la peur, la solitude, les enlèvements, la mort des nôtres et la révolte des survivants, en 2022, après les colloques, les débats, la condamnation sans cesse recommencée de ce que nous sommes, de ce que furent nos familles, voilà que la petite fille espérance se serait donc faufilée jusqu'à nous dans la Cathédrale Saint-Sauveur.
         " La foi dit Dieu, ça ne m'étonne pas /. La charité ça n'est pas étonnant ! .. Mais l'espérance, dit Dieu, voilà ce qui m'étonne "

Prière universelle. (Jacques et Nicole) Jacques :

         · Pour ceux qui ont défriché, semé, bâti, soigné, enseigné en terre algérienne, et dont l'œuvre aujourd'hui est salie.
         Prions le Seigneur Nicole :
         · Pour ceux des montagnes de Kabylie et des villages du djebel qui sont restés fidèles à la France, ont combattu pour Elle et ont été abandonnés par Elle.
         Prions le Seigneur
         · Pour ceux, officiers, soldats, civils, qui ont mis en jeu leur carrière, le bien-être de leur famille et l'avenir de leurs enfants, pour ceux qui furent emprisonnés ou fusillés parce qu'ils avaient voulu respecter la parole donnée et protéger les populations dont ils avaient été chargés d'assurer la sécurité.
         Prions le Seigneur
         · Pour ceux qui nous ont accueillis, soutenus, aidés, à notre arrivée en métropole en 1962, lorsque l'hostilité et l'opprobre étaient générales ; ceux qui ont édifié un mémorial contre l'effacement de la vie des nôtres en Algérie, comme ce fut le cas ici, à Aix-en-Provence.
         Prions le Seigneur
         · Pour nos pères qui ont tant espéré l'amour de la France, se sont battus pour Elle dans l'honneur, et qui sont aujourd'hui traités en criminels.
         Prions le Seigneur
         · Pour nos enfants, afin qu'ils puissent découvrir un jour, dans leurs livres d'histoire, les raisons qu'ils ont de respecter notre passé en Algérie, d'y puiser des leçons de courage, le goût de construire, et celui de la vie.
         Prions le Seigneur



La Cuisine du Bastion de France.
Calamars farcis.

        Ingrédients pour 8 personnes:
        Pour les calamars farcis :
        1 beau Calamar frais par personne.
        3 Oeufs frais.
        1 hachis d'Ail et Persil.
        Chapelure, ou, pain rassis râpé.
        1 sachet de Gruyère et Parmesan râpés.
        Sel et poivre.
        Pour la sauce tomate :
        1 gros oignon.
        Quelques gousses d'ail.
        1 boite moyenne de concentré de 140 gr à 28 %
        6 tomates bien mûres ou 1 boite 4/4 de tomates pelées au jus.
        Sel, poivre, thym, 1 feuille de laurier.

       
        Préparation des calamars farcis :
        Préparation des calamars :
        Ôtez les têtes, nettoyez et videz bien l'intérieur des calamars.
        Rincez à grandes eaux, égouttez et séchez au papier Sopalin.
        Réservez les têtes à part.

        Préparation de la farce à calamars :
        Faire une farce avec : la partie charnue des têtes de Calamars et leurs tentacules hachées menue + le hachis d'ail et persil + la chapelure ou le pain rassis râpé + le Gruyère râpé + 3 oeufs frais battus en omelette + Sel et poivre.
        Mélangez parfaitement.
        Farcir les calamars aux ¾ seulement.
        Fermez à l'aiguille et au fil à repriser blanc ou avec un petit pic de bois

        Cuisson des calamars farcis :
        Faites dorer doucement les calamars farcis, dans une bonne quantité d'huile d'olive.
        Réservez à part.

        Préparation de la sauce tomate :
        Préparez la Sauce tomate dans la même cocotte : rajoutez de l'huile d'olive et faire blondir 1 gros oignon coupé en rondelles avec l'ail.
        Mettre : 1 boite moyenne de concentré + 6 tomates bien mûres pelées et épépinées ou 1 boite 4/4 de tomates pelées au jus.
        Ajoutez : 1 verre d'eau + sel + poivre + thym + 1 feuille de laurier.
        Laissez doucement cuire à couvert environ 30'.

        Cuisson des calamars farcis dans la sauce tomate :
        Disposez les calamars farcis dans la cocotte et sa sauce tomate.
        Couvrir d'eau.
        Mijotez à couvert encore 30 à 45' environ.

        Conseils culinaires :
        Rectifiez le niveau de sauce au cours de la cuisson.
        Servir les calamars farcis dans un grand plat de service et la sauce avec des pâtes fraîches ou du riz.
        Pas de fromage râpé sur les pâtes, lorsque la sauce tomate est cuisinée avec un produit de la mer.
        Il ne faut pas choisir des calamars trop gros ou trop petits : 1 calamar par personne guidera le choix.

        Astuce personnelle de préparation :
        Disposez les calamars farcis dans un plat réfractaire bien huilé et les recouvrir d'une crépine de porc.
        Salez et poivrez + 1 bonne pincée de thym.
        Cuire au four.
        Préparez la sauce tomate à part et laissez longuement mijoter.
        Lorsque les calamars farcis et sauce tomate sont cuits, réalisez leur union tous feux éteints et cocotte fermée : les calamars farcis et la sauce tomate se gorgeront alors de leurs parfums réciproques.
        Cette recette est très laborieuse : il est indispensable de bien s'organiser avant de s'engager dans l'aventure des calamars farcis !
        Mais, cela en vaut bien largement la peine !

        Autre astuce personnelle :
        Ingrédients =
        - Tubes de calamars surgelés : 1 sac de 1 Kg contient 10 tubes.
        - 1 sac de 1 kg de petites seiches surgelées / pour 20 tubes
        - 1,800 à 2 kg de chair à saucisse, pour 20 tubes de calamars à farcir.
        - Farcir les tubes de calamars avec = les petites seiches hachées finement + chaire à saucisse + 1 ou 2 Oeufs / kg de viande hachée + un bon hachis d'ail et persil + du fromage râpé + sel et poivre + thym + fond de veau en poudre.
        - NB = je mets parfois dans la farce un sachet d'amande en poudre.
        - NB = les petites têtes des seiches à mettre dans la sauce tomate.
        - Servir avec =
        - des Tagliatelles, ou, avec du Riz cuit dans un bouillon de Volaille ( KUB ) + champignons de Paris que l'on aura poêlés avec ail et persil + olives vertes dénoyautées.
Jean-Claude PUGLISI
de La Calle de France
Paroisse de Saint Cyprien de Carthage.


Notre mémoire II…
Par M.José CASTANO,

Vous avez été nombreux à m'exprimer votre ressenti suite à l'article " Il y a 60 ans… l'EXIL ". Il en a résulté beaucoup d'émotion, de chagrin, de nostalgie et de rancœur… Nombreux aussi sont ceux qui ont émis le désir de voir une suite à ce drame car, à celui du départ, allait s'ajouter -tout aussi dramatique- celui de l'arrivée en France Cet article est dédié à tous ceux qui ont connu les affres de cet exode. Qu'ils n'oublient jamais ! Pour revoir l'article sur " l'Exil ", cliquez sur : IL Y A 60 ANS "L'EXIL"
       " Des années d'amour ont été effacées par la haine d'une seule minute " (Edgar Allan Poe)

… ET ILS NOUS ONT ACCUEILLIS AVEC DES CRIS DE HAINE

       … Peu à peu, le soleil, pareil à une meule incandescente, émergea des flots. Tout autour du navire, les eaux soyeuses tournoyaient lentement, en vastes cercles concentriques qui s'évanouissaient à la limite extrême de l'horizon. Un haut-parleur annonça bientôt que l'on apercevait les côtes de France. Mal réveillés, ils montèrent tous sur le pont. Sous le ciel gris, la côte paraissait noire.
       Des oiseaux de mer passaient au-dessus du bateau en poussant leurs cris aigus.

       Ils étaient tous là, serrés les uns contre les autres, appuyés à la rambarde. Le paradis dont ils avaient tellement rêvé, enfants, à travers les pages d'un livre de géographie approchait lentement et déjà ils n'en voulaient plus. Ils rêvaient à un autre paradis perdu : l'Algérie ; c'est à elle qu'ils pensaient tous à présent. Ils n'étaient pas les frères douloureux qui arrivaient pour faire panser leurs blessures, mais des étrangers. En eux remontaient des aigreurs. Le regret de ce qui n'était plus suffisait à faire revivre ce qui aurait dû être…

       Ce qu'ils avaient laissé " là-bas ", c'était avant tout cette part d'insouciance qui les faisait chanter et rire. En foulant pour la première fois le sol de la France, ils apprendraient brutalement la signification du mot " demain " dans une situation que personne n'avait pu prévoir et le qualificatif de " Rapatrié " serait apposé à chacun d'eux. C'était une manière comme une autre de les déposséder à tout jamais de ce sol qui les avait vus naître, de leur dire que jamais il n'avait été leur patrie. Et l'angoisse les étreignait car déjà la presse progressiste et bon nombre de politiques les avaient condamnés. C'est ainsi que " l'Humanité " du 6 Janvier 1962 parlait d'eux en ces termes " Ils ont une drôle d'allure ces passagers en provenance d'Algérie " et " La Croix " du 24 Février recommandait au sujet des jeunes rapatriés qu'il fallait " éviter de laisser notre jeunesse se contaminer au contact de garçons qui ont pris l'habitude de la violence poussée jusqu'au crime ".

       Robert Boulin, secrétaire d'Etat aux rapatriés, avait déclaré le 30 Mai 1962 au Conseil des Ministres : " Ce sont des vacanciers. Il n'y a pas d'exode, contrairement à ce que dit la presse. Ce sont bien des vacanciers, jusqu'à ce que la preuve du contraire soit apportée "… tandis qu'au nom du Parti communiste, M. Grenier s'indignait de la réquisition d'une colonie de vacances pour les " saisonniers "… Le 5 Juin, par l'entremise de " l'Humanité ", François Billoux, député communiste, conseillait au Gouvernement de loger les rapatriés " dans les châteaux de l'OAS ", ajoutant : " Ne laissons pas les repliés d'Algérie devenir une réserve de fascisme ".

       Lorsque ces nouveaux " vacanciers " débarquèrent, ils découvrirent aussitôt que le malheur ce n'était pas propre, pas beau à voir. Partout de lamentables cargaisons humaines où les matelas mal ficelés côtoyaient les cages à canaris. Des hommes, des femmes, des vieillards, dépenaillés, hirsutes, démoralisés, souffrants, la marche pesante, le découragement dans l'âme, tandis que les mamans étaient tiraillées en tous sens par leurs enfants qui pleuraient et poussaient des cris. On ne voyait plus que la morne lassitude des silhouettes courbées sous des charges hâtivement nouées qui donnaient l'impression d'avoir emporté, là, la part la plus précieuse du foyer. Mais la part la plus précieuse, en réalité, nul n'avait pu l'emporter avec soi, parce qu'elle dormait dans l'ordonnance des murs et dans la lumière qui baignait les paysages où s'étaient allumés les premiers émerveillements de l'enfance… on n'enferme pas les souvenirs, le soleil et la mer dans une valise !...

       Certains arrivaient dans un état de dénuement physique et matériel invraisemblable… Misère vestimentaire, délabrement… Il s'élevait de ce troupeau une rumeur faite non de cris mais de sanglots, de paroles qui revenaient en leitmotiv : faim, soif, dormir et surtout, Misère… Misère…
       Où étaient donc ces riches colons ? Ces exploiteurs de la misère arabe ? Ils étaient seuls désormais et ils n'en pouvaient plus.

       Pour les accueillir, point de " cellules d'accueil "… mais un imposant " service d'ordre " qui avait pour mission essentielle de procéder à un " filtrage " des éventuels suspects (entendez-par là, les membres de l'OAS). Des chefs de famille qui avaient eu le malheur de voir leurs noms mentionnés sur les fiches de police étaient, sans la moindre humanité, arrachés à leurs épouses et à leurs enfants, déjà singulièrement éprouvés par ce cruel destin et, jugés aussitôt tels des criminels, allaient remplir les prisons françaises encore imprégnées de l'odeur des tortionnaires du FLN que l'on venait, en hâte, de gracier. Quelle affliction que de se voir ainsi arraché aux siens à un moment où on a tant besoin de la présence d'un père et d'un époux. Quel cruel spectacle que celui-là ! Ils avaient tous besoin de l'Armée du Salut… on leur envoya les R.G, les C.R.S et les gardes mobiles… (1)

       Les pieds nus dans des babouches, un homme ouvrait un pardessus à chevrons : il n'avait que son pyjama dessous. Il se tordait les mains et racontait, la voix brisée par l'émotion, que sa fille avait été enlevée, le matin même du départ. Comme il avait perdu son dentier, on comprenait mal son récit et l'on entendait :
       - Elle criait : " Me laisse pas, papa… me laisse pas ! "
       Mais qu'est-ce que je pouvais faire ? Ils me tenaient. Ils me tenaient, je vous dis… criait le pauvre homme en éclatant en sanglots
       " Mon Dieu, mon Dieu ", répétait une femme en se signant.

       A quelques pas, une dame effondrée racontait au personnel chargé de l'orientation des réfugiés :
       Moi, je ne voulais pas partir, Monsieur. Je savais bien ce que ça serait. Je me disais : " Il n'y a qu'à attendre ". Je ne sortais plus. Juste pour les commissions. Je croyais que ça allait se calmer. Puis les deux locataires du premier sont partis. On n'est plus restées qu'avec Madame Ramon, dans la maison. Le soir, on mangeait l'une chez l'autre, pour se tenir compagnie, pour parler. Et puis, l'autre matin, quand je suis revenue du marché, elle était dans l'escalier, allongée, plein de sang partout, avec sa tête en arrière qui tenait plus que par le chignon. On avait tout chamboulé chez elle. Qu'est-ce que je vais devenir Monsieur… qu'est-ce que je vais devenir ?...

       C'était la litanie de la débâcle. Tous avaient un viol à raconter, un pillage, un crime, un enlèvement dont ils avaient été témoins.
       - L'armée française !
       - Et l'armée ? demanda un journaliste effaré par toutes ces horreurs.
       - Ah ouah ! Quelle armée m'sieur ? répondit un homme dont le visage était blême.
       - L'armée française !
       - Il n'y a plus d'armée française, m'sieur. L'autre jour, auprès de la grande poste, ils étaient dans les étages en train de frapper un Européen.
       - Qui ils ?
       - Les Arabes ! On entendait hurler. Passe une jeep avec un lieutenant français et trois soldats. Je fais signe. Ils s'arrêtent. " Vous n'entendez pas ? ", je dis. " Non. Je n'entends pas, qu'il me répond le lieutenant ! Et même si j'entendais, ce serait pareil. J'ai pas d'ordre ! "
       Ma parole ! Je lui ai fait un bras d'honneur. Si c'est pas malheureux. Et ça s'appelle la France, m'sieur ?
       A cet instant un homme qui écoutait la conversation s'adressa au journaliste :
       - Monsieur, le drame des Français d'Algérie rejoindra dans l'histoire celui des juifs chassés et persécutés sous le nazisme. Ce sera la même honte.

       Au même moment, ce 18 Juillet 1962, dans l'indifférence générale, se tenait le Conseil des Ministres. En parlant des Pieds-Noirs (vocable que bon nombre de Français d'Algérie entendaient pour la première fois), De Gaulle déclara : " Il faut les obliger à se disperser sur l'ensemble du territoire ", ce qui permit à Louis Joxe, son éminence grise, de renchérir : " Les Pieds-Noirs vont inoculer le fascisme en France. Dans beaucoup de cas, il n'est pas souhaitable qu'ils retournent en Algérie ou qu'ils s'installent en France où ils seraient une mauvaise graine. Il vaudrait mieux qu'ils aillent en Argentine ou au Brésil ".

       Et des jours durant, on rencontrait dans tout le Sud de la France, notamment dans les zones maritimes, des masses de Pieds-Noirs hébétés, prostrés, embarrassés dans les enfants, les valises et les formalités, assommés de douleur et de fatigue, amers face à l'indifférence et au mépris, se perdant dans des rues qu'ils ne connaissaient pas, photographiés comme des bêtes venues d'un autre âge, avec leur visage mort, ravagé par les larmes et la douleur.
       Dans les ports, c'était la désolation. Les cadres de déménagement de ces " richards ", hâtivement construits en bois, étaient volontairement plongés dans la mer par les dockers de la CGT et autres gauchistes. Ceux qui avaient eu la chance d'être épargnés, étaient éventrés. Leur contenu gisait, épars, sur le sol faisant le " bonheur " des rôdeurs à l'affût de toutes ces richesses…

       A Marseille, un homme dont la haine pour les Français d'Algérie n'avait aucune retenue, le socialiste Gaston Defferre, allait se charger personnellement de leur accueil. Sur les bancs de l'Assemblée Nationale, il alla jusqu'à prononcer ces mots infâmes : " Il faut les pendre, les fusiller, les rejeter à la mer… ", ajoutant qu'il ne les recevrait jamais dans sa cité. Le 26 Juillet 1962, lors d'une interview réalisée par Camille Gilles pour " Paris-presse", à la question de ce dernier : " Dans certains milieux de Marseille, on prétend que vous avez à votre disposition une police spéciale, genre " barbouzes ", est-ce exact ? " Réponse : " Ce sont simplement des militants… Ils sont groupés en sections et sous-sections. Il y en a à Marseille un peu plus de 15.000 (payés par le contribuable ou par le PS ?). C'est la deuxième fédération de France et, croyez-moi, ces gens savent se battre. Aux prochaines élections et réunions électorales, si les " Pieds-Noirs " veulent nous chatouiller le bout du nez, ils verront comment mes hommes savent se châtaigner… Ce ne sont pas eux qui viendront, mais nous qui iront casser leurs réunions. N'oubliez pas aussi que j'ai avec moi la majorité des dockers et des chauffeurs de taxis ". Et à une nouvelle question du journaliste : "Voyez-vous une solution aux problèmes des rapatriés de Marseille ? " " Oui, répondra sans vergogne Defferre, qu'ils quittent Marseille en vitesse ; qu'ils essaient de se réadapter ailleurs et tout ira pour le mieux ".

       Ainsi, tenaillés entre communistes et socialistes qui leur vouaient, à l'instar de leur " maître à penser ", une haine sans borne et qui, de surcroît, détenaient les rouages de la vie politique, sociale, administrative… et mafieuse, les Français d'Algérie installés à Marseille allaient connaître durant les premiers mois de leur exil, des difficultés à nulles autres pareilles…
       " Se réadapter ailleurs ", c'est ce que les " Rapatriés " allaient tenter de faire en dépit des difficultés qui s'amoncelaient : précarité, chômage, logement, scolarité, santé… Cependant, dans tous les coins de France où ils étaient arrivés en masse, on en profitait pour faire monter les prix ; chambres d'hôtels et meublés affichaient complet et la nuit, beaucoup de ces malheureux se retrouvaient dans les halls de gare, remâchant un peu plus leur rancune.
       Les logements se faisaient rares et étaient proposés à des tarifs exorbitants, les établissements scolaires n'acceptaient plus, par manque de place, les enfants… A la vue de tant de misère, ils ne cessaient de se répéter : " Est-ce cela la France ? Cette France que nous avons tant aimée ? "… Mais la France, ce pays merveilleux des droits de l'homme, cette terre d'asile de tous les réfugiés du monde, manquait, pour la première fois de son histoire, de générosité. Elle accueillait ces pauvres gens à contrecœur, témoignant autant d'indifférence que d'hostilité. Combien de ces " rapatriés " allaient découvrir des mots nouveaux tels que " dépression nerveuse ", " stress "… termes dont ils ignoraient le sens, eux, transfuges d'un pays de soleil où tout était prétexte à la fête... Combien de morts prématurés cette communauté compta la première année de son rapatriement en France !...

       Face à ce désastre humain, le gouvernement demeura de marbre. Seuls quelques élus locaux réagiront humainement avec des moyens limités et quand Alain Peyrefitte, pris de remords, exposera au " général Président ", le 22 Octobre 1962, " le spectacle de ces rapatriés hagards, de ces enfants dont les yeux reflètent encore l'épouvante des violences auxquelles ils ont assisté, de ces vieilles personnes qui ont perdu leurs repères, de ces harkis agglomérés sous des tentes, qui restent hébétés… ", De Gaulle répondra sèchement avec ce cynisme qu'on lui connaissait : " N'essayez pas de m'apitoyer ! "… On était bien loin du " C'est beau, c'est grand, c'est généreux la France ! "…
       Et c'est ainsi que, des années durant, les Français d'Algérie promèneront leur mélancolie à travers cette France égoïste et indifférente qui, sans se soucier des martyrs, aura laissé égorger les vaincus… (1) : C'est cette mésaventure qui mena directement le père de l'auteur de ces lignes à la prison de Fresnes.

       … ET ILS NOUS ONT ACCUEILLIS AVEC DES CRIS DE HAINE : Le titre de cet article est inspiré de celui de l'ouvrage " Et qu'ils m'accueillent avec des cris de haine " paru en 1982 et rédigé par mon ami Gérard ROSENZWEIG (alias, Henri MARTINEZ). Email : gerard-rosen@orange.fr
       " Quand la haine respire le sang, elle ne sait se dissimuler " (Sénèque)
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

      
José CASTANO       
e-mail : joseph.castano0508@orange.fr

       - 19 MARS 1962 - LE CESSEZ LE FEU… Ou la victoire du FLN
       – Cliquez sur : Lire la suite


       Et sur : "19 MARS 1962...LE CESSEZ LE FEU".

       Mon blog : http://jose.castano.over-blog.com/


       Ma biographie, cliquer sur : - Ma Biographie -


Algérie catholique N°2, 1936
Bibliothéque Gallica

Les Pères Blancs en Kabylie

       A l'Est du diocèse d'Alger et débordant sur celui de Constantine, s'élève un massif montagneux, sauvage, coupé de ravins profonds, encaissés, aux parois abruptes, aux crêtes en lames de couteau ; c'est le massif du Djurdjura. Les sommets sont élevés, la température y est rigoureuse en hiver, le sol en est plus qu'avare, les routes jusqu'à ces dernières années y étaient rares et elles ne sont encore qu'à l'état d'ébauche ; et cependant la population y grouille. Sa densité atteint celle de la Belgique : pour l'ensemble du pays elle est de 175 habitants au kilomètre, mais si on considère le territoire de chaque douar seulement, elle atteint jusqu'à 300 habitants au kilomètre, chiffre que ne dépasse pas la populeuse Belgique. Comment se fait-il que des gens se soient condamnés à vivre si nombreux dans un pareil pays, alors qu'ils avaient tout près d'eux de vastes étendues très fertiles, des plaines et des vallées, où la vie leur serait devenue on ne peut plus facile ?

Un peu d'histoire

       Or, la Kabylie a été habitée de tout temps ; au temps des Romains le " Mons Ferratus " recelait sur ses pentes, cachés dans les replis de ses ravins, des villages déjà nombreux ; au IIème siècle de notre ère, les Quinquégentiens, ayant brisé le " limes " romain, mais battus et décimés, virent leurs débris s'accrocher à ses pentes abruptes ; cependant ni Romains, ni Vandales, ni Byzantins, ni Arabes du 7e siècle n'osèrent s'aventurer dans ce pays rébarbatif et du haut de leurs montagnes les Kabyles regardèrent passer ces vagues successives d'envahisseurs. Au XIe siècle de nouveaux immigrants surviennent ; ce sont leurs frères de race qui étaient restés dans les endroits plus cléments de l'Afrique du Nord et que repoussait l'invasion hilalienne. Accueillants comme toujours, les premiers occupants les reçoivent ; mais le pays change d'aspect, les sommets jusque là couverts de forêts se peuplent, les parties incultes se défrichent, la physionomie du pays se dessine telle que nous l'avons trouvée de nos jours. A quel sentiment ont donc obéi ces gens, en venant se cacher dans ces montagnes inhospitalières ?

       Le tempérament kabyle féru d'égalité et de liberté
       Il faut se rappeler que le Kabyle est féru d'indépendance et de liberté ; il ne veut être contraint que par des lois qu'il s'est librement donné ; il est avide d'égalité plus encore que de justice ; aux partages de viande l'enfant à la mamelle aura sa part aussi grosse que celle de l'homme fait ; à la moindre inégalité de traitement, il se rebiffera en disant : " Am nkini, am Medden " (comme moi, comme tout le monde), et cet argument a pour lui une puissance insoupçonnable chez nous. Et donc il n'est pas étonnant de voir les premiers immigrants, qui avaient maille à partir avec l'autorité ou carthaginoise, ou romaine, ou vandale, venir demander à ce pays réputé inaccessible une liberté qu'on leur refusait ailleurs. L'immigration du XIe siècle eut un autre aspect ; les Beni Hilal et les Beni Soleïm lancés par les sultans du Caire avaient couvert tout le Nord plus avantageux, imposant de force la religion au nom de l'Afrique, s'infiltrant partout, occupant les points près de lesquels ils prenaient possession du pays. Or, à cette époque, nombreuses étaient les tribus berbères qui avaient embrassé soit le judaïsme, soit le christianisme ; bon nombre aussi étaient restées païennes. Mais les unes et les autres, gênées dans leurs pratiques religieuses par l'intransigeance des nouveaux maîtres, cherchèrent un endroit où elles pourraient jouir de la liberté si chère à leur cœur et elles vinrent se cramponner au sommet des crêtes kabyles. C'est donc pour sauvegarder en même temps leur liberté et leur foi que les Kabyles de la dernière immigration sont venus demander l'hospitalité au farouche Djurdjura ; ils ont obéi au même sentiment d'indépendance que les Mzabites du Mzab et de Ouargla, que les Chaouïas de l'Aurès, que les Rifains et les Chleuhs du Maroc.

Le pourquoi de l'établissement des Pères Blancs...

       Est-il donc étonnant que les Pères Blancs, missionnaires français et, comme tels, épris de liberté aient été attirés par ces qualités si voisines des leurs : l'amour de la liberté, surtout de la liberté religieuse, l'abnégation en faveur d'un idéal religieux, le renoncement aux aises de la vie pour pouvoir vivre indépendant, l'honneur dont on disait à juste titre ces gens férus, la communauté de croyances religieuses dans le passé ?

       Et ils s'y sont établis à partir de 1872-1873. Ils se sont adressés à cette population plus sympathique, car ils la pensaient moins fermée que les Arabes aux conceptions françaises ; mais à l'épreuve ils se sont aperçus que le fanatisme musulman avait fait là ce qu'il fait partout ailleurs, qu'il avait rendu ces populations aussi intransigeantes au point de vue croyance que les populations arabes d'origine. Fallait-il renoncer pour autant à faire refleurir ces si précieuses qualités qui semblaient les apparenter aux paysans de chez nous ?
       Les Pères Blancs ne l'ont pas pensé et ils se sont mis à l'œuvre ; que dis-je ? ils s'y sont donnés corps et âme, insensibles en apparence aux rebuffades, aux difficultés, aux insuccès.

...et leurs bienfaits

       Profondément émus de la détresse matérielle de ces pauvres gens auxquels ils donnaient leurs cœurs, ils ont voulu les aider à en sortir, ils ont cherché à les éduquer, à les moraliser, à les élever jusqu'à nous ; d'où leurs deux grands moyens d'action : la charité sous toutes ses formes et l'école. La charité, ils l'ont pratiquée et combien ! Y a-t-il une misère dans le pourtour de chaque mission qui n'ait été soulagée par eux ?

       Y-a-t-il un malade qui n'ait eu recours à leurs bons offices, à leurs soins dévoués ? Ils ont été à la disposition des gens et de jour et de nuit ; ils leur ont donné leur temps, leur peine, leur argent, du cœur le plus joyeux du monde. Ont-ils réussi ? Certes sous le rapport matériel si on a vécu un peu longtemps en Kabylie, on est obligé d'admettre que le Kabyle a introduit des changements importants dans la façon de se nourrir, de se vêtir, de se loger ; son intérieur s'est modernisé, on trouve plus nombreuses qu'autrefois les maisons bâties à la française, les cheminées se multiplient, l'habillement, de l'homme du moins, s'améliore, les souliers qui étaient du luxe autrefois, deviennent communs, l'orge a cédé la place à la semoule. Qui penserait maintenant en Kabylie à se rendre à pied à Alger ? Tous voyagent en autocar, surtout depuis que le réseau des routes tend à couvrir le pays. Ce serait suffisance intolérable que de vouloir attribuer tous ces progrès à l'influence des Pères Blancs. Il est juste cependant de reconnaître que par leurs conseils, par leurs secours, même pécuniers, ils y contribuent dans la mesure de leurs moyens.
       Ils ont été du moins des initiateurs ; ils ont bâti des maisons, où dans le cadre indigène le Kabyle a pu introduire des réalisations de la vie française ; ils ont amélioré leurs métiers à tisser ; ils se sont ingéniés avec l'aide des Sœurs Blanches, à apporter un peu de bien-être dans les familles en fournissant dans les ouvroirs et à domicile du travail aux femmes ; c'est de ces ouvroirs en particulier que sortent ces somptueux tapis, soit à haute laine, soit à tissage plat que rivalisent comme travail avec ceux de Kairouan ; ce sont encore ces ouvroirs qui fournissent ces délicates vanneries d'alfa qui font l'ornement de tant de ménages français.


       Leurs écoles, on s'en doute bien, n'ont pas peu contribué à mettre en valeur les vertus françaises qui sont en germe dans tout cœur kabyle bien placé. Vivant dans un milieu plutôt âpre tant au point de vue du sol qu'au point de vue du climat, le Kabyle doit de bonne heure s'exercer à l'effort ; il est déjà habitué ; il ne reste plus qu'à faire contracter l'habitude de la continuité dans l'effort ; c'est ce qu'on cherche à obtenir de lui par l'appât des diplômes qu'on fait miroiter à ses yeux.

       Il est ardent, susceptible, vindicatif ; la morale qui lui est enseignée lui apprend que son prochain n'est pas seul à encourir des responsabilités, que lui-même en ayant sa grosse part, s'il veut être absout, il faut aussi qu'il oublie et pardonne. Il est particulariste au superlatif et ne songe qu'à son intérêt ; la formation qu'il reçoit à l'école lui enseigne qu'il se doit à son prochain et que pour ce prochain il est de son devoir de s'oublier et de rendre service.


       D'une morale assez facile il est tenté de rejeter sur la nature qui lui a été donnée par Dieu, et donc sur Dieu lui-même, la responsabilité des fautes parfois énormes qu'il commet ; la morale intervient encore là pour lui montrer qu'un homme de caractère sait et doit se vaincre soi-même. Evidemment la transformation des caractères et de la mentalité ne peut se faire aussi rapidement que la solution d'un problème d'arithmétique ; il faut donc être patient dans la poursuite des résultats ; mais la dose de patience n'est pas mince qui a été inculquée aux Pères Blancs dans leur Noviciat de Maison-Carrée ; et, d'autre part, on peut avoir confiance dans les élèves kabyles qui ont accepté cette formation énergique.

       N'auraient-ils directement obtenu que peu de résultats, ils conviendrait néanmoins de leur savoir gré d'avoir été encore là des initiateurs. Si maintenant les écoles sont si nombreuses et si florissantes en Kabylie, n'est-ce pas l'exemple des Pères Blancs qui commença dès 1873 à inciter le Gouvernement à ouvrir des écoles partout où il a pu, encore ne les a-t-il commencées qu'en 1883, soit 10 ans après.
       Il se fait en Kabylie par les Pères Blancs et les Sœurs Blanches un travail considérable dont ne peuvent que profiter notre belle Colonie Nord-Africaine et conséquemment la France.
B. MILINAULT.



PROSTATIQUEMENT.....VÔTRE !
Envoyé par M. Georges Barbara
            - "Ouuuuuuuais aga moi ça, o tchoutche qu'est ce que t'yes entrain de nous faire là ? Ah ! c'est toiiiiii ? Toi l'effronté, le mac de la rue Burdeau que tu nous fais la pichade tous les soirs dans le corridor ?
            Et dire que moi que j'étais dans la cuisine comme une cucu de promiere que je suis, je te croyais qu'y te tombait de l'eau ? Et là, la madonne de moi quand j'te sorts, ça que j'te 'ois là devant mes yeux, c'est ce gougoutse qui te pissait dans le corridor !
            Mais à debon tu t'la fais. O Juju. Mais je va me manger le sang diomadonne ! Mais ça qu'y faut qu'tu sais toi, c'est qu'avec tes fantaisies, hier au'soir encore, madame Sultana, qu'elle habite au promier et qu'elle est vieille que tu te demandes pourquoi à l'est encore de ce monde, et ben la pauvre a t'a a risqué de se tuer en te glissant t'sur les pt'its besoins de ce gabari que j'ai devant les yeux !


            - "Attends escuse moi Conchette faut que je t'es'plique que tu vas 'oir que c'est pas ma faute c'est la faute au docteur Camilleri çuilà qu'il est à coté du marché ! Et que c'est même un bon docteur qu'y l'a soigné tout ma famille, et on voit qu'il a des dilplomes à cause qu'y se trompe jamais !
            - " A cause de Camillieri ? Et quoi encore ? Quece'tu me chantes là ? Aller vas vas delà !

            - " Et oui c'est comme j'te dis. Ca que tu sais pas toi, pourquoi t'yes une femme, c'est que moi mon docteur y m'a dit que j'ai attrapé la prostate, comme tous les hommes, et qu'y m'a même dit " Te sais Juju quand ça te viens l'envie de pisser te gènes pas fais n'importe où que tu te trouves, c'est pas bon de garder ! " Alors le soir, des fois quand on fait les vas et viens, dans ta rue ac les copains... Dés qui me vient l'envie de pisser, je pense à ça qu'y m'a dit Camillieri. Mais je va pas te faire dans la rue qu'a même ? Pourquoi comme y z'ont dit la police, que c'est un attentat à la pudeur. Et ben je me rentre dans votre corridoir qu'il est sombre à cause que vous rogardez à cinq sous prés pour te mettre la lumière, et je me fais une madonne de pichade que tu peux pas sa'oir combien ça me soulage. Et personne y l'a rien vu ! ! Et ousqu'il est le mal là, Conchette ? A debon c'est comme un traitement pour moi, te 'ois !

