N° 224
Février

https://piednoir.fr
    carte de M. Bartolini J.P.
     Les Bords de la SEYBOUSE à HIPPONE
1er Février 2022
jean-pierre.bartolini@wanadoo.fr
https://www.seybouse.info/
Création de M. Bonemaint
LA SEYBOUSE
La petite Gazette de BÔNE la COQUETTE
Le site des Bônois en particulier et des Pieds-Noirs en Général
l'histoire de ce journal racontée par Louis ARNAUD
se trouve dans la page: La Seybouse,

Écusson de Bône généreusement offert au site de Bône par M. Bonemaint
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EDITO

LE CIRQUE

        Ce mois de janvier sera passé comme une lettre à la poste pour moi, et nous voilà déjà en février ! Fini les galettes de l'Épiphanie avec le cidre et les " fèves ". Le 2 février, les crêpes de la Chandeleur avec encore du cidre ! Puis ce sera la Saint-Valentin et son pétillant pour deux. Tout cela clôturera les fêtes d'hiver.

         Même si l'actualité des médias, faux-cul, demeure centrée par " l'épidémie de coronavirus " et l'incapacité française à vouloir vraiment soigner les malades, dont la très grosse majorité sont des vaccinés. Silence sur les conséquences des vaccins sur ces personnes. L'avenir fera peut-être éclater des vérités.

         De l'avis de la communauté scientifique internationale, dans les prochaines semaines, " la pandémie " devrait ralentir, même s'il convient d'être prudent.

         Néanmoins, cette nouvelle pourrait permettre, enfin, que ce sujet entre dans les débats de l'élection présidentielle. Et que ce sujet de santé ne soit pas instrumentalisé à des fins idéologiques, politiques ou dictatoriaux pour priver la liberté d'expression ou la liberté tout-court et en jetant l'opprobre sur tel ou tel.

         Soigner tous les citoyens, sans aucune exception, c'est le serment d'Hippocrate. Ne plus être " emmerdé " par un président et ses sbires, c'est le vœu du peuple. Si l'on prive de soins les non-vaccinés, il faudra aussi priver de soins, les alcooliques, les fumeurs, les drogués, les bandits voleurs et assassins, les hommes politiques corrompus qui ont fait le serment d'hypocrite, etc…

         Quoi qu'il en soit, les citoyens vont se révolter, ils ne laisseront pas nos libertés s'envoler plus qu'elles s'en sont déjà allées, l'histoire des révolutions est là pour nous le rappeler. Englués dans leurs idéologie, les gens du pouvoir sont les seuls à ne pas sentir la grogne monter chaque jour, mais ils continuent leur cirque.

         Bientôt cela fera 60 ans que notre exode a commencé. A quelques semaines d'une élection importante et pour avoir les voix des aveugles, l'enfant président a convoqué des associations de Pieds-noirs qui ne représentent qu'eux même (c'est à dire une poignée), mais pas l'ensemble de nos communautés, afin de leur donner des miettes et des os à ronger ou des fèves. Le cirque habituel avant les élections…

         A l'occasion de ce 60ème anniversaire, continuons à faire connaître notre histoire et notre mémoire en menant le combat pour la vérité et la justice.

         Il y aurait encore beaucoup de choses à dire mais je suis sur que d'autres vont se manifester.


Jean Pierre Bartolini          
        Diobône,         
         A tchao.





Les Voeux ne sont pas encore terminés, voici ceux envoyés par M. P. Lorquin et M. Brua











Chronique du Bastion de France.
Et Si la Cuisine du Bastion était Contée !

        Dites-moi ? ! Frères, du Bastion de France… N'avons-nous rien oublié ! ?

        Longtemps, on a parlé d'Ali aux pieds de plomb et de Tchitchotte le magnifique... Parfois, d'un Prince - Corail de son état - quelque peu négligé au gré d'un Bafoungne* volontiers chicaneur... Souvent, de Marie du Carmel et de Cyprien son compère... Mais aussi - des Rois et personnalités !

        La liste est bien longue et si rien ne semble manquer, tout ou presque a été évoqué. Enfin… mais, disons-le franchement, c'est ce qu'il me semblait !

        Et puis et puis...

        En ces jours de fêtes de fin d'année sur cette terre d'exil, alors que sur les tables défilaient raides et fiers sous mon nez, Champagne et Foie gras encadrés par des mets à souhait pomponnés, il me vint tout à coup une idée que j'avoue humblement - un peu mieux relevée :
Et si la Cuisine du Bastion était contée !


        Très honnêtement aujourd'hui, s'il m'arrive parfois de concéder que dans les Royaumes de France et de Navarre associés - Ô combien ! - les choses servies flattent le palais, je ne puis cependant - je le vous jure ! - m'empêcher de penser et repenser, au brave homme courroucé qui un jour sous nos cieux, harangua vertement toute une assemblée médusée, qui, bien que repue cette fois-là, scandaleusement avait dédaigné - les quelques fils de pâtes par lui tendrement mijotées.

        Alors, rouge de colère devant ce sacrilège et se croyant brimé, il cria offusqué à qui voulait bien l'entendre, une espèce de morale que sûrement vous comprendrez :
        " Donnez-moi - hurlait-il ! - des Cochons bien grassouillets et parole d'honneur je vous ferai sur l'heure, des Macaroni grassement préparés ! Si c'est ça que vous voulez ! ? "

        Il tenait le saint-homme à dénoncer ce passe-passe, qui mélange le tout et maquille la déesse, en parlant bien fort et mettre le paquet, pour enfin sortir quoi du saladier ! ? Un quelque chose qui mouille la bouche, flatte le nez, plaît à l'œil, mais... Jamais au gousset !

        Ainsi pensait-il alors, Monsieur Antoine PÊPE + - mon oncle regretté.

        Cette évocation chers Frères du Bastion, pour me permettre d'affirmer que chez nous, point besoin ils n'étaient de couverts dorés, pour donner à nos mets cette saveur raffinée : c'était une cuisine des plus enchantée d'où, je ne sais par quel miracle s'exhalaient dans l'azur du ciel, les plus subtils et célestes parfums de la Méditerranée.

        Et puis et puis... distraitement, une huître à la main et chemin faisant, je rencontre par hasard le regard de Louise +, ma chère Maman, qui, d'emblée me conte délicieusement, la belle histoire d'un pauvre Chou tout vert de peur, autrefois, dans une cocotte longuement étouffé, en compagnie d'un sauvage cochon tout en saucisses transformé ! … Et puis, sans interlude, d'autres récits lumineux où, il était question d'anguilles du lac Mellah fraîches et dodues à souhait, convolant en justes noces au spaghetti fluet, au cours d'un banquet de Noël dont l'image éternelle, attirerait sans conteste bien des renards par l'odeur alléchée !...

        Et puis et puis... vinrent alors les cancans, les ragots et autres racontars !

        Depuis longtemps déjà et par tout le monde, Spaghetti se faisait de trop remarquer. Ses liaisons ! ? Moi, je les connaissais et je dirais même, que je les approuvais - au grand Dieu n'en déplaise ! Ainsi, du côté de la Presqu'île, souvent, on l'a vu rôder en compagnie d'encornets et de très mignonnes petites seiches, sous l'œil bien attendri d'une grosse tomate mère macrelle, à l'ombre parfumée d'un malicieux brin de basilic...

        Et puis et puis...vers les jardins, Spaghetti traînait d'aubergine en courgette, sans pour autant dédaigner la ronde pomme de terre et les petits pois frais... Savez-vous peut-être ? Que Spaghetti avait - mon Dieu ! Qu'il n'était pas bête - un fol amour pour le haricot au pâle visage, avec qui de plaisir il s'éclatait en faisant pâlir de rage, un certain cousin - Toulousain d'origine ! - qui, pour réussir, s'était bassement prostitué - au confit d'un volatile très adipeux ! ?

        Et puis et puis... soyons justes et pas mauvaise langue... Mais, reconnaissons tout de même, que, si volage fut le Général Spaghetti, que dire alors vaillant Capitaine, de ce mélange scandaleusement délicieux que parfois tu officiais ! ? Dans tes sermons, on pouvait voir des chiens de la mer, qui sans complexe côtoyaient un Saint du nom de Pierre, au milieu d'un divin cortège, bien escorté par un congre ténébreux et de piquantes rascasses, qui, jamais ne manquaient au passage, de lorgner les fringantes dorades, sans négliger pour autant la douce girelle, qui, prudente ce jour-là, se frayait un chemin à travers la branche de thym et la feuille de laurier, évitant ce faisant la pince d'un crabe tout rouge de timidité, lequel, semble-t-il, faisait mine de rêver.

        Quelle Bouillabaisse ! Mes chers amis… Mille pardons ! J'aurais dû dire dans notre beau langage : quelle Acqua-batse !

        Alors mes amis ! Pourquoi ? Trouver toujours à redire, lorsque vermicelle s'autorise un bain de lait bien sucré et puis lever les bras au ciel s'il s'octroie d'autorité quelques raisins ridés, en s'armant d'un noir bâton de vanille parfumée, pour écorcher à vif un jaune citron sur sa lancée, avant de s'en aller allègrement, en charmante compagnie de quelques œufs bien frais, vers le four du boulanger qui sans discuter, d'un bon coup de fagot de la bouche au foyer - transforme le tout en Pastière dorée ! ?

        Et puis, et puis... J'en passe et des meilleures… Les contes des mille et une cuisines du Bastion de France, seraient - je vous l'assure ! - biens longs à raconter.

        Enfin, le dessert arrivé... Madame Louise apprécia les Marrons et la Bûche décorée... Mais hélas ! Ils étaient malheureusement glacés. C'est alors, mes Frères, que nous avons regretté une absence très remarquée : la légère Oreillette, toute de sucre endimanchée, et l'odorant Zouzamiel, dont peu de nous ont encore le secret.

        Et puis, et puis... Rêvons et rêvons encore, mes Frères ! Toutes ces élucubrations pour vous rappeler, que nous aussi au Bastion de la France, on pouvait faire plein de miracles et avec peu de choses... Si les Bocuse et autres vedettes étoilées d'une certaine gastronomie étaient loin, il y avait chez-nous les Cyprienne - Marie - Louise - Nanette et Alice... Mais aussi - les Joseph - André - Raymond - Antoine et Janvier... qui, d'un simple coup de casserole, se faisaient à toute heure un plaisir de nous régaler. Point de Champagne authentique - peut-être ! -, mais, vins colorés de notre terre Calloise, avec ce petit Blanc - degrés 16 ! - que pressaient les Jardiniers de la route du Lac Mellah... Point de Saumon fumé importé - sûrement ! - mais, sardines argentées, qu'au petit matin on grillait çà et là, oignons frais à la main - au bord de l'eau prés des petits quais

        Qu'avions-nous donc à envier ! ? Il ne nous manquait - que la gale pour nous gratter !

        Voilà pourquoi - Callois, mes frères - un jour il m'est venu à l'idée, de bâtir ensemble un bon livre de cuisine où, serait consignée, la Cuisine du Bastion avec les recettes de chez-nous que vous me confierez. Je souhaiterai, des formules accommodées de marchandises bien comptabilisées et pour clore le tout, un petit mot d'historique sur le sujet - si vous en avez ! - en vous priant S.V.P., de faire figurer votre identité. Ce précieux patrimoine culinaire nos ancêtres enfin restera nôtre et je l'espère se transmettra à nos enfants - ces Callois grands et petits de demain.

        Ainsi sur toutes nos tables tout au long de l'année et pour la postérité, nous pourrons retrouver ce parfum nostalgique et léguer à nos enfants - le secret des cuisines, de notre Bastion bien-aimé.
Jean-Claude PUGLISI
de La Calle de France.
Paroisse de Saint-Cyprien de Carthage Décembre 1999.

        P.S :
        NOEL 1999 = seul à Giens et ne fêtant rien ! Mais je ne suis pas malheureux !

        En son temps, cet article n'a reçu aucun écho et les recettes demandées, ne me sont pratiquement jamais été adressées par quelque Callois que ce fut.

        Faut-il analyser ces faits comme un désintérêt majeur, de la part de notre communauté ?
        A cette question bien délicate, je répondrais franchement par la négative et tenterais d'apporter une explication à cet immobilisme Callois :

        1°/ Il est rare, que des réponses soient faites par les lecteurs du Petit-Callois.

        2°/ Pourquoi ! ? D'une part, par négligence... d'autre part, parce qu'il n'est pas facile pour beaucoup de personnes - quelque soit d'ailleurs, les titres et le degré d'instruction - de se muer même une fois en écrivain occasionnel.

        3°/ Cependant, je dois dire que j'ai toujours reçu des Callois le meilleur accueil, lorsqu'au cours de nos grands rassemblements, je profitais de l'instant pour recueillir pêle-mêle, toute une cargaison de précieux renseignements.

        4°/ Mais je veux ici, particulièrement louer Mme Marie Costanzo-Dinapoli ( + ), ma Tante de cœur préférée, qui malgré son état de santé bien fragile, s'est attachée des mois durant, à rédiger avec toute l'affection qu'elle me porte et la Nostalgie de notre terre, en guise de testament culinaire, la totalité des recettes Calloises qu'elle connaissait. Sois ici, chère Tata Marie, affectueusement remerciée.

        5°/ Il ne m'a pas fallu longtemps pour me convaincre, que le silence écrit de mes Frères et Sœurs du Bastion de France, n'était alors qu'un silence intéressé. Voilà pourquoi, j'ai - entre 1995 et 1996 -, rédigé ce bréviaire de Cuisine Calloise avec l'aide active du bureau de l'Amicale des Callois ( Citons : Justin Giordano - Jean Bonifaci - Alexandre Bertot...), nous avons pu enfin éditer à 500 exemplaires en 1997… Les premiers exemplaires, ont été mis en vente la première fois à l'occasion de la Toussaint Calloise de Novembre 97 en Castille, je dois dire, qu'il y avait la queue pour obtenir une dédicace, dont, je me suis fait un réel plaisir, d'affectueusement rédiger à chacun.

        Aujourd'hui " la Cuisine du Bastion " a été réédité à 150 exemplaires - les 500 premiers - étant épuisés depuis déjà un bon moment.
        Peut-on appeler cela : désintérêt ? Allons donc !

        N.B personnel :
En rédigeant cet ouvrage,
j'ai toujours eu en tête cette belle maxime :


" Chaque homme à sa mission sur terre,
la mienne est de me souvenir.
Aussi,
je pars furieusement en guerre
contre l'oubli ! "


        L'oublie ! ? Que c'est terrible chers Compagnons ! C'est en quelque sorte, perdre son âme !

        On dit parfois, que regarder le passé, c'est prévoir l'avenir ! C'est ce que je tente de faire depuis toujours, même, si parfois très gentiment on me reproche avec affection, d'être toujours là-bas et rien que là-bas !

        Mais là-bas ? C'est encore et toujours chez-moi et il n'y a que chez-moi - et pas ailleurs ! - que j'ai plein de choses à raconter !

        La Cuisine du Bastion ! Dites-moi ? mes frères... Où aurais-je pu la dénicher ? Sinon là-bas, chez-nous à La Calle, autrefois ! Et si j'avais oublié... Là-bas ! ? Quel grand malheur pour nous tous mes frères de... là-bas
Jean-Claude PUGLISI.
de La Calle de France


ECHO D'ORANIE - N° 283
En latin d'Afrique...
Une chronique contemporaine de Gilbert ESPINAL COMPTES DE NOEL

                - Ay ! S'écria Angustias en s'introduisant, la porte à peine ouverte, dans l'appartement de la Grand'mère : je suis ! Qu'avec un cheveu on pourrait m'étrangler, du suffoco (*l) qu'elle vient de me faire ma couturière, une française plus répinfée (*2) que je sais pas quoi me dire ! ....
               La golondrina et Amparo qui se trouvaient là, justement, tendirent davantage encore leur oreille.
               - Et qu'est ce qu'elle t'a fait ta couturière que t'y es là, avec le cœur entre les amygdales ? Interrogea la Grand-mère.
               - Pos, qu'elle m'a jeté à la fugure les vingt euros que je l'y avais laissés comme arrhes, qu'elle m'a attrapée par le bras et foutue à la porte de son atelier....
               - Toi t'y as du lui faire quelque chose pour qu,elle se conduise avec toi comme si tu serais la dernière des dernières.
               - J'étais venue chez elle, expliqua Angustias, sur recommandation de Madame Pimpollo, à qu'elle me fasse une robe de cérémonie pour que j'aille au packsage du frère à mon cousin Lopec'h, à Douarnenez.
               - Et comme y s'appelle le frère à ton cousin ? fit la Golondrina ; t'y as plus de famille que les lapins dans une cage : de partout y te sortent des cousins !
               - Tatapepette ! établit Angustias.

               - Mais cette Tatapépette, insista la Golondrina, c'est le frère ou la sœur de ton cousin : tantôt on l'appelle Joseph, pépé pour les intimes, et tantôt Tâtapépette ?
               - Y compte pour deux, répliqua Angustias : pour les papiers, c'est son frère ; mais dans la vie de tous les jours, c'est sa soeur qu'elle va se packser avec ....
               - Elle est transsexuelle ta Tatapépette ou quoi ? coupa Amparo.
               - T'y es folle ! sauta Angustias. Ouaala ! elle est comme le Bon Dieu l'a faite avec tous les attributs qu'y faut pour être masculine ; elle a rencontré un beau garçon d'origine pied-noir de Tunisie. I1 appartient à une vieille famille aristocratique du bled qui avait dans le temps monté une entreprise de concassage de cailloux, des gens joyeux, à ce qu'on m'a dit. Je crois que c'est son grand-père qu'il était à l'origine de l'affaire et son père il a continué. y z'avaient accumulé une grande' fortune. Bourguiba leur a tout pris et y sont revenus en France une main devant et l'aut' derrière. Horosement que Julot de Tataouine qu'y va devenir mon parent par packsage, il avait entrepris de se faire tatouer sur tout le corps ; et comme ça, il a pu, en montant une baraque dans les foires, à qu'on l'admire, refaire sa situation ; main'nant il circule plus qu'en béhème (*3) ...
               - Et qu'est ce qu'y s'est fait tatouer ? interrogea la Golondrina avec avidité.
               - Ma fi, y'a de tout: des fleurs, des z'oiseaux, des papillons, des fruits, des légumes ! y a pas un centimet' carré de peau, qu'il ait échappé à l'aiguille de l'artiste.
               - Et où y s'est mis tout ça ? sauta la Golondrina.
               - Je vous dis, partout ! par esemple, sur chaque bras y s'est, fait tatouer une femme nue.
               Chacune elle a la tête sur ses épaules, le corps sur ses bras et les jambes j'qu'au poignet ; quand y fait rouler ses biscoteaux elles dansent du ventre. On dirait qu'elles sont réelles ! sur le dos y s'est fait graver un homme accroupi sur le sol avec un parapluie dresse ; quand il écarte ses omoplatres le parapluie y s'ouvre ; et sur les fesses ...
               - Pasque tu l'y a vu les fesses ! s'exclama la Golondrina scandalisée.
               Qu'est-ce qu'il a sur les fesses ?
               - Le portrait de son aimée en légume et en fruits !

               - Que barbaridad(*4) ! s exclama la grand-mère. Tir dis des bluffes !
               - Le pur évangile ! c'est une composition ; avec des tomates pour faire les joues, une salade frisée pour la chevelure, des poires pour la mâchoire, des lychees pour les z'yeux, une tranche de patate douce (du mognato) pour le front ....
               - Et la bouche ? demanda la Golondrina - Je sais pas ! coupa promptement Angustias, mais y paraît qu'à l'ensemble y lui manque plus que la parole. D'abord, tout le monde reconnaît le portrait de Tatapépette et le conservateur du musée de Douarnenez. Il a déclaré que ça ressemblait à (attend que je me souvienne que c'est ma cousine Dolorès qu'elle me l'a répété) à un Arcimboldo.
               - Et sur les jambes qu'est ce qu'il a ?
               - Des fleurs, des fruits, des arbres et des branches !
               - Je suis sure qu'y s'est pas fait tatouer ça que je pense ! intervint la Golondrina.
               - Pos, tu te trompes ma fi' sauta Angustias. Y s'est fait représenter un triple décimètre (qu'encore y paraît que y avait de la place) pour que chacun puisse avoir une idée de ses capacités ; mais je le verrai pas moi pasque Tatapépette elle m'a prévenue, il porte toujours un string très strict : Il aime ma cousine entière, comme elle est ! j'qu'au poil il veut pas qu'elle se rase: elle reste avec ses poils sur la poitrine, ses poils aux bras, son poil aux pattes ....
               - Et . .. ? persifla la Golondrina
               - Là aussi ! conclut Angustias.
               - Elle garde sa barbe ? reprit la Golondrina.
               - La barbe à papa ! ricana sauvagement Angustias.
               - Et pourquoi tu te fous de moi ? s'exclama la Golondrina vexée. D'un coté tu nous déclares que pour faire des sous, il a monté une baraque où y montre ses tatouages et de l'aut' qu'elle garde ses poils, pos, moi j'ai cru qu'ils s'étaient associés, lui y montrait son Arcimboldo par derrière et elle sa barbe de l'aut' coté. Ce serait pas la première femme à barbe de l'histoire! Mon père y m,a raconté que, pendant la guerre de 14, au front, on exhibait une femme à barbe pour faire peur au boches ... ; je pensais que c'était la même chose avec ta cousine !

               - Et pourquoi ta couturière elle t'a foutue à la porte ? coupa la grand-mère.
               - Pasque je l'y ai demandé de me faire une robe - y faut que je sois chic au packsage de ma cousine (qu'y va y avoir 1e ban et l'arrière ban de la fami'), une robe qu'elle fasse à la fois fourreau et crinoline. Je l'y avais porté un de ces tissus que j'avais acheté à la Goutte d'or ! une soie ! a te lécher les babouines. Elle m'a dit cette bova (*5) que faire un fourreau et une crinoline c'était la quadrature du cercle. Et là je suis restée, comme une bamba (*6) avec mes sous et mon étoffe. Je sais plus comment faire !
               - Pos, soit simple ! lança la Golondrina, va chez Saint-Laurent; lui, comme toi, il est d'Oran: ses grands-parents y z'habitaient les bas quartiers, rue Pontébas; tu vas le voir et tu l'y esplique que toi aussi t'y es de la Calère, que t'y étais domiciliés place de la Perle et que c'était toi la perle de la place. T'y as pas été miss Oran toi je crois ?
               - Septième Dauphine ! fit modestement Angustias. La miss en titre, avant le concours, elle avait couché avec le Président et les six autres avec les six membres du jury; et moi, comme j'étais déjà fiancée avec le Bigoté et qu'il faisait que me dire que ce qu'il appréciait davantage à moi c'était ma virginité, là je suis resté avec le mogno etcho ( *7)
               - La virginité ! ricana Amparo, y me font rigoler les hommes avec leur virginité ! t'y aurais gardé ton collant et il y aurait vu que du feu !
               - C'est ça qu'elle me disait ma mère, que c'était une sainte femme, plus droite encore que la route à Raffarin! - Et combien y avait de candidates à ton concours ? demanda la Golondrina insidieusement.
               - Sept !
               -T'y était la plus moche, railla Golondrina,
               - Bon ! éructa fermement la Grand-mère pour mettre fin à cette oiseuse discussion, l'important aujourd'hui c'est que t'y ailles chez Saint-Laurent.
               - Où il habite ?
               - Avenue Montaigne ! encore il a là ses magasins, précisa la Golondrina.
               - On disait pas qu'il avait pris sa retraite ? interrogea Amparo
               - Ça c'est pour les z'impôts ! établit péremptoirement la Golondrina. Les couturiers de cette trempe y z'arrêtent jamais : y cousent plus de la main droite pour être exonérés des taxes, mais de la main gauche y continuent de tirer l'aiguille. Où tu crois qu'elle s'habille Madame Chirac ? pos, chez Saint-Laurent ; elle le paye avec les fonds secrets et lui y lui rend la monnaie en pièces jaunes comme ça, ni r,u ni connu j't'embrouille.
               - Moi je croyais qu'elle s'habillait à la Redoute ! proféra Amparo. Je la revois encore avec ce petit ensemble qu'elle portait quand elle a dansé la Lambada avec Yang Zémin. Quel couple ! on aurait dit qu'il avait boutonné sa veste au nombril de Bernadette, y z'étaient à croquer !
               - C'est que, hasarda Angustias, si je vais chez Saint-Laurent y va me faire payer le gusto y la gana (*8) ....
               - Ne crois pas, coupa la Golondrina, pour ses compatriotes y fait des prix, surtout si, au cours de la conversation tu lui glisses habilement que t'y étais lauréate au concours de beauté. T'y as pas besoin de lui préciser que t'y étais que septième dauphine ; y va t' et fier comme un pou d'habiller une miss !
               - Et comme tu crois que ça va se passer ? interrogea Angustias déjà prise de l'angoisse de l'inconnu.
               - Pos, tu rent' dans son magasin, y sera là, derrière son comptoir en train de vérifier les coupons qu'y lui restent, pisqu'il a pris sa retraite. A coté de lui sur une haute estrade tu verras un type, Pierre Bergé, qui compte les sous. Tir t'avances et tu 1'y espliques : posément, calmement. Tir verras le sourire qui éclairera son visage et y te redira cette phrase que nous connaissons bien tous " je vous ai compris".
               Autour de son cou il a une ficelle avec, pendu, un sifflet y fera "tut ! ... tut ! ..." Aussitôt le rideau que y a au fond du magasin y 's'ouv' et y a trois bonnes femmes qu'elles z'apparaissent : Cyndie Crawford, Noemie Campbel et Claudia Schoufleur, splendidement vêtues ; et y te dira : "choisissez madame !" si tu sais y faire, y te fera cadeau de la robe.
               - Et comme je vais faire moi pour rentrer dans ces robes ? elles sont minces comme des aiguilles à tricoter et moi je suis replète !
               - T'y es pas replète, lança venimeusement la Golondrina : t'y es comme un éléphant de mer, mais ça fait rien pasque chez les grands couturiers les coutures elles tiennent, c'est ça que ça fait leur renommée. T'y as pas vu des grosses clientes qu'ils z'habillent ? Pour 1'essayage, on tient les robes droites et on les coule dedans à la louche. Dehors elles sont comme des boudins, à l'intérieur comme des merguez.
               - Ay ! soupira Angustias, et si y me fait cadeau d'une robe, y va falloir que je me paye le sac, les gants et les chaussures
               - Le sac et les gants t'y as pas de souci à te faire qu'à Carrefour y en a de toutes les couleurs : en crocrodile de la Macta. Pour les souliers ce sera plus délicat....
               - Surtout que moi je suis difficile à chausser, gémit Angustias ; derrière je chausse du 37 pasque j'ai le talon menu, mais de devant y me faut du 43 à cause de mes z'oignons.
               - Alors, t'y as pas de souci à te faire conclut la Golondrina
               Si t'offr' les chaussures elles t'iront comme un gant : les trois mannequins chaussent du 46. Tu pourras installer tes oignons, ton ail et ton persil.
               Il lui a offert les trois robes ! " C'était des rossignols " a conclu la Golondrina au comble du dépit.

LEXIQUE
*l suffoco: affront
*2 repinfée: veut dire à la fois hostile et pincée
*3 behème: BMW
*4 que barbaridad: quelle énormité !
*5 bova: idiote
*6 bamba; imbécile
*7 le mogno hecho: littéralement avec le chignon fait, autrement dit en carafe
*8 le gusto y la gata'. le goût et I'envie



La chasse sous-marine en ORANIE
dans les années 1950

De Monsieur Alain ALGUDO

Illustration 1: La baie d'ARZEW

Illustration 2: Un de nos lieux de plongées.


Illustration 3 et 4: Le Cap Carbon en vue.
Alain ALGUDO - Guy VENIERE


       Ce lieu de plongées profondes était particulièrement poissonneux et nous y faisions des pêches miraculeuses de cigales de mer énormes dépassant parfois les deux kilos


Illustration 5: Cigales de mer du Cap CARBON.