            - "Ousqu'il est le mal diocane ?, et ben quand ça va t'arriver tu diras à ta gonzesse qu'elle te prends son bidon et le chiffon de parterre, et qu'elle te viens essuyer ! Ca fait rien que qu'à même nous on va s'taper les odeurs.
            Méte'nant aga de dire à ton Docteur qu'il est le plus fort comme tu dis, que des conseils comme ça y va les donner à la vache de sa mère. Et pis d'abord quand j'vais t' le rencontrer dans la rue, et ben crois moi, je vais pas me serrer la ceinture pour lui en chanter quatres !

            - " Te sais pas une chose Chounette méte'nant que nous on parle de ça, si tu me crois, et ben y m'a venu une madonne d'envie d'pisser!

            - " Quoiiiiiiiiii ? Mais à rogards-moi le ce catalogue de la Samaritaine, par dessur le marché main'nant y te fais d'l'esprit. Va de là, va o carnaval, aller aga's si tu peux aller faire des cages plus loin que jamais si tu roviens faire une pichade dans mon corridor, j'te jure t'sur la tombe de mes morts, que j'te prends la tête à coups de frottoir, et que toi et ta comment ça s'appelle déjà…. ah oui ta prostate et ben vous allez vous passer un mauvais quart d'heures !..

            - "O c'est bon, c'est bon Chounette, mais moi j'ois une chose, c'est que toi dans la médecine, pour que tu sais comment ça marche, y te faudra faire un passage en dedans les hopitaux pchicatriques! Ca c'est sur !

            - "Aller, Aller à rogards de t'en retourner d'où c'est que t'ye venu,,, et pis d'abord puisque c'est comme ça, j'te jure t'sur la vie des yeux que demain je vas te mettre une serrure à ma porte ,,, Tu iras pisser chez cet espèce d'effronté que que t'es !
            Aller va voir qui te veut !

Georges Barbara

Le député qui dérange
Par M. Martinez Antoine
https://exode1962.fr/

Le règlement de l'Assemblée nationale, impose que ce soit le doyen d'âge qui ouvre la première séance, de la nouvelle mandature.
À 79 ans, Le député du Rassemblement national José Gonzalez, natif d'Oran, élu dans la 10e circonscription des Bouches-du-Rhône a donc prononcé le discours d'ouverture devant la nouvelle législature, mardi 28 juin.
Nous pouvons dire qu'il ne disposait pas d'un préjugé favorable. Il avait, pour une partie de l'hémicycle, le visage de la bête immonde puisqu'il représentait l'hydre hideuse et malfaisante. Le serpent que l'on doit écarter en détruisant ses 89 têtes qui émergent du marais fétide d'où elles tentent de s'extirper.
Si son discours émouvant fut applaudi par une partie de l'assemblée nationale, une autre catégorie de députés scandalisés, eut du mal à trouver les qualificatifs inédits pour salir sans vergogne un homme et son passé.
Les députés de la NUPES, grands démocrates et humanistes, dont la hauteur de vue n'a échappé à personne, ont multiplié les outrances verbales pour matraquer le paria désigné.
Voici donc quelques saillies qui reflètent le sectarisme et dont la plupart sont bien connues et sans originalité, ressemblent fort aux réactions du chien de Pavlov quand celui-ci tapait sur la gamelle.

Quelques exemples affligeants :
- Sandra Regol députée EELV de la 1ère circonscription du Bas-Rhin: " Je suis abasourdie. Quelle déchéance ". (@sandraregol)
- Marie Pochon députée de la Drôme: " " Ouverture de la XVIe législature et applaudissements nourris pour le discours du doyen de l'Assemblée (RN) en forme d'ode à l'Algérie Française. Angoisse. " pic.twitter.com/4kJIyQUo2v (@MariePochon)
- Benjamin LUCAS : " J'ai mal à la République. " (@Benjam1Lucas) #DirectANpic.twitter.com/pNleWFwUDJ
- Thomas Portes, député insoumis : " Horreur et dégoût… Première rentrée parlementaire et on est vite dans l'ambiance.
Le doyen de l'assemblée nationale du RN entame un discours d'accueil plein de nostalgie de l'Algérie française. Il nous dit avoir laissé là-bas un bout de France.
J'ai déjà la nausée. " (@Portes_Thomas) pic.twitter.com/ftXVdKAeI4
- Mélanie Vogel, sénatrice écologiste des Français de l'étranger : " Ça fait quoi de faire sauter les digues avec l'extrême-droite? Ça fait qu'on applaudit un député RN qui fait un discours nostalgique sur l'Algérie française ". (@Melanie_Vogel_)
- Julien Bayou, député écologiste s'est dit " heurté ", même si le doyen a été " prudent et a évoqué son cas personnel ". " C'est vraiment problématique. Nous, on n'a pas applaudi ".
- Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste : " C'était assez gênant… c'est curieux que quelqu'un soit venu plaider sa nostalgie pour l'Algérie française et qu'il y a une partie qui l'a applaudi ".
- Mathilde Panot, députée LFI de la 10ème circonscription du Val-de-Marne : " Le député FN José Gonzalez, a tenu des propos infamants, injurieux et révisionnistes sur l'Algérie française.
Des propos honteux qui n'ont aucunement leur place dans une enceinte parlementaire et qui doivent collectivement nous inquiéter. " #DirectAN @LCP pic.twitter.com/Gc5EB62YQ0
- Sabrina Sabaihi, députée EELV des Hauts-de- Seine " Après une telle banalisation où ira t-on ? Le doyen de séance RN, nostalgique des assassins de l'OAS, évoque sans honte et larmoyant le souvenir de l'Algérie Française sous les applaudissements. Une insulte à notre histoire et à nos parents. Jour de HONTE. " pic.twitter.com/4C5tCahFjP
- Sandrine Rousseau députée EELV : " C'est inadmissible dans cet hémicycle là. (...) Je trouve que cette nostalgie de la colonisation à l'intérieur de notre hémicycle dit à quel point la dédiabolisation est tombée. Il a suffit d'un discours pour que ça tombe "… " José Gonzalez a parlé de la guerre d'Algérie avec nostalgie. Ce discours n'avait pas lieu d'être dans l'hémicycle ", dénonce la députée Nupes au micro de LCP. " Nous saluons les résistants et les indépendantistes algériens qui ont fait en sorte que la colonisation s'arrête".

Mais qu'avait donc dit Monsieur le Député Gonzalez ?
Voici son discours intégral.

" Monsieur le Ministre, mes chers collègues.

C'est avec émotion et solennité que je m'exprime aujourd'hui, puisque j'ai le vénérable privilège de la doyenneté de notre Assemblé Nationale. Sans attendre, je souhaite avant tout adresser à chacune et chacun d'entre vous, élus de métropole, d'outre mer et représentants des français du monde, mes plus sincères félicitations pour votre élection ou réélection. (applaudissements)
J'ai en ces moments, une pensée toute particulière pour ceux qui m'ont précédé dans cet inestimable honneur, d'ouvrir la première séance d'une mandature, notamment pour le vénérable parlementaire que fut Edouard Frédéric Dupont et pour ce grand français que fut Marcel Dassault. Qu'il me soit permis de saluer son arrière petit fils, notre collègue Victor Habert-Dassault réélu au siège du regretté Olivier Dassault. Cette émotion nous sommes nombreux à la ressentir au sein de cet hémicycle, en ce lieu où nous accompagnent de leur écrasante présence, toutes les glorieuses figures de l'histoire de France qui nous ont précédé sous ce dôme de lumière. Ce lieu qui résonne de tous les grands débats qui ont marqué notre vie démocratique.
Un lieu d'histoire mais je sais aussi, peut être pour les millions de français qui attendent de nous, un lieu d'espoir. En ce lieu sacré de la représentation du peuple français, de l'expression de la volonté nationale, vous voir réunis cote à cote, par ordre alphabétique, au delà de toutes nos divergences, est un symbole d'unité française.
Ce symbole d'unité touche l'enfant d'une France d'ailleurs, que je suis, arraché à sa terre natale et drossé sur les côtes provençales par les vents de l'histoire en 1962. J'ai laissé là-bas une partie de ma France et beaucoup d'amis. Je suis un homme qui a vu son âme à jamais meurtrie… (Interruption du député)
Excusez-moi, je pense à mes amis que j'ai laissés là-bas... (applaudissements)
Je suis un homme qui a vu son âme à jamais meurtrie par le sentiment d'abandon et les périodes de déchirement."
Comme nous tous, je n'en doute pas, je sais combien cette unité française est nécessaire. Notamment dans les temps complexes que nous traversons. J'émets le souhait, mes chers collègues, qu'elle éclaire le débat et inspire nos décisions. Sur décision du peuple, une assemblée profondément renouvelée s'installe. Chacun ne pourra que se féliciter que la sagesse du corps électoral ait pu venir compenser la brutalité d'un mode de scrutin qui a parfois donné le sentiment amer à certains français de ne pas être représentés. Les courants, mêmes minoritaires, sont toujours utiles à la richesse d'un débat démocratique ou à l'émergence de nouvelles thématiques dans le débat public. Mais nous ne devons pas oublier qu'en choisissant l'abstention, nombre de nos compatriotes nous appellent certainement encore, à une réflexion sur la représentativité politique et la démocratie sociale. La configuration politique de cette assemblée nous fait vivre une situation presque inédite dans l'histoire de la cinquième république avec une représentation nationale qui est appelée à prendre une place plus centrale. Sans méconnaître l'expression de nos convictions de propres ; sans méconnaître les passions légitimes qui affectent chacun d'entre nous : c'est ici un lieu où doit s'exprimer le débat et sans omettre le sens du combat que nous ont confié nos électeurs, il nous appartiendra de trouver les moyens d'œuvrer collectivement pour le bien du pays et dans l'intérêt des français et notamment les plus modestes et les plus vulnérables d'entre eux.
Permettez moi, au seuil de cette mandature, d'émettre le vœu que cette situation politique particulière, permette de faire progresser l'écoute, le respect et le dialogue, plutôt que l'invective, la confrontation stérile ou les anathèmes ; qu'elle contribue à réconcilier les français avec la politique et avec les politiques ; qu'elle permette à chacun de redécouvrir à cette occasion, l'utilité du débat et de la décision politique, pour l'amélioration de la vie quotidienne de tous. Je nous souhaite d'être les négociateurs audacieux et fructueux pour chacun d'entre nous.
Le meilleur dans l'accomplissement de votre exaltante mission et, pour notre patrie, des vœux de grande et belle réussite.
Vive la République, vive la France. Je vous remercie. " (Applaudissements)


De ce discours hautement républicain ne furent gardées que les 4 phrases pendant lesquelles, l'orateur, avec une grande émotion, a exprimé son origine et les troubles ressentis après son départ forcé.

Mais c'est dans les couloirs de l'Assemblé nationale que nous avons pu vérifier, s'il en était encore besoin, l'idéologie d'une grande partie de nos journalistes.
Interrogé par les " justiciers résistants " détenteurs d'une carte de presse, le député dût répondre aux questions considérées comme essentielles dans l'esprit de ses examinateurs, à savoir les crimes de l'armée française et de l'OAS

Ils auraient pu lui demander si ses amis perdus avaient disparu ou avaient été tués ; si son installation fut aisée dans la métropole ou des détails sur sa détresse psychologique de l'époque.
Non ! Il fallait qu'il prenne partie et désavoue publiquement les seuls responsables de " crimes " qui lui étaient imposés, de les discréditer et de les condamner sans réserve.

A madame Sandrine Rousseau ils auraient pu demander à la suite de sa déclaration :
" Nous saluons les résistants et les indépendantistes algériens qui ont fait en sorte que la colonisation s'arrête ", si elle était solidaire des méthodes du FLN et en accord avec des poseurs de bombes.
Et à madame Sabrina Sabaihi qui y voit un " nostalgique des assassins de l'OAS " (ce que le député, n'a jamais évoqué), on aurait pu demander ce que ses parents venaient faire dans cette histoire et si les assassins sont à trier en fonction de ses affinités et de son histoire personnelle.

"Glorification de la colonisation ; Angoisse, révisionniste de l'Algérie française ; Propos infamants, injurieux. Déchéance, dégoût, nausée, mal à la République…"
Il manque les autres adjectifs et locutions habituellement remâchés :
"Peste brune, fétide, heures sombres de notre histoire et surtout nauséabond."
Tellement olfactivement écœurant, qu'il est interdit de serrer la main de ceux qui ne partagent pas vos idées, de peur d'être contaminés par la lèpre infâme véhiculée par ces sous hommes qui ne devraient pas exister.
Le sectarisme n'est pas là où l'on s'attend le trouver. Dénier à un homme le droit de parler de ses origines, devrait alors être la règle pour tous, ce qui n'est pas le cas puisque les identités diverses sont à brandir comme un étendard pour cette gauche inculte qui a perdu depuis longtemps sa boussole et a renié les " valeurs " dont elle nous rebat sans cesse les oreilles.

Le journal Libération titre et s'inquiète :
" Quels députés, hors RN, ont applaudi le discours du doyen José Gonzalez évoquant l'Algérie française ? "
Comme s'il fallait distinguer dans un troupeau, les brebis galeuses et les brebis égarées. Et il démontre après en avoir interrogés quelques uns, que ceux-ci ne l'ont fait que par étourderie ou par respect des institutions, qui veut que l'on applaudi toujours le doyen de l'assemblée nationale.
OUF de soulagement, la république est sauvée.
https://www.liberation.fr/checknews/quels-deputes-hors-rn- ont-applaudi-le-discours-du-doyen-jose-gonzalez-evoquant-lalgerie-francaise- 20220701_V3U2LTMJ3VECTB42ZKCKB3TRZA/
Et dans une de ses indignations simplificatrices dont il a le secret :
" Premier jour à l'Assemblée: élu du RN, le doyen des députés fait déjà l'apologie de l'Algérie française ".
https://www.liberation.fr/politique/elections/ premier-jour-a-lassemblee-elu-du-rn-le-doyen-des-deputes-fait-deja-lapologie- de-lalgerie-francaise-20220628_FFO5QC5X5BG5XMPHCHX5BAI2MI/

A coups de citations tronquées et de propos fantasmés, certains médias disqualifient impunément tout ce qui ne correspond pas à leur idéologie, oubliant le principe que, si les commentaires sont libres, les faits eux sont sacrés. Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais

Qu'ils se taisent donc ces maudits Pieds Noirs ! Que la honte soit sur eux ! Que cette engeance soit réduite au silence ! Que leurs souvenirs soient effacés à jamais
et qu'ils meurent tous… enfin !

Mis en ligne le 09 juillet 2022
sur le Site de l'EXODE -



 
PHOTOS DE L'ARMEE
Envoyé par M. Jean Louis Ventura
   
PREPARATION MILITAIRE 1960



PROMESSE A LA TERRE
Envoyé par M. Joachim Sardella

        Le vieux était venu,
         C'était il y a longtemps
         Le dos et les mains nus
         Sous le soleil ardent.

         Il avait trouvé là
         L'étendue de caillasse,
         Il n'avait que ses bras
         Et la terre était basse.

         Là, il fit naître alors
         D'une couche tarie
         Des villes et des ports,
         Là il fit un pays.

         Aujourd'hui l'ennemi
         S'en vient faire main basse
         Sur l'arbre et sur le fruit
         Assassine et pourchasse.

         Mais le vieux fit un fils,
         Et ce fils à son image
         Et ce fils en fit dix
         Qui furent dix autres braves.

         Pour défendre leur terre
         Une force naquit
         Ils sont partis en guerre
         Ils ont pris de maquis

         Pour que l'honneur vive,
         Ils sont partis en guerre
         Dans le temps ils écrivent
         La promesse à la terre.

Bône, le 11 novembre 1961
Joachim Sardella



Une tragédie occultée par les livres d’histoire…
Par M.José CASTANO,

En mémoire des 1585 marins français morts sous le feu « allié »

3 JUILLET 1940… L’AGRESSION BRITANNIQUE SUR MERS-EL-KEBIR

       « Le souvenir de ces morts dérange tout le monde parce que l’évènement échappe à la logique. Il est à part des tragédies de la guerre. Personne n’a intérêt à ce que l’on en parle trop » (Amiral Marcel Gensoul)

       Mers El-Kébir… le « Grand Port », mot composé arabe, évoque la mer, que ce lieu géographique essaie d’étreindre dans la tenaille, largement ouverte de sa rade, et l’installation portuaire que la France de la seconde moitié du XX° siècle y a créée (1928 – 1945)…

       Tour à tour, port de pirates, centre de transit commercial et base navale, elle a offert une physionomie différente à chaque nouveau contact de populations, à travers les vicissitudes d’une histoire bimillénaire. Ce mouillage est à 200 kilomètres des ports ibériques de Carthagène et d’Alméria, du port rifain de Mélilla, à une distance à peu près double du Détroit de Gibraltar, passage obligatoire de la Méditerranée à l’Atlantique ou du Moyen Orient à l’Occident européen.

       Mieux abrité que Gibraltar, le port possède une des rades les plus belles et les plus sûres de l’Algérie. Le site profite enfin de la proximité de l’agglomération urbaine d’Oran, créée au début du X° siècle.

       Le but de la base navale est, non seulement de compléter la défense des côtes algériennes, de maintenir l’intégrité du territoire français, mais aussi d’assurer la liberté des communications et d’organiser notre présence dans la Méditerranée occidentale, en cas de conflit, face à une Italie hostile (en 1939) et à une Espagne d’une neutralité bienveillante envers les pays de l’Axe Berlin-Rome.

       L’armistice franco-allemand du 25 juin 1940 consacre l’échec de nos armées sur terre ; notre flotte, une des plus puissantes -qui n’avait pas été vaincue- est libre. Ni l’amiral Darlan, ni le général Weygand n’ont l’intention « …de livrer à l’ennemi une unité quelconque de notre flotte de guerre » et de Gaulle le dira, le 16 juin à Churchill en ces termes « La flotte ne sera jamais livrée, d’ailleurs, c’est le fief de Darlan ; un féodal ne livre pas son fief. Pétain lui-même n’y consentirait pas ».

       Les Anglais, de leur côté, désirent que notre flotte, riche en unités lourdes et légères, se rende dans leurs ports. Elle aurait pu le faire, le 16 juin 1940, mais personne ne lui en donne l’ordre et la Marine reçoit l’assurance, « qu’en aucun cas, la flotte ne sera livrée intacte », mais qu’elle se repliera probablement en Afrique ou sera coulée précise l’Amiral Darlan. Hitler ne demande pas livraison de notre flotte (le projet d’armistice ne le prévoyant d’ailleurs pas), pas plus que de nos colonies, sachant qu’il n’est pas dans nos intentions d’accepter de telles exigences.

       Les 18 et 19 juin, sont sabordées ou détruites, des unités en construction à Cherbourg, celles en réparations à Brest, Lorient, La Pallice et au Verdon. Les bâtiments capables de prendre la mer appareillent partie pour Plymouth, partie pour Casablanca, même le cuirassé Jean Bart inachevé.

       Le 27 juin, Churchill, en dépit des assurances données par le gouvernement Français, décide, dans le plus grand secret, de mettre « hors d’état de nuire » la marine française. Cette opération aura pour nom Catapult.

       Le 30 juin, dans un accès de colère, l’amiral North s’adresse à l’amiral Somerville :
       - Qui a eu cette fichue idée (opération Catapult) ?
       - Churchill ! répondit Somerville
       - No « Catapult », but, « Boomerang » ! Cette opération nous met en danger, répliqua North. Winnie (Churchill) est fou ! Je vois ce qu’il veut mais c’est une solution criminelle.

       Les bâtiments de la Méditerranée, le 3 juillet 1940, sont amarrés le long de la jetée de Kébir, d’Est en Ouest : le transport Commandant Teste, les cuirassés Bretagne et Provence, les croiseurs Strasbourg et Dunkerque. Leur font vis-à-vis, dans le fond ouest de la baie, six contre-torpilleurs : Mogador, Volta, Tigre, Lynx, Terrible, Kersaint…les fleurons de la flotte française. Au mât du Dunkerque, flotte la marque de l’Amiral Gensoul, commandant en chef… La démobilisation doit commencer dans quelques jours, les équipages se préparent à aller en promenade pour se distraire à terre.

       Les clauses de l’armistice ont été scrupuleusement observées, et dans le délai qui avait été fixé. Sur nos bâtiments, les culasses des pièces ont été démontées ; il en a été de même dans les batteries de côtes et de D.C.A. Dans les hangars d’aviation, les mesures de démobilisation ont été prises ; on a vidé les réservoirs de leur essence, démonté les canons des chasseurs et les mitrailleuses de tous les appareils ; les munitions ont été rassemblées et mises en dépôt.

       Vers 7 heures du matin, un torpilleur anglais, le Foxhound, se présente devant Mers El-Kébir. Un premier message annonce qu’il a à son bord un officier britannique, chargé d’apporter au commandant en chef de la flotte de l’Atlantique une communication de la plus haute importance. Mais une véritable force navale l’accompagne : le Hood, bâtiment de 42000 tonnes, l’un des plus grands cuirassés du monde, armé de pièces de 380 ; le Vaillant, la Résolution, armés également de pièces de 380 ; l’Ark-Royal, le plus rapide des porte-avions anglais, tous escortés de bâtiments légers et de torpilleurs.

       Sur les bâtiments français, l’arrivée inattendue de cette imposante armada provoque de l’étonnement, qui sera bientôt de la stupeur. Un officier d’état-major français est envoyé par l’amiral Gensoul à la rencontre de l’officier britannique, le commandant Holland. Celui-ci est porteur d’un document qu’on peut résumer ainsi :
       « La flotte de l’Atlantique est invitée à rallier la flotte britannique, ou à défaut, un port de l’Amérique, avec équipages réduits. En cas de refus de cette offre, elle devra se saborder, sinon, par ordre du gouvernement de Sa Majesté, la flotte britannique usera de la force. »

       L’amiral Gensoul réaffirma au parlementaire britannique que les craintes de voir les bâtiments français tomber aux mains des Allemands et des Italiens étaient injustifiées : « La marine française n’a pas l’habitude de manquer à sa parole ! », s’exclama-t-il.

       Plus tard, il affirmera qu’il ne pouvait accepter « un ultimatum se terminant par : « ou vous coulez vos bateaux ou je vous coule. C’est exactement : la bourse ou la vie… quelquefois, on donne sa bourse pour sauver sa vie. Dans la Marine, nous n’avons pas cette habitude-là ». Servitude et grandeur militaires !

       Ainsi, nos bâtiments, contre la force, se défendraient par la force.
       Au moment où l’officier britannique sort de la rade, le commandant de la flotte anglaise signale : « Si les propositions britanniques ne sont pas acceptées, il faut que je coule vos bâtiments. »

       Les bateaux français, aux feux éteints, disposés pour un désarmement rapide, reçoivent l’ordre à 7h55 : « Prendre dispositions de « combat », puis à 9h10 : « Flotte anglaise étant venue nous proposer ultimatum inacceptable, soyez prêts à répondre à la force par la « force ».

       En effet, le 3 juillet 1940, vers 10h, l’Amiral anglais Somerville adresse un ultimatum aux unités de la flotte française : « Coulez vos bâtiments de guerre dans un délai de 6 heures, ou nous vous y contraindrons par la force. »

       Après un conseil tenu par l’Amiral Jarry, commandant la Marine à Oran, le général de Saint-Maurice et le Préfet Boujard, celui-ci informe la population, par un communiqué affiché à 13h30, « qu’une alerte réelle pourrait avoir lieu l’après-midi, l’invite à se réfugier dans les abris, tranchées, etc…, renvoie les élèves dans leur famille ». Les consulats anglais du département sont gardés et surveillés, pour parer à toute manifestation. Les services de défense passive, l’hôpital, les services sanitaires, la Croix-Rouge et la police sont alertés. La dispersion des habitants de Mers El-Kébir est décidée, seul le Maire, les conseillers municipaux, les fonctionnaires et ouvriers de la Centrale et des travaux portuaires restent à leur poste.

       Dès 14h, heure approximative de l’expiration de l’ultimatum, les avions de l’Ark Royal volant sur l’eau déposent des mines magnétiques, à l’entrée du port et de la rade de Mers El-Kébir. L’escadre française est pratiquement bloquée (Churchill l’a reconnu). L’Amiral Gensoul cherche à gagner du temps pour permettre aux batteries côtières, aux avions de la Sénia (aéroport situé à la périphérie d’Oran), aux unités de la Flotte, de se réarmer pour le combat et aussi de laisser à nos alliés d’hier le temps de réfléchir à la portée de leur ultimatum. L’amiral anglais répond à une demande de cesser le feu qu’il ne l’arrêtera « que quand toute la flotte française sera coulée ».

       A 16h56, la flotte anglaise commence le feu. Abritée derrière l’éperon rocheux du fort de Mers El-Kébir, elle tire à cadence accélérée sur nos bâtiments qui cherchent à sortir de la rade. Les consignes s’exécutent partout avec ordre, à Oran comme à Kébir. Après 12 ou 15 minutes de « tir au gîte », les batteries côtières du Santon et de Canastel répondent au feu des Anglais ; le Strasbourg sort des passes. Le bilan s’établit ainsi : le croiseur Bretagne, atteint, explose, coule en sept minutes et disparaît sous l’eau : 150 hommes seulement sur 1300 fuient la mort, soit à la nage, soit en chaloupes. Le croiseur Dunkerque, n’ayant pu prendre la mer, à cause d’une avarie à son gouvernail, reçoit un obus qui tue 150 marins, plus de 100 mécaniciens et chauffeurs, 2 ingénieurs… Le bâtiment est hors de combat. Le croiseur Provence, touché, peut par ses propres moyens, aller s’échouer sur la côte de Kébir : il y a 4 morts. Le contre-torpilleur Mogador X61, incendié par l’arrière, s’échoue et compte 14 morts. Le Rigaut de Genouilli est atteint, seul le Commandant Teste, non cuirassé, amarré à la jetée en construction, est intact. Le Strasbourg fonce vers la haute mer, part vers Alger, puis Toulon.

       Et partout ces mêmes visions apocalyptiques ; parmi les carcasses d’acier éventrées, calcinées, retentissent les cris déchirants de centaines et de centaines de marins agonisants, mutilés, brûlés ou suffoquant au milieu d’une fumée âcre et d’un mazout noirâtre qui étouffent leurs dernières plaintes.

       Aussitôt les secours s’organisent. Le Maire de Mers El-Kébir, M. Boluix-Basset, les pêcheurs, gendarmes, pompiers, marins rescapés et la population aident au sauvetage des hommes des bâtiments atteints, jetés à l’eau valides ou blessés. Une chapelle ardente est installée dans la salle du cinéma de Kébir. Les obsèques des 1380 marins –assassinés- ont lieu le 5 juillet, au cimetière de Mers El-Kébir, en présence du Maire, du Préfet et de l’Amiral Gensoul qui s’adressera une dernière fois à ses hommes en ces termes : « Vous aviez promis d’obéir à vos chefs, pour tout ce qu’ils vous commanderaient pour l’Honneur du Pavillon et la grandeur des armes de la France. Si, aujourd’hui, il y a une tache sur un pavillon, ce n’est certainement pas sur le nôtre. »

       Le drame n’est pas terminé pour autant. La haine ancestrale de nos « alliés » va se concrétiser ce 6 juillet 1940. A 6h30, par trois fois en vagues successives, des avions britanniques survolent la rade, à basse altitude, déposent des mines magnétiques entre le Dunkerque et la passe, prennent le navire comme cible. Torpilles et bombes atteignent le bâtiment qui s’enfonce et échoue sur le fond, en donnant de la bande. Les trois chalutiers ou remorqueurs, coopérant à l’évacuation des morts du 3 juillet, sont coulés à leur tour. La D.C.A côtière, les batteries du Santon, Bel Horizon et Lamoune, les mitrailleuses installées sur la côte, au stade de la Marsa et à l’usine électrique répondent. Le drame, c’est que cette attaque fera encore 205 tués et 250 blessés atteints gravement. Au total, la marine française déplore plus de 1927 morts ou disparus et plusieurs centaines de blessés dont la plupart gravement brûlés. Deux avions anglais sont abattus.

       Ce qui est horrible, c’est que les marins anglais ont tué en une semaine plus de marins français que la Flotte allemande pendant toute la seconde guerre mondiale. Nous ne sommes pas loin des 2403 morts du drame de Pearl Harbor, l’un des grands événements de cette guerre puisqu’il décida de l’entrée en guerre des Etats-Unis d’Amérique. Mais les Japonais étaient leurs ennemis, les Anglais étaient nos alliés. C’est là un crime inqualifiable… impardonnable.

       Le 8 juillet, De Gaulle, parlant au micro de la BBC, déclare :
       « En vertu d’un engagement déshonorant, le gouvernement qui fut à Bordeaux avait consenti à livrer nos navires à la discrétion de l’ennemi… J’aime mieux savoir que le « Dunkerque » notre beau, notre cher, notre puissant « Dunkerque » échoué devant Mers El-Kébir, que de le voir un jour, monté par les Allemands, bombarder les ports anglais, ou bien Alger, Casablanca, Dakar. » … et pas le moindre mot de compassion envers les victimes de cette tragédie.

       Pour la première fois se trouvait ainsi affirmée, dans la bouche même d’un général français, une contrevérité : Alger, Casablanca, Dakar, donc les clés de l’Empire, allaient être utilisées contre les alliés britanniques. Et comme il vouait une haine viscérale à « l’Empire » qu’il considérait comme « Pétainiste » et qu’il fallait absolument mettre au pas pour la réalisation future de ses desseins, il donna à la flotte britannique, le 23 septembre 1940, la consigne de bombarder Dakar. Ce fut l’échec. L’insuccès des Britanniques fit comprendre aux uns et aux autres qu’il était vain de vouloir détacher l’Empire français de la Métropole et que la poursuite des attaques servirait de prétexte à une intervention allemande.

       Dans ses mémoires, Churchill n’a pas caché son embarras. Il a comparé Mers El-Kébir à une tragédie grecque : « Ce fut une décision odieuse, la plus inhumaine de toutes celles que j’ai eues à partager », écrira-t-il.

       Les historiens, les politiques, les « moralistes » et les censeurs qui ont eu à juger des hommes, des gouvernants, et à écrire l’Histoire, ont dédaigné de prendre en considération le traumatisme dévastateur que cet événement tragique avait produit dans les esprits…

       Mers El-Kébir explique en grande partie l’attitude de bon nombre de nos gouvernants de Vichy durant le conflit comme elle explique aussi celle des autorités civiles et militaires d’Algérie en 1942-1943 et d’une population acquise au Maréchal Pétain mais volontaire pour poursuivre la lutte avec Darlan et Giraud contre les puissances de l’Axe.

       L’Afrique du Nord, malgré son traumatisme, accepta de rentrer en guerre en 1942 et sera avec son « armée d’Afrique », l’une des composantes de la victoire finale. Elle conservera, néanmoins, son hostilité à De Gaulle, que ce dernier, devenu président du Comité de la Libération devait justifier… Il se souviendra toujours de ce sentiment d’inimitié à son égard et, dès 1958, remis au Pouvoir par ceux-là mêmes qui l’avaient blâmé, leur fera supporter amèrement le poids de sa rancune…

       Ces morts Français, bannis de la mémoire nationale, auraient pu reposer en paix. Or, le 5 Juillet 2005, jour anniversaire d’une autre tragédie (Le massacre de plusieurs milliers d’Européens, le 5 Juillet 1962 à Oran), le cimetière de Mers El-Kébir fut saccagé sans qu’aucune autorité gouvernementale française, aucun média, aucune association humanitaire et « antiraciste », n’élevassent la moindre protestation, préférant s’humilier à « commémorer » la « répression » (beaucoup plus commerciale) de Sétif par l’armée française en 1945.

       Aujourd’hui encore, le souvenir de cette lâche agression britannique contre une flotte au mouillage et désarmée demeure vivace dans la Marine et, paraphrasant Talleyrand, on peut affirmer que « Mers El-Kébir a été pire qu’un crime, une faute ».

       Quant aux survivants de cette tragédie qui défilèrent devant les cercueils de leurs camarades, ils ont conservé depuis, ce visage dur des hommes qui n’oublient pas.
       N.B : Le 24 mai 1941, au large de l’Islande, le cuirassé Bismarck coula le Hood. Trois jours plus tard, le 27 mai 1941, il fut attaqué au large de Brest et sombra à son tour sous les coups d’une armada britannique.

José CASTANO       
e-mail : joseph.castano0508@orange.fr
-o-o-o-o-o-o-o-


Corsaire de France
Par Raphaël Delpard
Envoyé par Mme Annie Bouhier
Ça fait du bien de lire enfin un mot de reconnaissance

              Mes repentances vont seulement au petit peuple algérien?; il eut à souffrir de la sauvagerie des indépendantistes (FLN)?; des Français d’Algérie – que je nomme pour moi-même, les Français de la Méditerranée – délaissés en permanence par Paris. Aux cent-quarante-mille harkis : abandonnés par toute la gauche, la droite gaulliste, et la droite chrétienne pleurnicharde. Dans un bel ensemble hypocrite, ils les laissèrent assassinés par les soldats algériens devenus ivres d’eux-mêmes.
              L’Histoire les a oubliés, les politiques les ont sacrifiés, pour le repos de leur conscience, l’opinion publique les a abandonnés. Aujourd’hui, plus personne ne se soucie d’eux. Victimes d’une lâcheté et d’une incompréhension tragiques, les Français de la Méditerranée n’ont cependant pas disparu.

               Durant les huit années qu’aura duré la guerre (de 1954 à 1962), ils seront injustement passés, dans l’esprit de tous, de victimes à bourreaux. Au début du conflit, une maigre frange de l’opinion les incriminait?; à la fin, un véritable front uni se dressera pour les rendre responsables de la colonisation – et donc du conflit. Entre-temps, fait décisif, il y aura eu Charles de Gaulle qui de retour aux affaires en 1958, grâce au problème algérien, rejoindra la coalition. Les plus clairvoyants de ses compagnons qui essaieront de s’opposer à la curée seront impitoyablement écartés des allées du pouvoir et réduits au silence.
              Dès les premières bombes artisanales (1954) aux accords d’Évian (1962), la ségrégation a fait son œuvre : désinformation, délation, manipulation des foules et des médias, création d’une police parallèle – appelée « Barbouses par les pieds-noirs » rappelant par ses comportements la Gestapo française de sinistre mémoire, torturant et tuant des Français. Elle était dirigée par l’ignoble Bonnie. Il avait créé la brigade algérienne?; hé oui, il y eut pendant la Seconde Guerre mondiale des Algériens qui fusillèrent des Français?; les habitants du Limousin ne l’ont pas oublié.
              Les Français de la Méditerranée ont été abandonnés à la vindicte des foules. Isolés, sans relais en métropole pour expliquer leur tragédie, sans aucun accès à la presse ni à la télévision, ils sont devenus, au fil des mois, les boucs émissaires d’un colonialisme honteux dont la France voulait se laver, tandis que mouraient par milliers des femmes et des enfants, des deux communautés, sous les coups du terrorisme du FLN – Front de libération nationale – dans des conditions que les nazis n’auraient pas reniées.
              Pas un seul intellectuel, pas un seul politique, pas un seul représentant religieux ne s’est élevé pour rappeler que cette population maltraitée, et jetée en pâture à l’ennemi, elle était française, qu’on le veuille ou non. Car, faut-il rappeler aux complaisants « du crime contre l’Humanité perpétré sur cette terre d’Afrique » que l’Algérie d’alors n’est ni une colonie, ni un territoire d’outre-mer, mais bien une province, intégrée à la République, et constituée de départements français.
              Ces familles installées depuis plus d’un siècle étaient des boutiquiers, des employés, des petits exploitants agricoles, des artisans?; des gens simples, des citoyens paisibles, attachés à leur terre. Par un de ses tours de passe-passe dont l’Histoire officielle a le secret, ils sont devenus des esclavagistes, des exploiteurs du peuple, des « colons », bref des « salauds ». On reste médusé de s’apercevoir qu’il a fallu verser plus de sang pour exclure et humilier que pour protéger.


               En 1962, les Français de la Méditerranée,ont quitté leur terre, dans un effroyable sauve-qui-peut. N’emportant rien de ce qu’ils possédaient, laissant leurs biens sur place. En arrivant en métropole, ils sont confrontés au racisme, que l’on applique en général à un étranger. Pour les Français de France, le pied-noir en a tous les attributs. Il vient d’un pays que la majorité ne connaît pas, parle avec un accent particulier et une syntaxe savoureuse (le « pataouète »), a des origines douteuses, un mode de vie plus proche de celui d’un Arabe que d’un Européen et, pareil à l’étranger, il suscite la peur. Car on le dit fourbe, raciste, membre d’une société secrète, jugée antirépublicaine, et dont les membres, selon ce qui se colporte, sont prêts à tuer père et mère.
              Rien. Il n’y a rien pour les accueillir. Des bénévoles dépourvus de moyens font ce qu’ils peuvent. Des Français de la Méditerranée sont bloqués au port de Constantine par manque de bateaux. Ils sont contraints de vivre sur place jour et nuit?; les vainqueurs ne leur apportent ni aide ni nourriture. C’est le général Franco qui dénoue la situation. Il affrète des bateaux afin que la population abandonnée puisse regagner la métropole.

               Quand le bateau quittait le port d’Alger, dans un réflexe commun, ils enfouissaient leur visage dans leurs mains, et tournaient volontairement le dos au défilement des célèbres maisons blanches et du ciel d’un bleu cinglant. Ils s’effondraient ensuite le visage contre leur maigre sac de voyage bosselé seulement de quelques mouchoirs.
              Comment avons-nous pu laisser les grutiers cégétistes du port de Marseille, dont le jeu consistait à laisser tomber les valises dans la mer. « Oh, désolé ! Un accident, disaient-ils » éclatant du même rire qu’utilise l’imbécile quand il se sait vainqueur. Le parti communiste n’avait pas pris la peine de leur expliquer qu’en Algérie la population européenne était plus à gauche que l’on pouvait le croire. Des villes comme Alger, Bône et Constantine eurent pendant des années des élus communistes.
              Comment avons-nous pu laisser les hôteliers refuser une chambre à une famille, parce qu’ils arrivaient de là-bas, la laissant dormir à même le trottoir ?
              Comment avons-nous pu laisser des élus exprimer clairement le dégoût que leur inspiraient les arrivants ? Invitant le gouvernement à les jeter à la mer ?
              Comment avons-nous pu laisser des constructeurs goguenards donner les clés d’un appartement à des familles, alors que l’immeuble n’était pas encore sorti de terre ?
              Comment avons-nous pu laisser fleurir des écriteaux sur lesquels figurait l’indication suivante : rats-patriés ?
              Tout cela eut lieu et il y eut pire encore.

               Un peuple n’est pas sécable. D’un côté les bons citoyens, et de l’autre, les mauvais. Un peuple est indivisible.
              À mon insu, j’ai fait partie de ces Français arrogants. Il m’a fallu attendre quarante ans pour découvrir que ces gens méprisables avaient écrit la dernière page glorieuse de l’Histoire de France. Tout ce qui tient encore debout en Algérie, ce sont eux qui l’ont bâti, épaule contre épaule, avec les Algériens.
              Je mets aujourd’hui un genou en terre. Je leur demande pardon de n’avoir à l’époque pu rien faire qui aurait pu amoindrir leurs souffrances.
Raphaël Delpard




 
UN MELI-MELO DE SOUVENIRS
Envoyé Par Annie


          Des images d’Algérie, parfois…
          Parce qu’elles ne s’oublient pas !
          Nos revues réveillent les mémoires.
          Un nom retrouvé, c’est une histoire.
          Rappelle-toi ! Oui, souviens-toi !
          Ces souvenirs-là, ne s’oublient pas !
          Nous habitions le même quartier.
          Nous allions à Gautier, au lycée,
          Celui du savoir, des quatre cents coups
          Et des mille bêtises de jeunes fous.
          Avec le temps, il y avait les filles.
          Parfois intrépides ou malhabiles,
          Dans nos jeux elles étaient nos espoirs,
          Nos rêves ou parfois nos déboires.
          Elles étaient une part de notre cinéma.

          Elles étaient trop belles les filles de « Là-bas ! ».
          Les sorties et les surprises parties,
          Il fallait s’y préparer chaque samedi.
          Rappelle-toi ! Oui, souviens-toi !
          Ces souvenirs-là ne s’oublient pas !
          Et la mer, les plages et le soleil.
          C’était le temps des sept merveilles,
          Et cette Algérie-là,
          Elle ne s’oublie pas !
          Je voudrais surtout ne pas évoquer
          Le temps si présent du danger,
          Le temps du terrorisme, des stroungas
          Et d’une terre qui n’était plus de joie.
          Rappelons-nous, que du bon temps.
          La première voiture entre Michelet et d’Isly
          Pour draguer les filles… Un appeau à perdrix !

          C’était le temps d’une jeunesse heureuse
          Qui ne se doutait pas d’une fin malheureuse.
          Souviens-toi de l’anisette et des kémias.
          Les verres se levaient une fois, mille fois,
          Avec parfois un couscous fait maison
          Aux épices d’Orient et la viande de mouton.
          Rappelle-toi les brochettes de Fort de l’Eau,
          A Sidi-Ferruch, les huitres, les moules, les brulots.
          Oui ! Cette Algérie-là,
          On ne l’oublie pas !

          Il y avait les grandes virées programmées,
          Oran, Constantine, loin des plages d’Alger.
          Bien sûr ! Les Harlem Globetrotters et leurs numéros.
          Le Musical… Charles Trenet et Dario Moreno,
          Aznavour, Brassens… Ils recevaient mille bravos !

            Le jazz… La trompette de Dizzi Gillespie…
          En voiture, nous l’avions ramené à l’Aletti !
          Enfin à la place Bresson, il y avait l’Opéra.
          Lohengrin, Marguerite ou encore la Tosca…
          Et la « Famille Hernandez », quel souvenir !
          A la salle Pierre Borde, du rire et du plaisir.
          Vieux frère retrouvé, tu n’as pas changé.
          Un peu grossi, mais toujours l’accent d’Alger.
          Celui de Bab-el-Oued pour être plus précis.
          En un mot comme en cent celui de l’Algérie.
          Ce sont des souvenirs, gravés dans le cœur.
          Crois-moi, Vieux frère, c’est que du bonheur.
          Cette Algérie-là,
          On ne l’oublie pas !
         
Robert Charles PUIG / 07 / 2022



Guerre d'Algérie: «La stratégie du chaos»
Envoyé par M. J.P. FERRER
Henri-Christian Giraud. F.CAMPO

         ENTRETIEN - De Gaulle a-t-il subi ou organisé les événements qui ont présidé au règlement sanglant de la guerre d'Algérie? Le journaliste et essayiste Henri-Christian Giraud a repris le dossier à nouveaux frais.

         Cet article est extrait du Figaro Histoire «Le crépuscule sanglant de l'Algérie française», retrouvez dans ce numéro un dossier spécial sur ce sujet toujours brûlant, 60 ans après les accords d'Evian.

         La guerre d'Algérie n'a pas été pour le général De Gaulle l'occasion d'un grand retournement. Il était dès 1958 pleinement décidé à y mettre fin en donnant l'indépendance au pays et en le livrant au FLN. Tout juste a-t-il été empêché de le dire avec franchise parce qu'il avait compris que c'est en s'appuyant sur les plus ardents partisans de l'Algérie française, en leur faisant croire qu'il serait l'artisan du maintien de l'Algérie dans la France, qu'il parviendrait à sortir de sa traversée du désert pour se hisser au pouvoir et mettre fin à la IVe République honnie : telle est la thèse que soutient Henri-Christian Giraud dans Le Piège gaulliste. Un livre d'une densité exceptionnelle, en même temps que d'une grande audace novatrice, nourri par une impressionnante bibliographie, le recueil des observations quotidiennes des contemporains de l'événement, et plus encore par l'exhumation d'archives inédites, singulièrement celles de l'Union soviétique. L'histoire de la tragédie algérienne en sort renouvelée par la mise en lumière d'un écheveau de trahisons et de tromperies qui constitua, au prix d'un fleuve de sang, l'un des plus singuliers mensonges d'État de notre histoire.

         LE FIGARO HISTOIRE. - Quelle intention se cache derrière votre titre ?

         Henri-Christian GIRAUD. - Devant le sinistre spectacle de l'aéroport de Kaboul, un certain nombre d'observateurs ont fait à juste titre le rapprochement avec la fin de la guerre d'Algérie pour dire que ce à quoi l'on assistait, aussi terrible que cela soit, était peu de chose à côté de ce qu'on avait pu voir en 1962 : en effet, ce qu'ont souffert les pieds-noirs et les harkis, dans l'indifférence à peu près générale de la population métropolitaine, mais de par la volonté délibérée du pouvoir et de son chef, fut atroce. Certains historiens parlent même d'apocalypse… Or, je me suis toujours posé la question suivante : le traitement de l'affaire algérienne devait-il fatalement être tragique ? C'est à cette question que j'ai tenté de répondre.

         Et quelle est la conclusion de votre enquête ?
         Si, pour Camus, « la tragédie n'est pas une solution », en revanche, elle l'est pour De Gaulle. « Je ne me sens bien que dans la tragédie », a-t-il confié à son éditeur Marcel Jullian, qui lui prêtait même cette boutade : « Moi, je fais dans la tragédie. »

         Qu'est-ce que cela a voulu dire concrètement ?
         Cela voulait dire changer la donne Algérie française, sur laquelle De Gaulle avait habilement surfé pour arriver au pouvoir, et, de mensonges en coups montés, créer progressivement les conditions de la tragédie (l'autre nom du chaos) pour réaliser son dessein primordial : le dégagement. Ou encore : la fuite, comme il le dira sans fard lors du Conseil des ministres du 4 mai 1962 devant un gouvernement en état d'hébétude. Il fallait que la situation soit chaotique pour justifier qu'il fasse lui-même l'exact contraire de ce pour quoi il avait été appelé en 1958 par les Français, à l'époque encore majoritairement favorables à l'Algérie française.

         Au sortir de la guerre, conscient de ce que la libération de la France devait à son empire colonial, De Gaulle était encore un impérialiste assumé, voire forcené

         Henri-Christian Giraud : Contrairement à la plupart des spécialistes de la période, vous affirmez que De Gaulle savait exactement ce qu'il voulait faire en arrivant aux affaires. Sur quoi vous fondez-vous ?

         Au sortir de la guerre, conscient de ce que la libération de la France devait à son empire colonial, De Gaulle était encore un impérialiste assumé, voire forcené, comme en témoignent ses ordres en faveur de la répression la plus extrême tant à Thierry d'Argenlieu en Indochine, qu'à Beynet au Levant et à Chataigneau en Algérie, lors des émeutes de Sétif en mai 1945, puis, durant la période du RPF, ses diverses prises de position sans concession. Mais, en 1954, une visite du démographe Alfred Sauvy, qui dit l'avoir sensibilisé aux différents problèmes que ferait peser le maintien de l'Algérie dans la France, semble l'avoir convaincu de la nécessité de la décolonisation, sous peine de voir la natalité musulmane submerger la population métropolitaine et envoyer 80 députés à la Chambre, et, parallèlement, de voir s'accroître un déficit chronique entre la France et sa colonie qui a toujours coûté cher en subventions. Sauvy, qu'il y a tout lieu de croire, confie l'avoir alors entendu se prononcer dès cette époque pour l'« abandon ».

         Le 4 juin 1958, le général De Gaulle, depuis le balcon du Gouvernement général à Alger, lance à la foule enthousiaste : « Je vous ai compris ! » Cette formule ainsi que le « Vive l'Algérie française ! » qui conclura son discours de Mostaganem, deux jours plus tard, entretiendront les illusions des partisans du maintien de l'Algérie dans la France auxquels il devait son retour au pouvoir. Selon Henri-Christian Giraud, De Gaulle était pourtant déjà décidé à l'« abandon ». Bridgeman Images
         Comment expliquer que ce changement ait été ignoré ?
         Tout simplement parce que De Gaulle fait en 1955 ses adieux à la presse et annonce son retrait de la vie politique, retrait confirmé par la mise en sommeil du RPF en septembre suivant.

         Un vrai faux retrait ?
         En effet, il s'agit d'une pure tactique de la part de celui qui s'est fait une méthode de « progresser par les couverts ». Disant alors en privé à chacun ce que chacun veut entendre, l'ermite de Colombey regarde les convulsions du « régime » honni avec gourmandise et, profitant du relâchement de la curiosité des journalistes, il programme soigneusement son retour. Ainsi, le 10 octobre 1956, trois semaines avant l'opération de Suez, qui a pour but d'assécher militairement la rébellion algérienne soutenue par l'Égypte et dont il connaît les préparatifs grâce à Christian Pineau, le ministre des Affaires étrangères, De Gaulle passe secrètement à l'offensive : il délègue Gaston Palewski, l'un de ses principaux intermédiaires avec Moscou depuis novembre 1940, auprès de Serge Vinogradov, l'ambassadeur soviétique à Paris, à qui l'on doit la révélation de cette visite, pour lui faire savoir qu'il va arriver incessamment au pouvoir, Guy Mollet n'étant pas en mesure de faire face à la situation terroriste ; que le président Coty y est favorable ; qu'il est le seul à pouvoir véritablement régler l'affaire algérienne et qu'aussitôt aux affaires, il négociera avec les représentants des Algériens.
         Le mot important de ce message est le mot « négociation ».

         Il l'emploie alors que le rejettent aussi bien le socialiste Robert Lacoste, ministre résident en Algérie, que son prédécesseur en Algérie Jacques Soustelle, député du Rhône sous l'étiquette gaulliste. Au même moment, le FLN vient en effet de faire connaître lors du congrès de la Soummam sa « doctrine de la négociation ». Celle-ci ne peut à ses yeux viser qu'à l'indépendance plénière de l'Algérie dans le cadre de l'unité du peuple et de l'intégrité de son territoire, Sahara compris, et à la condition d'être reconnu comme l'in­terlocuteur unique, en refusant tout ­cessez-le-feu avant un accord politique. En intervenant comme il le fait, c'est-à-dire en se déclarant de but en blanc pour la négociation, De Gaulle renverse donc le fameux triptyque molletiste : « Cessez-le-feu, élections, négociations. »
         D'où la joie des dirigeants de la rébellion, attestée par Jean Daniel alors à Tunis, de le voir arriver au pouvoir en mai 1958. Et d'où aussi leur immense déception à la suite de son discours du 4 juin à Alger et de son cri de « Vive l'Algérie française ! » le 6 juin à Mostaganem.

         Comment se présente alors la situation ?
         À ce moment de l'Histoire, le cocktail politique gaulliste est fait du leurre en cours des partisans de l'Algérie française et du sentiment chez les dirigeants du FLN d'avoir été dupés. De Gaulle se retrouve donc dans la situation d'un chef de guerre contraint de combattre sur deux fronts. Position intenable. Il lui faut par conséquent simplifier au plus vite la situation. Disposant des pleins pouvoirs, et s'arrogeant personnellement le traitement de l'affaire algérienne, il va concentrer toute son action sur le renforcement de l'État avec notamment la constitution d'un staff élyséen.
         En s'adressant sans distinction aux « 10 millions de Français d'Algérie », « des Français à part entière, avec les mêmes droits et les mêmes devoirs », qui auront à se prononcer bientôt, dans le cadre d'un collège unique, sur la Constitution en gestation, De Gaulle va dans le sens de l'intégration souhaitée par les tenants de l'Algérie française. akg-images / Erich Lessing

         En quoi consiste-t-il ?
         Il est composé essentiellement de deux indépendantistes affichés : René Brouillet, directeur des Affaires algériennes, et son adjoint, Bernard Tricot. Ce dernier, d'inclination mendésiste, raconte qu'ayant refusé par deux fois le poste, il ne l'a accepté qu'après s'être assuré auprès de De Gaulle que son travail viserait à préparer l'indépendance algérienne, comme lui-même venait de préparer celle de la Tunisie.

         Le staff élyséen s'enrichira plus tard d'un troisième personnage : François Coulet, nommé en mars 1960 directeur des affaires politiques de la Délégation générale du gouvernement à Alger, qui est un gaulliste inconditionnel. Et puis, bien sûr, contrôlant en fait tous les services de renseignement, officiels et officieux, et, surtout, disposant tous les soirs d'une heure de conversation en tête à tête avec le chef de l'État, le redoutable et redouté Jacques Foccart, le véritable homme fort du régime gaulliste.

         Comment les intentions de De Gaulle échappent-elles à ses proches comme à l'opinion ?

         Jusqu'en septembre 1959 au moins, la ligne officielle est le maintien de l'Algérie française, renforcée par les résultats spectaculaires du référendum ­constitutionnel (28 septembre 1958) et des élections législatives (30 novembre 1958), et plus encore par le choix d'un Premier ministre – Michel Debré – emblématique de la défense intransigeante de l'Algérie française (il avait jugé, sous la IVe République, qu'un coup d'État serait légitime contre tout gouvernement qui en consentirait l'abandon). Elle s'exprime par la proclamation de la volonté élyséenne de rechercher pour le problème algérien la « solution la plus française », formule magique propre à semer la confusion, et l'annonce en fanfare, le 3 octobre 1958, du lancement du coûteux plan de Constantine pour rattraper le retard en équipements des départements d'Algérie.

         1954-1962: comment l'opinion publique a basculé

         Tout cela désamorce plus ou moins les doutes que font naître d'autres décisions : l'éviction brutale de Salan, commandant en chef et délégué général du gouvernement en Algérie, et son remplacement par deux personnalités favorables à terme à l'indépendance, Paul Delouvrier, et le général gaulliste Maurice Challe ; la mise à l'écart de Soustelle dans un poste ministériel mineur, l'Information, quand tout le monde le donnait déjà comme Premier ministre ; les mutations massives d'officiers engagés dans les événements du 13 Mai à des postes en métropole et en Allemagne et leur remplacement par des fidèles ; la reprise discrète, dans la nouvelle Constitution, d'un « outil séparateur » avec l'article 53 (titre VI) qui donne la possibilité de « cession, échange ou adjonction de territoire » en vertu d'une loi et avec le « consen­tement des populations intéressées », ce qui permettra de contourner le dogme sacro-saint de l'inaliénabilité du territoire de la République ; la dévitalisation des comités de salut public nés du 13 mai 1958 par l'ordre de retrait des militaires ; le lancement en fanfare de la Communauté (nouveau nom de l'Union française), dans laquelle De Gaulle prétend inscrire le destin de l'Algérie, tout en soutenant que « personne n'est tenu d'y adhérer » et en précisant surtout que « l'indépendance est à la disposition de qui veut la prendre » ; et enfin, derrière l'effet d'annonce de l'appel à la « paix des braves », le 23 octobre 1958, l'appel du pied à l'« organisation extérieure », pour l'inviter à la signature d'un cessez-le-feu, qui accorde au GPRA, le prétendu gouvernement algérien en exil, un crédit qu'il n'avait plus aux yeux des wilayas à bout de souffle et vent debout contre les « nantis de Tunis », pour, ce faisant, habituer l'opinion publique française à l'idée d'une négociation avec lui.

         Le 4 juin 1958, Alger réserve un accueil triomphal à De Gaulle. La foule des pieds-noirs ovationne aussi Jacques Soustelle, dernier gouverneur général de l'Algérie, de février 1955 à janvier 1956, et ardent partisan de l'Algérie française, qui avait œuvré pour le retour du général au pouvoir. Maurice ZALEWSKI/RAPHO
         Avançant masqué derrière ces paravents et les succès vite spectaculaires des offensives Challe, qui ne laissent au bout d'un an aucun espoir aux fellaghas, dont les effectifs fondent de 121 katibas à seulement 35 à effectifs réduits un an plus tard, le guerrier de la politique qu'est De Gaulle peut œuvrer dans le secret à son renversement des alliances. Au nom de la ruse, éminente qualité de l'homme d'action comme il l'a écrit dans Le Fil de l'épée, tout y passe : gages et fausses promesses, mensonges répétés, dissimulations et assurances de tous ordres, provocations aussi, y compris l'engagement de sa parole d'honneur ! « Dans cette affaire algérienne, conclura Raymond Aron, De Gaulle a menti à tout le monde. »

         Quand finit-il par abattre son jeu ?
         Le coup de théâtre gaullien a lieu le 16 septembre 1959 : devant le peuple français en état de choc, le chef de l'État annonce un référendum sur l'autodé­termination sur la base de trois options possibles : la sécession, la francisation ou l'association. Et encore, ce troisième mot, « l'association », il ne le prononce pas. Il se contente de le désigner en usant d'une périphrase interminable (« le gouver­nement des Algériens par les Algériens, appuyé sur l'aide de la France et en union étroite avec elle pour l'économie », etc.), car cela pourrait être vu par le FLN comme l'amorce d'une troisième voie entre l'indépendance et l'assimilation. Signe qu'à ses yeux, l'autodétermination qu'il promeut officiellement n'est au fond que le masque d'une prédétermination en faveur d'une indépendance à tout prix.
         Or ce que l'on a appris depuis, grâce à une confidence publiée dans un livre posthume (1995) de Louis Terrenoire, ex-ministre de l'Information, c'est que dans le plus grand secret et au prix bien sûr de mille précautions, De Gaulle était allé jusqu'à soumettre la teneur de son discours sur l'autodétermination aux chefs du FLN : Ben Bella, Boudiaf, Aït Ahmed, emprisonnés en France, avant même d'en faire l'annonce au peuple français… « Ils m'auraient embrassé », confiera le messager, Gaston Gosselin du cabinet de Michelet. Cette manière de faire – qui n'est finalement que la poursuite de sa diplomatie secrète en direction du FLN depuis octobre 1956 – consacre définitivement le renver­sement des alliances (« Désormais, De Gaulle a partie liée avec nous », dit un ministre du GPRA à Jean Daniel) et la désignation de l'« ennemi commun » (le mot est de Belkacem Krim) aux deux parties : le camp Algérie française.

         Que représente face à lui ce camp ?

         Selon un sondage de l'Ifop, il était un an plus tôt encore majoritaire (52 %) dans l'opinion publique française et surtout au sein de l'UNR, le parti gaulliste, ce qui n'est pas pour arranger les affaires du chef de l'État, qui va tout faire pour le mettre au pas ! Concrètement, ce bloc Algérie française se compose de l'armée à quelques exceptions près, des Européens d'Algérie hormis quelques « libéraux », d'un certain nombre de personnalités métropolitaines de tous bords, et d'une forte proportion de musulmans fidèles à la France dont certains sont des élus de la République et d'autres des combattants : soldats, moghaznis, harkis, dont le nombre avoisine les 220.000. Un chiffre très supérieur aux effectifs de l'ALN.
         En leur sein, et en dépit de tout, nombreux restent ceux (de Challe, partisan d'une « décolonisation par promotion » et non « par abandon », à Soustelle en passant par Camus, Debré ou même Salan) qui, sur la base des résultats électoraux précédents et du délitement du FLN, croient encore jouable une « solution française », puisque le chef de l'État a annoncé le référendum d'autodétermination dans un délai de quatre années après le retour de la paix, ce qui laisse de la marge.

         De Gaulle dit à Peyrefitte au sujet de l'Algérie : « C'est un terrible boulet. Il faut le détacher. C'est ma mission. »

         Henri-Christian Giraud
         Mais le maréchal Juin, lui, connaissant bien le processus de pensée de son camarade de promotion, comprend que ce qu'il craignait confusément va se dérouler implacablement jusqu'à l'abandon de sa terre natale. C'est lui qui est dans le vrai. Dès le 20 octobre, De Gaulle dit à Peyrefitte au sujet de l'Algérie : « C'est un terrible boulet. Il faut le détacher. C'est ma mission. » Décidé à brusquer les choses, c'est-à-dire, malgré ce qu'il dit, à tenir pour rien les conditions de temps et de sécurité nécessaires à la bonne tenue du référendum, De Gaulle choisit l'affrontement par la provocation. Comment ? La principale force du camp ennemi étant le couple armée-pieds-noirs que symbolise le général Massu, l'auteur de La Discorde chez l'ennemi, servi par l'habile Foccart, monte son piège pour briser ce couple.

         C'est ce que vous appelez « l'opération Massu ».

         En résumé, selon le scénario mis au point par le « cabinet noir » gaulliste (l'expression est de François Mitterrand), il s'agit de faire en sorte que le bouillant général, patron de la 10e D.P. et préfet de la zone militaire d'Alger, très engagé dans le maintien de l'Algérie dans la France (« Tant que je serai ici, pas de crainte pour l'Algérie française ! » répète-t-il à l'envi) et, de ce fait, l'icône des pieds-noirs, ­désavoue publiquement la politique gaulliste. Ce sera alors le prétexte de son éviction, qui, chacun le sait, entraînera inévitablement la révolte de la population européenne que le pouvoir, fort d'un encadrement militaire très renouvelé à base d'ex-membres des Forces françaises libres, brisera dans le sang.

         Le général Massu. « Tant que je serai ici, pas de crainte pour l'Algérie française ! » répète celui qui, préfet de la zone militaire de l'Algérois, est l'idole des pieds-noirs depuis qu'il a démantelé l'organisation du FLN dans la « bataille d'Alger » de 1957 et participé à l'insurrection du 13 mai 1958. Tombé dans le piège tendu par le « cabinet noir » gaulliste, il désavoue publiquement la politique algérienne du général, et est rappelé en métropole en janvier 1960. akg-images / ullstein bild

         Sur la base d'autres indices encore, on peut légitimement affirmer que le SR lui a mis le marché en main : la coopération, avec un probable scoop à la clé, ce qui n'est pas négligeable pour un journaliste, ou un mauvais sort. Tout se passe comme prévu : Massu se lâche, l'interview bien mise en scène à la une du Süddeutsche Zeitung sous le titre « Massu déçu par De Gaulle » et en sous-titre « Le général de parachutistes prend ses distances avec la politique algérienne du président » paraît, comme par hasard, le 18 janvier 1960, quatre jours avant la réunion à l'Élysée de tous les responsables en Algérie, à laquelle Massu doit participer, alors que le reste du reportage de Kempski ne paraîtra qu'à partir du 25 janvier…

         Debré confie dans ses Mémoires avoir brûlé les ordres rédigés par De Gaulle pour empêcher que « sa figure soit abîmée »

         Henri-Christian Giraud
         Dans le sang ? Ne forcez-vous pas le trait ?

         Je n'invente rien. Debré confie dans ses Mémoires avoir brûlé les ordres rédigés par De Gaulle pour empêcher que « sa figure soit abîmée ». Et le général Ely, chef d'état-major des armées, confirme que ces ordres comportaient « l'ouverture du feu sur une foule où se trouvent des femmes et des enfants ».
         Reste que, pour pousser Massu à la faute, il faut vaincre sa méfiance et pour cela que le piège soit indétectable et donc qu'il vienne de loin, de l'étranger même si possible. Ce sera d'Allemagne, où l'ambassade française à Bonn prépare le terrain à un journaliste, Hans Ulrich Kempski, du Süddeutsche Zeitung de Munich, pour lui obtenir l'autorisation de faire un reportage sur la situation militaire en Algérie. Elle le recommande chaudement en vantant ses bonnes dispositions au Quai d'Orsay qui, à son tour, fait suivre l'autorisation à la Délégation générale en Algérie.

         Cette mobilisation d'autorités successives (un ambas­sadeur, un ministre des Affaires étrangères, un délégué du gouvernement) ne peut évidemment qu'être cautionnée par l'Élysée. À plus forte raison en ce moment de fièvre suscitée sur place par le discours sur l'autodétermination. Or le fameux Kempski, ancien parachutiste dans la Wehrmacht et affichant désormais des opinions de gauche, était en réalité ciblé par la Main rouge, la filiale du SDECE spécialisée dans l'assassinat des soutiens du FLN (elle en aura, selon Constantin Melnik, le responsable des services à Matignon, quelque 103 à son actif pour la seule année 1961 !).

         Notre ambassade à Bonn ne pouvait évidemment pas l'ignorer, non plus que le président de la République, puisque chaque opération « Homo » devait recevoir son assentiment. D'ailleurs, Louis Terrenoire, ignorant des dessous de l'affaire, vend la mèche : « Désireux d'aller enquêter en Algérie, [Kempski] a obtenu un visa de nos services de chancellerie à Bonn, bien qu'il y ait eu des raisons de le lui refuser, dit-il. Les facilités qui lui ont été accordées lui permettront de franchir la porte du général Massu et d'obtenir une interview. »

         Violente manifestation musulmane pour l'indépendance de l'Algérie, contenue par un cordon de CRS, le 12 décembre 1960, dans le quartier de Belcourt à Alger, lors du voyage de De Gaulle. KEYSTONE-FRANCE/GAMMA RAPHO

         L'interview fait scandale, et sans même entendre son fidèle compagnon qui crie au complot et dément ses propos, De Gaulle le fait convoquer à Paris, mais surtout interdit son retour en Algérie malgré les alarmes de tous les responsables, civils et militaires. Résultat : comme prévu, l'éviction de Massu provoque la révolte connue sous le nom de la « semaine des barricades ». Bilan : 22 morts et une centaine de blessés mais, surtout, un début de scission au sein de l'armée entre les loyalistes et les autres. La discorde chez l'ennemi est en cours… Pour De Gaulle, « l'opération Massu » est une réussite sur toute la ligne. Le piège a parfaitement fonctionné.

         Qu'en est-il de « l'affaire Si Salah » qui intervient quelques mois plus tard ?

         Cette offre de reddition du colonel Si Salah, célébré par le FLN comme le « prototype du maquisard valeureux et pur », et des principaux responsables de la wilaya IV (l'Algérois) en opposition frontale avec la direction du FLN jugée inapte, corrompue et communisante, a failli en mai-juin 1960 perturber la démarche gaulliste qui privilégiait la négociation avec ladite direction, loin du champ de bataille. Afin d'éviter que l'équipe de Matignon, Debré en tête, se saisisse de cette opportunité pour fonder la troisième force que Challe, fort de ses succès militaires et de l'afflux de ­ralliements de combattants, met en chantier avec son « parti de la France », De Gaulle s'en empare personnellement, allant jusqu'à recevoir nuitamment les trois chefs fellaghas à l'Élysée le 10 juin 1960. Cette affaire « extraordinaire », selon le mot de Tricot, méritait un trai­tement extraordinaire.

         Il fallait choisir entre les deux parties : les combattants ou les dirigeants. Mais la « paix des braves » n'est plus à l'ordre du jour (si tant est qu'elle l'ait jamais été) et De Gaulle réduit d'entrée de jeu cet événement à un rôle secondaire : celui d'un « adjuvant » (le mot est encore de Tricot), c'est-à-dire de moyen de pression sur les dirigeants extérieurs de la rébellion pour les amener à la table des négociations.

         Il choisit donc de s'adresser directement à eux, le 14 juin, et de les appeler à une ­rencontre à Melun, sauvant ainsi la mise à des politiques discrédités au détriment des combattants. Ils vont bien sûr sauter sur l'occasion mais, désormais sûrs d'eux, sans lâcher un pouce de leurs revendi­cations concernant la reconnaissance de l'indépendance de l'Algérie, et ce, sans aucun préalable sur le cessez-le-feu, le Sahara, la représentation unique ou le sort des populations. D'où un haut-le-corps gaullien et l'échec de la ren­contre de Melun qui assure toutefois au GPRA une grande visibilité aux yeux de la communauté internationale.

         Pourquoi la direction du FLN reste-t-elle sur ses positions ?
         Parce qu'elle y a tout intérêt puisqu'elle est assurée d'être incontournable après le choix de De Gaulle de ne pas traiter avec les combattants : comme par hasard encore, lors de l'ouverture des accords d'Evian, les deux principaux chefs de la wilaya IV, Si Salah et Si Mohamed, retournés les mains vides en Algérie tomberont sous des balles françaises en pleine période de « trêve unilatérale », ce qui signifie que l'ordre est venu de haut, sans doute pour effacer toutes traces d'une autre politique possible…

         Quant au chef de l'État, prisonnier du processus qu'il a mis en œuvre, il ne peut s'en sortir qu'en portant tous ses coups au camp Algérie française pour le neutraliser. Ce qu'il a anticipé en rétablissant la peine de mort en matière politique (elle était abolie depuis 1848), six jours avant de recevoir les chefs fellaghas à l'Élysée : sachant d'avance qu'il ne donnerait pas suite à leur proposition, il se donnait sans doute les moyens de faire face aux réactions des « ultras » si l'affaire venait à se savoir. Dès lors, la tragédie est en marche et elle va monter en gamme au rythme des initiatives présidentielles.
         Lesquelles ?