       Sur des fonds variant entre 15 et 25 mètres ces gros crustacés massifs étaient agrippés aux plafonds de vastes grottes sous-marines. Les prises se faisaient à la main mais avec une technique particulière en rapidité d'action vu leur vélocité dans la fuite.

       Généralement nous partions de la plage de LA STIDIA à travers la baie d'ARZEW avec mon bateau, le " Mikou ", deux heures de navigation avec une bonne météo.

       Nous croisions alors au large du port d'ARZEW vers les caps CARBON et FERHAT où les fonds sous-marins étaient de véritables aquariums ce qui nous permettait une sélection incomparable dans la faune qui peuplait ces hauts lieux de chasse.

       Mais le danger des plongées profondes en apnée était omniprésent et une prudence extrême s'imposait. Des règles strictes convenues entre nous nous ont permis d'éviter encore un drame lors d'une de ces sorties.

       Ce regretté Gérard LENFANT (+) un de mes derniers équipiers, a abusé, lors d'une plongée, du temps raisonnable d'apnée sous ma surveillance. Fort d'avoir déjà vécu un drame (que je relate plus bas ) j'ai prévu que l'accident allait arriver : il a perdu connaissance avant d'arriver à la surface. J'ai plongé immédiatement. Je l'ai rattrapé, largué sa ceinture de plomb, puis la mienne, et l'ai remonté à la surface.

       Hissé à bord du bateau avec l'aide un autre coéquipier, il a repris rapidement connaissance après quelques massages cardiaques que je maîtrisais. Il m'a dit alors qu'il ne m'appellerait plus désormais que " PAPA " !

       Hélas le sort devait ensuite s'acharner sur le malheureux, il se tuait quelques mois plus tard dans un accident d'avion à MOSTAGANEM.

       Revenant de ces lieux mythiques de la côte Oranaise nous relâchions alors dans le petit port naturel de LA STIDIA, point d'ancrage de mon bateau derrière le " grand rocher, " et c'était avec nos proches un peu la fête à nos arrivées avec nos tableaux de chasse.


Illustration 6: Une pêche de mérous au Cap FERHAT.
Alain ALGUDO - Guy VENIERE.

Illustration 7: De g à d Jean LEMARIE - Alain ALGUDO - J.Marie BERTRAND. Une pêche à La Stidia.

       Dans les environs immédiats de notre ville de MOSTAGANEM, au large du lieu dit " la deuxième crique " ou " la crique PEDEVILLE " située entre LA SALAMANDRE et la plage des SABLETTES, des fonds de dix mètres parsemés de larges dalles rocheuses étaient un habitat idéal pour les dorades royales. J'avais découvert ce lieu inconnu jusqu'alors par les amateurs de chasse sous-marine car assez éloigné en mer. Cet éloignement me permettait, par cette discrétion, propre à tous les chasseurs, d'en faire une chasse gardée prolifique.

       Je suis persuadé qu'à l'heure actuelle cette faune doit y abonder si la pollution générée par les rejets en mer de l'usine à papier installée à proximité n'ont pas affecté cet environnement sous-marin d'une pureté cristalline, mémorable pour moi, dans ces années 1950.

       Une anecdote, croisant un jour dans ces environs avec mon bateau, accompagné de mon équipier Jean LEMARIE, nous apercevons un bateau de pêcheurs à la palangrotte qui parait être en difficulté. C'est celui d'un de mes amis Coco MARTINEZ qui a coincé son grappin sur les fonds d'un " sec "appelé " les pedretas "(cailloux en espagnol) situé au large entre les plages des SABLETTES et d'OUREHA. Super plongeur en eaux profondes mon équipier propose à Coco d'aller le lui décrocher. Eberlué par cette proposition celui-ci accepte volontiers et mon ami Jean plonge sous ma surveillance avec succès sur un fond évalué de 25 à 30 mètres. Cet exploit, pour les non initiés, faisant ensuite le tour des amis pêcheurs à la palangrotte du Mostaganemois.

Illustration 8: Alain ALGUDO- La Salamandre.

Illustration 9: Une de ces pêches sur " ma chasse gardée " !.

       Ainsi il ne fallait pas aller bien loin dans les environs immédiats de la ville de MOSTAGANEM pour se trouver en présence d'une faune marine intéressante, ne serait-ce qu'à la Salamandre, station balnéaire de notre belle ville, pour réaliser des pêches mémorables.

       Très prisé et pratiqué par nos compatriotes, ce sport de haut niveau ne permettez pas la moindre erreur comportementale de prudence. Il a généré beaucoup de drames dont l'un très douloureux que j'ai vécu et que je relate dans un exposé joint à la série de photos prises durant plus d'une décennie.

       Nous avons eu de très grands champions, compatriotes qui se sont illustrés dans les compétitions sur le plan national et international : Hugues DESSAULT, mon Ami Marc VALENTIN (+) J.ESCLAPEZ, les frères PUJOL Jean Marc et Jacky, mes neveux, que j'ai initié tous jeunes en Algérie avec des règles strictes de prudence et qui ont remporté un titre de champion de France par équipe après le rapatriement. Par la suite " les élèves ont largement dépassé le maître ! "

Illustration 10: Marc VALENTIN - Champion de France.

       Grand compétiteur, plongeur et chasseur phénomène Marc VALENTIN s'est illustré dans toutes les compétitions à travers le monde.
       Après l'indépendance de l'Algérie, il a finalement fini sa vie à DÉNIA en Espagne où il y avait ouvert un magasin d'articles de plongée.


Illustration 11: Marc VALENTIN et Alain ALGUDO lors d'une projection commentée de diapos sous-marines.

       Il y est décédé prématurément d'un accident hémorragique brutal. Ses cendres ont été dispersées dans cette grande bleue qu'il aimait tant et qui lui avait tant donné.


Illustration 12: Jean-Marc et Jacky PUJOL - Champions de France par équipe !

       Les côtes Algériennes de l'ORANIE étaient un véritable Eldorado pour la pratique de ce sport et nos chasseurs rivalisaient de prouesses. Dans les eaux de " l'île Plane " à proximité d'Oran, les fonds étaient d'une richesse incomparable.

       Quant au joyaux de nos côtes, les " îles Habibas " en face du Cap Blanc, on ne les présente plus à ceux qui ont eu le privilège de les atteindre en garde à jamais un souvenir impérissable.

       J'ai eu la grande chance et la joie de plonger sur tous ces fonds d'une beauté grandiose où la limpidité des eaux donnait l'impression d'évoluer en apesanteur. Le fond était animé, ce jour là, par un festival de mérous et badèches en eau libre.


Illustration 13: L'Ile Plane au large d'Oran et du cap Falcon !


Illustration 14: De G à D - Claude WOILLOT - Jean LEMARIE -
Alain ALGUDO.

       Dans notre équipe, Claude WOILLOT , Jean Marie BERTRAND(+), Guy VENIERE(+) Jean LEMARIE(+) nous étions liés comme des frères, danger oblige, et jamais de plongées apnées en solo sur les grands fonds ! C'était notre règle, toujours à deux, de préférence toujours le même équipier. La seule fois, hélas, où j'ai laissé mon équipier partir (mon exposé explicatif) avec un autre copain pour une plongée profonde, il y a perdu la vie.
       Le destin ? Peut-être, mais que de remords pour toujours après un tel drame !!


Illustration 15: Jean LEMARIE (+) 1940/1961.

       Pour que le lecteur se rende compte de la beauté de l'univers où nous évoluions, je ne peux omettre de diffuser ces images d'un environnement qui, pour nous, dans notre baie d'Arzew, à LA STIDIA et ailleurs étaient et restent les plus belles du monde avec des souvenirs enfuis, d'ombres et de lumières certes, mais inoubliables.


Illustration 16: LA STIDIA PLAGE


Illustration 17: Coucher de soleil sur la plage.
18: Une fin de journée dans la baie d'ARZEW


Illustration 19: La modeste mais inoubliable plage de LA STIDIA


Illustration 20: Stidia plage- "Le plateau"


Illustration 21: Stidia plage - coup de mer !
Illustration 22: Stidia plage - Orage sur la baie d'Arzew.


Illustration 23: Stidia plage - Coucher de soleil sur la baie d'Arzew.


Illustration 24: Stidia plage - Les baigneurs sur le "grand rocher "!


Illustration 25: Stidia plage - le terre plein d'arrivée.

       Les photos suivantes sont le relevé d'une partie de nos prises en chasse sous-marine dans les eaux allant de la plage d'OUREHA située entre MOSTAGANEM et LA STIDIA et la plage de PORT AUX POULES située entre LA STIDIA et ARZEW, à savoir une dizaine de kilomètres de côtes rocheuses dans des fonds variant de 05 à 25 mètres.




























Illustration 26: Jean LEMARIE

       Je dédie ce document à la mémoire à mon jeune équipier et ami Jean LEMARIE décédé le 30 juillet 1961 au cours d'une plongée sur la côte oranaise.
       Il était jeune, il était beau, il était talentueux….il avait 20 ans ! Fils d'une famille de PERREGAUX amoureuse de LA STIDIA et sa plage divine.
       Une passion commune nous unissait ….celle de l'univers marin !

       Une grande amitié unissait aussi toute notre équipe auprès de Jean, Claude WOILLOT, Jean-Marie BERTRAND, Guy VENIERE et moi-même.
       Elle se concrétisait par une solidarité, que nous croyions sans faille lors de longues plongées profondes dont Jean avait le secret. Bien des fois il m'invitait à partager le spectacle du dessous d'une belle dalle poissonneuse qu'il avait le don de localiser.

       Il possédait dans cet univers cette qualité d'homme poisson qui faisait que la grâce naturelle d'un dauphin émanait de tout son être.
       Sa disparition est pour moi, depuis ce 31 juillet 1961, inoubliable et si triste, mais espérant la réincarnation je me console en me persuadant qu'il a rejoint ce monde du silence où nous nous retrouverons un jour. Comme Jean COCTEAU, je pense aussi que " le vrai tombeau de morts est dans le cœur des vivants, " alors pour moi il plane toujours, avec cette facilité qui lui était propre, dans cet élément où il excelle maintenant à jamais.
       Cette journée fatale ressemblait à toutes celles, à nulle autres pareilles, dont nous gratifiait souvent notre belle Algérie.

       La mer scintillante était d'un bleu profond commun à tous les petits matins sur les côtes d'ORANIE ; Nous avions dépassé ORAN et, après le cap BLANC, rejoint les " sept îles " par la plage de MADAHK. Nous revenions sur les lieux après une reconnaissance la semaine précédente où j'avais assisté à une de ses plongées sur un fond évalué à 30 mètres. La limpidité de l'eau donnait ce jour là l'impression d'être en apesanteur. Je le voyais au fond pas plus grand qu'un double décimètres, et remontant sans un seul coup de palme, son corps ondulant tel un cétacé.

       Nous revenions donc sur les lieux que nous avions repéré le dimanche précédent, fonds de chasse de 15 mètres de moyenne où nous semblions évoluer là aussi dans un aquarium, ces " aquariums "communs sur nos côtes à cette époque et où nous nous faisions une règle de choisir et limiter les prélèvements.
       Cette expédition en vue de plongées profondes en apnées avait été minutieusement préparée physiquement, rien n'avait été laissé au hasard, ceux qui on pratiqué comprendront, ce sport tel que nous le pratiquions étant de haut niveau et surtout à hauts risques.

       Etaient présents ce jour là dans notre équipe renforcée les deux fils de l'Amiral JOURDAIN, Jean-Claude et Philippe, Guy VENIERE, Jean LEMARIE et moi-même.
       La mer d'un calme absolu était irrésistiblement attirante, mais comme d'habitude avant de nous mettre à l'eau nous procédions à l'incontournable léger " casse-croûte de conditionnement. "
       Mais hélas, le drame allait survenir, mon jeune équipier avait des " fourmis dans les palmes ", il avait repéré mais pas pu cibler un gros mérou sous un gros roche par une quinzaine de mètres de fond ! Il décidait donc de se mettre à l'eau immédiatement arrivé.
       Ne pouvant l'en dissuader, je demandais à Guy VENIERE, lui aussi pressé de se mettre à l'eau, de me suppléer, vu que je n'étais pas encore équipé.

       Le sachant accompagné, je me mettais à l'eau en compagnie de Philippe JOURDAIN et entamions nos plongées dans une autre direction sur d'autres fonds.
       Une demi-heure environ après ma mise à l'eau je percevais le bruit du moteur du hors-bord que nous avions fait suivre et qui fonçait vers moi à grande vitesse.
       Surpris, je compris bien vite aux gestes et à la mine de Jean Claude JOURDAIN que l'insoutenable venait de se produire : " Alain viens vite, Jean et au fond et nous ne pouvons le récupérer ! "

       Arrivé rapidement sur les lieux, dans cette eau cristalline, s'impose alors à moi le terrible spectacle de mon jeune ami étendu au fond, sur le dos, les bras en croix, tenant toujours son fusil harpon et au bout de la flèche un énorme mérou qui se débat encore faiblement.
       Imaginez mon émotion. Une colonne de 15 mètres d'eau nous sépare. Je suis conscient du temps qui s'est écoulé et les chances nulles de survie à envisager.

       Sachant que je ne pourrais le remonter sans risque en force à une telle profondeur, je me munis d'un cordage, j'entame ma plongée et je l'attache à ses jambes et remonte rapidement…..hélas, la corde est trop courte et je suis obligé de la relâcher.
       J'entame alors une autre plongée avec un autre filin que je noue au précédent et finalement nous réussissons à remonter mon jeune ami désormais sans vie.

       Entre temps les secours ont été alertés...comment je n'en ai pas le souvenir, et les deux sauveteurs tenteront eux aussi, après nous, de le ramener, en vain, à la vie. Ayant perdu connaissance sur le bateau à la suite des efforts de mes deux plongées et de mon émotion, j'ai subi par la suite un examen de contrôle à l'hôpital d'ORAN .

       Soixante ans après, je ne peux terminer l'évocation de cette dramatique journée sans faire part de ce souvenir resté gravé dans le marbre de ma mémoire : c'était la sérénité de ce jeune visage, les yeux naturellement clos à jamais. Il paraissait dormir paisiblement et dégageait une impression d'un bien être semblant appartenir définitivement à cet élément primordial de la vie où il adorait évoluer et qui venait de la rappeler à lui.