         Deux principalement. Le 3 avril 1960, c'est la mutation brusquée de Challe qui va progressivement se convaincre du « torpillage » de l'affaire Si Salah par l'hôte de l'Élysée parce que tout affaiblissement du GPRA le gêne plus qu'il ne le sert, et prendre conscience que le plan Challe n'a été qu'un « leurre » et pas un leurre « destiné à l'étranger, à l'ONU, mais un leurre destiné à l'armée » et qu'il ne fallait pas que la victoire soit totale ni que le « parti de la France » disposant de sa propre force armée puisse offrir une alternative crédible.

         Le colonel Si Salah, un des chefs de la wilaya IV. L'offre de reddition de ce valeureux maquisard opposé à la direction du FLN faillit perturber la démarche gaulliste qui privilégiait la négociation avec ladite direction. AFP

         Le 4 novembre 1960, c'est l'offre solennelle de négociation politique faite au GPRA. Évoquant « la République algérienne », De Gaulle ajoute subrepticement lors de l'enregistrement : « laquelle existera un jour ». Cette dernière incidente ne figurait pas dans le discours qu'il avait fait lire à Debré. Elle le prend de court. Or, cette concession sans contrepartie à la rébellion signe l'arrêt de mort de tout projet d'association. Dès lors, les démissions se succèdent, notamment celles de Delouvrier et de Jacomet, les deux têtes gouvernementales sur place, qui s'offusquent de le voir lâcher l'indépendance avant même de l'avoir négociée.

         Comment réagit le FLN à ces nouvelles avances ?
         Le message de l'Algérie algérienne a été bien capté par le GPRA qui se dit prêt à renouer le contact rompu à Melun, mais le fait est là : le FLN ne s'impose toujours pas à la population musulmane, première victime du terrorisme, et qui ne lui obéit que sous la contrainte et la terreur. Ses dirigeants n'étant pas sûrs de sortir victorieux du référendum d'autodétermination, on assiste alors à cette chose assez ahurissante que De Gaulle va devoir payer de sa personne pour imposer publiquement le FLN tant en Algérie qu'en France, où il souffre d'un fort discrédit dû aux attentats, et porter ainsi le coup de grâce à l'« ennemi commun » : les partisans de l'Algérie française. C'est la raison pour laquelle il se rend en Algérie en décembre 1960. Il confie à Terrenoire qui l'accompagne : « C'est une ­partie difficile que nous allons mener, et qui n'a pour moi rien de réjouissant. »

         Cette « partie difficile », c'est de faire en sorte que des manifestations musulmanes montrent la popularité du FLN. L'affaire a été montée de main de maître par François Coulet et des officiers des SAU (sections administratives urbaines) qui ont incité les jeunes à crier : « Algérie musulmane ! Vive De Gaulle ! Algérie algérienne ! » La « partie difficile » s'accompagne de nombreux débordements puisqu'elle va faire 112 morts (statistiques officielles) et plus de 400 blessés. « Pour la première fois, écrit Benjamin Stora, qui donne la clé de l'affaire, le drapeau du FLN flotte sur Alger, donnant au GPRA une légitimité populaire cruciale alors que s'esquissent les dures négociations qui vont mener aux accords d'Evian. »

         Désormais De Gaulle peut dire et répéter que le FLN est « représentatif des neuf dixièmes de la population algérienne » et en prendre l'opinion à témoin. D'où ce constat mélancolique d'un officier français : « Nous avons subi un véritable Diên Biên Phu psychologique (…). Le 16 mai 1958, nous n'avions pas la situation militaire en main et tout le monde criait : “Vive la France !” Aujourd'hui, nous avons gagné sur le plan militaire, mais on crie : “Vive le FLN !” »

         Vous avancez que le putsch des généraux aurait lui-même été facilité par l'inertie volontaire du pouvoir…
         Les futurs putschistes, parfaitement identifiables et depuis toujours iden­tifiés, étaient tous sous surveillance étroite de la Sécurité militaire du fidèle ex-FFL Feuvrier, renforcée d'une cellule d'anciens de la France libre se recrutant par cooptation. La police politique est donc assurée et, dans son livre Le Putsch des généraux, Pierre Abramovici a recensé il y a maintenant déjà une dizaine d'années les avertissements répétés des diverses officines gaullistes, notamment le Mouvement pour la Communauté, auprès des autorités.

         Les généraux André Zeller, Edmond Jouhaud, Raoul Salan et Maurice Challe (de gauche à droite), quittant la Délégation générale d'Alger après s'être adressés à la foule, le 24 avril 1961. Averties des préparatifs d'un putsch, les autorités politiques ont laissé faire, assurées qu'elles étaient de son échec. Mais la dramatisation orchestrée par le chef de l'État lui a permis de s'octroyer les pleins pouvoirs en application de l'article 16 de la Constitution et de remettre au pas l'armée française. KEYSTONE-FRANCE/GAMMA-RAPHO
         Contraignant d'ailleurs Louis Joxe à intervenir pour censurer leurs communiqués qui rendaient publique l'éventualité d'un putsch. Debré reconnaîtra lui-même à la tribune de l'Assemblée nationale que le gouvernement a été averti des préparatifs du putsch le 18 avril, soit quatre jours avant son déclenchement ! Jean-Raymond Tournoux rapporte ce propos de certains tacticiens du gaullisme : « Heureuse insurrection… On peut ima­giner que, par sa dernière conférence de presse, le Général a eu pour dessein de débusquer ses adversaires, de les amener à un coup. » Ce qui est sûr également, c'est que la dramatisation orchestrée par le pouvoir autour d'un putsch qui n'avait techniquement aucune chance puisque les moyens aériens ne donnaient aucune possibilité de manœuvre en direction de la métropole, a permis au chef de l'État de s'emparer des pleins pouvoirs en faisant jouer le fameux article 16 de la Constitution, et de remettre au pas l'armée française. C'était le but du piège.

         Cette mise au pas de l'armée était-elle destinée à aplanir les derniers obstacles à un accord avec le FLN ?

         Elle était nécessaire à la conversion de sa victoire en défaite. De Gaulle s'est fait donner le 8 janvier 1961 par un ­référendum à double question la liberté d'aller au terme de sa politique algérienne. Soucieux d'aller vite lors des négociations (qui commencent véritablement le 5 mars 1961 à Neuchâtel et se poursuivent par Evian 1 et Evian 2), il ne va plus hésiter à céder alors aux quatre volontés d'un FLN bien décidé à lui « faire avaler son képi et la visière avec » : le 9 mars 1961, il accepte que le cessez-le-feu ne soit pas un préalable pour l'ouverture de négociations ; le 6 avril, il accepte que le FLN soit l'interlocuteur unique et le représentant exclusif du peuple algérien ; le 5 septembre, il reconnaît la souveraineté algérienne sur le Sahara ; le 18 février 1962, il abandonne le sort des populations européenne et musulmane à la discrétion du FLN. La négociation a tourné ainsi à l'habillage diplomatique d'un abandon pur et simple et, le 18 mars, c'est la France qui vient à Canossa, avec tout ce que cela veut dire d'humiliation à venir.

         Au final, notre pays se retrouve aujourd'hui en position de faiblesse intellectuelle et morale dans le nouveau rapport de force international, marqué par la montée d'un islamisme qui était alors déjà en germe dans la guerre d'Algérie, et régulièrement en situation d'accusé de la part d'un faux vainqueur qui, pour se légitimer aux yeux de sa population, n'a de cesse de condamner l'œuvre coloniale française et de lui demander des comptes et des excuses. Ce à quoi s'est prêté, toute honte bue, l'actuel président de la République, n'hésitant pas à accuser la France d'avoir commis en Algérie un « crime contre l'humanité ». On prétend souvent que la politique gaulliste a été visionnaire. Elle a débouché pourtant sur un fiasco dont nous n'avons pas fini de payer les conséquences.
         Algérie : le piège gaulliste. Histoire secrète de l'indépendance, Perrin, 704 pages, 30 €. Perrin
         «Le crépuscule sanglant de l'Algérie française», 132 pages, 8,90€, disponible en kiosque et sur le Figaro Store.




LA FIN DU 1er RÉGIMENT ÉTRANGER
DE PARACHUTISTES
Par Daniel WEIMANN, médecin capitaine
Envoyé par Mme A. Bouhier

            
            Il y a 60 ans, le 30 avril 1961 était dissous l'un des plus beaux et des plus prestigieux régiments de l'armée française et particulièrement de la Légion Étrangère : le 1er Régiment Étranger de Parachutistes. Les circonstances de cette disparition sont encore vivaces dans la mémoire des plus anciens d'entre nous, pour nos jeunes l'histoire et les parents leur ont appris que c'était à la suite du putsch des généraux, ou putsch d'Alger, qui a eu lieu dans la nuit du 21 au 22 avril 1961 et qui a échoué 4 jours plus tard.

Historique de la création du 1er REP

            - Créé au lendemain de la seconde guerre mondiale, le 1er juillet 1948, le BEP (Bataillon Étranger de Parachutistes), appellation originelle de l'unité, avait été deux fois sacrifié en Indochine. Une première fois au Tonkin, en septembre 1950, où 17 légionnaires seulement revinrent d'une mission suicide sur la RC 4, puis à Diên Biên Phu où il a vécu le cauchemar que l'on sait : sur le millier d'hommes qui reconstituèrent le BEP, moins d'une douzaine survécurent.
            - Reconstitué le 1er septembre 1955 à Zéralda pour les besoins de la guerre d'Algérie sous l'appellation de REP, il mit hors de combat 8.000 HLL, récupéra plus de 5.000 armes mais compta également 300 tués dont le lieutenant-colonel Jeanpierre (mai 1958) et 500 blessés.

            Pour son seul séjour en Algérie, le 1er REP avait reçu pour ses légionnaires parachutistes, plus de 3.000 citations. Son drapeau portait cinq palmes et la fourragère aux couleurs de la médaille militaire.

Contexte du putsch des généraux

            - Le 8 janvier 1961, par un référendum sur l'autodétermination en Algérie organisé sur tous les territoires, les électeurs s'étaient prononcés à près de 75% en faveur de l'autodétermination (En Nouvelle-Calédonie, l'UC recommanda l'abstention et seuls 35% des inscrits s'étaient prononcés en faveur du gouvernement du général de Gaulle). C'est alors que des négociations secrètes avaient été ouvertes entre le gouvernement français de Michel Debré et le G.P.R.A.

            - C'est ainsi que beaucoup d'Européens s'inquiètent de leur sort et ne croient pas à une coexistence possible avec la majorité musulmane dans le cadre d'un état souverain. Leur désespoir rejoint celui des nombreux militaires qui entrevoient un nouveau recul de la France après le lâchage de l'Indochine. Ils s'indignent d'avoir vaincu pour rien l'ennemi sur le terrain ; une partie des cadres de l'armée, qui avaient mené sept années de durs combats sous la direction de plusieurs gouvernements depuis la guerre d'Algérie, se sentit trahie par le général de Gaulle, et voulut s'opposer par un coup de force aux projets d'indépendance de l'Algérie. Le pouvoir gaulliste était bien informé par la police judiciaire d'Alger et les services de renseignements.

            - Le général d'aviation Maurice Challe, 55 ans, qui fut nommé commandant en chef en Algérie par le président de Gaulle est à l'origine de cette victoire militaire incontestable sur le FLN : du 6 février 1959 au 6 avril 1961 : 26.000 adversaires tués, 10.800 prisonniers et 20.800 armes récupérées. Après la conférence de presse du général de Gaulle du 11 avril 1961 qui considérait la solution d'indépendance d'un cœur parfaitement tranquille, Challe, amer, se décide de franchir le Rubicon et convainc l'ancien général d'aviation Edmond Jouhaud et le général d'artillerie André Zeller de le rejoindre dans une nouvelle " Révolution ". Pour ce faire il va s'appuyer sur le fleuron de l'armée : le 1er Régiment Étranger de Parachutistes, basé à Zéralda.

Implication du 1er REP dans le putsch d'Alger

            - A la veille du putsch d'avril 1961, le régiment est commandé par intérim par le commandant Hélie Denoix de Saint Marc (le lieutenant-colonel Guiraud étant en permission). Le 20 avril 1961 au soir, Challe reçoit discrètement à Alger, le commandant Denoix de Saint Marc et l'invite à participer activement au complot. Après une heure d'entretien, Saint Marc rentre à son PC de Zéralda, convoque ses sept commandants de compagnie et leur dit : " Ce que nous allons faire est très grave. Nous y risquons notre peau. Si jamais ça tourne mal, c'est moi qui prendrai la responsabilité de cette aventure. "
            - C'est ainsi que dans la nuit du 21 au 22 avril 1961, les légionnaires parachutistes de Denoix de Saint Marc s'emparent en trois heures des points stratégiques d'Alger : le Gouvernement général, l'Hôtel de ville, la Radio et l'Aéroport. Il est à noter qu'il y eut qu'une seule victime de l'opération, le M d L Pierre Brillant, abattu en défendant le transmetteur radio d'Ouled Fayet.
            - Les chances de réussite sont toutefois minces car le REP ne représente que 1.000 hommes, soit à peine 0,3% des effectifs présents en Algérie et que le général Gouraud, commandant le corps d'armée de Constantine, se ravise et se retire du complot. Le coup n'est pas assez préparé pour rallier d'autres régiments ou les fonctionnaires civils, policiers et administratifs préfectoraux. De plus, le pouvoir à Paris est au courant des préparatifs du putsch par trois réseaux de renseignements : la préfecture de police de Paris de Maurice Papon, la sécurité militaire et le SDECE. Une cellule de crise est créée immédiatement autour de de Gaulle.
            - Samedi 22 avril : La population d'Alger apprend à 7 h du matin que l'armée a pris le pouvoir de l'Algérie et du Sahara. Les trois généraux rebelles, Challe, Jouhaud et Zeller, en accord avec les colonels Godard, Argoud et Lacheroy, font arrêter le délégué général du gouvernement, Jean Morin et un certain nombre d'autorités civiles et militaires. Quelques régiments se mettent sous les ordres des généraux.
            - A Paris, la police arrête dès 6 h du matin le général Jacques Faure, six autres officiers et quelques civils impliqués dans le " Complot de Paris " censé relayer en métropole le putsch. A 17 h le général de Gaulle, serein, déclare : " Ce qui est grave dans cette affaire, messieurs, c'est qu'elle n'est pas sérieuse ".
            - A Alger, vers 19 h, Challe s'exprime à la radio d'Alger : " Je suis à Alger avec les généraux Zeller et Jouhaud, et en liaison avec le général Salan pour tenir notre serment, le serment de l'armée de garder l'Algérie pour que nos morts ne soient pas morts pour rien. Un gouvernement d'abandon s'apprête aujourd'hui à livrer définitivement l'Algérie à l'organisation extérieure de la rébellion. L'armée ne faillira pas à sa mission et les ordres que je vous donnerai n'auront jamais d'autres buts ".
            - Dimanche 23 avril : Salan arrive d'Espagne, mais Challe est de plus en plus isolé et refuse d'armer les activistes civils.
            - A 20 heures, le président de Gaulle vêtu de son uniforme de général, paraît à la télévision et prononce son fameux discours dénonçant un " quarteron de généraux en retraite… ". Conformément à l'article 16 de la Constitution de la Ve République, il se saisit alors des pleins pouvoirs qui seront mis en œuvre jusqu'au 30 septembre 1961.

             Pendant ce temps-là, en Algérie, des unités d'appelés refusent d'obéir aux ordres des mutins, se soulèvent à leur tour et arrêtent les officiers putschistes en leur sein.

            - A 00h 45, le 1er ministre Michel Debré appelle la population à se rendre sur les aéroports par tous les moyens pour repousser les putschistes et dramatise ridiculement la situation en faisant croire à des parachutages et à des atterrissages de troupes factieuses ! Douze vieux chars Sherman de la 2nde Guerre Mondiale, non armés, tournent dans Paris et prennent position devant l'Assemblée nationale !

            - Lundi 24 avril : les syndicats organisent symboliquement une grève générale d'une heure qui est massivement suivie. A Alger, la situation s'enlise. Les généraux putschistes se font acclamer une dernière fois par les algérois : ils exhortent la population d'Alger de les soutenir dans leur combat. Mais la situation en Oranie et dans le Constantinois est au point mort. En même temps, il règne chez les appelés du contingent une grande agitation : manifestement ils s'opposent ouvertement aux insurgés. Les généraux se sentent de plus en plus isolés, c'est le chant du cygne….

            - Mardi 25 avril : Le gouvernement français ordonne la mise à feu de la 4e bombe pour les essais nucléaires à Reggane afin que l'engin ne tombe pas dans les mains des putschistes. Le général Challe fait le constat d'échec et prend alors la décision de mettre fin au soulèvement.

            A 22h, les parachutistes commencent à se retirer alors que la ville est investie par les forces de l'ordre. Les généraux Challe, Jouhaud et Salan se replient sur Zéralda avec le 1er REP. Le général Zeller préfère disparaître anonymement dans la foule.

            - Mercredi 26 avril : C'est depuis le cantonnement du 1er REP que les généraux Salan et Jouhaud choisissent de passer dans la clandestinité afin de rejoindre l'OAS créée deux ans auparavant.

Dissolution du 1er REP

            - Les légionnaires du REP se replient en ordre vers le camp de Zéralda le 25 avril vers 22 h.

            - Le 26 avril Hélie Denoix de Saint Marc, leur commandant séditieux, négocie la reddition du général Challe qui est emprisonné le soir-même à la prison de la Santé à Paris. Il sera rejoint le 6 mai par André Zeller qui s 'est constitué prisonnier.

            - Le 27 avril, le régiment était aux arrêts, tous les officiers devaient se constituer prisonniers. Certains légionnaires refusaient la reddition mais l'état était trop puissant : les blindés de la gendarmerie mobile encerclaient le camp et la flotte était là à quelques encablures, les canons pointés sur eux. Une dernière fois, ils traversèrent en camion leur bonne ville de Zéralda en entonnant le refrain d'Edith Piaf : " Non, je ne regrette rien… ".

            - Le 30 avril 1961 : est officiellement annoncé la dissolution du 1er REP ainsi que les 14e et 18e RCP, du groupement des commandos de l'Air. La tenue " Léopard " disparaît.

Epilogue

            Comment ces générations de généraux et d'officiers supérieurs ont-elles pu en arriver à ces extrémités, à se placer à ce point en dehors du cadre légal et de leur devoir d'obéissance ?

            Paradoxalement " pour justifier leur rébellion contre l'autorité de l'état peu conforme à la tradition militaire française, les conjurés se réfèrent à l'exemple qu'a donné de Gaulle lui-même en 1940 en refusant d'accepter l'armistice négocié par un gouvernement formellement légal, mais proclamé illégitime, et en continuant le combat. "

            - Les sanctions : les condamnations des principaux auteurs du putsch ne se font pas attendre : " au total 220 officiers sont relevés de leur commandement, 114 traduits en justice, 83 condamnés : les généraux Challe et Zeller à 15 ans de réclusion, le général Gouraud à 7 ans, le commandant Hélie Denoix de Saint Marc à 10 ans. Salan et Jouhaud qui s 'étaient enfuis sont arrêtés et condamnés, le premier à la détention à perpétuité et le second qui était pied-noir, à la peine de mort. Il est à noter que 3% des officiers d'active, environ 1 millier, démissionneront, par solidarité avec les putschistes.

            - Les amnisties : Cinq ans plus tard, Challe et Zeller sont amnistiés et réintégrés dans leurs dignités militaires. Salan et Jouhaud sont amnistiés en novembre 1982.

            En tout cas, les conséquences du putsch d'Alger sont importantes et " l'armée française sort brisée de la crise qu'elle vient de traverser " (Yves Courrière 2001)

Cas du commandant Hélie Denoix de Saint Marc

            Il est intéressant de s'arrêter sur l'homme et le soldat qu'a été le commandant Hélie Denoix de Saint Marc : Entré dans la résistance à l'âge de 19 ans, arrêté et déporté en 1943 et libéré mourant par les américains il effectue à l'issue de la 2nde Guerre Mondiale sa scolarité à l'ESM de Saint-Cyr - Coëtquidan et servira comme lieutenant en Indochine dans les rangs de la Légion Étrangère en 1948 (l'affectation au poste de Talung au milieu de la minorité Tho l'aura particulièrement marqué par l'abandon des villageois qui seront massacrés). Un autre séjour en Indochine le verra commander une compagnie indochinoise parachutiste du 2e BEP.

            - Nous avons vu son rôle dans le putsch des généraux alors qu'il commandait, par intérim, le 1er REP. Il fut condamné à 10 ans de réclusion criminelle, il passera 5 ans dans la prison de Tulle avant d'être gracié le 25 décembre 1966. En 1978 il est réhabilité dans ses droits civils et militaires.

            - A 89 ans, le 28 novembre 2011, il est fait Grand-croix de la Légion d'honneur par le président de la République, Nicolas Sarkozy.

            - Il meurt le 26 août 2013 et inhumé au cimetière de la Garde-Adhémar dans le Drôme.

            Il fut aussi un écrivain très apprécié et est l'auteur de plusieurs ouvrages (Les champs de braises. Mémoire, Les sentinelles du soir, entre autres etc.). Je vous livre sa déclaration devant le Haut Tribunal Militaire, le 5 juin 1961.

             " Monsieur le président, depuis mon âge d'homme, j'ai vécu pas mal d'épreuves, la Résistance, la Gestapo, Buchenwald, 3 séjours en Indochine, la guerre d'Algérie, Suez et puis encore la guerre d'Algérie…

            En Algérie, après bien des équivoques, après bien des tâtonnements, nous avons reçu une mission claire : vaincre l'adversaire, maintenir l'intégrité du patrimoine national, y promouvoir la justice raciale, l'égalité politique.

            On nous a fait faire tous les métiers, oui, tous les métiers, parce que personne ne pouvait ou ne voulait les faire. Nous avons mis dans l'accomplissement de notre mission, souvent ingrate, parfois amère, toute notre foi, toute notre jeunesse, tout notre enthousiasme. Nous y avons laissé le meilleur de nous-mêmes. Nous y avons gagné l'indifférence, l'incompréhension de beaucoup, les injures de certains.

            Des milliers de nos camarades sont morts en accomplissant cette mission. Des dizaines de milliers de musulmans se sont joints à nous comme camarades de combat, partageant nos peines, nos souffrances, nos espoirs, nos craintes. Nombreux sont ceux qui sont tombés à nos côtés. Le lien sacré du sang versé nous lie à eux pour toujours.

            Et puis un jour, on nous a expliqué que cette mission était changée. Je ne parlerai pas de cette révolution incompréhensible pour nous. Tout le monde la connaît. Et un soir pas tellement lointain, on nous a dit qu'il fallait apprendre à envisager l'abandon possible de l'Algérie, de cette terre si passionnément aimée, et cela d'un cœur léger. Alors, nous avons pleuré ! L'angoisse a fait place en nos cœurs au désespoir ! Alors j'ai suivi le général Challe. Et aujourd'hui je suis devant vous pour répondre de mes actes et de ceux des officiers du 1er Régiment Étranger de Parachutistes, car ils ont agi sur mes ordres.

            Monsieur le Président, on peut demander beaucoup à un soldat, en particulier de mourir, c'est son métier. On ne peut lui demander de tricher, de se dédire, de se contredire, de mentir, de se renier, de se parjurer.

            Monsieur le président, j'ai sacrifié vingt années de ma vie à la France. Depuis 15 ans, je me bats. Depuis 15 ans, j'ai vu mourir pour la France des légionnaires, étrangers peut-être par le sang reçu, mais français par le sang versé. C'est en pensant à mes camarades, à mes légionnaires tombés au champ d'honneur que j'ai fait, devant le général Challe, mon libre choix. "


             Déclaration du Commandant Hélie Denoix de Saint Marc commandant le 1er Régiment Étranger de Parachutistes lors du putsch d'Alger devant le Haut Tribunal Militaire, le 5 juin 1961.
    Texte écrit le 28 avril 2014, revu et mis à jour le 20 avril 2021
(Daniel WEIMANN, médecin capitaine au 2e REP-Calvi 1970-1974)  



DÉPART
par M. Robert Charles PUIG.
Envoyé par Mme N. Marquet

         La foule sur le port est nombreuse, compacte.
         Elle sait qu'aujourd'hui elle part, sans espoir de retour,
         Comme un acteur quittant la scène au dernier acte,
         Son pays, ses racines, ses souvenirs et ses amours.

         Au-dessus du quai et du môle, le soleil larmoyant
         Est lourd de larmes, de rage, de pleurs et de sanglots.
         Il semble si différent du temps, du bon vieux temps…
         Et la Méditerranée trop sombre, n'a plus l'attrait du beau.

         C'est l'heure de l'embarquement à bord du Kairouan,
         Avec juste un bagage à la main, parfois juste un couffin.
         Ils franchissent la passerelle du bateau d'un pas hésitant.
         Ils partent ! Fuient ! Ils quittent leur terre pour un autre destin.
         Ils ne savent pas de quoi demain et le futur seront faits.
         Depuis le bastingage, ils regardent, fixent la ville blanche,
         Mais Alger... Alger ! n'est déjà plus celle qu'ils ont aimée.
         Le long de leurs joues, des larmes amères s'épanchent.

         C'est l'heure du grand départ... de la fin, de l'exode, du néant.
         Ils partent en se signant, mettant une croix sur le passé.
         Les machines, au cœur du bateau, vibrent bruyamment.
         Que restera-t-il bientôt de cette terre aimée, vénérée ?

         Tout à coup, brassant l'air comme un tonnerre, la sirène retentit.
         Le navire soudain lève l'ancre, s'arrache du bord du quai.
         Des mouchoirs se lèvent pour un dernier adieu à l'Algérie...
         Des mouchoirs humides des larmes de ceux qui ont pleuré.

         De la ville bientôt il ne restera plus qu'une image brouillée.
         Alors, pour accompagner au large ce peuple qui fuit, dans le ciel
         Qui semble à l'unisson d'un temps gris, sans couleur ni clarté,
         Tout là-haut, pareil à un " Adieu ! ", volent des hirondelles.
 
       
         1962 ! Le navire a levé l'ancre. Sa sirène résonne comme une plainte de douleur et agresse un ciel sans soleil. Dans ce Cri, c'est le tableau d'Edward Munch qui apparait. L'Exode d'un peuple. Sa fuite et son destin inachevé sur la terre de ses ancêtres. La passe est franchie et Alger s'éloigne dans la brume d'un matin chagrin.

         Les partants quittent une terre française depuis 1830. Elle a été soignée, éduquée, construite. Les pleurs des femmes, les larmes des enfants, les drames des disparus restent vivaces dans les âmes, mais il n'y avait pas de choix. C'était la valise ou le cercueil.

         2022 ! C'est la réélection d'Emmanuel Macron et une assemblée nationale sans majorité. Nous avons pendant 5 ans avalé des couleuvres. Cela va-t-il continuer ? Il semble fini le temps d'un pays qui puisait son histoire et ses racines au temps de Clovis, le premier roi barbare a devenir chrétien à Reims. Il n'y a plus de Charlemagne défenseur de la chrétienté et Charles Martel doit se retourner dans sa tombe. Sa victoire à Poitiers en 732 n'a servi à rien.

         Aujourd'hui, le pays se vend à l'Orient. Il accepte la règle du pire et son assemblée joue avec le feu en offrant des postes à ceux qui défilent avec les antiblancs, prônent l'islamo-gauchiste et une France sans frontière, ouverte à la migration sauvage, les excès des sans papiers et l'insécurité des vies et du territoire.

         Moi je me souviens des ports et des aéroports d'Algérie. Ils sont pris d''assaut par des gens qui fuient, mais à Paris De Gaulle ne lève pas un doigt pour les aider. Au contraire, avec Fouchet au Rocher noir, ils assassinent Alger le 26 mars. Ce n'était pas assez. Le 5 juillet, deux jours après l'indépendance du pays dans des conditions honteuses, parce que l'armée a ordre de ne pas intervenir après les faux accords d'Evian, l'Exécutif parisien et des hommes politiques sans honneur laisseront Oran assassiner. 3 000, 3 500 morts et disparus.

         Alger n'est plus visible au fond de l'horizon. Je ne sais pas encore que mon arrivée dans un port de la Métropole sera saluée par des cris de haine, mon bagage sera fouillé, mes objets déplacés et qu'à partir de ce moment, la gauche communiste, les socialistes et même cette droite molle nous montrerons d'un doigt coupable. Le pire à partir de 2017 sera ce président de la République élu pour la deuxième fois qui, par ses mots indignes et honteux, flagelle l'Histoire de France.

Robert Charles Puig / juin 2022
        


PHOTOS de BOU-SAADA
Envoyé par Divers contributeurs
Place du Marché




Hôtel du Petit Sahara






Hôtel de l'Oasis




Hôtel Transatlantique






Fort Cavaignac





L'Oued






Un Décret Spécial
Envoyé par M. Louis Aymés ;
Ce Décret serait d'actualité en cet été !!!                 
 



On va tous y passer !
Envoyer par M. Michel


Pépé et Mémé sont assis dans le parc
Pépé dit : "J'ai une folle envie de glace"
Mémé dit : je vais en chercher, que veux-tu ? »
"Deux chocolat, et toi ? »
"Moi, je prendrai deux vanille"
Pépé réplique : -"Il vaut mieux que tu le notes"
”Mais non le camion de glaces est juste là devant"
"Notes le, je te dis que tu vas oublier"
"Non, non, je n'oublierai rien !"

Mémé part en grommelant
"Deux chocolat, deux vanille... Deux ch…"
Après un bon quart d'heure Mémé revient
avec 2 saucisses et 2 cornets de frites bien dorées !!
Pépé lui dit "Et où est la moutarde ?"

"Bon sang, je l'ai oubliée ! »
"Tu vois, répond Pépé, je te l'avais bien dit
de le noter !"

Ne rigolez pas trop, chacun son tour..
                  



PEINTURE
De Jacques Grieu


     
         Je peins et donc je suis , Descartes aurait pu dire
          S'il avait eut en mains, un pinceau à brandir.
          Son Discours eut alors été un beau tableau
          Car on peint ses idées au moyen du cerveau.

          On peint ses illusions ; mais rien de plus réel.
          En captant l'invisible, l'absolu se révèle
          Et parfois on s'étonne en voyant prendre forme,
          Beaucoup de sensations qui au fond de nous, dorment.

          Il ne faut pas confondre et peinture et teinture.
          La lumière et les ombres sont à la peinture,
          Ce que le plomb et l'or sont à un alchimiste.
          Le mystère tremblotte au pinceau de l'artiste...

          En pensant sa peinture on a quelquefois peur :
          Celui qui peint la fleur veut peindre son odeur...
          Le langage est au fond peinture des idées ;
          On ne peint pas la chose mais on peint ses effets.

          La musique et le chant sont aux paroles vraies
          Ce que chaque peinture est au dessin et trait.
          On rêve sa peinture : et puis on peint son rêve ;
          Alors, pour la finir, on est son propre élève…

Jacques Grieu                  



Tirailleur Algérien,
N° 42, 20 mai 1900

Source Gallica
LA PARTIE DE PÊCHE

            C'était par une de ces belles nuits d'été.
            Deux heures sonnaient à l'horloge de la Mosquée. Une douzaine de jeunes gens traversaient en devisant gaîment la place du Gouvernement. Connue on pouvait le deviner à l'aspect des engins et victuailles dont ils étaient chargés, ils se rendaient à une partie de pêche.
            Arrivés à la balustrade du boulevard ils s'arrêtèrent un instant pour contempler la mer qui était d'huile, car le temps était très beau et pas la moindre brise n'agitait la surface des eaux.
            Calme plat, dit l'un d'eux.
            Bravo ! Répliqua un autre, quel beau temps nous allons avoir. Et comme nous allons nous amuser.
            Là dessus ils descendirent aux quais, se jetèrent dans une barque, déchargèrent provisions et engins de pêche, démarrèrent et quatre d'entre eux se saisirent des avirons, les autres s'assirent un peu partout dans la chaloupe et les voilà partis, ramant et chantant.
            En mer, ils mirent leurs lignes à l'eau et en peu de temps firent ample provision de poissons.

            La pèche terminée, ils continuèrent leur route et atterrirent entre le Fort-de-l'Eau et le Cap Matifou.
            Après avoir jeté l'ancre ils amarrèrent solidement la chaîne à l'avant de la nacelle et se mettant à l'eau en tenant une corde pour attacher l'arrière sur la plage ; cette corde était assez longue, car à cet endroit la mer était peu profonde et l'esquif devant rester toute la journée au même endroit, il fallait le laisser assez loin du rivage pour qu'il y eut assez de fond pour le tenir à flot.
            Une grosse pierre trouvée sur la plage servit à l'amarrage du coté de la terre.

            Toutes précautions prises quant au bateau, ils dressèrent leur tente sur le sable, débarquèrent les vivres et se mirent en devoir de préparer la bouillabaisse, friture, etc., pour le festin tant désiré.
            Quand tout fut à point on s'installa sous la tente et la ripaille commença.
            Dire, s'ils trouvaient, les mets succulents serait superflu, car à voir la rapidité avec laquelle ils s'engouffraient dans ces estomacs de vingt ans, dont l'appétit naturel avait été aiguisé par cette promenade matinale, on ne pouvait douter qu'ils ne fussent délicieux.
            Ayant bien mangé et bien bu, les chansonnettes s'en mêlèrent et nous n'étonnerons personne en disant qu'il faisait nuit noire que nos gaillards, qui s'étaient installés sur le sable après le coucher du soleil pour être, plus à l'aise, chantaient, riaient, dansaient et buvaient encore.

            Mais comme toute chose a une fin, ils jugèrent qu'il était temps de songer au retour et, dansant par-ci, chantant par-là, titubant un peu partout, ils plièrent bagages, remontèrent sur le bateau, retirèrent l'ancre, et vogue la nacelle, les rames recommencèrent leur office, balançant leur mouvement avec les chansonnettes, nos lurons arrosant souvent leur gosier d'un petit vin qu'ils avaient, l'air de trouver fort à leur goût.