Alain ALGUDO Le 1er Mai 2021 


La Nostalgie est aussi de l'autre côté.
Frères du Bastion de France !
- Que parfois je fredonne quelques notes nostalgiques,
Au carrefour d'une histoire que d'une plume un peu grise,
Je griffonne bucolique dans les brumes d'un soir,
Ou,
Que je chante parfois, des trésors plein la tête,
le bleu tendre et léger des matins d'autrefois...
Il m' arrive cependant,
De suspendre un instant ces deux notes de musique,
Pour me dire d'écouter vers le sud,
Cet écho apporté par le vent, et
Qui vient j'en suis sûr d'un pays fabuleux,
Où, depuis toujours,
Scintille la mer et refleurit le corail.

- C'est pourquoi, aujourd'hui je ne puis m'empêcher,
De chanter une histoire que l'écho m'a contée,
Un beau jour où soudain je me suis demandé,
Si des fois par hasard sur un autre rivage,
Une certaine nostalgie pouvait bien exister ! ?

- Regardez bien le ciel !
- Par pudeur souvent son azur est caché,
Mais,
Qu'une brusque tourmente à la tête des nuages,
Ou
Qu'un vent persistant dégringole dans un crâne,
Et voilà mes amis les rideaux sont levés !
Par pudeur ou tranquille...
J'appelle ça :

Nostalgie !
- Respectons la pudeur et parlons en conteur :

- Bien longtemps il y a,
Qu'en rustre et simplet à presque s'y tromper,
Un brave homme du pays,
El Kala*, le petit d'une grande famille,
Sans fléchir tous les jours
D'un pas calme et tranquille,
Se dirige vers l'endroit où l'attendent ses amis...

- Délaissant sans regret son logis et son lit,
Ignorant sans complexe les grincements de la grille,
Saluant au passage Pascalin* et sa pipe,
Il s'en va toutes les nuits
Pour dormir dans une tombe,
Prés
Des morts ses copains.

- Bien longtemps il y a,
Je me suis demandé,
Le pourquoi du brave homme au cerveau embrouillé ! ?
- Allez donc de ce pas,
Essayer gentiment d'en savoir un peu plus,
Plus que moi je m'entends !

- Il dira sûrement, en tout cas je le pense, qu'à
Chaque nuit de sa vie, tranquille, il s'en ira,
Pour dormir en famille, prés des morts ses amis.

- Mais son esprit, par les années quelque peu froissé,
Gardera le secret du jardin de ses rêves,
Là,
Où éclosent les roses
qui
Embaument le passé...

- C'est ainsi tout simplement,
Qu'El Kala le petit,
S'en ira toutes les nuits,
rechercher dans sa tête
un passé qu'il revit,
D'une façon bien étrange mais aussi bien à lui,
Quand au soir passe l'ange
De parler

Nostalgie.
- Il dort me direz-vous et ne rêve à rien du tout !

- Mais moi je peux vous dire,
Que
Parfois dans la nuit,
Qu'il éclaire doucement d'une frêle bougie,
Il demeure toujours là sentinelle immobile,
Lisant et relisant, je ne sais quel bouquin,
En tenant compagnie aux défunts ses copains...
Ponctuant parfois sa lecture de discours authentiques :
Des histoires du Bastion
Qu'il revit chaque nuit,
Tout prés de ces gens d'autrefois qui bâtirent notre histoire.

- Et puis,
Lorsque enfin prenant sommeil,
Son rêve insensé,
Son beau rêve se poursuit ...

A l'infini...
- Aux premiers chants du coq, lorsque s'achève enfin la nuit,
Le songe doucement se dissipe.

- Et alors, comme tous les jours,
El Kala le petit,
D'un pas calme et tranquille, s'en ira vers la grille,
Saluant au passage Pascalin* et sa pipe...

- Quand, parfois,
Dans les rues du Bastion encombrées de passants,
Taciturne et secret il erre à tous vents,
Sans daigner une seule fois
Adresser aux vivants,
Le discours de ses nuits que parfois il entend,
Au grand jour cette fois dans le coin d'un nuage,
Qui du coup laisse voir,
Une parcelle de ciel bleu éphémère et sincère,
Qui s'en vient par hasard
Rappeler une histoire...

Celle d'un Bastion de France, d'autrefois à la belle époque !
- Et puis lorsque sur les monts du Boulif,
Quand l'astre fatigué va enfin se coucher,
D'un pas calme et tranquille dans le soir qui arrive,
El Kala* le petit réintègre son logis,
saluant au passage Pascalin* et la grille...

- Par un soir de décembre installé dans une tombe,
Ne daignant écouter sur la pierre tombale,
Le concert persistant d'une pluie en furie,
Ni
Celui de la mer,
Qui
Depuis un moment s'était mise à gronder...

- Négligeant même je le pense,
De prêter une oreille au Bafougne* en colère,
Qui hurlait à tue-tête dans les rues du Camp Saint...
- Et ainsi,
Faisant fi des intempéries,
Béatement bien-sûr,
Il lit et relit silencieux ce soir-là,
Une chandelle grelottante allumée prés de lui.

- Un moment,
Brusquement il resta interdit,
Par
Un bruit bien étrange en tout cas insolite :
C'était,
Nous dirait-il une sorte de plainte,
Un soupir long et triste, éphémère et unique,
Un sanglot impromptu,
Qui jaillit du caveau au milieu de la nuit.

- Pour une fois je vous le jure,
Effrayé et surpris,
El Kala* le petit s'éjecta de sa couche,
Pour s'enfuir vivement vers une autre contrée,
Préférant
Je le pense, d'autres amis trépassés...

- Depuis ce jour,
Plus jamais
La maison du soupir il ne vint fréquenter,
S'installant dans une tombe

Il put reposer,
Aux côtés de compagnons beaucoup plus discrets.

- Frères du Bastion de France !
- Si par hasard une fois à La Calle tu venais,
Vers le soir discrètement,
Approche-toi de la grille du cimetière de notre cité.

- Tu pourras j'en suis sûr,
Voir calmement arriver,
Ce brave homme bien étrange,
Qui
Revient comme toujours,
En fidèle serviteur de ces belles demeures,
Où,
Les hôtes des lieux qui n'ont plus de familles,
Compagnons de la nuit qui écoutent sans rien dire,
El Kala le petit,
Raconter le discours d'un Bastion nostalgique,
Qui surgit tous les soirs des brumes de sa mémoire...

- Et même si parfois,
Du jardin fabuleux quelque spectre endormi,
D'un soupir lui témoigne,
Triste et sincère un accord infini,
Qu'il fasse beau ou très froid,
Notre frère de là-bas,
Tous les soirs se rendra,
Toujours calme et tranquille du côté de la grille,
Pour tenir compagnie à nos morts
- ses amis !
- El Kala* ! Mon petit...

- Si ton mur de granit n'est que douce folie,
Il y a dans ton âme
Quelque chose de sensé :
un ciel bleu simple et pur balayé par le vent,
Où,
Les blanches mouettes,
Se racontent parfois pour ne pas s'ennuyer,
Les histoires de tes nuits par un chant mélodieux,
Qu'un goéland qui passait
Est venu, un beau soir par la mer,
Se poser sous mon toit pour me dire cette histoire,
Un beau soir où ensemble,

Nous avions sans pudeur dissipé les nuages,
Pour enfin regarder le ciel bleu

D'autrefois.
- El Kala ! Mon ami,
Si les morts eux aussi,
Ont parfois des soupirs quelque peu nostalgiques,
Permets-moi un instant,
Permets-moi de te dire et sans même faire semblant,
Que
Tu viens de nous montrer,
Que

La Nostalgie est aussi de l'autre côté.
Jean-Claude PUGLISI.
de La Calle de France
Paroisse de Saint Cyprien de Carthage

    N.B : - Ce texte a été écrit en Juin 1986.   

        - Cette histoire authentique m'a été racontée, par Hocine Rezzaz +, mon ami d'enfance Calloise.

        - Cette nouvelle du Bastion de France a pour héros, Krim, le plus jeune des frères d'Abd Al Rahman Rezzaz + - père d'Hocine.

        - Je l'ai appelé El Kala le petit dans cette narration.

        - On lui donnait le sobriquet de " Forteresse" ! ? C'était un alcoolique notoire, d'esprit simple et de tempérament taciturne, vivant au jour le jour aux bons soins de sa famille et de ses amis Callois.

        - Après l'indépendance de l'Algérie en Juillet 1962, Forteresse quitta son domicile pour s'installer définitivement dans le cimetière des Chrétiens... Je ne manquais pas alors de reprocher à sa famille, de laisser leur frère ce simple d'esprit, résider en permanence dans ces lieux particuliers...

        - Et voilà ce qu'ils m'ont répondu :

        " Forteresse a une chambre avec tout le confort possible… Mais il ne veut pas quitter le cimetière !… Parce que, après l'indépendance, ne voyant plus d'européens Callois dans les rues de la ville, son cerveau malade s'est imaginé que la seule façon de les retrouver et de continuer à cohabiter avec eux, c'était de les retrouver dans le cimetière chrétien… Là, où étaient inhumés plein de gens qu'il avait bien connus, et qui eux, n'étaient pas partis… Voilà pourquoi un jour, Forteresse a trouvé domicile dans le cimetière. "
        Et moi, j'ai pensé tout haut cette vérité biblique :
" Bienheureux les pauvres d'esprit,
le royaume des cieux leur appartient ! "
Jésus-Christ,
Sermon sur la montagne
- Mon Dieu ! Combien ils ont de la chance.
        - PASCALIN était le concierge du cimetière de La Calle.
        - Le Bafoungne = vent violent de direction Nord-Ouest - Sud-Est, soufflant en hiver à La Calle.


Sur la route de Duzerville
Par M. Lucien Cordina
Envoyé par M. A. Hamelin

              Je vous invite à me suivre sur une route de l'Est algérien. Elle part de Bône et se dirige vers Guelma. A la hauteur de Duzerville, un village de la plaine, elle bifurque pour gagner les montagnes autour de Souk-Ahras. Se fraie-t-elle un chemin en suivant une voie romaine d'autrefois ? Je l'ignore. Ses concepteurs, des militaires, sans aucun doute, imaginent un tracé, vers 1852, pour faciliter les déplacements des troupes.

              Longue, large, bien dessinée, elle s'installe dans un décor sauvage, beau, envoûtant. Elle accueille très vite, sur ses deux côtés, de profonds fossés, creusés pour permettre l'évacuation des abondantes pluies vers les oueds et éviter ainsi inondations, eaux dormantes. Des arbres, d'essences diverses, des frênes mais aussi des eucalyptus viennent se dresser, par la suite, le long de son parcours. Cette enveloppe végétale ajoute à l'œuvre d'art un cachet particulier.

              Ce n'est qu'une route. Je n'en connais pas d'autres. Elle est celle de mes rêves d'évasion d'adolescent, de mes marches contrôlées que je m'autorisais à cause des " évènements ", de mes promenades à vélo... Je n'oublie rien des vingt-deux kilomètres qui séparent Bône, la ville, de Saint-Paul, le hameau, actif, riche du labeur des hommes.

              Il fallut de nombreuses années de travaux, de sueur, de décès, hélas ! Pour qu'elle devienne l'artère indispensable qui rapproche le bled de la civilisation du XIXe siècle, puis du XXe. Je retiens d'elle, deux distances. Aujourd'hui, quand je dois effectuer un kilomètre, aussitôt j'entends une voix qui me souffle: " comme pour aller de Monville à Saint-Paul ". Quand à un carrefour je lis: " B... 5 km ", je traduis " Duzerville-Monville, 5 km ". C'est ce qu'il me reste, en permanence, de mes attaches à ce coin d'Algérie.


L'avenue de droite ou l'avenue de la Marne

              Je vous emmène, cela vaut le déplacement. Quittons Bône et partons vers la riche plaine. Nous n'atteindrons pas Guelma, nous n'irons pas skier à Thagaste, l'antique, la cité de Monique, d'Augustin, son fils. Nous nous limiterons. Nous referons le trajet que j'ai effectué pendant vingt ans, dans les deux sens. Est-elle devenue autoroute ? Peut-être ! Je n'y suis jamais retourné. Je n'ai aucune envie de revoir une terre que je ne cesse, pourtant, d'aimer. Comme moi, elle a dû changer. Je n'ai plus les mêmes yeux qu'il y a cinquante-neuf ans. Je crains de ne pas reconnaître un figuier, un néflier, un détail qui m'accompagna et qui me vit grandir. Les uns et les autres vivent leurs ambitions. Ils évoluent selon des désirs que j'ignore. Je préfère entretenir mes souvenirs, même si j'oublie le nom d'un lieu, d'une rivière, d'un pont. Ils sont autres, je suis autre...

              Éloignons-nous de la ville de ma jeunesse. Derrière la grande, la magnifique gare des CFA (les chemins de fer algériens) nous montons dans un car qui assure la liaison entre Bône et Mondovi, comme deux autres. Nous choisissons le plus récent, le plus confortable. Deux avenues s'offrent à nous pour commencer notre pérégrination. A droite, une avenue dédiée à la bataille de la Marne, à gauche, une autre, plus large (1). Elle longe les quais du port d'un côté, les voies des chemins de fer, de l'autre. Les deux, avenues de droite et celle de gauche, se rejoignent quelques kilomètres plus loin pour ne faire qu'une seule route, la route qui va vers Duzerville.

              Occupant l'ancien lit de la Boudjimaa, un oued détourné, l'avenue offre à la circulation un espace bien pratique pour entrer et sortir de Bône. Elle prolonge l'élégante rue Prosper Dubourg, du nom d'un ancien maire, aux belles façades d'immeubles pour se terminer au pied du mausolée de Sidi Brahim, construction toute en rondeur, d'un blanc flatteur.

              Bruyante, elle l'est. Du caractère, elle en a. Active, elle l'est aussi et se met au service de tous ceux qui savent se servir de leurs mains, les adeptes du bricolage. Elle accueille des ateliers divers, des boutiques, des artisans, des garages, des concessionnaires de marque, Peugeot, par exemple.

              Elle traverse la Boudjimaa, grâce à un pont romain en dos d'âne, aujourd'hui disparu, de onze arches de largeur et de hauteur différentes. En été, les eaux stagnantes de la rivière libèrent un parfum d'égout qui se répand très loin dans le quartier. Elle se prolonge entre des docks qui font la fierté de la ville : la Tabacoop, la Tomacoop, la Cotocoop, et toute une collection de " coop " véritables usines, toutes issues de l'agriculture, activité principale de la plaine qui entoure l'agglomération bônoise. Elles font vivre une importante population.


Cotocoop de Bône.

              Sur la droite de l'avenue, après le pont, il existe une petite route que j'aimais emprunter pour monter sur la colline où se dresse la basilique de Saint Augustin, " un lys merveilleux élancé vers le ciel comme une fraîche prière du matin " (Laurent Ropa, "Le chant de la Noria").

              Inspirée de la cathédrale de Carthage, construite à partir de 1881, achevée en 1909, elle conserve une relique du saint. Lieu de pèlerinage, elle accueillait en mai tous les communiants et communiantes de la région pour assister aux vêpres, et en août, vers le vingt-huit, une foule célébrait la fête du fils du pays. Une statue, coulée dans le bronze des canons turcs de la casbah, se dresse face à la cité et semble la bénir.

              Difficile de grimper là-haut sans croiser, sans s'arrêter, devant ce qui reste de l'antique Hippone. Ce ne sont que ruines, mais quelles ruines ! Colonnes, forum, théâtre, statues, mosaïques... Toute une civilisation, tout un prestige, tout un art de construire... Je regardais depuis la route. J'admirais. Je ne disposais pas de guide pour m'expliquer la vie d'ici au temps de la puissante Rome. Je le regrette. Mes professeurs d'histoire du collège négligeaient les visites guidées. Les attentats, toujours possibles, interdisaient toute initiative. Ils appliquaient les consignes du ministère de l'Éducation nationale de Paris. Ils ne parlaient que de Lutèce, de la Gaule romaine, de nos ancêtres les Gaulois, de Vercingétorix, rarement de l'Algérie ancienne, de son histoire. Navrant !


Ruines d'Hippone et vue de la basilique de Bône.

L'avenue de gauche ou l'avenue qui commence en longeant les quais du port...

              J'ai oublié le nom de " l'avenue de gauche " celle qui commence en longeant les quais du port. Avait-elle un nom? Au départ, elle n'est qu'une grande esplanade brûlée par le soleil en été. Des constructions de prestige, une brasserie " Le Maxeville ", l'entrée du cours Bertagna, l'artère emblématique de la Coquette (l'adjectif que l'on attribue à Bône), limitent son extension vers le nord. Elle décide alors d'encercler une " halte-fraîcheur " où des palmiers tentent de créer une oasis dans un désert de pavés, de goudron. Puis, nonchalante, elle vient s'appuyer sur la façade de la gare des Chemins de fer algérien, au sud, magnifique réalisation à l'architecture un brin mauresque avec des grandes baies vitrées, bien dessinées, un minaret, fier, élégant, une horloge à son sommet.

              Je la revois, détendue, accueillante, sur les bords de la petite darse face à la centrale électrique qui s'élève sur l'autre rive. Très vite, elle s'agite. Ce n'est plus la promenade idéale. Des entrepôts, des agences maritimes se succèdent et attirent des camions, des véhicules de toutes sortes. Elle se prolonge jusqu'à l'embouchure de la Seybouse, paradis des pêcheurs, des athlètes pratiquant l'aviron.

              Des maisons basses derrière des jardins fleuris nous conduisent à Joannonville. Nous les suivons et nous entrons dans un village de bord de mer. Ce n'est pas encore une station balnéaire à la mode. Elle en a pourtant toutes les vertus: longues plages de sable fin, dunes, coquillages... Il fait bon y vivre.
              Un pont construit au-dessus des lignes de chemin de fer, sert de lien aux deux avenues, celle de droite et celle de gauche, pour former une seule route qui part à la conquête des villages parsemés de la plaine avant d'atteindre les monts qui entourent Souk-Ahras.

              Née du génie, de la sueur, de l'abnégation des républicains aveyronnais mais aussi des " transportés " venus du Gard, de l'Hérault, des Pyrénées-Orientales, la route devint au fil des ans, un axe routier important. Au-delà de Souk-Ahras, elle s'aventure dans le Sud, vers Tébessa, vers les Aurès, vers les mines de fer de l'Ouenza, vers les mines des phosphates du Kouif. Nous ne parcourons qu'une vingtaine de kilomètres à travers une plaine aux couleurs changeantes de la vigne, verte au printemps et en été jusqu'aux vendanges, rousse en automne, marron, couleur des ceps dénudés, en hiver. Nous croiserons des enclos dignes de Provence, avec de hauts cyprès qui protègent les arbres fruitiers des vents marins, des cimetières où reposent tant de pionniers.

La route

              Je partais en voyage chaque fois que je montais dans l'autobus pour aller de Monville à Bône, rejoindre le lycée, le cinéma du dimanche après-midi, ou de Bône à Monville, mon lieu de résidence. Quel voyage ! Les vignobles se perdaient dans l'horizon où allaient heurter les djebels, au loin. Le soleil, rarement absent, brillait et mettait en valeur le bleu des montagnes, les couleurs multiples des plantations, des champs cultivés avec art. Je n'ai jamais pensé photographier ces lieux. Ils appartenaient à mon histoire, à mon univers et jamais, je n'ai songé qu'un vent de l'histoire, maléfique, me priverait un jour, de ces merveilleux endroits.

A - De Bône à Duzerville

              Le car quitte " son arrêt bus ", s'engage dans l'avenue de la Marne et file vers Mondovi. Il laisse la ville et atteint, après avoir aperçu Joannonville, l'Allélick, l'Aalig, la terre promise...

              Les anciens, venus de Malte, connaîtront sur les terres de l'Allélick, aujourd'hui si florissantes, l'enfer. Certains obtinrent une concession, un cadeau du gouvernement français, un cadeau que le réceptionnaire paya souvent de sa vie. Téméraires, travailleurs acharnés, les Maltais, originaires pour beaucoup de Gozo, s'attaquèrent aux ronces, aux fourrés impénétrables, aux figuiers de barbarie enchevêtrés, aux serpents, aux chacals, aux marécages. Ils défrichèrent, ils asséchèrent, ils piochèrent...

              Grâce à leur obstination, à leur travail, fruits et légumes divers sortent des terres devenues généreuses, irriguées par une eau limpide que des norias, jamais épuisées, distribuent sans compter. Ainsi, la persévérance et l'intelligence des hommes sont récompensées. Ils ont transformé une brousse hostile en une campagne où il fait bon vivre.

              Mais, les jardiniers de l'Aalig ne restent pas longtemps seuls. Leur savoir-faire, leur combativité, tracent le chemin vers de nouvelles initiatives. Un aérodrome voit le jour. L'industrie s'installe à proximité de cet exceptionnel paradis vert. La SNAF, la plus importante, annexe d'un industriel alsacien, travaille le fer, monte, répare les wagons pour les CFA. Là, où il n'y avait que marécages, un patelin se développe. L'Allélik aux fermes éparses, aux usines inventives, aux jardins verdoyants, borde la route sur une étendue d'une lieue.

              Le car ignore " Le jardin de l'Allélik " cher à Laurent Ropa, le poète. Il poursuit sa route entre des haies d'arbres. Nous arrivons au pont Bouchet, premier arrêt. Une rivière traverse la route, les cultures. Elle se perd dans la Seybouse, quelques kilomètres plus loin. Des personnes descendent devant une maison de ferme. Il y a peu de monde à cet endroit. La campagne domestiquée, fertile, s'étend à perte de vue.

              Nous continuons notre avancée. La route, presque droite, aperçoit très vite les premières maisons de Duzerville, Galmoussaïa.

B - Galmoussaïa (2), El Hadjar, Duzerville

              Trois noms pour un même lieu. Galmoussaïa et Duzerville se confondent. L'ancienne appellation, Galmoussaïa, se substitue souvent à la nouvelle. Ceux qui utilisaient parfaitement la langue arabe disaient quand ils s'y rendaient : " Je vais à Galmoussaïa ". Tout le monde comprenait et cela ne gênait personne. Quant à El Hadjar, un bled perdu au milieu des terres agricoles, il a gagné en renommée quand le Plan de Constantine de 1959, décide d'installer une aciérie pour traiter le minerai de fer de l'Ouenza.

              L'appellation " Duzerville " naît le 12 février 1845 lors de la création du village par le général d'Uzer, où il créa la première exploitation agricole. Il administra Bône, de 1832 à 1836, avec énergie et sagesse. Très vite, le bourg prend une extension considérable. Des fermes importantes naissent. Commune de plein exercice depuis le 22 août 1861, sa prospérité s'affirme. Pâturages, céréales diverses, vignes, couvrent très vite les terres environnantes.

              J'ai une affection toute particulière pour ce village. Nous y entrons entre deux rangées de bâtisses d'un étage. Nous nous arrêtons près de la grande place où se déroulent des fêtes, chaque année, à la fin des vendanges. Il y a foule sur la piste de danse, dans les rues, devant les baraques foraines, les manèges.


L'église de Duzerville

              L'église se dresse au bout d'un long, large mail arboré. De jeunes arbres, prometteurs d'ombre, de verdure, se développent. Une rue qui part vers les campagnes de la périphérie, sépare le presbytère de la mairie, de la mosquée. Un boulodrome s'étend de l'hôtel de ville jusqu'à la place où s'élève le monument aux morts des deux guerres, 1914-1918, 1939-1945, où des noms de musulmans, de chrétiens, " Morts pour la France " se suivent sur un marbre sombre...

              Nous nous éclipsons en empruntant une rue commerçante au bout de laquelle nous croisons la gendarmerie et surtout l'important groupe scolaire.

C - De Duzerville à Saint-Paul

              Notre excursion s'arrêtera à Saint-Paul. Notre route, elle, continue vers Darhoussa, puis vers Mondovi. Darhoussa vit les premières années d'Albert Camus. Mondovi, gros bourg, fut créé en 1848 par des Parisiens volontaires.

              Six kilomètres nous attendent sur une artère carrossable, fréquentée, bien droite, encadrée des inévitables fossés, profonds, prévus pour l'évacuation des eaux de pluie. Si la rive gauche accueille une haie d'eucalyptus derrière laquelle se cache une voie ferrée, celle de droite a choisi une allée d'oliviers qui s'étire jusqu'au domaine de Monville.

              Une centrale électrique occupe un terrain gagné sur le maquis. Deux lotissements remplacent des champs incultes à proximité de " La Lorraine ", immense exploitation agricole. Une longue allée, bordée d'imposants palmiers, les sépare et s'enfonce dans la campagne. L'un regroupe de petites maisons sans prétention avec jardin, l'autre des édifices, avec cour intérieure protégée des regards. Ces derniers, suppriment progressivement les gourbis où vivent les ouvriers saisonniers.

              Saint-Paul, un lieu-dit, se forme autour d'une gare CFA : une école, une ancienne prison, un bar, une épicerie-papeterie, un marchand de bonbons avec sa petite carriole et surtout de grandes propriétés : Monville (3), la SAFHI, le Chapeau de Gendarme.


Gare de Saint-Paul.

              La gare gère le passage des trains de voyageurs, de marchandises, et ceux qui mènent au port le minerai de fer de l'Ouenza, les phosphates du Kouif. L'école s'efforce de scolariser tous les enfants de la contrée. Trop petite, elle laisse, malheureusement, de nombreux gamins sans apprentissage de l'écriture, de la lecture.

              La prison, quant à elle, vidée de ses occupants, attend une nouvelle affectation. Les trois grosses propriétés se spécialisent dans la vigne et le vin, les pâturages et les troupeaux, les fruits, nombreux et divers, les agrumes. Ainsi, les friches, les marécages reculent, disparaissent sous des habits de verdure.

              Des promenades, entre Monville et Saint-Paul, entre Saint-Paul et le Chapeau de Gendarme, s'improvisent. Le calme, la sécurité, invitent à la flânerie, aux balades à vélo. La SAFHI, très étendue, se traverse. Certains catholiques assistent à la messe dans une salle aménagée en chapelle appartenant à un viticulteur.

Le départ

              Je me souviens d'une route. Je l'utilise pour la dernière fois en juin 1962. Je quitte Duzerville un matin. Il fait beau, ce jour-là. L'été s'installe. Nous roulons lentement. Les arbres, les maisons isolées, abandonnées depuis longtemps, et les autres, défilent. Je ne sais plus si je m'attarde sur un site en particulier. Je regarde simplement. Je ne retiens rien de ces moments. Je n'éprouve aucune peine, aucune envie de protester. Je pars. Le drapeau bleu-blanc-rouge ne flotte déjà plus au mât de la mairie. Par contre, les drapeaux des arrivants se dessinent sur les murs du village. Des slogans injurieux, menaçants, écrits en bon français, sans faute d'orthographe, les accompagnent : de véritables appels au crime.

              Les années sont passées. Un habitant de El Hadjar, que ma famille connaît, m'invite. Comment a-t-il fait pour avoir mon adresse ? Je préfère ne pas le savoir.
              - " Viens, dit-il, tu es chez toi, ici. C'est aussi ton pays ".

              Ce n'est plus mon pays. Il m'a rejeté. Il a repoussé les miens les accusant de tous les maux. Je ne renierai jamais l'amour que j'éprouve pour cet Est algérien qui m'a instruit, qui m'a appris à respecter le travail des hommes, leurs croyances. Je continue à suivre son évolution, ses luttes, ses espoirs. Je n'oublie pas que mes grands-parents quittèrent Gozo, traversèrent la Méditerranée sur une barque avec, pour seul bagage, une malle, où s'entassaient quelques souvenirs, des vêtements, sur laquelle ils s'appuyèrent quand la mer se faisait violente. Ils rêvaient d'une vie différente de celle qu'ils avaient à Marsaforn, leur patrie. Sur la terre d'Algérie, le travail pénible fourni devait aider leurs enfants à s'épanouir et cesser d'être de simples jardiniers, comme eux, comme leurs ancêtres. Je n'oublie pas que la fortune ne fut jamais au rendez-vous. Ils travaillèrent, peinèrent, s'épuisèrent, partagèrent avec leurs voisins, sans distinction de race ou de religion. Ils connurent la joie d'exister sur une terre qu'ils façonnaient.
              Alors, va, Algérie... Sois heureuse !