            Combien de temps chantèrent-ils en ramant, nous ne pourrions le dire, et encore moins eux.
            Enfin une voix dit : La lumière du phare, qui nous guidait, ne se voit plus.
            Peut-être faisons-nous fausse route.
            Non il me semble apercevoir le feu vert.
            Moi, j'aperçois le feu rouge.
            Et moi, je vois mille lumières.
            Ce sont les becs de gaz du Boulevard.
            Oh ! Alors nous serons bientôt arrivés.
            Et ils continuèrent de ramer, toujours chantant et riant, aspirant à pleins poumons la brise fraîche de la nuit et regardant avec indifférence les reflets phosphorescents des eaux remuées par les avirons.

            Eh bien, arrivons-nous ? Regardez bien devant afin que nous ne fassions pas une bosse au môle.
            Aies pas peur, je veille à çà, mais nous ne sommes pas encore si près que tu le penses.
            Pourtant, depuis que nous ramons.
            Oh il n'y a pas si longtemps que çà, une heure tout au plus.
            Ah ! Ah ! Une heure ! Avec plusieurs à côté.
            Allons, c'est parce que tu es fatigué, passe-moi les avirons que je te remplace.
            Non, non, mais j'ai peur que nous nous égarions.

            Mais, farceur, puisque nous voyons les lumières d'Alger devant nous
            Ou ?
            Là, tiens, vois-tu le feu du phare ?
            Du phare, tu veux dire du môle?
            Du phare ou du môle, je ne sais pas. Allons, quelques bons coups de rames et nous arrivons.
            Et là dessus coups d'avirons et chansons de recommencer.

            Tout à coup les lumières s'évanouirent ; à l'obscurité profonde qui régnait succéda un demi-jour, puis graduellement on vit assez clair pour distinguer à une certaine distance.
            Quelle ne fut pas la stupéfaction générale en se retrouvant près de la plage et surtout en apercevant, à quelques mètres d'eux, étalés sur le sable, les restes de leur pantagruélique repas.
            Ils se frottèrent les yeux pour s'assurer qu'ils ne rêvaient pas, puis, à l'unisson, partirent d'un éclat de rire homérique.
            Ils avaient oublié de détacher du rivage la corde qui retenait la barque.
O. RASCASSE.

Le Port de Bône.
Source Gallica
EST ALGERIEN N°10, 15 décembre 1868

             Le moment s'approche où Bône possédera aussi son port, port magnifique, assez vaste pour suffire à la ville s'agrandissant de jour en jour, assez sûr pour que tous les navires de la Méditerranée y viennent chercher un abri pendant les tempêtes d'hiver, disposé de façon à ce que les marchandises puissent être embarquées sans bateaux de transbordement.
             Une darse ou arrière-port pourra bientôt permettre aux bâtiments d'un certain tonnage de pénétrer, pour ainsi dire, jusque dans la nouvelle ville et de vastes quais seront appropriés pour recevoir les dépôts des marchandises qui ne pourront être embarquées immédiatement.
             Ces importants travaux achevés, Bône possédera le meilleur port de l'Algérie ou à peu près. Sur cette côte naturellement dépourvue d'abris, notre port sera le refuge de tous les navires de commerce ou de pèche ; peut-être même, dans un avenir prochain verrons-nous les plus gros bâtiments de guerre venir mouiller jusque sous nos murs : notre ville en fin deviendra l'entrepôt de tous les produits de la province.

             Au moment où vont se terminer ces travaux si considérables, il n'est pas sans intérêt d'examiner ce qu'était autrefois ce port, ce qu'il est aujourd'hui et ce qu'il est appelé à devenir plus tard.
             Les personnes qui habitent Bône depuis plusieurs années voyaient, il n'y a pas longtemps encore, les navires mouillés dans la partie de l'anse du Cazarin qui porte aujourd'hui, le nom d'avant-port.

             Ce mouillage, assez convenable par les vents sud-est, sud et sud-ouest, devenait réellement dangereux par les vents de Nord-Ouest et Nord-Est. En effet, lorsque soufflaient les vents de nord-ouest, le mouillage du Cazarin était tourmenté par une forte houle dont le résultat était d'interrompre tout travail d'embarquement ou de déchargement ; lorsque soufflait le vent de nord-est, le golfe de Bône tout entier se transformait en un immense brisant.
             Les bateaux mouillés dans l'anse du fort Cigogne, aujourd'hui la Darse, ne pouvant résister à l'agitation du flot, cassaient leurs amarres et allaient se briser contre les talus avoisinants ; quant aux navires mouillés en rade du Cazarin, secoués à la fois par le vent, le ressac et une houle qui déchaussaient les ancres en remuant les fonds de sable, ils ne tardaient pas à chasser et à se jeter sur les roches de l'hôpital ou sur les brisants qui entourent l'embouchure de la Seybouse.

             D'anciens habitants de Bône nous ont raconté, avoir vu ainsi, dans la même journée, jusqu'à dix et douze bâtiments en perdition.
             En 1855, le service des ponts et chaussées, touché de cet étal de choses et comprenant que l'intérêt général de la colonie, et de la province de Constantine en particulier, exigeaient que des garanties fussent données, aux navires en mouillage à Bône. Présenta au ministère de la guerre un projet qui, est, à peu de différence près, celui du port actuel.
             Il comprenait un avant-port de 60 hectares et donnait dix hectares de superficie à la darse ou arrière port.
             Ce projet fut approuvé par le ministère de la guerre en 1855; le 20 août 1856, l'adjudication des travaux de l'avant-port fut faite à M. Dessolier, et l'administration approuva ; cette adjudication le 5 septembre suivant.

             Ce n'est que dix ans plus tard et vers le commencement de l'année 1866 que le projet de construction de la darse fut repris sérieusement ; M.Castor, entrepreneur de travaux publics, qui venait de construire le pont de Khell et de refaire les quais du port de Brest, soumissionna le 25 novembre 1866 et obtint l'entreprise de la construction des quais et du creusement de la darse.
             Voici sommairement le détail des travaux que s'engageait à accomplir M. Castor :
             I) La construction des murs du quai sur les faces nord et est ;
             II) Des remblais de la plate-forme qui devra entourer ces quais et des terrains environnants ;
             III) De deux chaussées, l'une pavée au pourtour du mur du quai, l'autre d'empierre ment ;
             IV) Enfin des accessoires des quais, tels que : escaliers, bornes d'amarrage, etc., etc.


             Ces travaux sont aujourd'hui bien avancés, et on prévoit l'époque prochaine où tout le mouvement commercial se transportera sur les quais nouvellement construits.
             Nous exposerons dans le prochain numéro du journal les procédés employés par M. Castor pour la construction des piles destinées à soutenir les murs du quai.
             Ces procédés, extrêmement curieux à plusieurs points de vue et dont il est l'inventeur, ont déjà été expérimentés par lui pour la construction du pont de Khell, et les piles ainsi construites donneront aux murs des quais une solidité telle qu'on n'aura jamais à craindre des affaissements pareils à ceux qui se sont produits dernièrement au port de Brest.
C. TAUPIAC


PHOTOS de BOU-SAADA
Envoyé par divers Contributeurs
Pont Ferrero




Moulin Ferrero




Moulin Ferrero



Tombeau de Dinet






Tombeau de Dinet





Un coin de l'Oasis





LE SANG DES RACES
Par LOUIS BERTRAND
Source Gallica

         " Tous ne poursuivent point la même volupté. Cependant, c'est la volupté qu'ils poursuivent. Et peut-être aussi que cette volupté qu'ils poursuivent n'est point celle qu'ils s'imaginent et qu'ils pourraient dire, mais la seule et unique Volupté.,
         Car il y a naturellement en tout quelque chose de divin. "

         Ethique à Nicomaque, VIII, 14
I
LE FESTIN


         La fièvre de construction, qui dure encore, commençait à répandre dans les faubourgs tout un monde remuant et bariolé de travailleurs. On édifiait les voûtes du port et le boulevard de l'Impératrice. Les rues d'Isly et de Constantine s'ébauchaient, entraînant, comme deux grands canaux, le flot montant des populations neuves vers les plages et les ravins fleuris de Mustapha.
         Du côté des carrières de Bab-el-Oued, c'était un mouvement perpétuel de lourdes galères, chargées de matériaux. Les cris des charretiers s'élevaient sans cesse, en inflexions rudes ou longuement modulées, au milieu du claquement des fouets et des poussières aveuglantes soulevées des ornières de la route par les pieds des bêtes et des hommes.

         Ce samedi soir du mois de juin, l'haleine immobile du sirocco embrasait l'air. Le grand eucalyptus qui se dresse à mi-côte au-dessus des carrières ne bougeait pas, et ses feuilles flétries pendaient comme mortes des rameaux brûlés. Il était à peu près sept heures. Une brume étincelante se déployait derrière le promontoire de Matifou, et des flammes rouges s'allongeaient sur les cimes de la Bouzaréa.
         Suivant un des lacets qui vont aux carrières, trois casseurs de pierres descendaient vers le Faubourg. Alertes, légers dans leurs espadrilles et leurs pantalons de toile collants, ils semblaient ne pas sentir la brûlure de l'air, ni les poussières qui s'élevaient et qui, rendues caustiques par les urines des mulets, picotaient leurs visages et enflammaient leurs paupières. Derrière eux, d'autres groupes apparurent, puis bientôt toute une procession d'hommes se déroula aux flancs de la montagne. Des cris se répondirent, des feux de cigarettes se propagèrent d'une bande à l'autre.

         Les trois jeunes gens étaient un peu en avant des groupes. Tout en arpentant de leur pas allègre, ils causaient peu, se contentant de souffler la fumée de leurs cigarettes. Le plus petit, Ramon, d'une carrure déjà trapue, comme les paysans du sud de l'Espagne, essayait de couper le silence en des accès de loquacité, mais l'humeur placide des deux autres gênait son bavardage.
         Ceux-ci, deux grands diables osseux, avaient de petites figures décharnées aux yeux pâles et clignotants : l'aîné, Cagnète, qu'on surnommait ainsi parce qu'il était long et maigre comme un roseau ; l'autre, Cinto, à peine moins haut sur jambes que son frère, mais dont les moustaches blondes plus épaisses animaient un peu le visage.
         Tous trois étaient des " nouveaux débarqués ", comme on disait. L'année d'avant, chassés par la famine, ils avaient quitté leur village de San-Vicente, auprès d'Alicante, avec des bandes entières de paysans de leur province. Malgré les malédictions des aïeules, ils étaient venus chercher le pain blanc et la joie sur cette terre d'Afrique, où la vieille haine de leur race appréhendait toujours les maléfices sacrilèges et les traîtrises du Maure. Ils s'y étaient établis comme chez eux ; ils y avaient retrouvé leur pays, ceux qui étaient nés sous les palmiers d'Elche, ou près des falaises de Carthagène, comme les laboureurs de la huerta de Valence et ceux qui élevaient les orangers dans le grand jardin humide de Murcie.

         La côte âpre et dure qui s'infléchit vers Cherchell, la plaine fumante de la Mitidja, les plateaux verdoyants du Sahel leur rendaient à tous la terre natale. Mais surtout ceux d'Alicante, dont les yeux d'enfants s'étaient brûlés aux blancheurs de la roche de Santa-Barbara, étaient venus par grappes, comme les abeilles qui se collent aux trous des murs, se rassembler aux bords des carrières de Bab-el-Oued. L'éclat aveuglant des pierres, la poussière incandescente des routes, l'aridité morne et superbe de la montagne brûlée de soleil leur plaisaient : c'était aussi tragique et aussi farouche que là-bas.
         Le paysage de la montagne, du Faubourg et de la mer était donc pour Ramon, Cagnète et Cinto, une habitude très ancienne. Descendre de la carrière à la tombée de la nuit leur semblait une chose aussi nécessaire que, l'année d'avant, de ramener à pareille heure l'attelage paternel sur la route d'Alcoy ou de Muchamiel.
         A l'endroit où se trouve aujourd'hui la cabane du marquage, ils joignirent une galère attardée qui se hâtait vers la ville.
         Ramon cria vers le charretier. Les trois jeunes gens le saluèrent.
         Celui-ci, pendu à la mécanique, leur répondit sans quitter le serre-frein, ni tourner la tête.


         Vous avez de la chance, vous autres, pour aller manger la soupe. Moi, quand est-ce que je vais rentrer ? Je ne serai pas au lit avant les dix heures. Ah ! Maria puttissima !
         Il y avait dans le jurement de l'homme une telle désolation et une telle lassitude, l'accablement de cette journée interminable, le regret de la table et du lit, le désir de la femme attendant sur la porte, que les trois compagnons se sentirent réjouis à l'idée qu'ils allaient manger tout à l'heure et se reposer le lendemain.
         Dis, Ramon, exclama Cagnète, tu soupes avec nous ?...
         Ramon n'aimait pas trop la compagnie de Cagnète et de Cinto, trop pacifiques et trop sages pour son humeur de mauvais garçon se plaisant aux hâbleries et aux batailles. Il ne les fréquentait de temps en temps que parce qu'ils étaient tous les trois du même village. Cependant l'idée d'aller souper à l'auberge, d'échapper à la tutelle du père, lui souriait. Il se sentait un grand appétit de plaisir, ce soir-là, mais par convenance, il résistait.
         Qu'est-ce que la vieille va dire ? Objectait Ramon... et le vieux donc, s'il ne me voit pas à table ?

         Allez va ! Dit Cinto, pas tant de façons !... tu soupes avec nous, moi et mon frère nous allons prévenir la tia Pépa. On passa devant l'auberge, où Cagnète et Cinto prenaient pension, leurs parents étant engagés dans une ferme du côté de Boufarik. Quant à ceux de Ramon, ils habitaient une des petites maisons, basses qui s'échelonnent un peu plus loin, le long du Chemin des Fours-à-Chaux.
         Selon la coutume, la tia Pépa, la mère de Ramon, était à prendre le frais devant sa porte, en compagnie de quelques commères. La tia Pépa, toute petite et toute noire, trônait sur sa chaise et, prenant des airs de reine, elle faisait de grands gestes pompeux. (Tia, tio : termes familiers par lesquels on désigne, en espagnol, toutes les personnes âgées.)
         Du plus loin qu'elle aperçut sont fils, elle se mit à l'injurier :
         Ah ! Bandit ! Assassin!.. Qu'estoc que tu as encore fait hier au soir !...
         Et elle conta aux voisines que Ramon avait donné un coup de tête à Manolito, le fils de Dolorès ; que celui-ci était au lit, que la mère était venue se plaindre...

         Tiens ! Qu'est-ce qu'il se mêle celui-là, riposta Ramon, les dents serrées... et avec un brusque éclat de colère Pourquoi est-ce qu'il me dit que je ne suis pas un homme ?...
         Cagnète et Cinto s'efforcèrent d'apaiser la mère et le fils, affirmant que ce Manolito était un garnement hargneux et couard qui n'avait pas volé son coup de tête. Sous prétexte de calmer tout à fait Ramon. Ils proposèrent de l'emmener souper avec eux.
         La tia Pépa se récria. Ils insistèrent.
         Enfin ! Puisque c'est avec vous, je ne dis rien, concéda la mère... Ah ! Si seulement il était comme vous deux, soupira-t-elle, ou comme son frère Juanète !


         Les trois garçons se dirigèrent en hâte vers l'auberge. C'était une grande cambuse bâclée, moitié brique et moitié bois, qui s'élevait un peu avant d'arriver au petit pont de l'oued M'Kacel. Le sirocco était devenu plus lourd après le coucher du soleil. La route poudreuse était pleine d'enfants qui se poursuivaient en piaillant, ou qui, la veste en main, jouaient " aux taureaux ".
         Devant la porte de l'auberge, deux clients prenaient l'absinthe, assis autour d'une petite table verte. Ramon voulut absolument les imiter, afin de ne pas avoir l'air "d'un nouveau débarqué " et de faire comme les Français. Il offrit une absinthe, à Cagnète et à Cinto, qui désapprouvèrent cette débauche, et qui, en vrais buveurs se contentèrent d'un sirop de limon.
         Des maçons retardataires arrivaient par bandes, le couffin du déjeuner à la main ; ils secouaient sur le seuil leurs espadrilles blanches de poussière.

         Lorsque Ramon et ses camarades entrèrent. La salle était déjà pleine. Un peu perdus dans la rumeur des paroles, le cliquetis des vaisselles, le mouvement houleux des têtes, ils cherchèrent des yeux une place libre ; mais du fond de la salle, une main s'agita vers eux et une grosse voix cria :
         Ho ! Ramon ! Avance ici !
         C'était son ami Pascualète le Borrégo, un charretier mahonnais. A peu près du même âge, un même goût pour le plaisir et les batailles les avait liés. Ramon fut enchanté de la rencontre. A travers les bancs serrés, on gagna la table de Pascualète. Les convives qui étaient presque tous des charretiers espagnols, se serrèrent pour faire de la place aux nouveaux arrivants.
         Quelle chaleur, hé, Pascualète ! Dit Ramon en s'asseyant.

         Oui !... un bon temps pour faire pousser les enfants et les coups de couteau, répondit le Borrégo, dont les petits yeux sensuels luisaient sous les paupières bridées.
         Les charretiers ne faisaient que commencer leur repas ; chacun s'empressait de cerner sa faim, enseveli dans son assiette et sans s'occuper du voisin. Des mains lourdes se versaient des rasades jusqu'au bord du verre. De courtes phrases s'échangeaient entre deux bouchées. Mais les autres tables retentissaient de conversations et de rires. Des mots de toutes les langues méditerranéennes surgissaient parfois dans le tumulte, puis la rumeur grandissante couvrait tout, et un roulement continu grondait comme sur les galets des plages.

         "Il y avait là des hommes de toutes les nations, des terrassiers piémontais, les plus bruyants de tous, avec leurs faces roses de Gaulois aux longues moustaches blondes et leurs yeux bleus. Ils étalaient de grandes bottes et des pantalons de velours aussi larges que des jupes, à côté des cottes de toile bleue des charpentiers marseillais. Par-ci par-là, éclataient les tailloles multicolores des petits charretiers de la Camargue et de la vallée du Rhône, qui gesticulaient entre les larges épaules des Piémontais. Une blouse de Montélimar, déteinte par les lessives et dont les broderies noires s'effaçaient sous la poussière, se démenait avec des gestes amplifies par les plis. Tous se comprenaient, s'excitaient, s'enivraient de leurs propos, que les Piémontais martelaient de rudes accents toniques. Le vin coulait dans les verres, incendiait les visages et dilatait les yeux.

         Plus pacifiques, les hommes du Nord se tenaient à l'écart c'étaient presque tous des Alsaciens immigrants, des Badois de la Forêt-Noire. Quelques-uns, anciens zouaves ou chasseurs d'Afrique, se reconnaissaient à l'impériale de leur barbiche. Des maçons auvergnats se mêlaient à eux, avec leurs favoris noirs et leurs casquettes en peau de lapin, qu'ils conservaient malgré le soleil, par économie. Pour se distinguer, tous affectaient à l'auberge de ne parler que le français, ce qui faisait rire ceux de Marseille. Il y en avait qu'on interpellait des autres tables en singeant leur mauvais allemand.
         Hé ! Schumacher!... Ous'que t'a mis ton schnaps ?
         Et les petits charretiers de la Camargue répétaient sur tous les tons schnaps, brod, grumbeeren, en contrefaisant les inflexions grasses et traînantes des Alsaciens.

         Près des Espagnols, il y avait des tables entières de Maltais, de Napolitains, de Mahonnais, tous charretiers ou maçons, très à l'aise et parlant haut comme des gens qui sont chez eux. Les Maltais au teint mat et au visage gras caressaient de grosses moustaches à la Victor-Emmanuel. Plusieurs avaient des anneaux d'or à leurs oreilles. Mais, au fond, les autres les méprisaient à cause de leur sac mélangé et de leur ressemblance avec les Maures et les Juifs. Les Napolitains les écrasaient de leur faconde, tout fiers de leurs chemises de laine rouge ; et le Mahonnais, trapu et colossal, se carrait dans ses épaules, assénait de lourdes ripostes, qui inspiraient le respect.

         Ils se divertissaient aux dépens d'un malheureux gitan, un tondeur de chevaux, que les charretiers avaient ramené de l'écurie. Comme il était sourd et muet, on lui hurlait d'énormes plaisanteries dans les oreilles.
         Quelques-uns, lui mettant les poings sous le nez, faisaient semblant de le vouloir battre.. Le gitan ahuri, dépaysé au milieu de tout ce monde, avec son maigre visage, son teint jaune, ses accroche-cœur plaqués aux tempes, regardait en face les mauvais plaisants, les pupilles dilatées et cherchant à comprendre.
         Dis, Gabriel ? T'as couché avec ta sœur ?...
         Qué !... c'est la mode des gitans : tous pêle-mêle, dans le même lit...

         Gabriel ! tu es saoul, tu as pris la tasse... ta femme va te fiche une raclée...
         Les injures et les brocards s'excitaient. Juan le Mahonnais lui versa une purée d'absinthe dans son verre, tandis que Pascualète, ayant pris une bouteille vide, lui claironnait dans les oreilles, en soufflant de toutes ses forces. Comme le gitan n'entendait rien, les rires redoublèrent. D'autres lui versaient du vin dans le cou, ce qui faisait retourner le malheureux, les mains levées et menaçantes.
         Au milieu du tumulte, les charbonniers valenciens, qui besognaient dans les ravins du Frais-Vallon, se tenaient graves, presque sinistres, avec leurs visages glabres et enfumés et leurs petites blouses de lustrine noire. Ils assistaient d'un air de parfaite indifférence aux hurlements et aux rires, promenant leur regard tranquille des Piémontais batailleurs aux Mahonnais brutaux et féroces.

         Or, tous ces hommes se repaissaient des nourritures avec une sorte de fureur qui était belle à voir. Ils rompaient le jeûne des ancêtres, ils disaient adieu à la frugalité et à la misère des pays arides, ils s'épanouissaient à l'abondance et à la richesse venues du Nord. De petites servantes valenciennes circulaient avec d'énormes quartiers de bœuf bouilli sur un lit de pommes de terre. D'autres emportaient des soupières à moitié pleines de potages au safran, où s'échevelaient des pâtes. Le patron, une espèce de ruffian d'Alicante en chemise rose et en pantalon de velours collant, se hâtait au milieu des groupes, la serviette sur l'épaule et des bouteilles aux mains. La fumée des cigarettes commençait à noyer la lueur des lampes à pétrole pendues aux solives. Des guitares décrochées des murs perçaient la rumeur des voix et, de toute cette foule montait une large odeur enveloppante, où se fondaient les émanations des lieux où ils vivaient. La senteur des mulets et des fourrages, celle des plâtres neufs et des poussières âpres des bâtisses, la fraîcheur saline des carrières, où filtrent des sources, envahissait la salle.

         Ramon s'enthousiasmait. Il contemplait surtout avec admiration la rondité de la patronne, une grosse Alsacienne blonde et lymphatique la gorge qui tremblait sous la camisole, les joues tombantes et fanées par le maquillage disaient l'odyssée à travers les lupanars de la haute ville.
         Pascualète le Borrégo regardait son camarade à la dérobée d'un air narquois
         Quand est-ce que tu prends le fouet, Ramon ? interrogeait en ricanant le Borrégo. Viens sur la route de Blida avec nous autres, tu en auras des payses !...
         Au même moment, Juan le Mahonnais, un colosse aux larges oreilles, chiffonnait la patronne au passage.
         Dites, madame Charles, vous vous en souvenez des charretiers de Médéa ?
         Ces propos et ceux du Borrégo enflammaient l'imagination de Ramon : ce n'était pas l'envie qui lui en manquait, de faire la route de Blida, mais le père aurait voulu qu'il l'aidât avec ses frères dans son métier de charbonnier. Ramon l'avait déjà planté là pour se faire casseur de pierres. Il ne lui restait plus qu'à quitter tout à fait la maison ; seule, la peur du vieux le retenait.

         Tout à coup des cris d'enfants retentirent au dehors. C'était le cri du carnaval accompagnant les masques
         Ramon se précipita vers la porte avec les autres. Une poussée se produisit. Toutes les énergies frémissantes, surchauffées par cette journée de sirocco, fouettées par les nourritures et les boissons, avaient besoin de se détendre. C'était une aubaine.
         Mais Ramon n'écoutait pas. Encore tout agité de l'émoi de la poursuite, il venait de reconnaître, parmi les hommes qui rentraient en désordre, un maçon au visage bilieux, dont les moustaches semblaient deux petits rouleaux d'or posés sur ses lèvres c'était Pépé Clari, un jeune homme de l'âge de Ramon, mais bien plus grand, très maigre et fort étroit d'épaules. Ramon, les dents serrées, se mit à le dévisager insolemment.

         Qu'est-ce que tu as, Ramon ? dit Pascualète le Borrégo.
         Rien ! Et après une pause : Il y en a un ici qui ne me plaît pas.
         De sa main tendue, il désigna Pépé Clari, qui détourna la tête et affecta de causer tranquillement avec son voisin. Ramon, furieux, fit le geste de se lever, mais le Borrégo lui mit la main sur l'épaule et le força à rester assis

         Calla, Ramon, calla (tais-toi) ! disait Cinto, d'un ton paternel.
         Quelques-uns, prévoyant du scandale, se réjouissaient déjà. Mais Pascualète détourna la colère de Ramon par ses questions :
         Voyons !... Qu'est-ce qu'il t'a encore fait, cet homme-là ? Tu es tout le temps à chercher des batailles... Un jour ou l'autre, tu vas ramasser un soufflet !...
         Lui ?... Un soufflet !... D'un coup de tête, je lui casse les côtes !...
         Ramon, que la colère reprenait, fit de nouveau mine de se lever. Pascualète le maintint, et, baissant la voix, afin de ne pas attirer l'attention des autres tables.
         Il faut que tu sois bête de te battre pour une fille ! C'est à cause de la Rosa, hein ?...

         Puisqu'il sait que je la fréquente, dit Ramon, qu'est-ce qu'il se mêle de lui courir après... Oui, la chica (la petite) me l'a dit. Il est tout le temps à rôder autour...
         Et si elle l'aime, la chica ?... insinua le Borrégo.
         Elle l'aime ?... Elle voudrait le voir au bout d'une fourche, oui !... L'autre soir, comme il était derrière nous, je lui ai dit qu'il fallait choisir, et elle m'a dit : " C'est toi que je veux !... "
         Le rappel de cet aveu, remplit Ramon d'un tel orgueil que, pour l'instant, il en oublia sa rancune.
         Au même moment, on se levait des tables pour séparer deux Piémontais qui s'étaient pris de querelle en jouant à la mourre. Pascualète profita de la diversion pour faire sortir Ramon.

         On s'assit devant une guinguette en planches, en face des bâtiments de la Compagnie. La nuit était tout à fait venue, une nuit torride et voilée de brume. L'air était aussi brûlant que dans la journée. Seulement des souffles étouffants soulevaient par intervalles la poussière de la route et se posaient comme un fer chaud sur les visages. Des jeunes gens descendaient vers la ville, en chantant au son des guitares : c'étaient les fiancés qui allaient chercher leurs fiancées. Presque toutes servantes chez les bourgeois de la ville, les garçons avaient coutume d'aller les prendre à la porte des maîtres pour les ramener chez leurs parents.
         Tandis que les autres remuaient leur café de caroube, Ramon, inquiet, sondait les ténèbres du regard. Tout à coup, il tendit la main vers l'angle des bâtiments où s'embranche la route du Frais-Vallon :

         Tiens ! je parie qu'il est là, ce grand carnaval, ce grand lâche !...
         On distingua, en effet, des ombres qui disparurent très vite dans la direction de l'ancien cimetière juif.
         Je crois qu'ils sont trois, dit Pascualète le Borrégo.
         Ah ! Cristo,. il n'ose pas s'aventurer tout seul : il lui faut une bande de fours à chaux comme lui pour qu'il se risque à sortir... Tiens ! je te le jure, ce soir, il faut que je lui mange le foie !
         Et, se levant brusquement :
         Moi, je descends vers Alger, je vais chercher la chica…
         Nous t'accompagnons, Ramon ! dit le Borrégo.
         Cagnète et Cinto étaient très ennuyés de tout cela. Ils auraient préféré aller se coucher, mais, par pudeur, ils appuyèrent l'offre de Pascualète. Quant à Ramon, il déclara superbement qu'il n'avait pas besoin d'eux. Finalement il consentit, car il avait peur de traverser tout seul le petit bois d'eucalyptus qui bordait le chemin avant d'arriver aux portes.
         On se mit en route. Ramon ramassa de grosses pierres dont il bourra sa ceinture. Ses compagnons l'imitèrent. En arrivant aux eucalyptus, ils croisèrent une patrouille conduite par un agent. Néanmoins Ramon ne cessait pas de tourner la tête, explorant l'ombre, se méfiant toujours d'une embuscade derrière les arbres ; mais rien ne s'apercevait.

         Au-delà des portes, ils rencontrèrent des chanteurs et des guitaristes, dont ils reconnurent plusieurs. Ils échangèrent des saluts. L'Esplanade, avec ses terrains vagues et ses tas de décombres, était encore un endroit suspect. Ils se hâtèrent d'arriver à la rue Bab-el-Oued, qui resplendissait des feux de, ses cafés et de ses guinguettes. Les bodegas espagnoles, comme les zincs marseillais, regorgeaient de braillards, de buveurs et de jongleurs. Des calèches passaient, emportant des Mauresques et des militaires. Des filles circulaient sous les arcades, des appels retentissaient en des langues diverses, au milieu du grincement des guitares et des ritournelles des mandolines.

         Alger était en fête. On devinait l'émoi de toutes les chairs au rire déchirant des femmes, qui tout à coup sonnait faux dans la nuit. Sur la place du Gouvernement on entendait ronfler les cuivres d'une musique militaire. Puis la place apparut avec son éclairage de décor, les hautes façades blanches des maisons, où luisaient les lettres d'or des enseignes, les palmiers de la Régence aux verts étranges qui semblaient des arbres de féerie. Tout au fond, les glaces des cafés populaires ouvraient des perspectives profondes, peuplées de têtes pâles et multipliant des lumières comme des illuminations. Les chaises et les tables des terrasses, toutes remuantes d'hommes et de femmes en cheveux, débordaient jusque sur la chaussée, où la foule tournait lentement, comme alourdie par l'air, autour des lourdes guimbardes et des petits corricolos aux couleurs violentes.
         Ramon pris par le mouvement de la foule, sentait en lui cette trépidation fébrile, qui tout à l'heure exaltait les conversations et faisait luire les prunelles aux tables de l'auberge. L'énervement du sirocco s'y ajoutait. Plus que jamais il avait envie de se battre. Les propos d'amour de Pascualète le Borrégo et de Juan le Mahonnais sonnaient de nouveau à ses oreilles :

         Laissez-moi là vous autres !... et merci, hé ! dit Ramon en touchant la main à ses trois camarades.
         Comme ceux-ci voulaient l'accompagner jusqu'au bout :
         Non, non ! je fais mes affaires tout seul !
         La voix de Ramon était rauque et tremblante de colère contenue. La vantardise espagnole se mêlait dans ces mots à la jalousie farouche dont ceux de sa race entourent les choses de la volupté et du sang. Il voulait être seul avec sa fiancée.
         Celle-ci était servante chez des boulangers de la rue de Chartres.
         Comme il craignait d'être en retard, Ramon pressant le pas, s'engagea dans les ruelles arabes qui joignent la rue de Chartres à la rue Bab-Azoun. Les tambourins grondaient continûment dans les cafés maures. Des chansons âpres et gutturales se traînant sur des airs d'église déchiraient la rumeur de la ville. Brusquement la pénombre de la ruelle cessa, et Ramon émergea à la lumière crue des restaurants et des cafés européens. La rue de Chartres apparut avec ses bars et ses claque-dents pleins d'hommes et de cris. L'air s'était encore alourdi des émanations fades des épiceries et des cuisines, de la moiteur fétide, des respirations et des sueurs humaines.

         Tout à coup Ramon, qui marchait la tête basse, sentit une main se poser sur son bras.
         - Bonsoir, Ramon !
         - C'était sa fiancée, qui, lasse de l'attendre, s'était mise en route toute seule. La chica était une robuste fille à la taille mince et aux traits du visage fortement accentués. Elle marchait avec ce balancement gracieux des hanches qu'ont toutes les Valenciennes. De larges cercles d'or pendaient à ses oreilles :
         TU sais, dit-elle précipitamment, il est derrière nous ! Il m'a parlé !...
         - Qui ?
         - Lui ! Pépé Clari, avec deux hommes.
         Ramon se retourna, regarda le long des maisons, fouilla de l'œil dans les groupes qui stationnaient. Il ne vit rien :
         - II se cache, le grand lâche ? Tu es sûre que tu l'a vu ?
         - Je te le jure, puisqu'il m'a parlé.
         - C'est bon, il ne perdra pas pour attendre.
         Ramon entraîna Rosa vers Bab-el-Oued. Ils marchaient l'un à côté de l'autre comme deux hommes. Ramon ne disait rien. Sa fiancée se rapprochait de lui balançant sa taille de son air de princesse et le dépassant un peu de la tête. Une angoisse pleine de délices la remuait à l'idée que deux hommes allaient se battre pour elle.

         Ils descendirent la rue en coup de vent, tenant le milieu de la chaussée, se défiant des piliers et des arcades. Quand ils se furent engagés au milieu des terrains vagues de l'Esplanade, soudain un coup de sifflet retentit, deux hommes surgirent derrière un tas de pierres, plus loin un troisième apparut.
         - Va-t'en, dit Ramon ; il va y avoir des coups !... Passe les portes et appelle les soldats du poste, si tu crains...
         Mais Rosa serra fortement le bras de Ramon :
         - Si tu es tué, dit-elle, je veux qu'ils me tuent avec toi !
         Les trois hommes formant cercle se rapprochaient.
         - Les lâches, dit Ramon, ils ont le courage de tirer des couteaux !
         Mais ils s'avançaient avec précaution, craignant la force herculéenne de Ramon et sachant que la chica l'aiderait au besoin. Ses larges mains valaient celles d'un homme. Ils virent à peine le geste de Ramon qui sortait une pierre de sa ceinture.

         Tiens attrape ce pavé-là !
         Pépé Clari s'abattit tout à coup en poussant un hurlement. A l'instant même, le trot d'une voiture s'annonçait dans la rue Bâb-el-Oued. Les deux acolytes s'enfuirent à toutes jambes vers les rampes du jardin Marengo. Ramon et Rosa se mirent à.courir vers les portes. Celle-ci, affolée, avait pris le bras de son fiancé et, comme la voiture s'était arrêtée, ils redoublèrent la hâte de leur course, craignant d'être pris.