              Et vous qui me lisez, qui avez utilisé cette route, pardon s'il y a des erreurs, des oublis... Le temps est passé.
Lucien Cordina
L'Algérianiste N°176 décembre 2021

              Comme je n'ai pas la possibilité de joindre M. Cordina pour lui faire part de " ses oublis ", je les note ci-dessous. Le webmestre.
              1- la route de gauche est la Route Nationale N°12 qui longe les quais de la gare
              2- C'est au Général d'Uzer cependant que doit revenir le mérite de la fondation de cet important centre agricole qui porte aujourd'hui son nom " Duzerville ", et qui n'était en son temps qu'une vague bourgade indigène à l'appellation non définie, puisqu'on la nommait aussi bien " Bouzaroura " que " Ghamoussaïa ". Louis Arnaud.
              3- MONVILLE fait partie de la série de grands domaines agricoles de la région de Mondovi : MONVILLE, GUEBAR, CHAPEAU DE GENDARME, La LORRAINE, BEUGIN, DARHOUSSA, SAINT PAUL, GAZAN...
              Tous ces domaines étaient la propriété de grands propriétaires qui avaient des régisseurs et qui administraient leurs domaines comme des petits hameaux, dans certains, on trouvait des petites écoles, des cantines, des chapelles, des infirmeries, des commerces domaniaux, etc...
              4- Erreur : Albert Camus n'est pas né au domaine de Darhoussa mais à celui de Saint Paul. Voir la Seybouse 114.



LE MUTILE N° 124, 18 janvier 1920

Histoire d'un humble Héros
               De la Vigie Marocaine :
               On les oublie déjà les héros de la grande guerre ! Les hurlements des vivants se ruant, en masse les vins contre les autres pour se disputer des parts de bonheur, étouffant la voix sainte des morts, honneur de l'humanité. Et la presse haletante suit la cohue bruyante oubliant une des plus belles parties de son programme, rappeler de temps en temps les heures sublimes qui viennent de s'écouler.
               Ressaisissons-nous donc en reproduisant cet émouvant récit du capitaine Rouillé sur la mort, héroïque d'un marsouin :

               Le 22 août, 1914, à Rossignol (Belgique) je, fus blessé. Immobilisé et abandonné sur le champ de bataille, j'allais être fait prisonnier, lorsque le soldat réserviste Godefroy, de ma section, prit l'initiative de me transporter au milieu d'une haie.
               J'estimais Godefroy. Je savais qu'il était cultivateur pas très riche en Normandie.

               Au milieu de la nuit, appuyé, sur lui, je gagnais le bois, afin de prendre la direction de l'Ouest que je supposai libre d'ennemis. Hélas, le bruit du canon s'éloignait d'heure en heure. Nous étions abandonnés, perdus derrière les lignes allemandes. A ce moment nous rencontrâmes le caporal Pochard qui nous suivit.

               Pendant 6 jours, nous errâmes dans les bois et les champs au milieu des troupes ennemies. Les betteraves et les carottes crues composaient notre nourriture.
               Le 28 vers midi, notre attention fut attirée par des commandements poussés par des Allemands. Ces derniers faisaient une battue.

               Vu l'état d'épuisement dans lequel je me trouvais et les souffrances causées par ma blessure non pansée, depuis six jours, je n'avançais qu'avec beaucoup de difficultés. Les deux soldais étaient obligés de me soutenir. Pendant ce temps, les Allemands gagnaient du terrain.
               N'étant plus cachés par les taillis, ils nous aperçurent, et commencèrent à tirer sur nous. Voyant que la partie était perdue, je donnai l'ordre au caporal Pochard et au soldat Godefroy de prendre le pas de course vers un taillis qui se trouvait à quelques centaines de mètres en avant. Le caporal obéit avec raison, mais Godefroy refusa de me quitter.

               " Ils me fusilleront avec vous, me dit-il, mais il ne sera pas dit que j'aurai abandonné mon officier seul aux mains des boches". Epuisé, à bout, de forces, je me suis affaissé. Une minute après les Allemands nous entouraient. Le capitaine me demanda aussitôt si j'étais le chef des francs tireurs qui harcelaient leurs convois. Sur m'a réponse négative, il se mit en colère et donna l'ordre de, nous fusiller.
               En effet, trois hommes se précipitant sur moi, me placèrent contre un arbre. Les mêmes dispositions furent prises contre Godefroy. Voyant qu'il n'y avait rien à attendre de cet officier, je lui fis remarquer qu'étant, en uniforme et appartenant à un corps organisé dès le temps de paix, il devait nous traiter en prisonniers de guerre.
               Monsieur, me répondit l'officier allemand, je n'ai pas de compte, à vous rendre, je ne vous ferai pas fusiller parce que mon lieutenant vient de me faire remarquer que vous êtes blessé, niais le soldat, qui n'a rien le sera. "

               Je cherchai à lui faire comprendre que le soldat aurait pu se sauver, qu'il était resté avec moi pour me soigner. Cette brute ne voulut pas entendre raison. Pour couper court, à l'entretien, il me fit empoigner par deux soldats et donna l'ordre de fusiller Godefroy. Ordre suivi immédiatement d'exécution.
               J'assistai impuissant à l'assassinat de mon malheureux compagnon de misères, victime de son dévouement.

               Avant de mourir, il me remit, pour, ses parents, un mandat-télégraphique qu'il n'avait pu percevoir avant son départ de Cherbourg et son livret militaire. Prenant la position réglementaire, il me salua en me disant adieu ; puis, avec un air crâne, il fit face à ses bourreaux et attendit la mort avec un calme des plus saisissants. Ma reconnaissance pour cet humble héros est sans borne.

               A cet effet, j'ai l'honneur de demander que la croix de guerre soit accordée au soldat Godefroy pour son dévouement, son esprit de sacrifice et l'héroïsme dont il a fait preuve en présence de la mort.
               Cette récompense posthume sera une douce consolation pour ses parents, pauvres cultivateurs de la commune de Néhou, canton de St-Sauveur-le-Vicomte. (Manche).
Signé : Capitaine BOUILL.É.

               N.D.L.R. - Nous pourrions compter par millier les actes de bravoure de nos soldats, mais hélas la guerre est finie et l'on oublie vite les sacrifices ; on oublie les revenants, de la grande tourmente et il est encore plus facile, d'oublier ceux qui ne sont plus.
               Que de beaux actes nous aurions à enregistrer à côté des cas d'indifférence que nous rencontrons tous les jours.



Les Maltais à Bône
Envoyé Par Mme Paule Caillat
Le pionnier a précédé tous maltais les autres
          C'est l'éloge d'un peuple. Sous le titre Bône, son " Union ", son peuple (esquisse sociale), L'Afrique du Nord illustrée publiait un très intéressant dossier d'une vingtaine de pages serrées consacré à Bône, dans sa livraison du 16 novembre 1935. Nous en extrayons ces lignes consacrées aux Maltais qui représentaient une part importante de la population de la ville, tant par leur nombre que par leurs activités. A. Segui.

           PARMI les six ou sept espèces raciales, rencontrées à Bône dans leur pureté ou leur croisement, la priorité sans doute revient à la compagne fidèle de la première heure, à celle qui devait donner la saveur à l'amalgame social bônois. Priorité, parce que dans les parages de Bône, le pionnier maltais a précédé tous les autres et a payé une lourde rançon aux fièvres, épidémies et à l'insécurité de la broussaille marécageuse. On en trouve même avant l'occupation qui étaient établis dans la région, soit comme jardiniers, souvent. Captifs, soit qu'ils allaient rapporter de Malte du cumin ou des bijoux en or rouge ".

           Contraint d'émigrer
          Le Maltais est plein de vertus solides : mais serait-il homme, s'il n'avait pas ses défauts ?
           Attaché à la terre, tant désirée sur ses îles trop petites, durement conquise en Algérie et enrichie par les apports, végétaux et animaux, de son pays natal; la terre qu'il ne voudra plus lâcher dès qu'il l'aura mise en valeur, qu'il aime en connaisseur de son métier et en indifférent à d'autres passions, cherchant plutôt, dans son isolément moral de la société et en quelque méfiance de celle-ci, à thésauriser, à l'instar du paysan de France.

           Attaché à sa famille, il demande à l'épouse, envers laquelle il est très respectueux et dont, il ne saurait guère divorcer, de garder la retenue sérieuse. nécessaire en pays musulman, de s'occuper de la bonne éducation des enfants, quitte à donner plus tard et souvent les filles en mariage aux Français d'origine.

           Acquérir le droit de citoyen français
Carte_Indochine           Etant contraint de quitter son foyer original, où sur deux cents km carrés se pressent deux cent mille habitants, il s'est attaché à la France et à l'Algérie qui lui ont offert une cordiale hospitalité. Il est heureux de vivre à l'ombre du drapeau français pour lequel la légion maltaise s'était sacrifiée en Egypte sous Kléber. Dès l'abolition de la course, il a préféré aux autres pays d'immigration l'Algérie, proche par la situation géographique et l'idiome indigène, analogue à son patois. Quoiqu'il soit sujet anglais, ou peut-être précisément, parce qu'il n'est que sujet, non pas citoyen, il préfère aux possessions britanniques la terre française, où il acquerra facilement le droit de citoyen.

           Elégante Maltaise en costume traditionnel dans une rue de M'dina (Ph. M. Segui, 2005)

           Aussi s'est-il fait naturaliser en grand nombre. Il émigre, sans esprit de retour, cesse les relations avec le pays natal, et en oublie jusqu'à sa langue maternelle, dès la troisième génération. Ayant subi. au cours des siècles, seize jougs politiques différents, appartenant toujours au plus fort navigateur, lequel paraissait avoir besoin de la clef de deux mers, il porte l'estampille du peuple amorphe. Donc, s'abstenant de politique, il est pacifique, respectueux de l'ordre et de l'autorité lesquels il désire. Sorti d'un mélange de races, comme indiquent son type physique et ses noms de famille, tirés de l'arabe, du latino italien, du français ou anglais, et, tout en gardant aussi longtemps que possible ses qualités intrinsèques, il se dissout dans les autres peuples chrétiens.

           Le poids des traditions
           Attaché à la foi que saint Paul avait, lors d'un naufrage, prêchée personnellement aux ancêtres, foi respectée pendant plus de deux siècles par le maître musulman, et, plus tard, défendue par les Chevaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem, jusqu'en 1798, où les sans-culottes, moqueurs et irrespectueux de Vaubois finirent par faire livrer l'archipel à la révolte et aux Anglais ; attaché aux traditions de ses îles où la séparation des pouvoirs de l'Etat et de l'Église a été opérée dans un esprit d'équité, où est laissée toute liberté au clergé et aux ordres quant à leur ministère d'autel ou de conscience, la liberté publique aux fêtes religieuses, la liberté privée à l'individu d'aider aussi généreusement que bon lui semble, l'exercice du culte et ses administrant le Maltais est fier d'avoir été appelé publiquement et quant à lui seul, par Lavigerie, " l'ami fidèle ".

           Se créer une situation...

           Travaillant de jour et de nuit, robuste, sobre, détestant, le faste, fort économe, conscient que le temps ne respecte que ceux qui l'ont respecté. (c'est-à-dire, que rien n'est moins assuré de durer qu'une fortune trop hâtivement amassée), il arrive presque infailliblement à se créer une situation matérielle solide. Celle-ci lui permet, de ne jamais répondre par un refus à l'appel incitant sa générosité d'aider une bonne œuvre. En connaisseur des belles qualités colonisatrices de cette race, un grand diplomate, Paul Cambon, a recommandé et encouragé, du temps où il était résident général à Tunis, une forte immigration maltaise dans l'Afrique du Nord.

           ...Après avoir débarqué pieds nus
           Souvent, le Maltais a débarqué quelque part, sur un quai de la côte nord-africaine, pieds nus, ayant pour tout bagage la veste sur le bras et beaucoup d'énergie latente dans sa poitrine. Il cherche à gagner sa subsistance, d'abord comme il peut, soit en portefaix, ouvrier, domestique de ferme, garçon boulanger, commis de commerce ou chauffeur, quelquefois, par exemple, au début de l'occupation française, en interprète (connaissant l'arabe, l'italien, l'anglais, le français).

           On croit découvrir une analogie avec Singapore où bien des millionnaires d'origine chinoise ont débuté comme simples coolies. Avec quelques économies réalisées et parfois grâce au concours de compatriote, il ouvre une petite boutique, contenant chaque jour un peu plus de comestibles, légumes, fruit, également épicerie, boulangerie ou boucherie. Il augmente bientôt son activité, en tentant, de temps à autre, une opération commerciale qui s'offre à lui, sur céréales, farines, bestiaux, fourrages. Ces marchandises sont celles qu'il préférera, dès qu'il pourra disposer des moyens nécessaires pour en faire le commerce sur une plus grande échelle. Il en fera, de même, l'exportation vers Malte et ensuite à d'autres destinations. Il entreprendra le commerce d'immeubles. Encore au milieu du siècle dernier quelques-uns pouvaient faire le troc lucratif des produits du sol algérien contre " l'or rouge " de Malte.

           Initiative prudente
           Comme le Maltais est également, chez lui, excellent marin autant que pécheur, le nouvel arrivé, s'il s'y connaît, se fera, plus tard. agent maritime, armateur, propriétaire de bateaux rie pêche, ou approvisionnera les navires en charbon. Il fera aussi les transports sur terre : roulage. garage.
           Le garçon de ferme deviendra maraîcher, cultivateur et un jour, à force de sueur et d'économies, peut-être grand propriétaire.
           Dans les entreprises industrielles, aux possibilités encore bien restreintes, en Afrique dia Nord, le Maltais était dans la région de Bône le premier qui actionnait, à force animale, et plus tard à vapeur, les moulins à huile, ceux à farine et les fabriques de pâtes alimentaires. Par la diversité de ses occupations, le Maltais fait preuve d'initiative, cependant, additionnée d'une forte dose de prudence qui lui conseille de ne pas porter, comme on dit, tous ses oeufs clans le même panier.