         Puis, une fois, sous les voûtes, ils affectèrent une allure plus calme pour calme devant le poste. Maintenant c'était fini, ils étaient hors d'Alger. Ramon, ivre de joies se repaissait de son triomphe. Surexcités par l'émotion de tout à l'heure et fouettés par cette soirée ardente, tous ses nerfs vibraient. La pression de la main de Rosa qu'il sentait pour la première fois contre sa chair lui fit perdre la tête. Alors, emporté par le débordement de sa force et I'appel de sa luxure, soudain il eut envie de se jeter sur elle et de la violer. On entendait tout proche la plainte de la mer sur les écueils.

         Viens ! dit-il tout à coup.
         Où cela.
         - Là-bas, viens !
         II l'entraînait vers la mer.
         Rosa, extasiée par la force de son fiancé et toute troublée d'amour, cédait au bras de Ramon. Mais elle s'arma, immobile, enracinée au sol comme une borne :
         - Est-ce que tu es mon mari pour me commander ? Lui dit-elle durement. Ramène-moi à la maison ! Quand nous serons mariés, j'irai partout où tu voudras.
         Ramon savait qu'il n'y avait pas à lutter contre elle. II lui lâcha le bras en la regardant avec des yeux mauvais, puis, sans se toucher, parallèlement, ils revinrent par le petit bois d'eucalyptus.
         Ils marchaient silencieux vers le Faubourg, lorsque derrière eux un bruit de pas et de guitares les fit se retourner.
         Ho! Ramon! cria une voix...
         C'était Pascualète le Borrégo avec une bande de guitaristes, qu'il avait rencontré en chemin. Ils avaient vu un rassemblement autour de Pépé Clari, et, se doutant que Ramon était en avant, ils avaient pressé le pas pour le rejoindre.

         Il a reçu un coup à la tête ! dit le Borrégo... On le portait chez le pharmacien comme nous passions... Il s'en souviendra, celui-là !
         A ces mots, Rosa leva les yeux vers Ramon, et elle le regarda avec un tel élan d'admiration et de reconnaissance, que celui-ci en oublia le refus de tout à l'heure.
         Les jeunes gens se mirent en marche, entourant le couple, par crainte d'un retour offensif des amis de Pépé Clari. Les guitares sonnèrent joyeusement. Alors un grand garçon pâle se mit à lancer d'une voix perçante une romance valencienne, dont le plain-chant guttural se traînait en longues modulations à la mode arabe. Ce chant barbare, aux caresses farouches, fit bondir le cœur de Ramon c'était vraiment ses fiançailles. Comme les paranymphes de ses noces futures, le chanteur et les musiciens l'escortèrent jusqu'au seuil de sa fiancée.

         Celle-ci se retourna sur la porte, et, sans lui toucher la main, elle lui dit avant d'entrer :
         Adieu, Ramon ! viens demain à la maison parler à mon père.
         Dans ces paroles tremblait tout son amour avec une joie cruelle d'être délivrée de Pépé Clari. Ramon le sentit, et l'orgueil de son triomphe s'en accrut. Comme son sang brûlait, il se remit en marche dans la nuit avec Pascualète. Ils allèrent longtemps, une même fureur les poussait. L'ardeur de cette journée étouffante, l'exaltation du repas en commun dans la salle de l'auberge, tout cela, ayant couvé si longtemps, éclatait à cette heure et embrasait leurs veines.
         Ils montèrent précipitamment les rampes du Jardin Marengo sans se rien dire, presque farouches, et ils ne s'arrêtèrent qu'au sommet de la Casbah, sur la plate-forme qui domine la ville. Ils visitèrent l'un après l'autre tous les bouges, et Ramon s:y creva d'amour jusqu'à l'aube.

         Le lendemain, il fut exact au rendez-vous de la Rosa. Les parents le reçurent avec un embarras mal déguisé, mais au fond ils étaient flattés de ce mariage. Le père de Ramon passait pour avoir du bien en Espagne, et celui-ci promettait d'être un rude ouvrier. Mais sa réputation de batailleur et de mauvais garçon les rendait hésitants.
         Quand il fut parti, la mère de Rosa, scandalisée par les allures de Ramon, essaya de la dissuader :
         Comment est-ce que tu peux l'aimer, dit-elle, lui qui est si méchant ?
         Eh bien ! dit la Rosa, plus il est méchant, plus je l'aime !
         Elle rougit, tout étonnée elle-même de sa réponse.

         A partir de ce jour Ramon fut admis à "fréquenter". Ces assiduités excitèrent d'abord une violente colère chez son père, qui rêvait d'un tout autre mariage. Ramon saisit ce prétexte pour quitter tout à fait, la maison, et, ayant trouvé un équipage, il se mit à travailler sur la route de Blida avec Pascualète le Borrégo. Quand il eut ramassé de quoi s'acheter un lit et une commode, il parla tout de suite de faire venir les papiers d'Espagne et de fixer la date du mariage.
         Comme il gagnait beaucoup d'argent et qu'il était devenu plus sage depuis qu'il fréquentait, ses parents se radoucirent, ils donnèrent leur consentement. Petit à petit, la tia Pépa se prit d'affection pour sa future bru.
         Il se marièrent un soir de mai. Les guitaristes furent aux noces de Ramon, -- et dix mois après, il naquit un garçon qui s'appela Rafael, comme son père et son aïeul.

Louis Bertrand



BROUTY
Par M. Bernard Donville
                Chers amis,

            Voici un peu de détente et une agréable récréation avec la suite N°6 de l’étude sur Charles Brouty
            " « Brouty nous entraine cette fois -ci sur le port d'Alger : "en bas le port".
            Profitons de ces souvenirs qui arrivent à point nommé pour nous rappeler d'anciens étés.

            Brouty comme journaliste va nous faire découvrir d'autres lieux d'Algérie que ce soit le long des côtes, en pays kabyle ou plus au sud.
            Deux thèmes importants dans le N° 7 vont l'attirer : les enfants et les marchés.

            Vue la chaleur retrouvons Brouty au Sahara N°8 (Normal ?!)

            Cette nouvelle vision du travail de Brouty m'amène à vous faire découvrir, avec le N° 9, ses travaux comme illustrateur. En particulier vous redécouvrerez cet ouvrage qui pour les plus anciens constitua un cadeau de Noel.

            Quel charivari parce que la fin de Brouty n'estait pas encore arrivée. Déjà que le père bidi il s'est gouré dans le dernier envoi en pensant à la b d de Aïcha dont je vous avais déjà parlé (si on peux dire?). Alors c'est que vous l'avez bien aimé Brouty mais malheureusement aujourd'hui le N° 10, c'est le dernier épisode, peut être le plus beau, alors profitez en bien.
            La prochaine fois c'est la surprise ... et ce sera quand je veux ! Na ! Et ce que je veux...

            Bonnes lectures, à la fraiche si possible.
            Amitiés, Bernard
Cliquer CI-DESSOUS pour voir les fichiers

BROUTY 6

BROUTY 7

BROUTY 8

BROUTY 9

BROUTY 10

A SUIVRE



LA PARODIE DU CID
EXTRAIT envoyé par M. Parent et M. Brasier



La seule parodie amusante et curieuse des grands maîtres est faite
par leurs disciples et leurs admirateurs.
Théophile Gautier




La Parodie du Cid a été
représentée pour la première
fois le 3 novembre 1941
au Théâtre du Colisée, à Alger



PERSONNAGES et INTERPRETES

     DODIÈZE, marchand de brochettes courtier électoral :.... Gabriel ROBERT
     GONGORMATZ, dit "Le Comte3, Ancien patron coiffeur,: Raoul ROLLAND
               courtier électoral
     RORO, chômeur, fils de Dodièze : ………………....................L'AUTEUR
     Monsieur FERNAND, député : ………………….............Philippe ROBERT
     ALPHONSE, agent électoral : …………………..........................BALDINI
     AYACHE, Agent électoral : ………………….................Emmanuel ORTS
     ALI, petit commissionnaire ……………………................................X...
     CHIPETTE, sans profession, fille de Gongormatz, : ……Hélène MELE
               fiancée de Roro
     Madame CARMEN, propriétaire : …………………........Paule JOURDAN
     FIFINE, bonne à tout faire chez les Gongormatz : ………Nicole HEBERT
     FATMA, femme de ménage chez Madame Carmen : ……Jean VAROR
     LA SANCHE
     La scène est à Bab-El-Oued, à Alger, sous la IIIème République

La dernière reprise publique, du vivant de l'auteur, a eu lieu en 1964 au théâtre de Bobino, à Paris, avec, dans les rôles principaux, Françoise FABIAN (Chipette), Marthe VILLALONGA (Madame Carmen), Albert MEDINA (Dodièze), Philippe CLAIR (Roro) et Lucien LAYANI (Gongormatz).

ACTE II

SCENE PREMIÈRE
(Sur la place publique)

GONGORMATZ,, AYACHE

     GONGORMATZ,
     Je dis pas le contraire. Un peu qu'il a fait l'oeuf,
     Un peu que j'étais gaz, i m'a venu le boeuf.
     Mâ pisque j'l'a gonflé, cadeau ! et marqu' dommage !

     AYACHE
     Ça fait rien, Gongormatz, A rapport à son age,
     Ti'aurais pas dû taper, aussinon rien qu'un peu,
     Mâ pas lui monter l'oeil qu'il a venu tout bleu.
     T't à ['heure, au Comité, tous i z'ont la colère.
     Demain les élections; qui gatz i va les faire ?
     Comme il a dit Fernand: c'est de la désunion.

     GONGORMATZ,
     T'ies sûr qu'il a pas dit que c'est pas ses oignons ?

     AYACHE
     Allez., raconte au vieux que ti'as tapé trop vite.
     Après, à chez Tintin, le patron i t'invite.

     GONGORMATZ,
     Ça i dirait Fernand ? Oh! comme il est gentil !
     I s'arrapelle pas de ça qu'j'a fait pour lui ?
     I connaît qu'à Dodièze; il y fait des risettes.
     Mâ les deux ans d'prison, qui c'est qui s'les a faites ?

     AYACHE
     Oh là, là ! ça va bien. Je veux pas le saoir.
     Si ti'as fait le couillon, ti'as fait que ton de'oir,
     Mâ si tu contunues, ho ! tu perds la fugure.

     GONGORMATZ,
     Chiche tu craches en l'air et pis tu dis : j'te jure !

     AYACHE
     Toi, tu fais le mariol. Entention les tournants !

     GONGORMATZ,
     Moi je fais comm' j'dis moi. Port'la chose à Fernand.
     Arrégare à ces oix que j'en a plein les poches.
     S'i se croit d'les aoir, figa ! faut qu'i s'l'accroche !

     AYACHE
     C'est comm'ça que tu causes en dessur un élu...

     GONGORMATZ,
     ...Que j'a qu'un mot à dire et demain i l'est plus !
     S'i me fait une gambette, allez ! qui c'est qui tombe ?
     Et s'i veut m'fair' sauter, qui c'est qui part en bombe ?

     AYACHE
     Saoir lequel qui'arrive et pis lequel qui part ?
     Tu veux le bon conseil ?

     GONGORMATZ,
     Mets-toi-le quelque part !

     AYACHE
     Merci !

     GONGORMATZ,
     De rien.

     AYACHE
     Allez, faut qu'j'y porte la réponse !

     GONGORMATZ,
     Dis-y qu'au lieur d'voter, demain j'vas fair' des lionces !

     AYACHE
     Entention qu'il aim' pas Fernand, les zigotos !

     GONGORMATZ,
     Ma tête elle est malade, alors cause, à mon dos !

     AYACHE
     Çuilà qu'i sèm' le vent i s'récolt' la trompette !

     GONGORMATZ,
     je m'en connais un aute, i faut qu'tu l'y répètes...

     AYACHE
     A de bon, Gongormatz, ti'as pas venu maboul ?
     Fais comme i dit Fernand !

     GONGORMATZ,
     Qu'i va s'la pillancoul !
      (Exit AYACHE)
     Personne i me fait peur et ceuss-Ià-là qui veulent,
     je suis capabe encor à leur casser la gueule,
     Diocane !
     (Il brandit une tondeuse)
      Et si y'en a qu'i z'ont trop des cheveux,
     A la coupe ! A la coupe ! Allez, qui qu'i n'en veut ?
     (Il arpente la scène avec agitation)

SCÈNE II

GONGORMATZ, la tondeuse à la main,, RORO, l'espadrille à la main

     RORO
     0 l'homme, arrête un peu !

     GONGORMATZ,
     Cause !

     RORO
     Eh ben ! y'a du louche.
     T'le connais à Dodièze ?

     GONGORMATZ,
     Ouais !

     RORO
     Ferme un peu la bouche !
     T'sais pas, tout vieux qu'il est, ça qu'il était çuilà
     Honnête et brave et tout, dans le temps, t'le sais pas ?

     GONGORMATZ,
     Assaoir !

     RORO
     Et ce boeuf qu'i monte à ma fugure,
     T'sais pas d'aousqu'i sort, t'le sais pas ?

     GONGORMATZ,
     Quelle affure ?

     RORO
     A quatre patt', ici, je te le fais saoir !

     GONGORMATZ,
     Allez, petit merdeux !

     RORO
     Merdeux, faut oir à oir,
     Et petit, c'est pas vrai, mâ quand c'est ma tournée,
     N'as pas peur, j'attends pas pour rendre les tannées !

     GONGORMATZ,
     Pour un taquet à moi, je t'en rends dix ou vingt !
     Mâ dessur un petit je vas léver la main ?

     RORO
     Un petit dans mon genre, i peut te rendre un mètre !
     Pour dix coups d'encaissés, cent coups i veut te mettre !

     GONGORMATZ,
     T'le connais à Bibi ?

     RORO
     Eh ! mala j'connais pas !
     Un bâtard, un falso qu'il a tapé papa ?
     Les cornes qu'on te oit dessur la carabasse,
     je m'les prends un par un et comm'ça je me les casse !
     je connais, je connais : ti'es le roi des chiqueurs.
     Mâ je pense entre moi: " si ti'as peur, n'as pas peur.
     Un pluss connu que lui y'a pas dans la Cantère.
     Qué malheur que personne i connaît à son père! "

     GONGORMATZ,
     Ti'ensultes pas cet homme, aussinon...c'est pas bien !

     RORO
     A'c un coup de soufflet ti'as bien tapé le mien !
     Pasqu'il est vieux, le pauve, et péteux, tu profites.
     Tu t'le prends en rétraite et tu fais schkapa, vite.
     Mâ s'il aurait oulu sortir le rivolver,
     Direc pour Saint-Ugène, i te fait sanger l'air.
     Papa, c'est un lion qu'il en a plus la force.
     Pluss terribe que lui, manque i z'en ont les Corses !
     Vec cet homme, ô cougoutse, i faut faire entention, Î
     Pourquoi c'est toujours lui, quand Y'a les élections,
     Qu'i fait voter les morts, en schkamb, et tous d'attaque
     Et qu'i s'les garde à l'oeil pour pas qu'on s'les sarracque !

     GONGORMATZ,
     Zéc !

     RORO
     A'c tes quat'cheveux, j'me fais des bross'à dents
     Pour bien m'les astiquer jusqu'à tant qu'i vient blancs !
     A'c ton foie, a'c ton mou, ça fait rien qu'i sont rances,
     Pour de rire à papa j'me mont' la concurrence !
     A'c tes boyaux, j'me fais des crins de lign' de fond,
     A'c ta peau, sept costum' et deux-trois pantalons !
     A'c ton oeil qu'il est bon, j'me fais un' bill ' z'agate,
     A'c l'aute œil qu'il est guitche, une épingue à cravate,
     A'c les oss de tes morts des baguett' de tambour,
     Et pis, a'c ça qu'je pense, un plat des pomm' d'amour !

     GONGORMATZ,
     Aouah ?

     RORO
     Va, mieux pour toi tu fais pas le louette.
     Empoisonné, tu sais, il est, mon coup de tête !

     GONGORMATZ,
     Gdeub !

     RORO
     Viens, si ti'as pas peur. Descends en bas le port!
     Allez ! Lève la paille on crache en-d'sur les morts !

     GONGORMATZ,
     Pas les morts ! Pens' qu'y'en a des fraich' dans la famille
     Et que d'un peu de pluss tu te mariais ma fille !
     Dans ta situation, ça m'fait plaisir de oir
     Que ti'as laissé tomber l'amour pour le de'oir,
     Que ti'es un p'tit champion, quâ mêm' ti'es t'un minime,
     Qu'autant Chipette i t'aime, autant moi je t'estime.
     Et qu'pouvant pas pour gendre aoir un sous-préfet,
     J'me trompais pas beseff d'sur le loup qu'elle a fait !
     Mâ j'ai pitié de toi, pasque tu m'entéresses.
     J'admire à ton courage. Han ! c'est beau, la jeunesse !
     (Roro brandit son espadrille)
     VA, tu m'serch' pas d'affaire., Un coup d'dés, c'est fatal :
     Si tu pourrais parier mill' francs, ça m's'rait égal.
     Très peu pour moi, l'honneur. Pas de flouss, pas d'histoire !
     A vaincre sans pari, on triomphe sans boire.
     Tout le monde i dirait qu' c'était moi qu' j'avais tort
     Et c'est moi final'ment que j'rég'rais tes croqu'-morts !

     RORO
     Tu m'as lévé l'honneur, tu m'lév'ais pas la vie ?
     Et tant qu'à la petite, avant que j'la marie...
     Tu peux te la garder ! Mâ si j'aurais oulu,
     Je viens, je me la trompe et je la parle plus !

     GONGORMATZ,
     Je te léve les dents !

     RORO
     Moi, les oss je te casse !
     (Un silence Ils se défient du regard, à distance)

     GONGORMATZ,
     Encor t'ies là debout ?

     RORO
     Ti'es pas mort, la rascasse ?

     GONGORMATZ,
     Allez, viens ! Quand son père i s'a mangé des coups,
     C'est forcé qu'à son fils il y'a donné le goût.

SCÈNE III

(Devant la maison de Madame CARMEN),,

     Madame CARMEN
     Allez, va, va, ma belle un peu pluss du courage.
     Tu veux que je te chante : " Après le sombre orage ? "
     Ce matin, c'est la nuit, ma i fait jour ce soir.

     CHIPETTE
     Non, Carmen, c'est pas vrai , jour et nuit i fait noir.
     Quand deux canot' i sont dans ce coup de baffagne,
     Du temps qu'un le oilà, l'aute il est en Espagne !
     je me trouve un mari qu'il est beau, jeune et tout ;
     Mon pére il est consent et son père i s'en fout.
     Oir-moi ça qu' c'est l'hasard : un i tencont' à l'aute
     Et mon père i se prend son père à la calbote !
     Tout ça pour du chiqué, pour un morceau d'chiffon !
     je t'le demande un peu, Carmen, qu'est-c'qu'i n 'en font ?

     Madame CARMEN
     Et moi, je dis comm'ça que toi, ti'as rien à craindre.
     Un rien qu'i fout le feu, un rien qu'i peut l'éteindre.
     En premier, on se croit qu'i vont tour ravager,
     Et pis Monsieur Fernand i va s'les arranger.
     Et pis t'sais comment qu'moi, j'a des amis sensibes ?
     pour m'fait plaisir, " le Corse " i fera l'impossibe.

     CHIPETTE
     Arrange à ces affair' qu'i z'en ont bien besoin,
     Mâ les affair' d'honneu, ça s'arrang' à coups d'poing !
     Ti'auras beau faire agir la Corse et la Provence,
     En reculant le mal, davantage i s'avance.
     Cuilà-là que le bœuf i s'le garde en-dedans,
     Au pIuss on l'entend pas, au pluss i grinc? Les dents !

     Madame CARMEN
     Laisse un peu qu'i te tient, ton Roro, la promesse ;
     Les vieux i font amis, n'as pas peur, à la messe !
     Et nous oirons bientôt si ton père il est sourd
     Quand le curé spagnol i te tape le discours !

     CHIPETTE
     Touch' du fer, mieux ça vaut ! je connais à mon père.
     Pour qu'i s'escuse au vieux, ouallou, y'a rien à faire !
     Aie, aie, aie ! C'était sùr que ce malheur i vient :
     Ma glac'de Monoprix j'a cassé hier matin !

     Madame CARMEN
     Atso ! Ti'as peur du vieux, le " Lion des Brochettes " ?

     CHIPETTE
     Et Roro, c'est un vieux ?

     Madame CARMEN
     Ce petit ? Michquinette !

     CHIPETTE
     Le petit d'un lion i vient grand d'un seul coup.

     Madame CARMEN
     Moi, si je s'rais de toi, j'y donne un rendez-vous,
     Tête à tête, et du temps qu'on est bien camarades,
     J'y dit deux mots pour pas qu'i fait des couillonnades.

     CHIPETTE
     S'i m'en'oie au charbon, de quoi que j'aurai l'air ?
     Et s'i fait comm' j'dis moi, lui, la fugure i perd !
     Méchant comment qu'il est, s'avaler la tomate ?
     Va, va, nous allons oir un grand coup de triate !
     Et moi je dois bisquer bessif pour ce Roro,
     Ou qu'i fait rien du tout, ou qu'i n'en fait de trop !

     Madame CARMEN
     Chipette i fait des necs ! On oit la grande dame
     Que son sang de Spagnole il est kif-kif la flamme !
     Ecoute ! A ce petit, je me le prends chez moi,
     Le temps que ça s arrange, un mois, deux mois, trois mois.
     Il est comme un caid, oblig'ment qu'i vient sage.
     I mange, i boit, i dort... et y'a pas du carnage !

     CHIPETTE
     Ho ! Quelle affur'j'en ai ? Challah qu'i dort cent ans !

     Madame CARMEN
     Ali !... Serch'-moi Roro ! Dis-y que je m'l'attends.

SCÈNE IV

Madame CARMEN, CHIPETTE, ALI, FATMA ,,

     ALI
      Y'en a M'siou Gongormatz it loui...

     CHIPETTE
     Jésus-Marie !

     Madame CARMEN
     Ouach bik ?

     ALI
     Imchi fissa fi zoudj à la, Pîch'rie !

     Madame CARMEN
     Jure !

     ALI
     Ouallah! Tos li deux i dispiti beseff !

     CHIPETTE
     C'est la donnade, allez ! Jésus-Marie-joseph !
      (Exit CHIPPETTE)

SCÈNE V

Madame CARMEN, FATMA,,

     Madame CARMEN
     Atso ! de mauvais sang je vas tomber malade !
     Quand i veut le bont Dieu, i n'en fait des cagades !
     je pleure a'c la petite et je pense au petit.
     La pitié y pour elle et l'amour j'a pour lui.
     je dors plus de la nuit ! Chouf un peu ma fugure.
     Tout le manger qu'i reste. On s'le jette aux ordures !
     Mâ de ce coup d'embrouille ousqu'i sont tous les deux,
     je sens que l'appétit ell' revient un p'tit peu...

     FATMA
     Pasqu'i cassa l'carta, Carmin il ist contente ?
     T'itis genteille avant, mat'nant ti viens michante ?

     Madame CARMEN
     L'amour, elle est méchante, ô Fatm, c'est pas moi !
     L'amour ! L'amour ! L'amour ! ! ! Enfant de j'sais pas quoi !
      (Petit ballet de Fatma)
     Et pis, pour commencer, barka vec ces manières !
     La poulitesse, ouallou ! De quoi qu'c'est ces moukères ?
     Si Chipette i le perd, qui c'est qui'a défendu
     Qu'une aute i s'enteresse à cet individu ?

     FATMA
     L'amour il ist pas bon ! C'ist on z'oiseau kabyle.
     Tojors i s'ensauvi quand nos otr'on l'appile !

     Madame CARMEN
     Pasque tu connais pas, tu te crois qu'c'est pas bon.
     C'est kif-kif un zlabia qu'on y'a mis d'la poison ;
     Et quand ti'as le gousto d'aoir la maladie,
     Zbouba pour le docteur et pour la pharmacie !

     FATMA
     La maladie, i s'ra dans ton la tîte à vous
     Qu'ist-c' qui c'ist, cit Roro ? On canaille, on oyou !

     Madame CARMEN
     Mala je le sais pas ! je causais pour de rire.
     je rêve et si je rêve i faut pas me le dire...
      (inspirée)
     Sors le jeu d'la ronda !
      (elle se tire les cartes)
     Tiens, oilà Gongormatz,
     L'as de basto,, qu'à Bone, on s'lappelle as de matz,
     Roi de sabrès, le vieux, le " Lion des Brochettes " !
     Cheval d'oros, c'est moi. Deux de matz, c'est Chipette...
     Oilà l'as de sabrés ! Çuilà-là, c'est Roro !
     1, 2, 3, 4... Pour moi, Y'a boucoup des douros.
     Un paquet là-dessur ! Ca qu'c'est la destinée !
     Chipette i va n'aoir un petit dans l'année !
     Après, pour la marier, i trouve un monsieur blond !
     1, 2, 3, 4... Des coups ! Congormatz il est bon !
     Dodièze il est content. Et Roro ? ....... Manmamille !
     Des morts, encor des morts !... Mais pas dans la famille...

     FATMA
     Ah ! ouah ! Madam' Carmin, Ji cart', c'ist d'la zoubia !
     Ti viens à Bidonville, y'en a li gueblia.

     Madame CARMEN
     Ouais, c'est ça, pis après je reviens plein des bêtes !
     Atso ! C'est, la donnade ! Elle a raison, Chipette !

     FATMA
     Il a rison Chipette it toi ti'as pas rison.
     Ça qu'y'a dans son gourbi, c'ist pas dans ta mison.

     Madame CARMEN
     Qu'est-c' tu veux ? C'est l'AMOUR qu'i me tourn' en bourtique !
      (FATMA esquise de nouveau son pas de balai)
     Mais-dis-donc, ma parole, y'a plus des domestiques ?
     Va oir tes cabinets, qu'i sont tout dégoûtants
     Et que t'ies là, feignante, à manger mon argent !

SCËNE VI

(Sur la place publique),, Monsieur FERNAND, AYACHE, LA SANCHE

     Monsieur FERNAND
     Vraiment, ce Gongormatz est bien peu raisonnable.
     Ose-t-il croire encore son geste pardonnable ?

     AYACHE
     J'a fait ta commission, mâ l'homme il est têtu !
     Mieux ça vaut j'te dis pas ça qu'i m'a répondu.

     Monsieur FERNAND
     C'est trop fort ! Ainsi donc un louftingue en colère
     La veille du scrutin m'empêtre en cette affaire !
     Il offense Dodièze et il se fout de moi !
     En pleine République il veut faire la loi !
     Si bon courrier qu'il soit et tant qu'il m'en souvienne,
     je saurai bien rabattre une humeur si hautaine.
     Fût-il le Roi de l'Urne et le Dieu du Scrutin,
     Il n'aura pas un sou, non, non, pas un rotin !
     Quoi qu'ait pu mériter une telle insolence,
     J'étais prêt en justice à prendre sa défense,
     Mais Puisqu'il exagère, il s'expose aujourd'hui
     A me voir froidement témoigner contre lui !

     LA SANCHE
     tripotant machialement un jeu de cartes
     I faut pas s'occuper des affair' personnelles.
     Toujours, dans un' partie, y'a deux manches et la belle.
     Fernand, à force et pis à peu à peu,
     La chaleur ! La chaleur ! ! La chaleur ! ! ! tu prends feu !
     I sait bien qu'il a tort, mâ que c'est pas sa faute.
     Qu'est-c' tu veux ? Il est fier. Et j'm'en connais un aute !

     Monsieur FERNAND
     La Sanche, taisez-vous et sachez, sapristi,
     Qu'on se rend criminel en lâchant son parti !

     LA SANCHE
     Ça va, je dis plus rien...
      (fausse sortie)
     Mâ j'ai deux mots à dire :
     C'est moi qu'je lèv' la paille !

     Monsieur FERNAND
     Hein ? Quoi ? Veuillez traduire.

     LA SANCHE
     Un homme à qui tu mets des pareill' conditions,
     Comment qu'tu veux qu'après i fait tes élections ?
     Dis-y qu'à coups de tchak i s'esplique, y'a pas d'honte,
     Mâ, s'i perd la fugure, i s'appell' plus " Le Comte "...
      (Confidentiellement)
     Que, d'après les on-dit, si je fais pas d'erreur
     Vec un nommé Lecomte i s'ressemb'à fair' peur.
     Passons ! C'est ton bras droit ? Laisse qu'i fait ta campagne,
     Et moi j'me prends Roro, tout seul à la castagne !
     C'est à mon bras de fair dans cette affair' de bras.
     Pass' la main ! Ne t'occupe ! Un jour, tu comprendras...
      (Il bat son jeu de carte sous le nez de Monsieur Fernand, ahuri)
     Tu ois l'as de sabres ? Entention, j'l'escabote.
     Un, deux, trois ! ... Ousqu'il est ? qu'est-c' ti`en dis, mon, p'tit pote ?
     Allez, ti'as resté chkouate !
      (il s'esclaffe et lui tape sur le ventre)

     Monsieur FERNAND
     Eh bien ! jeune homme, eh bien !
     D'abord, vouvouyez-moi, si ça ne vous fait rien !
     Vous perdez le respect....Mais je pardonne à l'âge
     Et chez un électeur j'excuse ce langage.
      (A lui-même)
     Ce pays, comme on dit ans délégations *,
     Ce pays, entre tous terre d'élections,
     Ce pays, qui de moi fit son parlementaire,
     Me parle... et c'est l'Afrique avec tout son mystère.
     Chaque mot, chaque geste a l'air d'être indcent.
     Peut-être n'est-ce là que l'effet de l'accent,
     Mais, ne comprenant pas, j'en reste aux conjectures,
     Avec l'impression qu'on m'a dit des injures...

     LA SANCHE
     Ah! ouatt, Monsieur Fernand, c'est pas c'que vous croyez.

     Monsieur FERNAND
     Vous voyez ! je comprends quand vous me vouvoyez.

     LA SANCHE
     je ois que tutou'oies... Et encore, en godille !

     Monsieur FERNAND
     Mais revenons au fait.

     LA SANCHE
     Passons-les en famille...

     Monsieur FERNAND
     Votre " Comte " m'embête ! Il a perdu d'honneur
     Celui que du Nitram j'avais fait commandeur.
     S'attaquer à mon choix, c'est se payer ma tête.
     Je le redit bien haut : ce Gongormatz m'embête !
     Mes ennemis sont forts et pour avoir ma peau
     Ils vont chercher les morts au fond de leurs tombeaux.
      (en confidence)
     Un Schiaffino *, ce soir, en amène deux mille !

     LA SANCHE
     Ay man ! Jusqu'à les morts qu'i dorment pas tranquilles ?
     Mais ça fait rien. Les morts, c'est pareil les vivants
     Et je crois de connaître à cuilà qui les vend.
     C'est un entrepreneur, un maig', un honnête homme.
     On peut se l'engantcher. Ça dépend de la somme.

     Monsieur FERNAND
     Le trésorier d'honneur par malheur est parti,
     Emportant avec lui la caisse du parti !
     Ah ! les meilleurs s'en vont !
      (émotion)
     Gongormatz et Dodièze
     Le laissent de surcroît le cul entre deux chaises !
     Que suis je venu faire en Afrique du Nord ?

     AYACHE à part J
     e oudrais le saoir !...

SCÈNE VII

Monsieur FERNAND, AYACHE, LA SANCHE, ALPHONSE,,

     ALPHONSE
     Fernand, le Comte est mort * !
     (Monsieur FERNAND, atterré se découvre)
     Enfin, s'il est pas mort, i se tient l'aubergine !

     Monsieur FERNAND
     Ah! cessez d'employer ces formes sibyllines
     Et ne grossissez pas un futile incident !

     ALPHONSE
     Futile ? Eh ben ! Futile il y'a lévé six dents !
     A chez nous, quand un homme i s'en affogue un aute,
     Que pareil à un pourpre il y tourne la calote,
     Le monde i dit comm'ça : " Madone ! I s'l'a tué ! "
     Ça fait rien que le mort on s'le oit remuer.
     I se lève. I s'en va sans rien dire à personne
     Et nous aut' on se boit le flouss de la couronne !

     Monsieur FERNAND
     Pardonne, cher Alphonse, à mon esprit obtus.
      (A La Sanche)
     Et toi, mon bon ami, redis-moi tu, veux-tu ?

     ALPHONSE
     Chipette i vient te oir. Qué trombone en coulisse !
     Rien qu'i pleure et qu'i crie : " Ousqu'elle est la poulice ? "

SCËNE VIII

Monsieur FERNAND, AYACHE, LA SANCHE,
ALPHONSE, CHIPETTE,
DODIÈZE, FIFINE, FATMA, ALI,
,

     CHIPETTE
     A la garde ! A la garde !

     DODIÈZE
     0 Fernand, tu l'entends ?

     CHIPETTE
     Au feu! A l'assassin !

     DODIÈZE
     Si c'est pas dégoûtant !

     CHIPETTE
     Ousqu'elle est la poulice ?

     DODIÈZE
     Encore i rôcommence !

     CHIPETTE
     Qu'on s'le condamne à mort, et pas des circonstances !
     Il a pris son souyer, comm'ça, par le p'tit bout,
     I m'a tué mon père !

     DODIÈZE
     Il y'a donné deux coups !

     CHIPETTE
     N' as pas peur, la poulice i fait ça qu'i doit faire.

     DODIÈZE
     Personne i t'a touchée, toi, ti'as rien qu'à te taire.

     Monsieur FERNAND
     Calmez-vous l'un et l'autre et parlez à loisir.
     Chipette, je sais bien, ça ne fait pas plaisir
     Quand on n'a plus vingt dents, d'en avoir six d'atteintes
      (Bas, à DODIÊZE, qui s'agite)
     Toi, ne l'énerve pas, elle veut porter plainte.

     CHIPETTE
     M'sieu, mon père il est mort. On s'l'a moitié tué.
     De la peur qu'il a eue il a resté muet.
     Pluss d'un bidon du sang qu'il a pissé, le pauve !
     Douze i z'étaient dessur ; après, tous i s'ensauvent.
     Ce sang, que c'était trop combien qu'i n'en avait,
     Que le vot', à côté, c'est du sang de navet,
     Ce sang, que justement moi j'avais i se caille
     Qu'en-dessur l'estomac d'une attaque i se caille,
     Ce sang, qu'il est sorti allez saoir par où,
     De le oir, ça m'a fait les jamb' en fromage mou !
     Oilà dans quel état qu'on s'la à mon père.
     Tant qu'il est pas vengé, je veux pas qu'on s'l'enterre !
     J'arrive en bas le port, je m'le ois tout saignant.
     I me fait : " C'est Roro, ce bandit, ce feignant ! "
     De là, i s'a gagné seul à son domicile ;
     J'y a donné deux cachets pour qdi dort bien tranquille.