           Honnête et fidèle à sa parole
           Le Maltais, devenu Français, désire réserver à ses enfants un sort, à son avis, plus enviable, en leur faisant donner une instruction qui se termine à Alger ou à Paris, et laquelle leur permettra d'embrasser des professions libérales ou de se faire officier dans l'Armée française. Ses enfants seront plus rarement fonctionnaires. A Bône même, il y a un médecin, deux pharmaciens, deux professeurs de collège d'origine maltaise. Nombreux sont les Maltais décorés de la Légion d'honneur ou qui font partie de la chambre de commerce et. de la municipalité.

Au Réveil du lion, établissements Laussat, à l'angle de la rue des Volontaires


           Les dispositions du Maltais pour le petit et le grand commerce sont indéniables. - l'entraînement traditionnel ne faisant pas défaut sur ses Îles, à l'origine phéniciennes et servant longtemps d'emporium entre l'Europe occidentale et le Levant. Malgré qu'il soit hanté par l'amour, légitime, du gain, son intelligence lui recommande l'honnêteté et la fidélité à la parole donnée, comme les seuls moyens possibles de créer et d'entretenir l'atmosphère de confiance, base de toutes relations commerciales suivies. Sans doute est-il partisan du fair-play commercial des Anglais.

           Bône, citadelle maltaise nord-africaine
           Les Maltais sont. arrivés à constituer les fortunes des plus importantes dans Bône-même, leur citadelle nord-africaine. En dehors, ils ont, des propriétés réparties un peu partout. Parmi elles, l'Allélick, (sis sur le territoire de la commune de Bône) est resté leur fief rural.

           Pour en comprendre le motif, il faut se représenter les peines qu'ils y ont endurées jadis, dont une description, sous forme de roman admirablement réaliste, est donnée dans " Le chant de la noria ",, par un jeune Maltais Bônois de grand avenir littéraire.

           A Bône, on ne voit jamais de Maltais quémander l'aumône. Humiliation, devenue inutile du fait de l'existence, depuis 1904, d'une Société amicale franco-maltaise, dénommée " La Valette ". Celle-ci peut être désignée également sous le nom de " Croix de Malte", son emblème.

           Un conseil municipal de bonne entente a été constitué au dernier scrutin. Voir sa composition qui peut satisfaire tout le monde : sur trente membres, la moitié est d'origine française, dont six Corses ; neuf membres ont leur origine à Malte, trois en Italie, deux en Israël, un parmi les Musulmans.

           Une magnifique église, dédiée à Sainte-Thérèse-aux-roses, sera terminée cette année. Placée sur une colline du faubourg Saint-Cloud-les-Plages, et dominant la mer, cette circonstance et sa construction d'actualité rappellent bien la sainte moderne de Lisieux. L'extérieur seul est au prix de six cent mille francs, couvert par souscription bônoise ou emprunt, lequel a pu être contracté rapidement par les membres du conseil d'administration (ou conseil de fabrique de la cathédrale. NDLR), en grande partie maltais, à un taux d'intérêt, très bas et, soit dit, grâce à la garantie fournie par les membres du conseil eux-mêmes.

           Une entraide très active
           Les premiers pas de la Société ont été guidés par un Maltais, venu pieds nus de Tunis à Bône. Les millions (or) que ce dernier a su acquérir par la suite, ne le laissaient pas oublier la misère des autres, telle qu'il l'avait connue lui-même. Après la guerre et après avoir traversé une époque de sommeil ; " l'Amicale " prend un nouvel essor, grâce au talent organisateur d'un homme de cœur et qui la dirige depuis 1924. Ce président met également ses vastes bureaux à la disposition des sociétaires qui s'y donnent rendez-vous. Comme, par suite de l'action sociale de la Société, le Gouvernement de Sa Majesté britannique se voit débarrassé du souci pour ses sujets maltais, se trouvant à Bône et dans le besoin, il a décerné (en 1934) au dit président actuel pour les services rendu le grade de " Honorarv officer ", dans " l'Order of the Bristish Empire ".

           Ceci indique que la Société se compose non seulement de Français d'origine maltaise, mais également de Maltais habitant Bône et ayant conservé leur nationalité d'origine. Du reste, le vice-consul d'Angleterre est l'un des présidents d'honneur de la " La Valette ". De même, le but de l'Amicale est poursuivi par l'entraide, matérielle et morale de tout sorte, apportée aux membres adhérents, et l'aide offerte â leurs compatriotes sujets anglais qui viennent se fixer à Bône. Cette aide comprend principalement : la délivrance de bons de secours (dans les cas d'urgence de secours en espèces) : le relèvement des naufragés de la fortune par le travail ; l'embauche des chômeurs ; et, le cas échéant, des démarches facilitant la naturalisation. Cependant, la Société ne donne aucun prêt d'argent.

           Les sociétaires sont aujourd'hui au nombre de six cents environ. Les femmes membres sont exclues de L'administration et des délibérations de la Société. Elles ne prennent, non plus, part au banquet annuel, organisé par le Conseil d'administration et honoré de la présence des notabilités locales ainsi que de la presse, le banquet a lieu en hiver et en ville. En été, une partie de pêche dans les environs réunit les hommes-sociétaires toute une journée, agrémentée par la plus franche gaieté.

           Un de ses fondateurs et président d'honneur est le doyen actuel des Maltais bônois.
           A l'âge de onze ans, il avait débarqué d'un voilier venant de Malte et il n'y est retourné qu'une seule fois pour une huitaine de jours. Mais il en a fait vivre pour la première fois la fameuse Société de musique de l'île à Bône, afin de contribuer au prestige de ses compatriotes. Toujours loyal vis-à-vis du gouvernement qui lui avait accordé l'hospitalité, il. appela le Beau café, créé par lui à Bône, d'après l'impératrice Eugénie. Il s'est fait naturaliser et a donné plusieurs de ses enfants ou gendres à la France en danger. Il reste l'exemple bônois d'un " chevalier de Malte ".
           Le Maltais est, pour ainsi dire, réfractaire à l'esprit de retour au " pays " qui n'a jamais été le sien.
G. Jacques Bertrand,
docteur ès-sciences politiques
et économiques


           Un arbre en souvenir de nos ancêtres
           Tout un symbole : affichettes sur des arbres du parc national de Ta'Qali, près de M'dina, à Malte, et dont la plantation a été financée par des membres de Généalogie Algérie Maroc Tunisie originaires de Malte (Ph. A. Segui, 2005).

           L'Autorité touristique de Malte et la direction du parc national Ta'Qali ont en effet établi le Roots Circle Project qui a permis de lancer, en 1999, le Roots programme sous l'égide du ministère du Tourisme. Le but est d'encourager les émigrés maltais actuels ou des descendants de visiter le pays de leurs ancêtres afin de découvrir leurs racines. C'est pourquoi Généalogie Algérie Maroc Tunisie s'y est très rapidement associée.

           Lors du voyage à Malte, " Retour aux sources ", du 29 septembre au 6 octobre 2005, au parc Ta'Qali, le président Claude Delaye et plusieurs participantes et participants ont symboliquement planté un olivier en souvenir des ancêtres qui ont émigré en Algérie.

**************

Laurent Ropa, Mario Scalési
compatriotes par la patrie d'adoption
autant que celle d'origine

           Arrivé très jeune en Algérie pour l'un, né en Tunisie pour le second, ils y ont vécu la totalité de leur existence ou une grande partie. Tous deux d'origine maltaise, écrivant en français sans jamais renier leurs origines, mieux en les revendiquant, en s'y référant sans cesse.

           À tel point que l'université de Malte leur consacre un cours qui " vise à familiariser les étudiants avec deux auteurs de souche maltaise. Poète et romancier, Laurent Ropa tire son inspiration de la terre de ses ancêtres et de son pays d'adoption. Son patriotisme pour l'île qu'il n'a jamais visitée est attesté aussi par ses traductions en français d'ouvrages maltais et par des études littéraires sur leurs auteurs. Tristesse, révolte, désespoir, de rares accents de résignation marquent Les Poèmes d'un Maudit de Marius Scalési. "

           Au terme de ce cours, il est demandé aux étudiants de dire " dans quelle mesure les origines maltaises de Laurent Ropa sont présentes dans ses œuvres " et, dans le cas de Marius Scalési, ils " analyseront particulièrement son pessimisme dû à un grave accident au cours de son enfance ". Une bibliographie est proposée aux étudiants.
           En 2002, le lycée de Marseilleveyre, à Marseille, a piloté un voyage en Sicile, en partenariat avec le lycée Gustave-Flaubert de Tunis, " autour du poète Marius Scalési " (c . Notes en dernière page).

Carte_Indochine           II est né à Xaghra, Gozo (et-dessous ; 3700 habitants environ, aujourd'hui) en 1891, arrivé à Bône avec ses parents, deux ans plus tard. Lui-même n'est jamais retourné dans sa terre natale. Comme d'autres Maltais, son père, Guzeppi (Giuseppe), et son épouse, Karmela, ont quitté Gozo avec Antoine et Laurent. C'était donc en 1893. Guzeppi était parti plus tôt.. dans sa seizième année, revenait à Gozo dès qu'il en avait les moyens, puis s'y est marié. Dans Le Chant de la noria, roman que Laurent publie en 1932, il évoque leur vie " dans ce coin près de Bône qu'est I'Allélick (où son père loue un jardin), peuplé de Maltais, maraîchers (actifs et sérieux ". (F. Cunen).

Laurent, enfant de Gozo et de Bône

           Dans ces pages, nous souhaitons donner envie de découvrir ces poètes : à travers leur oeuvre, leur vie. leurs sentiments d'enfants et d'adultes, on reconnaît ceux de tout un peuple transplanté en terre d'Afrique française et communs à beaucoup de nos ascendants.
" A Laurent Ropa,
né à Xaghra â Noël 1891,
mort en France le 29 mars 1967,
romancier et poète français
qui a traduit en français
des œuvres maltaises,
le Conseil civique de Gozo
l'honore en ce 3° anniversaire
de sa mort. "
Plaque commémorative, inaugurée à Xaghra le 29 mars 1970, par Marguerite, née Gervaiseau, la veuve du poète, en présence des autorités civiles et religieuses. A Victoria, son buste orne un monument.

Mario, martyr ardent

Carte_Indochine            LE JOUR est encore récent où je le vis jeune, brûlant de passion intellectuelle, vibrant de toute son âme idéaliste et tendre à nous parler de la Poésie telle qu'il l'aimait, la défendait.
           C'était à Tunis, en décembre 1919. Ses épaules, affaissées par la croix quotidienne, portaient la tête ardente de martyr. Et son verbe trouvait des accents d'une éloquence si haute, que nous nous taisions pour l'écouter (Maximilienne Heller. Annales africaines, 29 juin 1922).

           Paria...
           Mario Scalési eut en effet une vie douloureuse, physiquement. et moralement.
           Il voit le jour à La Goulette, où vit la " petite Sicile ", le 6 février 1892, d'une mère maltaise et d'un père sicilien, mais, au début de cette vie, à l'âge de cinq ans, celle-ci bascule : une chute, dans un escalier, lui vaut une scoliose et une infirmité définitive, une "jeunesse, Celle des Parias en pleurs. ! Dont on exploite la faiblesse / Et dont on raille les douleurs ".
           Il écrira :
           L'instant ou j'ai cessé de vivre,
           Je le verrai longtemps encore.
           (Quand l'espoir a fermé son livre
           On peut bien dire qu'il est mort).
           "J'étouffe " fut mon premier cri
           Au premier jour de mon enfance.
           Jamais ne pointe en mon esprit
           La moindre lueur d'espérance.

           Selon Pierre Brunel "université Paris-Sorbonne), qui a très bien analysé l'œuvre de Scalési, il "a fréquenté trop peu de temps l'école primaire française en Tunisie, mais pratiqué le français et l'italien ".
           Il lui arrivera donc d'écrire un poème dans les deux langues mêlées, comme cet Amour bilingue :
           O piccina, nel franco idioma
           Per te sciolio il canto d'amor,
           Adornai la tua bruma chionma
           De rubini candenti dal cor

           Dans mes fleurs, ces fleurs illusoires
           Captivant ton sourire aimé
           J'ai béni tes prunelles noires
           E la notte che versano in me.
           O le doux jargon de folie
           Qu'égayait ton accent moqueur !
           Qu'as-tu fait, mon lis d'Italie,
           Des rubis tombés de mon cœur !

           Et grand poète français
           " Déjà rejeté, en marge des enfants de son âge, Marius accomplit quelques années de scolarité à l'école primaire de Bab-Souika (photo ci-dessous), son quartier natal ; où il fait l'apprentissage du français. Mais à la mort de son père, il doit aider à la subsistance de la famille. Il vend des journaux dans les rues, non sans continuer à s'instruire et à lire...
           Plusieurs fois, il devra changer de métier, devenant tour à tour comptable, puis employé dans une imprimerie. Ce qui ne l'empêche pus de se passionner pour la poésie française : il découvre Baudelaire, Verlaine. Rimbaud (...).
           Les premiers vers de Scalési paraissent dans La Tunisie illustrée (dont il fut un fidèle collaborateur), premiers essais qui lui valent l'admiration et les encouragements de plusieurs intellectuels tunisiens : Arthur Pellegrin, d'abord, qu'une même infirmité rapproche du poète, D. A. Guelfi, F. Huard ...
           Lorsqu'en 1916, Pellegrin fonde la revue Soleil, il confie la critique littéraire à Marius Scalési qui, sous les pseudonymes de Claude Chardon et Rocca Staïti, la signa ,jusqu'à sa mort. (...)
           " Un jour viendra. (...) où Scalési aura enfin la place qui lui revient dans notre littérature, et où cet italo-maltais, cet étranger (car il n'était pas naturalisé), sera universellement reconnu grand poète français.
Guy Dugas, Université Paris XII

           Le lac Bahira et l'îlot ChikIi (ou Chekly), dans la partie nord du lac de Tunis, et son fort espagnol. Il est relié au cordon littoral par une chaussée de 8,5 km. En arrière-plan, le djebel Zaghouan
Le lac Bahira

Le soleil africain, exubérant, fulgure.
La brise a remué des épaisseurs de feu.
Et d'un souffle salin, me jette à la figure
La méphitique odeur qui monte du lac bleu.