     Monsieur FERNAND
     Courage, va, ma fille. Il repose aujourd'hui
     Et demain nous boirons l'anisette avec lui.

     CHIPETTE
     Vous avez pas compris ? Aïe, aie, aie ! Qué misère !
     Comment qu'i faut vous dire ? On m'a tué mon père !
     Tant des coups qu'il a pris, t't à l'heure, en bas le port,
     Mon père i va mourir. Il est en moitié mort.
     (Elle hurle )
     Au secours ! Au voleur ! Elle est témoin, FiFine !
     Un agent ! Un l'hussier ! sortez la guyotine !
     Et, la mort de mes yeux ! si personne i me croit,
     Rien qu'on fait l'autopzis * et on oit ça qu'on oit !
     (A Monsieur FERNAND)
     M'sieu, dans votre entérêt, occupez-vous d'l' affaire.
     Tant qu'elle est pas réglée, i faut qu'on s'l'enterre !
     On m'a tué mon père ! Ouais, c'est la vérité !
     A oir si ouais ou non n's avons un député ?
     Et d'abord, tout le monde i connaît au coupabe ;
     Et quâ même, on oit bien que c'est pas un Arabe !
     C'est Roro, que son nom, le bon, c'est Rodriguez
     Le fils à ce vieux-là qu'i se vend les merghez !

     Monsieur FERNAND
     Dodièze, réponds-lui.

     DODIÈZE
     Qu'il en a de la sanche
     Çuilà qui peut mourir quand sa tête i vient blanche !
     La tombe de mes morts ! Si c'est pas malheureux
     De oit que la schkoumoun i s'en prend à les vieux !
     Moi qu'on l'y dit Dodièze, avec honneur et gloire,
     Moi que toujours pour toi j'a gagné la victoire,
     Pas rien qu'un calaar i me fait des affronts,
     Encor je dois baisser bessif le patalon ?
     Moi qu'j'ai jamais tombé dans aucune embuscade,
     Moi qu'on m'a jamais mis paravant la delcade,
     Devant le magasin, la clientèle et tout
     Gongormatz i m'l'a mis pasqu'il était jaloux !
     Ce bras, qu'il a bourré pour toi des urn' entières,
     Ce bras, qu'i t'a porté des oix du cimitière,
     Ce bras, ce bras d'honneur qui t'a fait député,
     Si y'aurait pas Roro, mieux j'le fais ramputer !
     I m'a prêté le sien, il a drobzé le Comte;
     I m'a rendu l'honneur, i m'a levé la honte.
     S'i faut qu'un de nous deuss i monte à la prison,
     Rien qu'on m'arrête à moi ! Fernand, j'a pas raison ?
     Appelle à les agents ; fais plaisir à Chipette.
     Mon bras il est malade ? Alors, cause à sa tête !
     Qu'iI est mort Gongormatz ou bien qu'il est mort pas,
     C'est moi qu'je suis la tête et Roro c'est le bras !
     Personne i l'aurait fait si j'aurais pu le faire !
     En travers de la loi, moi je passais avant.
     Ousqu'i passait le père i peut passer l'enfant.
     Si tu veux passer toi, réchéflis, pense à l'homme !
     Tu m'as compris, tu m'as. Silence et chin'-chin' gomme !
     Ouais ou non, ti'es le chef ou ti'es un boudjadi ?
     S'il a fauté le bras, je crois que j'l'ai d'jà dit,
     Mâ si je l'ai d'jà dit, ça fait rien, j'le répète,
     Le bras i n'en a fait, grâce à Dieu, qu'à sa tête.
     Alors, oilà la tête ! Appelle à le boureau
     Et garde-toi le bras, que ti'en as pas de trop !

     Monsieur FERNAND
     L'affaire est d'importance et, bien considérée,
     Mérite au Comité d'être délibérée.
     Allons, raccompagnez Chipette à la maison.
      (bas)
     Dodièze, es-tu pressé de coucher en prison ?
     Va me chercher ton fils. J'arrangerai l'affaire.

     CHIPETTE
     Y'a pas d'arrangement, ouallou, y'a rien à faire !

     Monsieur FERNAND
     Va te coucher, ma fille, et calme ta fureur !

     CHIPETTE
     Retenez-moi, madone ! ou je fais un malheur !
A SUIVRE


PENURIES

De Jacques Grieu

Y'A PLUS

Les Français sont grognons: de tout y'a plus assez
Ils se sentent perdus, frustrés et angoissés :
Y'a plus assez de profs, on manque d'enseignants,
Plus assez de toubibs, pénurie de soignants.
Pas assez d'hopitaux et tous manquent de lits.
Et le pouvoir d'achat qui toujours rétrécit !

Y'a plus assez de blé, d'huile de tournesol,
Plus assez de moutarde et manque de pétrole.
Le gaz est denrée rare et l'électricité,
Va manquer cet hiver pour pouvoir se chauffer.
Y'a plus de moucherons et donc plus d'hirondelles,
Y'a plus de hanetons, y'a plus de sauterelles.

Y a plus de saisons et il fait bien trop chaud,
Y'a plus assez de pluie et l'on va manquer d'eau.
Pour trouver de la neige, on va toujours plus haut
Et y'a plus un glacier qui ne vire au chaos…
Y'a plus de bons légumes avec les goûts d'antan.
Y'a plus de bois de rose, ou séquoias géants.

Y'a presque plus d'élèves qui soient " collés " au bac
Plus beaucoup de PC sans victimes d'arnaques.
On n'est jamais contents, tout nous choque et nous nuit :
Le parking est trop loin, les enfants font du bruit.
Le métro qu'on attend, le vent qui souffle trop,
Les remèdes trop lents, les escaliers trop hauts …

Sans notre GPS, nous craignons l'inconnu ;
Sans l'airbag, le smartphone, on se sent tous perdus.
Y'a plus de sens civique, on ne veut plus voter,
Y'a plus d'entrepreneurs, on ne veut plus risquer.
Nous sommes conseilleurs, professeurs de bonheur.
Nous voulons tout le beurre, aussi l'argent du beurre…

Jacques Grieu                  




AFRIQUE SEPTENTRIONALE.
Gallica : Revue de l'Orient 1849-1 pages 62 à 67
NOTICE NÉCROLOGIQUE.
LE MARÉCHAL BUGEAUD DUC D'YSLY,

Membre de la Société orientale de France.

         Thomas-Robert Bugeaud, duc d'Isly, maréchal de France, né le 15 octobre 1784,à Limoges, où il fut baptisé dans l'église de Saint Pierre, est mort à Paris le 10 juin 1849, des suites d'une attaque de choléra. II était fils de M. Jean Ambroise Bugeaud, chevalier, seigneur de la Piconnerie, marquis de Ribevrolles, et de Françoise de Sutton de Clonard, fille de Thomas Sutton, comte de Clonard, d'une illustre famille irlandaise, venue en France à la suite du roi Jacques (1). Des quatre oncles maternels du maréchal Bugeaud, deux sont morts glorieusement au service de la. France, l'un dans la guerre d'Amérique, à l'attaque de Sainte-Lucie, comme capitaine de vaisseau et aide de camp du comte d'Estaing ; l'autre, choisi par l'infortuné Lapeyrouse pour l'accompagner clans sa célèbre expédition autour du monde, périt comme commandant en second de l'expédition. Les deux derniers fils du comte de Clonant, grand-père du duc d'Isly, colonel dans la brigade irlandaise au service de la France, prirent une part active et glorieuse dans la guerre d'émancipation de l'Amérique contre les Anglais.
         Deux de ses frères furent contraints d'émigrer pour se soustraire aux persécutions révolutionnaires, ce qui ne l'empêcha pas de se donner tout entier à sa patrie dès que l'âge et la raison lui permirent de choisir une carrière. Il entra en 1804 aux vélites de la garde, et fut envoyé sur les côtes de la Manche, puis â la grande armée en 1805. Austerlitz lui valut les galons de caporal de grenadiers de la garde impériale, et l'année suivante, sa conduite dans la campagne de Pologne lui mérita l'épaulette de sous-lieutenant au 64e de ligne ; six mois après, blessé à Pulstuck, il passait lieutenant.


         Après avoir fait les campagnes de Prusse et de Pologne, il arriva en Espagne comme lieutenant adjudant-major, et, le mars 1809, il était nommé capitaine de voltigeurs, puis de grenadiers au 116e de ligne ; deux ans plus tard chef de bataillon, puis major. Chacun de ses grades était le prix d'une blessure, la récompense d'une action d'éclat.
         Cette guerre terrible et difficile d'Espagne valut au commandant Bugeaud la réputation d'un des officiers les plus intrépides, les plus actifs et les plus intelligents de l'armée. Depuis 1808 jusqu'en 1814, â l'assaut de Lérida, au combat de Tivisa, au siége de Tortose, à la prise de Tarragone, aux combats d'Yécla, de Burgos, d'Ordal , le valeureux officier se fit remarquer du maréchal Suchet, qui le mit plusieurs fois à l'ordre du jour de l'armée, et qui s'est plu à consigner dans ses mémoires tout ce que lui avait inspiré d'estime la bravoure et le talent de l'infatigable Bugeaud.

         Dans l'hiver de 1813 à 1814, il commandait les avant-postes de l'armée sur le Liobrégat. Au moyen d'une combinaison stratégique qui lui appartient en propre, il défendit la position menacée par des forces infiniment supérieures, enleva plusieurs détachements ennemis, entre autres, un escadron tout entier de hussards noirs anglais, et soutint avec une poignée de braves le choc de 14,000 hommes qu'il repoussa plusieurs fois avec pertes.
         A la suite de cette brillante affaire, et, sur les instances du maréchal Suchet, il fut promu sur-le-champ de bataille au grade de lieutenant-colonel, avec le commandement du 14ème de ligne. Il était à Narbonne à la tète de son régiment au moment où se livrait la bataille de Toulouse.
         La première restauration, qui le nomma colonel de son régiment, l'avait envoyé tenir garnison à Orléans.

         Au retour de Napoléon en 1815, il fit acte d'adhésion, mais refusa noblement le grade de maréchal de-camp pour rester colonel jusqu'à ce qu'il eût mérité un nouvel avancement pour de nouveaux services. Arrivé à l'armée des Alpes, il se retrouva sous les ordres du maréchal Suchet, qui, ayant appris à l'apprécier en Espagne, lui confia le commandement de son avant-garde. Là il se distingua dans une suite de brillants combats. Dans la nuit du 15 juin, il enveloppe et prend un bataillon de chasseurs piémontais dans le village de Saint-Pierre d'Albigny ; le lendemain matin il met en déroute une brigade piémontaise et lui fait deux cents prisonniers ; le 23, il détruit un bataillon ennemi à Moustiers ; le 27, il défait entièrement une avant-garde autrichienne.
         La nuit suivante, il était campé à l'Hôpital sous confins en Savoie, lorsqu'il reçut en même temps le bulletin de la bataille de Waterloo et la députation chargée de lui apporter l'aigle remise au champ de mai. Au point du jour, il réunit son régiment, lui communiqua le bulletin et lui remit l'aigle en s'écriant. : " Soldats, vous jurez tous que tant qu'un soldat du 14e existera, cette position sera défendue, et que pas une main ennemie ne touchera le drapeau sacré de la patrie. Le serment fut répété avec enthousiasme. Le colonel savait que douze mille Autrichiens s'avançaient contre lui. Il était là, comme il l'a dit plus tard lui-même, aux Thermopyles ; car s'il laissait passer l'ennemi, nos troupes qui se trouvaient dans la vallée de Maurienne étaient compromises. Il se dévoua, et avec quatre petits bataillons formant en tout 1700 hommes, il défit dans la même journée deux brigades, l'une piémontaise et l'autre autrichienne, de l'armée du général Frimont. Pendant dix heures d'un combat acharné, il fit 960 prisonniers, tua 2,000 hommes â l'ennemi et dispersa le reste des douze mille qui avaient passé les Alpes. Il resta maître du champ de bataille.

         De 1815 à 1851 le colonel Bugeaud, mis en demi-solde, se retira philosophiquement sur les champs paternels. Le guerrier se fit laboureur Il apprit l'agriculture et l'enseigna tout autour de ses domaines.
         Promu au grade de maréchal de camp en 1851, les électeurs de Périgueux ne tardèrent pas à l'envoyer à la Chambre.
         Ce fut au mois de juin 1836 que l'Afrique s'ouvrit pour la première fois à son activité guerrière. II y débarqua le 6 pour y réparer nos échecs, vaincre Abd-el-Kader et conquérir sur les bords de la Tafna, sur la route d'Oran, aux environs de Tlemcen de brillants lauriers et le grade de lieutenant-général. C'est lui qui le premier parvint à faire des prisonniers aux Arabes. Cet événement eut une grande importance, car les indigènes, habitués à massacrer les Français tombés entre leurs mains, furent dès lors obligés de les respecter par crainte des représailles.
         L'année 1840 le vit gouverneur général de l'Algérie. S'il avait fallu du génie pour concevoir la première expédition d'Alger et la faire réussir à point, ainsi que le fit M. de Bourmont, il n'en fallut pas moins au général Bugeaud pour tirer notre armée et notre colonie naissante de l'état précaire où les avaient placées les divers ministères qui s'étaient succédé depuis 1830.
         Il reçut le bâton de maréchal de France le 17 juillet 1843.

         Deux ans après, il ajoutait une glorieuse page à nos annales militaires en gagnant sur les Marocains la bataille d'Isly, dont le plan a fait l'admiration de tous les stratégistes de l'Europe, et dont les résultats furent immenses pour notre conquête.
         Le maréchal Bugeaud poursuivit en Algérie l'œuvre de la guerre et de la colonisation avec une nouvelle activité. Il y a accompli de grandes choses, et la France lui devra l'avenir de cette contrée qui peut nous dédommager un peu des pertes que nous avons éprouvées depuis soixante ans. Lorsqu'il fut nommé gouverneur général, nos possessions se bornaient à quelques villes, où nos soldats captifs étaient décimés par la fièvre et par la faim. Ce qu'on appelait alors le territoire français n'était qu'un hôpital dans une prison, et le maréchal, en sept années, à force de courage et de persévérance, a conquis l'Algérie et nous a laissé un royaume plus vaste et plus soumis que les Turcs ne l'avaient jamais possédé. On écrira sans doute un jour cette histoire. Si l'historien est digne du sujet, la postérité n'aura pas assez d'éloges pour l'homme qui a su accomplir en si peu de temps un si grand ouvrage ; et quel que soit le mépris qu'inspire à nos descendants le temps où nous sommes, ils s'étonneront des injures que ce grand homme a subies.

         Cette colonie, créée par les armes du maréchal, est défendue et gardée par ses traditions, et, de jour en jour, ses vues, plus connues et mieux comprises, ont démontré que nul, au milieu de tant d'esprits intelligents qui ont pris part à notre conquête, ne possédait au même degré que lui la conscience véritable de nos intérêts africains et n'avait pénétré aussi avant dans les solutions du double problème de la direction civile et de la direction militaire.
         Le maréchal Bugeaud faisait beaucoup par lui-même : actif, infatigable il se portait de sa personne partout où il croyait non seulement sa présence nécessaire, mais encore simplement utile, et, sous ce rapport, il laissait peu à faire à ses subordonnés. La gloire qu'il avait acquise dans l'achèvement de la conquête et de la pacification de l'Algérie s'est reflétée sur les officiers qui se sont élevés sous ses ordres ; car, trop grand dans sa supériorité pour être accessible â la jalousie, il aimait â faire valoir avec empressement les services de ses lieutenants.
         Très-soigneux de la santé du soldat, l'armée d'Afrique comme nos troupes de France lui doivent des améliorations pour leur bien-être ; il a plus fait sous ce rapport qu'on n'avait essayé depuis soixante ans dans l'intérêt du soldat. Le maréchal croyait qu'on pouvait tout entreprendre à la guerre avec des soldats vigoureux et avec des soldats français surtout ; aussi toute sa sollicitude d'homme et de chef se portait vers les moyens d'entretenir l'énergie politique, et d'élever la force morale du soldat qu'il aimait d'affection.
         Avec de pareils principes, on conçoit qu'il devait conquérir la confiance de ses troupes, et en effet il en était adoré. C'est toujours par des qualifications très justes que le soldat français baptise ses chefs, et les soldats ne donnaient pas d'autre nom au maréchal Bugeaud que celui de père Bugeaud. Rien ne remplacera, au jour de la première bataille, la foi dont les animait cette tête blanchie dans les périls de la guerre, cette renommée qu'aucun revers n'avait atteinte, et ce cœur plein de tendresse pour eux.

         Le maréchal était le fils de ses oeuvres ; son éducation, à cause des malheurs des temps qui avaient pesé sur sa famille comme sur tant d'autres, avait été négligée ; il dut la compléter par lui-même. C'est peut-être à cette circonstance qu'était due l'originalité de ses idées ; mais si la forme manquait quelquefois à son expression, on remarquait toujours chez lui un sens droit des choses, un bon sens enfin trop rare en France.
         Ses qualités privées étaient au niveau de son courage et de ses talents. Il avait le coeur aussi droit que l'esprit, l'âme pleine de bonne foi et de générosité. Peu d'hommes ont fait plus d'ingrats et ont moins voulu croire à l'ingratitude, ou en ont moins tenu compte. Croirait-on que le département qu'il habitait, et dont il était le plus ardent bienfaiteur en même temps que le plus illustre citoyen, lui a préféré aux dernières élections des hommes qui n'ont que le triste honneur de compter dans cette foule ignorante qui se rue avec tant de fureur à l'assaut de l'ordre social !

         Quoi qu'on en ait dit, le maréchal Bugeaud était loin d'être accessible à la haine ; et si certains hommes, depuis 1848 surtout, s'efforçaient de le rendre odieux et le présentaient comme un homme violent, ces hommes avaient leurs raisons pour le faire ; c'est que le maréchal les connaissait bien. Il les détestait, non par rapport à lui, mais par rapport au mal qu'ils font à la France. Dans son patriotisme, il les regardait avec raison comme les seuls obstacles à ce que la France reprenne dans le monde la position qui lui appartient. Et, malgré son amour de la gloire, il songeait à quelque chose de plus grand et de plus précieux pour la France que de gagner des batailles contre l'ennemi du dehors ; il voulait empêcher les français de se déchirer entre eux. C'était le rêve de ses derniers jours : imposer la paix et cependant ne point tirer l'épée.
         " Dieu ne m'a pas jugé digne de rester ici-bas pour vous aider, " a dit le maréchal Bugeaud au président de la République. La France ne ratifiera pas cette humble et noble parole. Elle sait que, par l'énergie de son âme, par l'ascendant qu'il exerçait sur l'armée, par la confiance qu'inspiraient son caractère et ses talents, M. le maréchal Bugeaud était du petit nombre de ces hommes qui peuvent, au moment donné, servir de rempart à une société tout entière.

         La place de ce grand homme reste vide. Pour la remplir, il faut des combats et des années. Parmi nos vieux généraux acteurs illustres des guerres de l'Empire où sa jeunesse s'est glorieusement passée, aucun n'a plus sa vigueur ; parmi les jeunes, aucun n'a son expérience et son autorité. Espérons cependant en la Providence, car quelques-uns des lieutenants du maréchal l'avaient compris, et je n'en citerai pour preuve que ces paroles prononcées sur sa tombe par un des plus dignes, M. le général Bedeau :
         " La France ne saura jamais assez les causes de la confiance absolue que nous inspirait notre général en chef, les motifs de l'affection respectueuse que nous avions pour lui.
         Et plus loin :
         Cent mille soldats ont pris part sous ses ordres à la conquête de l'Algérie. Ils vivront longtemps après lui pour répéter partout et glorifier avant l'histoire le nom du chef qui savait fixer la victoire à leurs drapeaux. "


         Le maréchal Bugeaud est mort en soldat chrétien. Calme comme en un jour de bataille, le vieux guerrier a vu s'avancer d'un oeil ferme le dernier ennemi qu'il eut à combattre. II a reçu avec la foi et la simplicité d'un enfant les secours de la religion, et c'est après avoir suivi avec toute la liberté de son esprit les prières des mourants qu'il a rendu à Dieu son âme purifiée par les sacrements, spectacle auguste, dont ceux qui l'ont vu ne parlent qu'en pleurant ; consolation suprême et la seule que puissent goûter les cœurs dévoués que ce malheur public atteint plus particulièrement; grand et sublime enseignement que Dieu donne au monde en opposant à l'orgueil des pygmées du jour l'humilité sainte du véritable héros.
J. n'Es.
Membre correspondant de la Société orientale.
        


LE PENSIONNAIRE DE Mme TROUCHON
Source Gallica
ALGER ETUDIANT
N° 121, 1er avril 1931

              Telle Monsieur Séguin avec ses chèvres, Madame Trouchon n'avait, jamais eu de chance avec ses pensionnaires .Comme elle s'était fait une spécialité d'étudiante, cela n'étonnait personne, dans le quartier où de nombreuses matrones avaient tâté de l'universitaire et y avaient définitivement renoncé.
             Au marché, où elle promenait de chaque côté de ses larges fesses, deux couffins qu'elle remplissait en grande partie de papiers avant de sortir pour faire croire qu'elle faisait des achats importants, Madame Trouchon arrêtait toujours deux ou trois de ses connaissances pour leur raconter ses déboires que tout le marché de Bab-el-Oued connaissait maintenant par cœur.
             Le souvenir de son dernier pensionnaire surtout, avait le don de la mettre en fureur.
             - " Voyons, m'ame Garofalo, vous êtes pas de mon avis ? Un sacripan qui avait toutes mes gentillesses, je le, soignais comme qui dirait si c'était, mon fils ! Au début, évidemment, il était très gentil, et pis un jour va t'faire fiche ! Il a changé tout pour le tout. Sous prétexte que sa chambre elle était indépendante, il amenait tout un tas d'ecriatures, de poufïasses que j'sais pas où il allait les chercher, et y avait des jours qu'il se trompait exprès de leur donner rendez-vous en même temps, rien que pour les voir s'taper des marrons sur la figure.

             Un jour l'propriétaire y"m'a dit comme ça que si l'chahut continuait, y m'donnerait congé. Vous pensez, si j'ai bondi ! Vous nous voyez pas d'ans la rue avec mon fils, ma bru, et l'petit à cause de ce chameau là ? Foutez-moi l'camp que j'y ai dit ; toutes vos histoires c'est sur moi qu'ça retombe et j'suis pas un bouc hémisphère ! Y voulait rester encore huit jours pour chercher un aut' piaule mais j'ai été imbranlable et il a fallu qu'il décampe !"
             -- " Vous n'en prendrez plus, maintenant, de pensionnaire ? "
             - " Ah ! j'crois que si ! Vous pensez, on a cinq pièces, m'ame Garofalo, et s'cochon d'propriétaire y nous a augmentés ! Les appartements d'avant guerre, tout vieux et dégoûtants, on les paye trois fois plus cher ! J'payais 90 francs par mois et on m'a mis à 160 ! Ça fait mal au coeur de donner tout cet argent tous les trente jours que l'Bon Dieu fait, tandis qu'avec un pensionnaire j'ai encore du benef. Et ça fait déjà six mois que je suis sans personne !"
             " Tu sais, j'peux pas payer le loyer avec c'que tu gagnes, il faut trouver un pensionnaire.

             Amédée Trouchon souleva les épaules d'un air désabusé ; il avait acquis de longue date que sa mère ne lui demandait son avis que persuadée qu'il serait du sien - au cas contraire elle savait, fort bien s'en passer. Il était d'ailleurs détaché des choses d'ici-bas. Employé de commerce, il se piquait d'avoir des lettres, et faisait du grec et du latin. Il avait un culte pour Virgile et, récitait chaque matin, une Eglogue en guise de, prière.
             - " Tu pourrais peut-être, me répondre ! glapit Madame Trouchon.
             - " D'abord, fit Amédée. - dont le front olympien et où reflétait la douce sérénité, de l'intellectuel - Réfléchis, maman. Tu n'as jamais pu t'entendre avec tes pensionnaires ! "
             - " Et puisqu'on ne peut, pas faire autrement ! D'abord regarde tiens ! "
             Madame Trouchon bondit dans la cuisine et en revint en portant sur son ventre une marmite qu'elle découvrit.
             - " Regarde c'qu'on a à bouffer ! "
             Quelques vagues légumes très clairsemés nageaient dans le bouillon. Amédée approuva par une citation de son maître. : " Apparent rarî nantes in gurgite vasto ".
             - " Bon : beugla Madame Trouchon, au lieu de m'insulter en grec, tu ferais mieux de m'écouter ! et pis d'abord je te demande pas ton avis ! j'aurai Un pensionnaire ! pas un étudiant, bien sûr. (que le diable les emporte !) mais quelqu'un de bien, un p'tit jeune homme poli, comme il faut, il n'en manque pas qui cherchent des chambres ! "
             - Et Madame Trouchon rentra dans la cuisine, précédant d'un quart d'heure son derrière.

II

             Il arriva le lundi suivant. C'était, un brave gars blondasse aux yeux ronds, à l'allure timide. Il venait sans escale de Tiaret à Alger pour y faire du commerce. Son père, colon, réalisait de beaux bénéfices dans les céréales. Moyennant huit cents francs par mois, il jouissait d'une chambre, (indépendante), de l'éclairage, du blanchissage et avait droit, à une place à la table des Trouchon - où Amédée lui apprit, les amours d'Enée et de Didon et ne manquait, à aucun repas de rappeler que les Troyens mangèrent leurs tables sur l'emplacement où Mussolini mange actuellement le macaroni..

             Madame Trouchon était aux anges. Le nouveau pensionnaire mangeait peu, n'occupait sa chambre que le soir, et ne la dérangeait point pour se laver les pieds. Bref, Madame Trouchon était enchantée de son pensionnaire. Un jour, il partit pour une semaine chez lui et envoya une lettre de là-bas.
             " Tout va bien, disait-il, je mange bien, je bois bien, je dors bien et j'espère qu'il en est de même pour vous. Ici pourtant on a été embêté pendant plusieurs jours par les sauterelles qui sont tombées mercredi. Mais à la fin on a pu s'en débarrasser.
             Pour le moment, je travaille à la ferme, mais je reviens lundi prochain, j'ai pensé à vous, je vous rapporterai des oeufs. "
             Madame Trouchon en avait maigri de joie.
             - " Non. Mais ce qu'il est gentil c'petit tout de même ! répétait-elle toute la journée à Amédée. Tu t'rends compte ? Au prix où sont, les œufs aujourd'hui ? Justement ta femme est fatiguée, de donner à téter au petit. Elle va en faire une cure.
             Au marché de Bab-el-Oued ce fut une révolution quand madame Trouchon annonça la nouvelle.
             - " Eh ben ! vrai ! vous en avez de la chance ! oui là au moins, y sait vivre !"
             Madame Trouchon se rengorgeait : " Oh ! qu'est-ce que vous voulez ! pour une fois que j'tombe bien !"

             Le lundi soir, quand Blaise arriva, il fut reçu à bras ouverts par toute la famille. Madame Trouchon, l'appela mon p'tit et lui annonça que pour fêter le retour de l'enfant prodigue, elle avait fait un gâteau de semoule, aux pruneaux. Pendant le dîner, Blaise parla tout le temps de sa propriété, des fameuses sauterelles, et des ravages qu'elles avaient causés. Madame Trouchon souriait avec complaisance mais mijotait dans son jus. Enfin Blaise se frappa le front :
             " Ah ! j'oubliais ! je vous ai rapporté des oeufs, comme je vous l'avais promis ! "
             Il se leva, et, au milieu d'un murmure de remerciements confus, se dirigea vers sa chambre. Il en revint en portant un petit paquet qu'il déploya sur la table.
             - " Tenez, fit-il, regardez comme c'est curieux ! "
             Madame Trouchon avala deux pruneaux de travers :
             C'était des oeufs de sauterelles !

III

             Après une jaunisse qui dura trois semaines, Madame Trouchon convalescente se résigna à prendre son pensionnaire tel qu'il était.
             - " Au moins, soupirait-elle, celui-là, il ne m'amènera jamais de femmes ici ! "
             Amédée, qui s'était marié pour avoir une femme, approuva de l'air narquois d'un homme blessé par de nombreuses aventures : " c'est vrai, avec un outil comme ça, tu peux être tranquille ! "

             - " Non, mais tu ne vois pas ? fit Madame Trouchon hérissée, si ça devait continuer comme avec, l'autre ? Le propriétaire habite juste à l'étage au-dessous. Tu parles si ça lui cassait les pieds d'entendre toutes ces femmes se traiter d'charogne ! d'abord y m'a dit : " C't'une condition que j'vous pose, m'ame Trouchon ; ou vous m'foutez la paix une bonne fois, ou j'me plains à la police et j'vous fait déménager ! "
             C'est qu'il le ferait, ce sale type, tu sais ! y trouve qu'on paye pas assez cher comme ça, il veut faire des bureaux de notre appartement ! "
             - " Oh ! la la ! fit Amédée, en gonflant sa poitrine! qu'est-ce que je lui refile dans la figure, ce jour-là ! si ça nous arrivait tu vois.."
             Et ses petits poings se serrèrent comme des nœuds de ficelle. ...
             - "Tais-toi, mon fils, tu es fou, fit Madame Trouchon toute fière et tremblante, reste tranquille. ! Ah ! toi avec ton caractère tu m'feras tourner le sang en eau de javel !"

             La vie s'écoulait tranquillement, lorsqu'un jour, au déjeuner, Madame Trouchon remarqua que Blaise avait une belle cravate, et s'était peigné avec soin. Elle lui en fit compliment, non sans une certaine appréhension qu'elle n'osait se formuler à elle-même. Le lendemain, Blaise acheta un costume et des souliers neufs: Enfin le troisième jour il demanda à Madame Trouchon de lui préparer un bain de pieds.
             - " Ça y est ! beugla Madame Trouchon, en s'arrachant les cheveux par poignées, cette fois j'en suis sûre ! il va s'appuyer cl'la poule lui aussi !
             Néanmoins, elle prépara le bain de pieds demandé, puis alla se morfondre près, de ses fourneaux.

             Pendant les jours suivants tout fut très calme, et, madame Trouchon se reprochait déjà de s'être alarmée pour peu de chose, lorsqu'un soir vers onze heures et demi, alors que tout le monde était couché depuis, longtemps, on entendit frapper à la porte de Blaise : toc, toc, toc d'abord trois coups bien assénés, puis, comme on ne répondait pas, les coups devinrent plus forts, et à la fin, ce devaient être des coups de pied, car on entendit le bois craquer sinistrement. A la fin, des hurlements s'élevèrent clans la nuit. Une voix de femme, éraillée, vociférait : " Salaud ! Tu vas ouvrir ? Voilà une heure que je frappe ! Oui, j'sais qu't'es avec une morue ! Mais t'ouvriras quand même, t'as compris ?"
             Et les coups retombèrent en avalanche sur la porte, attirant tous les voisins sur leurs paliers.
             Madame Trouchon en chemise, un foulard noué autour de la tête apparut dans la porte entrebâillée, suivie d'Amédée qui avait saisi son revolver.

             Devant la porte de Blaise, une grue fardée et vociférante piquait, une crise de nerfs.
             - " Oui ! braillait-elle, s'adressant à Madame Trouchon, vous louez à un salaud ! vous avez compris ? un salaud ! Hier, il était encore avec moi, et c'soir y m'laisse tomber pour aller avec une roulure ! mais j'veux là voir ! j'veux y casser la gueule, et à lui aussi j'vais y donner ssssâa mère, ils ouvriront que j'vous dis ! même si j'dois casser la porte à coups d'pieds !"
             Tous les voisins s'étaient réunis sur le palier. Au premier rang le propriétaire, les bras croisés, regardait d'un air sombre Madame Trouchon effondrée.
             A la fin, la porte s'ouvrit et Blaise parut, en négligé. Sans lui laisser le temps d'ouvrir la bouche, la grue se précipita dans la chambre, cherchant sous les meubles, retenue avec peine par Blaise affolé qu'elle gratifiait de gifles et de coups de poings bien tassés.

             D'un pas justicier le propriétaire s'était avancé vers madame Trouchon :
             -- " En voilà assez ! cracha-t-il : comment !
             Ce scandale, après tant d'autres à cette heure-ci, dans ma maison, alors que ma fille est malade, que ma femme a dû aller chercher un docteur ! on n'a même pas le droit d'être malade tranquillement ! "
             Il voulut, prendre les voisins à témoin, mais la bataille dans la chambre s'était terminée, par le knock-out de Biaise, et la grue poussait un hurlement de victoire.
             - " La voilà ! tenez ! regardez-la ! "
             Elle ouvrait la porte de l'armoire dans laquelle on apercevait une femme en chemise.
             Tous les spectateurs se précipitèrent dans la chambre, et restèrent figés :
             C'était la femme du propriétaire.
             FIN
HENRI DE JOLINIERE.



Tout augmente :
Envoyé par M. Pieter Kerstens

        Le moral des Européens n'est pas au beau fixe depuis plus de deux ans ! Tous les mois on nous annonce de nouveaux soucis à venir et ce n'est pas avec ce que l'on voit à la télé que l'on a envie de rigoler.
        Curieusement, chaque situation problématique n'est argumentée que sous l'aspect du " politiquement correct " et souvent provoquée par " l'Homme Blanc " et son comportement inapproprié, sans aucunes références au passé, parce que pour la mafia politico-médiatique l'Histoire ne commence qu'en 1939…

        L'EUROPE ? CHASSE GARDEE DES YANKEES.
        Sans cesse on nous a répété que L'Europe a pu vivre " libre ", grâce aux interventions armées des Etats-Unis en 1917 et 1942. C'est un peu occulter une situation économico-financière qui, au lendemain des deux guerres mondiales, à pu largement profiter aux industriels et banquiers américains. Ceux-ci ont très massivement implanté leurs sociétés dans tous les pays d'Europe et dirigé celle-ci vers ce que nos dirigeants nous ont imposé comme une " mondialisation heureuse " dès les années 1970.

        On en voit les conséquences néfastes depuis quelques années. A la remorque des USA, les pays de l'OTAN et ceux de l'Union Economique Européenne se sont armés avec du matériel américain, dépendent en majeure partie des GAFAM pour tout le secteur informatique, subissent les inepties idéologiques et culturelles en provenance du Nouveau Monde, copient les modes vestimentaires et culinaires (Mac Do ou KFC) propres aux obèses ou encore acceptent les dogmes du multiculturel et les hérésies véhiculées par les " réseaux sociaux ".
        Comme les gouvernements européens n'ont pas de géostratégie claire, ils se retrouvent embrigadés par les utopies belliqueuses des USA envers d'autres pays de la Planète, comme cela a été le cas en Irak en 1992, puis en ex-Yougoslavie en 1999, puis en Afghanistan en 2002, à nouveau en Irak en 2003, en Lybie en 2011, en Syrie en 2012 et depuis février 2022 en Ukraine, pour combattre le Satan de Moscou…véritable obsession du vieillard de Washington.

        C'EST TOUJOURS LA FAUTE DE POUTINE !
        Moins de charbon, de gaz, et de pétrole, par une série successive de sanctions diverses et variées (la 7ème datant du 18 juillet) la Commission Européenne conduit les 27 pays membres vers un " Hara-Kiri " général pour le plus grand bonheur des Etats-Unis qui, eux, vont se remplir les poches, à notre détriment.
        Plus d'huile de tournesol, plus de moutarde (?), plus de terreau, plus de blé ou de maïs, plus de lithium, plus de cuivre, plus d'acier inox, plus d'engrais, moins de voitures, toutes les exportations de biens et de marchandises ayant été bloqués par les eurocrates de Bruxelles, ce sont alors les écolos-bobos qui devraient applaudir et crier victoire pour une décroissance des économies et moins de pollutions. Mais bizarrement, on ne les entend pas !
        Les détails et les origines du conflit entre la Russie et l'Ukraine sont passés sous silence.

        En janvier 2022, la popularité du petit saltimbanque de Kiev n'était que de 20%.
        En 3 ans, depuis sont élection, Zelenski n'a jamais su, pu ou voulu mettre en œuvre les deux impératifs sur lesquels il avait été élu : l'éradication de la corruption endémique en Ukraine et la fin des hostilités dans le Donbass, région bombardée sans relâche par Kiev depuis 8 ans !
        Ce virtuose des mises en scène médiatiques a ignoré les accords de Minsk 1 et 2, étant lui-même sous l'emprise des Etats-Unis, qui lui ont promis monts et merveilles, et d'un président américain -Joe Biden- le poussant à la guerre ouverte avec Moscou.

        Lors de l'envoi de matériels sophistiqués et de missiles performants, on constate maintenant que 2 canons Caesar sont entre les mains des Russes et que de multiples missiles Javelin, Stinger ou Milan ont été vendus sur le " Dark net " par des militaires ukrainiens corrompus.
        Il est urgent que les pays d'Europe se dégagent du piège ukrainien où aucune obligation morale ne les obligent, qu'ils invitent le clown de Kiev à plus de modération et à la réalité de la politique, que l'Allemagne et la France fassent respecter les accords de 2014 et 2015 et que tous fassent preuve de bon sens en brisant les entraves mises en place par les Yankees.
        L'intérêt national de chaque pays d'Europe doit primer sur celui des Etats-Unis dont l'hégémonie doit partout être combattue, avant qu'il ne soit trop tard.
Pieter Kerstens, 22 juillet 2022



LIVRE D'OR de 1914-1918
des BÔNOIS et ALENTOURS

Par J.C. Stella et J.P. Bartolini


                            Tous les morts de 1914-1918 enregistrés sur le Département de Bône méritaient un hommage qui nous avait été demandé et avec Jean Claude Stella nous l'avons mis en oeuvre.
             Jean Claude a effectué toutes les recherches et il continu. J'ai crée les pages nécessaires pour les villes ci-dessous et je viens de faire des mises à jour et d'ajouter Oued-Zenati, des pages qui seront complétées plus tard par les tous actes d'état civil que nous pourrons obtenir.
             Vous, Lecteurs et Amis, vous pouvez nous aider. En effet, vous verrez que quelques fiches sont agrémentées de photos, et si par hasard vous avez des photos de ces morts ou de leurs tombes, nous serions heureux de pouvoir les insérer.

             De même si vous habitez près de Nécropoles où sont enterrés nos morts et si vous avez la possibilité de vous y rendre pour photographier des tombes concernées ou des ossuaires, nous vous en serons très reconnaissant.

             Ce travail fait pour Bône, Aïn-Mokra, Bugeaud, Clauzel, Duvivier, Duzerville, Guelaat-Bou-Sba, Guelma, Helliopolis, Herbillon, Kellermann, Millesimo, Mondovi, Morris, Nechmeya, Oued-Zenati, Penthièvre, Petit et Randon, va être fait pour d'autres communes de la région de Bône.
POUR VISITER le "LIVRE D'OR des BÔNOIS de 1914-1918" et ceux des villages alentours :

    
CLIQUER sur ces adresses : Pour Bône:
http://www.livredor-bonois.net

             Le site officiel de l'Etat a été d'une très grande utilité et nous en remercions ceux qui l'entretiennent ainsi que le ministère des Anciens Combattants qui m'a octroyé la licence parce que le site est à but non lucratif et n'est lié à aucun organisme lucratif, seule la mémoire compte :

http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr
                         J.C. Stella et J.P.Bartolini.
 


NOUVELLES de LÁ-BAS
Envois divers


Villégiature à Annaba

Envoyé par Laurent
http://lestrepublicain.com/index.php/annaba/ item/9035950-les-libyens-en-masse


lestrepublicain.com - 26 Juil 2022 Annaba

Les Libyens en masse

         Une vaste campagne est menée actuellement par nos frères Libyens, qui ont opté pour la ville d’Annaba pour passer leurs vacances et parfois aller plus loin sur le territoire national.
         Leurs conseils adressés à leurs concitoyens est « Nous avons trouvé le respect et un pays magnifique ». Effectivement ils sont partout bien accueillis, car l’algérien et particulièrement les annabis sont connus pour leur sens profond de l’hospitalité.
         Ces voisins de la Libye sont venus en Algérie pour découvrir un pays riche en sites merveilleux, à l’histoire profonde et sa côte féérique.Annaba de plus offre à ses visiteurs un grand nombre d’hôtels de grand standing, dont certains appliquent des tarifs abordables, ainsi qu’une cuisine traditionnelle algérienne raffinée.

         Que cherchent les touristes ? La quiétude, le bon accueil et des gestes fraternels et c’est ce qu’ils ont trouvé chez nous. Les voitures immatriculées en Libye sont remarquées à travers les artères de la ville, ainsi que celles venues de la Tunisie, ce qui dénote une relance du tourisme dans notre région.
         Tourisme qui a été longtemps ignoré et laissé pour compte, malgré les potentialités et les paysages magnifiques de notre pays. La côte d’Annaba est d’une beauté extrême et permet aux visiteurs étrangers de jouir de son charme et de son attrait.
Ahmed Chabi           


Éradication du marché informel à Annaba

Envoyé par Hélène
http://lestrepublicain.com/index.php/annaba/item/9035967 -un-veritable-casse-tete


lestrepublicain.com - 27 Juil 2022 Annaba

Un véritable casse-tête

         « L’opération d’éradication du marché informel menée, depuis quelques jours, par les services compétents a été accueillie favorablement par la population, mais celle-ci souhaite que la lutte s’inscrive dans la durée, afin de voir les rues, les trottoirs libérés une fois pour toutes », a déclaré un commerçant exerçant dans le centre-ville.
         Et de poursuivre : « Cette campagne nécessite de gros moyens humains et matériels pour pouvoir éradiquer ce phénomène. Les marchands ambulants squattant, de jour comme de nuit, certaines rues et chaussées, ont été délogés, manu militari, par les policiers, alors que d’autres continuent d’occuper la voie publique située dans le centre-ville ».

         Sur un autre volet, un psychologue qui a trouvé que cette opération allait régler sans aucun doute le problème de l’anarchie régnant au cœur de la ville, estime que les responsables doivent prendre en charge le problème de ces jeunes pour leur éviter de commettre l’irréparable.
         « Un jeune chômeur sans argent de poche sera contraint de voler ou d’agresser pour pouvoir subvenir à ses besoins. Les portes du banditisme lui seront ainsi ouvertes pour accomplir son forfait et assouvir ses désirs », a-t-il dit. Depuis quelques mois, les rues et artères de la ville des jujubes laissent à désirer du fait de la vente des fruits et légumes effectué au su et au vu de tout le monde par les vendeurs ambulants.
         Heureusement que les agents de l’ordre sont là sinon la situation serait pire. « Nous souhaitons que ces jeunes puissent vendre leurs marchandises au niveau des places publiques agréées par les services de la commune. Car ce n’est pas normal que des rues situées en plein centre-ville soient transformées en marché de fruits et légumes », nous a dit un groupe de citoyens qui estime que l’opération d’éradication du marché informel soit menée sans merci.
Nejmedine Zéroug           


Sédentarisation des nomades en Algérie

Envoyé par Grégoire
https://elwatan-dz.com/sedentarisation-des-nomades- en-algerie-ancrage-culturel-dans-lhabitat-rural-a-bou-saada

tsa-algerie.com - Par: Yousra Salem 01/03/2022

Ancrage culturel dans l’habitat rural à Bou Saâda

          La maison a été réalisée en respect de la mémoire de la population agropastorale, qui tourne autour de la «kheima» (tente)
          La conception des logements en Algérie était toujours une véritable énigme, non seulement sur le plan architectural, mais surtout vis-à-vis de l’ancrage culturel, sociétal, voire environnemental, de la population.

          En réponse à cette problématique, l’architecte et activiste dans le domaine de l’environnement à l’échelle nationale et internationale, Abderrazak Messaad, a initié bénévolement un nouveau projet, dont l’objectif est la sédentarisation des nomades de Bou Saâda, dans la wilaya de M’sila. Un projet qui a été déjà lancé, il y a des dizaines d’années, soit à l’époque coloniale ou par les autorités algériennes après l’indépendance.

          Mais la question qui se pose est la suivante : ces pouvoirs ont-ils réellement réussi ? Hélas, les anciens nomades ont déserté ces habitations en béton, qui ne répondaient pas à leur mode de vie, en l’absence de l’aspect spatial et culturel de cette région. «Les idées pour un architecte sont des solutions à une problématique qui touche la société, précisément dans le domaine de l’habitat. Ici, on parle de l’habitat rural des ex-nomades.

          Cette frange de la société est installée dans des régions excentrées, où l’accessibilité est très difficile, même pour transporter les matériaux de construction», a déclaré Abderrazak Messaad, en marge de sa conférence animée dans le cadre du salon national Builtec organisé du 20 au 23 février à Constantine.

           Et de poursuivre que «la problématique est que ces gens n’étaient pas suffisamment pris en charge dans le domaine de l’habitat. Il faut dire qu’à la veille de l’indépendance, la société agropastorale représentait la majorité de la population algérienne. Donc, les solutions adoptées pour cette frange de la population ne sont pas adaptées à leur culture».

          Une tentative à haut risque
          Mais quel genre de solutions apporter pour convaincre cette frange de la population à sédentariser ? En réponse à cette question, l’architecte estime qu’elle est générale et devrait se poser sur le plan typologique de l’habitat actuel de manière globale en Algérie, où les constructeurs n’ont pas pris en considération la dimension culturelle et sociospatiale de cette population. Pour lui, il faut se demander quels sont l’origine et l’ancrage des constructions actuelles ? Mais pour les nomades de Bou Saâda, la question à poser sur les solutions envisagées devrait être «très pointue», selon le conférencier.

          En se basant sur les propos de l’architecte Abderrezak Messaâd, qui est également secrétaire général de la Fédération nationale de la protection de l’environnement et président d’une association écologique locale à Bou Saâda, la conception des logements réalisés au préalable n’a été fondée sur aucune étude anthropologique et socioculturelle sur le peuple algérien.

          Une autre manière qui a procédé à la déculturation du peuple, qui a ses particularités et ses habitudes. Vu leur mode de vie existant depuis des siècles caractérisé par le déplacement chaque saison, il est très difficile de convaincre les nomades à se sédentariser en un seul endroit durant toute l’année.
          On se retrouve en train de tourner toujours au tour de l’ancrage culturel. «D’abord, moi je suis de la région dont on parle qui est Ouled Naïl, à Bou Saâda. Selon les statistiques publiées, 60% des logements ruraux réalisés au profit de ces gens sont vides. Nous avons compté sur 100 maisons une soixantaine abandonnées ou exploitées comme écuries.
          Donc la question est là : pourquoi elles sont vides ?», a-t-il souligné, indiquant que les besoins socio-économiques n’ont pas été pris en charge lors de la construction. «Actuellement, il y a des études et des articles scientifiques qui sont publiés ou en cours de publication. Pour revenir aux nomades, il faut qu’il y ait une étude morphologique de cette catégorie de la population. Les nomades ou les ex-nomades ne sont pas des constructeurs. Donc, il faut faire très attention en leur réalisant des maisons.

          C’est un groupe de personnes qui a ses réflexes. Un travail d’architecte doit être un tout, apportant une solution et prenant en compte le côté social, culturel et le mode de consommation de l’espace par une famille. C’est à partir de cet ensemble d’éléments que l’architecte doit commencer à faire son plan», a-t-il insisté. C’est la raison pour laquelle un groupe de bénévoles chapeauté par Abderrazak Messaad a lancé quatre expériences dans la région, en se focalisant sur plusieurs approches disciplinaires qui étudient tous les aspects du mode de vie des concernés.
          Les habitations ont été réalisées par rapport à la mémoire de la population agropastorale, qui tourne autour de la «kheima» (tente). D’après les indices préliminaires, affirme notre interlocuteur, il y aura de très bons résultats. «Surtout que nous avons déjà lancé des projets similaires auparavant. Nous avons corrigé ce qui n’allait pas pour le reprendre à nouveau», a-t-il dit.

          Une «kheima» en béton
          Quand on parle d’un nomade, instantanément l’image des gens qu’on ne peut géolocaliser nous traverse l’esprit, mais cette règle en réalité n’est plus courante. Abderrazak Messaad rappelle les faits historiques de la colonisation qui a forcé les nomades à se sédentariser. «Même après l’indépendance, les gouvernements avaient aussi incité les gens à se sédentariser à travers les programmes des villages socialistes et les logements ruraux et ainsi de suite.

          Le nomade n’avait pas d’adresse, mais aujourd’hui, en réalité il a une adresse. Il y a une mutation sociale, particulièrement avec l’influence des changements climatiques, où le travail agropastoral est devenu de plus en plus dur et de plus en plus exclusif à cette frange de population », a-t-il ajouté, évoquant la particularité de cette société enfermée sur elle-même et difficile à pénétrer, où il faut avoir les moyens pour lire leurs besoins et les décortiquer. Donc, précise l’architecte, l’atterrissage des nomades était forcé et on loin d’être un choix.
          Agissant avec délicatesse et sans finalités économiques, les initiateurs de ce nouveau projet ont ouvert un débat avec quelques familles. La dernière proposition a été faite à une famille de 9 membres d’ex-nomades, dans la commune de Djebel Messaad, une région qui s’appelle R’zouzi. Une région complètement excentrée, en l’absence de routes et des moindres commodités. La réalisation de la maison d’environ 85 m² était très rationnelle, avec la prise en considération du côté spatial.
          C’est-à-dire, l’habitation a une architecture assez spécifique, où on voit clairement des voûtes ou des coupoles en jonction. Cette combinaison offre un genre d’open space réalisé avec des matériaux modernes en 20 jours seulement. «On aurait pu la réaliser en moins de 20 jours, si ce n’est l’absence d’accès et les difficultés de transporter les matériaux à la montagne», a commenté l’architecte. Cette maison conçue comme une kheima ancestrale sera exploitée en sa totalité. Il n’y aura pas de chambres pour séparer les enfants.

          Chaque espace sera utilisé pour plusieurs activités. De différentes terminologies sont utilisées pour chaque coin, à l’instar de «khafa». Ce dernier est un enclos exploité comme une chambre, mais aussi pour d’autres activités durant la journée. Chaque angle est multifonctionnel, où le cloisonnement n’a pas de place.
          C’est une autre vision de l’espace. «L’Algérien, pas uniquement le nomade, a besoin à ce que son logement soit revisité par rapport à son ancrage culturel. Et l’habitat pour nous reste toujours une véritable problématique dans l’utilisation.

          Dans une maison, on a tendance à faire pour chacun une chambre, contrairement à ces gens qui vivent ensemble. Le sens de la communication chez eux est plus développé, ce qui a d’ailleurs dicté notre conception. Contrairement à nous aujourd’hui, on cloisonne. Pourquoi on fait une chambre à clef pour un enfant ?», dira M. Messaad.
          À notre question, si les murs disloquent les familles algériennes, il répond : «A mon sens oui, il faut ouvrir surtout pour les enfants et développer la communication entre les membres de la famille.» Le projet vient d’être achevé, avec l’alimentation en eau potable à partir d’une source naturelle et de l’électricité par l’énergie solaire.

          Les autorités vont-elles adopter ce projet, comme un exemple pour mettre point au désastre architectural d’aujourd’hui ?
Yousra Salem             


Concentré de tomate

Envoyé par Sabine
https://www.tsa-algerie.com/concentre-de-tomate- comment-lalgerie-est-parvenue-a-lautosuffisance/

tsa-algerie.com - par : Djamel Belaid 27 Juil. 2022

Comment l’Algérie est parvenue à l’autosuffisance

           Dans la cuisine algérienne, l’utilisation de la tomate est fréquente. Que ce soit avec le couscous, la hrira ou autres plats traditionnels les tomates sont partout. Le plus souvent il s’agit de concentré de tomate dont le pays est aujourd’hui autosuffisant. Mais à quel prix ?

           Une conserverie ouverte 24h sur 24

           Depuis quelques jours à la conserverie Ben Amor de Fedjoudj (Guelma), le ballet des camions est incessant. Des camions, il y en a de toutes les marques : du Berlier poussif au camion MAN à deux essieux ou celui tractant une remorque à large plateau. Tous chargés de tomates avec des ridelles surélevées pour augmenter la charge.

           Dans la cour, une fois les camions passés sur le pont bascule, ils doivent manœuvrer de façon à pouvoir vider leur chargement dans la fosse de réception. La manœuvre n’est pas aisée et les chauffeurs doivent tenir compte de l’exiguïté de la cour. Une exiguïté qui accentue les empilements sur 4 niveaux de fûts métalliques de 200 litres remplis de concentré de tomate.

           Dans un concert de bruits de moteur, de klaxons et d’avertisseurs de recul deux agents règlent le ballet où se mêlent quelques tracteurs et un Clark chargés de fûts. La conserverie fonctionne 24 heures sur 24.

           Récolte, progression de la mécanisation

           En Algérie, la production de tomate de conserve est en pleine expansion. Ces dernières années, les subventions publiques et le dynamisme des agriculteurs conjugué à celui des transformateurs ont changé la donne.

           En janvier 2019, le wali d’El Tarf annonçait que l’importation du concentré de tomate était dorénavant taxée à 200%. Une mesure envisagée depuis 2018 par les services agricoles et qui a rendu confiance aux producteurs.

           En Algérie, seul le manque d’eau, d’engins de repiquage ou de récolte freine encore l’expansion des surfaces. Nombreux sont les transformateurs qui ont augmenté leurs capacités à l’image de l’unité d’Ouled Farès. Au début de l’année, son responsable, Djilali Ayad Ahmed, confiait à l’agence APS des capacités de transformation devant passer de 500 tonnes à 2 000 tonnes.
           Aujourd’hui, les agriculteurs algériens utilisent des variétés de tomate à haut rendement. Les plants sont élevés en serre, repiqués et irrigués par goutte à goutte. Le ministère de l’Agriculture et du développement rural indique que les rendements qui étaient de 500 quintaux/ha en 2013 sont passés à 800 quintaux/ha en 2021, avec des pointes de 1.300 quintaux/ha à Ain Defla.
           Les variétés à date de maturité différée devraient permettre d’échelonner les arrivages dans les conserveries. Mais elles tardent à être connues, en août, il suffit d’un coup de chaleur pour que la maturation arrive d’un seul coup.
           La mécanisation de la récolte progresse. La conserverie Benamor à Guelma dispose de 11 engins de récolte. A El Tarf, les frères Kraimia, spécialisés dans la tomate, disposent même de leur propre engin.

           Des tomates qui coutent cher à l’Etat

           Le kilo de tomate est vendu aux conserveries au prix de 12 DA, à cela s’ajoute une prime de 4 DA par kilo de tomate livré à la conserverie. Elle même perçoit 1,50 DA/kg transformé. Des primes attribuées par l’Etat et qui contribuent largement au succès de la filière.
           Ces primes sont parfois versées en retard par l’Onilev, ce qui a amené le ministère à adopter un nouveau système numérisé. Il permet le versement des primes directement sur le compte des agriculteurs sans passer, comme auparavant, par les transformateurs.

           L’agro-économiste Ali Daoudi de l’ENSA note que cette politique de contrat entre agriculteurs et conserveries est essentiellement portée par l’Etat : « L’importante adhésion des entreprises et des agriculteurs s’explique avant tout pas les incitations de la politique publique, notamment les différentes primes. » Chaque kilo de tomate coûte à l’Etat 5,5 DA, soit 36% du prix d’achat.

           En 2015, avec plus de 0,6 million de tonnes produites, le montant des primes a atteint 3,6 milliards de DA et 12,6 milliards DA en 2021 avec 2,3 millions de tonnes. Pour cet économiste, la subvention de la filière tomate a atteint ses objectifs et ses limites en Algérie. Aussi suggère-t-il, « le passage à une deuxième génération de mécanismes d’incitation » permettant l’amélioration des performances de la filière algérienne de la tomate.
           Nombreux sont cependant les agriculteurs qui se plaignent de la hausse de leurs charges de culture et réclament une augmentation du niveau des primes.

           Des projets d’exportation de concentré de tomate

           Fin juillet, le ministre de l’Agriculture et du développement rural, Abdelhafid Henni, se félicitait dans la presse, de l’autosuffisance en concentré de tomate et indiquait qu’un programme d’exportation était à l’étude.
           L’Algérie a arrêté de les importer depuis 2020, permettant une économie en devise qui dépasse les 40 millions de dollars par an, expliquait en novembre à l’agence officielle, le sous-directeur du développement des filières végétales au ministère, Amokrane Hadj Said

           Des exportations qui devraient tenir compte des subventions publiques mais aussi des besoins croissants en eau de la culture.
           Les producteurs font parfois face à un manque d’eau. Début juin, des agriculteurs de Bouchegouf (Guelma) ont manifesté durant deux jours leur mécontentement. L’Agence nationale des barrages et transferts (ANBT) a dû procéder à des lâchers supplémentaires d’eau qui était initialement destinée à l’alimentation en eau potable de la région.

           Volonté d’export, niveau des primes et fourniture en eau potable, une équation à plusieurs paramètres.
Djamel Belaid             


Un algérien auteur d’une invention extraordinaire

Envoyé par Edith
https://elwatan-dz.com/un-algerien-auteur-dune-invention-extraordinaire- dans-le-domaine-de-lindustrie-automobile-un-moteur-made-in-algeria-oui-pourquoi-pas

  - Par El Watan - Par: Ramdane Kebbabi 07/06/2022

Dans le domaine de l’industrie automobile : Un moteur made in Algeria ? Oui, pourquoi pas !

           L’Algérien peut faire des miracles : il suffit de croire en lui. Inventeur et mécanicien surdoué, Yacine Benziada (45 ans), vit mal le fait que l’Algérie ne soit pas un fabricant de véhicules. Très au fait des secrets de l’industrie automobile, Yacine est l’auteur d’une invention inédite. Révolutionnaire.

           Après plus de 20 ans de recherches et d’expérience dans le domaine de la mécanique, il parvient à mettre sur pied un système qui devra donner naissance à un nouveau moteur automobile. Il s’agit, en effet, d’«un système hydromécanique pour moteur à combustion interne sans arbre à cames».

           Le prototype de ce mécanisme jamais fabriqué jusque-là a déjà été monté sur un moteur diesel Peugeot Partner. L’expérience a été une réussite totale et va bientôt être rééditée sur une voiture Mercedes, affirme Yacine qui a pris attache avec des chercheurs et des organismes de renommée internationale pour faire breveter son invention.

           Dès la diffusion de la nouvelle sur Youtube, ce génie a été contacté par plusieurs constructeurs automobiles dont BMW, Citroën et Peugeot pour leur en dire plus. Mais il se montre très vigilant, préférant d’abord tout breveter et que l’Algérie soit la première à en profiter.

           Père de trois enfants, ce natif de Jijel a tout fait avec ses propres moyens dans son atelier à l’est de la banlieue d’Alger. «Ça m’a pris énormément de temps et d’argent. J’ai acheté un tour, une fraiseuse et d’autres équipements. Car sans ces moyens, rien n’est possible», confia-t-il modestement alors qu’il s’apprêtait à démonter un moteur Nissan 4X4.

           Un moteur sans arbre à cames !

           Mais en quoi son invention est-elle extraordinaire ? En fin connaisseur de la mécanique, Yacine y répond avec précision : «Avec le nouveau système, les soupapes ne sont pas actionnées par l’arbre à cames, mais par une pompe hydromécanique que j’ai moi-même fabriquée. Ainsi, le vilebrequin sera plus libre et le moteur beaucoup plus puissant.

           En plus, il consomme nettement moins d’huile par rapport au moteur à arbre à cames », précise-t-il. Autres avantages, le nouveau moteur est très facile à fabriquer, dégage moins de bruit et n’admet aucune huile en haut de la culasse.

           L’importance du nouveau système réside aussi dans le fait qu’il permet de se débarrasser de plusieurs pièces qu’on trouve dans le moteur classique. «En plus de l’arbre à cames et ses accessoires comme les pastilles ou les doigts de culbuteur, le nouveau moteur n’aura pas de chaîne de distribution, de tendeur, de pignons et de joints spi. Il sera donc plus léger en termes de poids et dans certains moteurs comme celui de la Polo, la fausse culasse est à supprimer aussi. Avec le nouveau mécanisme, la culasse aura une autre forme plus simple que celle qu’on connaît actuellement», détaille notre interlocuteur.

           A l’entendre parler, on comprend que Yacine n’est ni un vantard en quête d’un bon auditoire ni un aventurier en mal de réputation. Exposée à des ingénieurs et autres génies de la mécanique, son exploit a impressionné plus d’un. K. Mouloud est un doctorant et ami de longue date de Yacine. Il l’a accompagné dans toutes les démarches en vue de breveter son invention. « Ce qu’il a entrepris doit être pris au sérieux par les plus hautes autorités du pays. Ce n’est pas de la rigolade.

           Son invention pourrait permettre à l’Algérie de se lancer aisément dans la production de véhicules. Et Dieu sait que nous en avons les moyens. L’Algérie dispose de grandes usines de montage de véhicules à Tiaret, Rouiba et Constantine. N’oublions pas que dans les années 80, la SNVI produisit des camions avec plus de 70% d’intégration. Maintenant que cette usine dispose de tours numériques, de fonderie et de fraiseuses haut de gamme on pourra y fabriquer le moteur qu’on veut. Il suffit de tendre l’oreille et d’accompagner des gens comme Yacine », préconise-t-il.

           Et à Yacine de reprendre la parole : «Dans le domaine de l’industrie automobile, le plus important c’est le moteur. La coque et la carrosserie, on en a produit des dizaines de modèles ces dernières années, mais les moteurs ne sont pas une mince affaire. Les Allemands l’ont quand même fait en 1886.

           Et nous, plus d’un siècle plus tard, on continue à importer des véhicules. Il y a quelques années, on achetait de l’étranger plus de 400 000 voitures par an. Ce n’est pas normal !

           Qu’est-ce qu’ils ont les Allemands ou les Japonais de plus par rapport à nous. La seule différence c’est que nous, nous n’accordons aucune valeur à nos compétences, mais eux, ils les mettent au-dessus de leur tête.»

           Pour un pays qui place le développement de l’industrie automobile au centre des préoccupations, le rôle et l’apport de génies comme Yacine n’y sera que bénéfique.

           En mars dernier, le ministre de l’Industrie, Ahmed Zeghdar, a souligné que «l’Algérie veut une industrie automobile opérante et véritable.». «Nous sommes en contact avec de grandes entreprises pour mettre en place une industrie effective», précisant que ce dossier a «une dimension stratégique pour les opérateurs économiques, en vue d’instaurer une industrie véritable qui parviendra à exporter ».

           Des inventions à breveter

           Le ministère va-t-il tendre la main à notre inventeur dont le plus grand souci est l’obtention du brevet d’invention ? «Nous avons écrit même à Belkacem Hebba, l’imminent chercheur algérien établi aux USA. Nous avons envoyé aussi un rapport consistant au PCT de Genève (Suisse), un organisme de référence en matière de brevetage. Leur réponse n’a laissé aucun doute sur le bien fondé de mon invention. Le dossier a été fait avec l’aide d’un ancien directeur de l’Inapi, l’institut Algérien de la propriété industrielle.

           Le PCT nous a émis quelques réserves concernant le schéma de l’invention. En vérité, je ne voulais pas tout dévoiler. J’étais très méfiant. Et même le rédacteur du brevet m’a déconseillé de le faire. On m’a aussi envoyé des liens des deux inventeurs qui se sont penchés sur la même idée que moi. L’un est chinois, l’autre est un anglais, mais ce qu’ils ont fait est irréalisable.

           En plus, ils ont travaillé sur un moteur essence alors que mon invention porte sur le moteur diesel. Chose qui n’a jamais été faite par le passé », explique Yacine, sûr de lui. Très informé des nouveautés de l’industrie automobile, notre hôte a la tête bourrée d’idées innovantes. Il nous parle longuement des moteurs HDI, DCI, VTI, VTT, VTEC, en expliquant les spécificités et le mode de fonctionnement de chacun. En 2019, il était sur le point de signer une convention avec une haute institution de l’Etat (il préfère ne pas dévoiler son nom, ndlr) afin de doter plus de 300 engins d’un ralentisseur unique en son genre (lire l’encadré).

           Mais l’avènement du hirak et la pandémie de la Covid-19 ont tout chamboulé. Avant de penser à la suppression de l’arbre à cames, Yacine a étudié longuement tout ce qui avait été fait auparavant dans ce domaine à travers le monde. « Citroën est le premier fabricant à avoir tenté de supprimer l’arbre à cames du moteur.

           C’était dans les années 1960. Ils n’ont pas réussi. Chrysler et BMW aussi ont tenté l’expérience afin de rendre le moteur plus puissant. Elles ont investi des sommes colossales sans pour autant obtenir de bons résultats.

           Une autre compagnie a remplacé l’arbre à cames par des bobines générant du champ magnétique. Une autre l’a fait par l’introduction d’un compresseur qui fonctionne avec la pression d’air en s’appuyant sur une mémoire qui commande les électrovannes des soupapes.

           Le moteur a été mis en marche, mais il n’a jamais été industrialisé. Son défaut réside dans le fait qu’il coûte excessivement cher et que certaines de ses pièces comme les joints spi ne résistent pas à la chaleur sur les longues distances. Toutes ces expériences ont été faites sur le moteur essence.

           Pour le diesel, personne n’a essayé car on pense qu’il est impossible», dit-il. Aujourd’hui, Yacine se trouve comme désorienté. S’il a tardé à refaire le rapport de brevetage, c’est d’abord par manque de moyens. Mais pas seulement. Sa crainte de voir son invention atterrir entre les mains de personnes malintentionnées le hante énormément.

           Pour éviter un tel scénario, il en appelle aux industriels et aux plus hautes autorités du pays pour que son rêve devienne réalité. Le rêve de voir des véhicules à moteur sans arbre à cames sillonner les routes et les villes des quatre coins d’Algérie et du monde aussi.

           Des voitures moins chères qui nous feront oublier les années de gabegie et les usines de gonflement de pneus des Tahkout et consorts.
Ramdane Kebbabi                 



De M. Pierre Jarrige
Chers Amis
Voici les derniers Diaporamas sur les Aéronefs d'Algérie. A vous de les faire connaître.
    PDF 160A                                                  PDF 161
    PDF 161A                                                  PDF 162
    PDF 163                                                  PDF 163A
Pierre Jarrige
Site Web:http://www.aviation-algerie.com/
Mon adresse : jarrige31@orange.fr



Définition du mot : ARGENT
Envoyé par Louis
L'ARGENT a besoin de plusieurs mots pour se faire comprendre....

    À l'école, il se fait appeler " *frais*"
     En banque : *prêt*
     En bourse: *devises*
     Au tribunal : *amende*
     Aux impôts : *taxes*
     À l'église : *denier*
     Au restaurant : *addition*
     Dans le mariage : *dot*
     Dans l'immobilier : *loyer*
     Chez l’ouvrier : *salaire*
     Chez le fonctionnaire : *appointements*
     Chez le chômeur : *allocation*
     Chez le retraité : *pension*
     Chez l'avocat : *honoraire*
     Chez le député : *émoluments*
     Chez le kidnappeur: *rançon*
     Chez le créancier : *dette*
     Chez une victime: *indemnisation*
     Chez les prostituées la *passe*
     Dans le testament : *héritage*
     Chez le voleur : *butin*

     En politique : *pot-de-vin*



Si vous avez des documents ou photos à partager,
n'hésitez-pas à nous les envoyer. D'avance, Merci.

                 EN CLIQUANT. ===> ICI

Notre liberté de penser, de diffuser et d’informer est grandement menacée, et c’est pourquoi je suis obligé de suivre l’exemple de nombre de Webmasters Amis et de diffuser ce petit paragraphe sur mes envois.
« La liberté d’information (FOI) ... est inhérente au droit fondamental à la liberté d’expression, tel qu’il est reconnu par la Résolution 59 de l’Assemblée générale des Nations Unies adoptée en 1946, ainsi que par les Articles 19 et 30 de la Déclaration universelle des droits de l'homme (1948), qui déclarent que le droit fondamental à la liberté d’expression englobe la liberté de « chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit ».
Numéro Précédent RETOUR Numéro Suivant