Pauvre lac. que l'été dessèche et diminue
Et que ronge la vase insatiablement
Eau lumineuse à qui le reflet de la nue
Inflige, enfer d'azur, un vaste embrasement

En son îlot, là-bas, le fort castillan veille.
Brisant à ses créneaux l'importune clarté,
Et seule des flamants la Visite vermeille
Console ses ennuis et sa caducité.

Les rayons ont vêtu le vétéran de pierre
Du manteau, d'or formé par leurs tissus divins.
Dans l'éblouissement de l'intense lumière
S'estompent les Djebels grisâtres et lointains.

J'entends frémir. venant de mon passé, des ailes.
Le songe bleu de l'eau m'incite à méditer.
Frôlant. le lac ami comme un vol de morelles.
Mes rêves ingénus reviennent y chanter.

Tandis que les oiseaux s'échappent vers Carthage
Ou s'égrènent sur l'onde en chapelets vivants,
Je veux, jusqu'à la nuit, vaguer sur le rivage,
En rythmant sur mon coeur le murmure des vents.

Et je ressaisirai les Douceurs Fugitives
Alors, que l'Irréel s'anime au fond du soir
Et que les larmes d'or des étoiles plaintives
Au sein du lac obscur commencent à pleuvoir.

Mario Scalési. Poèmes d'Orient

           Mario Scalési finit sa vie malheureuse dans un asile de Palerme, vaincu par la tuberculose et la folie, le 13 mars 1922. Il n'a que trente ans. Comme Laurent Ropa, il est peut-être peu connu mais pas oublié.

           Notes
           Bibliographie établie par l'université de Malte, à M'sida, à l'intention de ses étudiants :
           Ropa, L., Le Chant de la Noria. Paris, Albert Messein, 1960.
           Suite poétique maltaise, Conseil de l'Europe, 1970.
           Poètes maltais, Tunis. Editions de Mirages, 1937.
           Ropa. L., Le Tombeau de Bou-Ras.
           Le Mans, Ch. Monnoyeur, 1950.
           Scalési. M., Les Poèmes d'un maudit. Tunis. E. Saliba et Cie, 1935


           "C'est l'état civil français qui lors de l'immigration de son père en Afrique du Nord, à l'audition du nom de Rapa, selon la prononciation gozitane, transcrivit " Ropa " suis récrimination du jeune Maltais quasi-analphabète. " F. Cunen
           Selon le chanoine Félix Gaucher, de la Société littéraire du Maine et ami très proche de Laurent Ropa, qui accompagna sa veuve à Malte, en mars 1970, le plus jeune frère de Laurent, le père Rapa. était alors supérieur d'un couvent de Dominicains, à Malte. La proche famille Rapa était nombreuse.
           Les cultures des pays de la Méditerranée / Un voyage en Sicile en passant par Tunis, tel fut le thème du projet du lycée Marseilleveyre, de Marseille, conçu pour être mis en oeuvre en partenariat avec le lycée Gustave-Flaubert de Tunis et le lycée Ruggera-Settimo de Caltanissetta (60 000 hab.) en Sicile.
La première étape, à Tunis, en 2002-2003. Un partenariat nord-sud (échange Marseille-Tunis), s'intitulait : Autour du poète Mario Scalési, production théâtrale.

La seconde étape (2003-2004) comportait une session trinationale en Sicile, en co-production avec le Centre de Culture Européenne de Partanna (Sicile), le Centre de Culture européenne de Saint-Jean-d'Angély et l'Institut européen des itinéraires culturels.
Le lycée de Marseilleveyre poursuit très activement ses échanges, notamment avec la Sicile.

http://www.cairn.info/revue-de-litterature-comparee-2008-3-page-351.htm

           Généalogie Algérie Maroc Tunisie - juin 2015 N° 130


PHOTOS de MERS EL KEBIR
Envoyé par M. J.L. Ventura

LA RADE
























ENTREE DU SOUTERRAIN












Il est tard, maintenant, dors mon fils.
Envoyé Par Mme A. Bouhier
Mère, voici vos fils et leur immense armée.
Qu'ils ne soient pas jugés sur leur seule misère.
Que Dieu, mette avec eux un peu de cette terre
Qui les a tant perdus, et qu'ils ont tant aimée.
Charles Péguy

       Tu as raison, c'est drôle un nom de famille.
       Parfois ça ne veut rien dire mais ça dit tellement de choses sur celui qui le porte.

       Un patronyme on le reçoit à la naissance, on le transmet un peu plus tard, on en est pas vraiment propriétaire.
       Du coup, c'est précieux, ça s'entretient ; c'est la dernière richesse de celui qui n'a rien, et tant qu'on a un nom, on est encore, quelqu'un.

       Chez nous tu vois on en évoquait plein des noms tout le temps : Nom de scènes, de plume, d'emprunt, des noms à coucher dehors, de jolis noms qui rappelaient des comptoirs et des rivages lointains.

       Bon faut dire qu'à la maison,
       Y avait des noms qu'on n'avait pas le droit de prononcer en vain ; et bizarrement, qu'on prononçait souvent, en vain.

       Et parmi tous ces patronymes l'un d'entre eux m'étonnait par sa sonorité, c'était un nom étrange et à rallonge, qui ne m'était pas familier, il ne ressemblait pas à ceux qu'on entendait.
       Et pourtant sa seule évocation, suggérait qu'il recelait des Denoix de Saint Marc ! Un drôle de nom celui d'un chevalier d'un corsaire ou d'un aventurier.

       Quand on est grand on le sait, Denoix de Saint Marc, c'est un nom de Ministre ou de commission, un nom qui fleure bon l'administration.

       Bref ! Denoix de Saint Marc c'est un nom de gens sérieux un nom de gens bien …

       Un nom, pour lequel on fait des éloges, pas des procès (A la rentrée solennelle du Barreau de Paris, le Premier Secrétaire fait l'éloge d'un Confrère, le Deuxième Secrétaire doit faire le réciter d'un procès.)

       Et pourtant !! Ministère Public contre Denoix de Saint Marc, ce procès là j'le connais par cœur, je le connais si bien que j'en ai presque des souvenirs,

       Ecoute, écoute le grésillement des transistors.
       " Non rien de rien, … "

       21 avril 1961, depuis quelques mois on diffuse cette chanson ; Edith Piaf l'a dédiée aux légionnaires engagés en Algérie depuis 7 ans déjà.

       Dans les maisons bourgeoises, on entend des airs de swing et de jazz qui se mêlent aux chants traditionnels arabo-andalous que crachent les gargotes alentours.

       Soudain, la musique s'arrête et la radio éructe un message incompréhensible.

       " Le 1er REP quadrille Alger avec à sa tête le Commandant Hélie Denoix de Saint Marc, le Général de Gaulle ! déclare l'état d'urgence ! ". Le reste des noms et des informations se perd au milieu des ondes.

       A Bordeaux un ancien résistant se souvient d'un jeune camarade idéaliste.
       A Rennes, et à Paris des anciens déportés revivent avec émotion une nuit de décembre 1943.

       Un jeune partisan vietnamien réchappé miraculeusement de l'enfer des vietminh lui ! pense à ce commandant rencontré dans les vallées du Tonkin.

       Ce 21 avril 61, le Général Challe arrivé clandestinement à Alger avait convoqué Hélie Denoix de Saint-Marc pour lui révéler son plan, et lui proposer de prendre part à un coup d'Etat.

       " Notre action n'a rien de fasciste ou d'antidémocratique, nous souhaitons contraindre De Gaulle à revoir sa position et à négocier. "

       Denoix de Saint-Marc a 39 ans, l'acte est grave quelles qu'en soient les raisons, il le sait bien. Pourtant en moins d'une heure son choix est fait, il prendra part au putsch. Ce soir-là il réunit ses hommes et leur dévoile le plan, pas un ne refuse.
       Ni dans les marches ni dans le danger, ni même dans les défilés, personne ne sépare la légion.

       En une nuit le 1er REP s'est emparé des places fortes, l'aéroport, l'hôtel de ville, la radio.
       Challe prend la parole " Je suis à Alger pour tenir notre serment, celui de garder l'Algérie. L'armée ne faillira pas à sa mission et les ordres que je vous donnerai n'auront jamais d'autres buts. "

       En réalité, De Gaulle à Paris est serein, il sait tout du complot, il sait que Challe n'a pas d'appui et que le projet est voué à l'échec. Il laisse faire, le coup est un prétexte idéal pour s'arroger les pleins pouvoirs, et déclarer l'Etat d'urgence.

       Le lendemain il prononcera pour la forme une allocution évoquant à tort " un quarteron " et non un quatuor " de généraux en retraite ".

       Retiens, le pouvoir, c'est d'abord une parole, une voix.

       Le coup est un échec, les putschistes sont lâchés ; les soldats doivent déposer les armes et rentrent dans leur caserne. Ils sont immédiatement mis aux arrêts, et transférés au fort de Nogent.

       Le soir les gardiens les entendent chanter à tue-tête cette chanson de la môme dont ils ont amendé quelques strophes.

       Ni le bien qu'on m'a fait, ni la prise du corps d'Armée d'Alger.
       Sous le feu, quand un camarade tombe, en marchant, et même au fond d'une geôle, à la légion ! On chante !

       L'officier lui, est loin de ses hommes.

       5 juin 1961 Imagine, Paris, l'île de la cité,

       Imagine, une salle comble, on est venu de partout pour voir l'homme que le Roi veut déshonorer.

       Le procès passionne autant qu'il divise et la beauté du lieu elle, tranche avec l'ambiance de la salle.
       Les hautes fenêtres laissent passer la lumière d'un bel après-midi ; au plafond, une toile de Bonnat, la Justice pourchassant le crime.

       La grande salle d'audience de la 1ère Chambre de la Cour d'appel de Paris est un choix qui ne doit rien au hasard.
       L'endroit est si beau et si solennel qu'aujourd'hui encore Magistrats, avocats et greffiers y prêtent serment.

       Cette salle c'est un symbole, 15 ans plus tôt on y avait condamné Laval et Pétain.

       C'est ici qu'on juge les traîtres.

       Depuis un mois on s'affaire, en 30 jours à peine, tout a été refait pour l'occasion.
       Là des spots de lumières au cas où les audiences viennent à s'éterniser, ici des micros pour les témoins.
       Pas de place pour le doute, tout le monde doit comprendre de quel côté se trouve la justice.

       Transféré depuis la prison de la santé dans un camion grillagé, Hélie Denoix de Saint Marc est entravé, et pourtant les quelques escortes qui le croisent se mettent machinalement au garde à vous.

       Ses grands yeux bleus scrutent la salle, il n'a pas peur

       A la Légion on ne baisse jamais la tête ni devant la mort, ni devant Dieu.

       Fils d'avocat, il le sait bien, la justice a quelque chose de théâtral : il faut humilier l'accusé, le contraindre à la pénitence.

       Mais l'officier refuse la mise en scène imposée
       Béret vert, uniforme d'apparat, et décorations sur la poitrine, pas question de perdre la face dans cette passe d'arme, dans ce duel entre l'épée et les robes.

       Tant pis pour le résultat.

       A côté du décorum, le verdict non plus n'est pas négligé.
       Tout a été pensé, réfléchi pour aboutir à une condamnation exemplaire.

       L'institution d'abord, au lendemain de la reddition, De Gaulle commande un " Haut Tribunal militaire " sorte de juridiction ad hoc pour juger les félons.
       Pas de recours possible, le Haut Tribunal militaire juge en dernier ressort.

       Retiens ! La justice politique ne se déjuge jamais, elle ne supporte pas la contradiction. Seul espoir envisageable, une grâce absurde présentée à celui-là même qui avait créé cette institution.

       En un mois à peine l'instruction, le déféré, l'acte d'accusation, tout est bouclé sur ordre, les rares interventions des juges ne sont que de pure forme.
       Retiens dans les procès politique c'est le Prince qui juge pas la justice.

       Le Tribunal aussi est composé sur ordre,
       Maurice Patin qui officie habituellement à la Chambre criminelle de la Cour de cassation est choisi pour présider les débats, il est flanqué d'éminents juristes des Présidents de Cour d'appel, et de militaires de haut rang.

       Quelques jours plus tôt on avait déjà jugé Challe et Zeller les architectes du putsch.
       Le cas Denoix de Saint Marc lui, est différent, il n'a pas le profil convenu du réprouvé ; il n'est ni un idéologue ni un factieux.

       Le Président Patin pose quelques questions pour la forme parce qu'il faut bien faire semblant toujours le même rituel:

       - Nom : Denoix de Saint Marc
       - Prénom : Marie Joseph Hélie

       - Avez-vous déjà été condamné ?
       - Oui par les Allemands.

       Patin est furieux, cette marque d'arrogance, n'annonce rien de bon. Il reste pourtant impassible pas question d'engager un débat sur la légitimité des causes que chacun défend. Il faut absolument éviter que le putsch ait son martyr ou son héros.

       C'était pourtant juste, issu d'une vieille famille du Périgord, Hélie Denoix de Saint Marc n'a que 18 ans lorsque indigné par la défaite, il entre en résistance.

       Ici même dans cette salle nombre d'anciens camarades de toutes tendances politiques confondues sont venus témoigner pour dire qui ! est Hélie Denoix de Saint Marc. Les témoignages s'enchaînent chacun raconte ce qu'il sait de l'accusé. Par petite touche, un portait, se dessine.

       Monsieur le Président nous avons rencontré Hélie Denoix de Saint Marc une nuit de juillet 43
       Alors que nous tentions de rejoindre la France libre nous avons été dénoncés par notre passeur, arrêtés, livrés à Gestapo puis déportés dans des wagons plombés, envoyés au camp Buchenwald et affectés dans un camp de travail.
       Buchenwald, une longue valse avec la mort.
       Dans cet enfer, on perd son nom, on n'est plus personne Hélie Denoix de Saint Marc lui, a disparu : Il n'est plus que le Matricule 20543.
       Enfin, lorsque ce 11 avril 45, les américains libèrent le camp, ils découvrent des cadavres entassés dans des fausses communes à peine recouverts par la terre.

       Et pourtant, du bout du camp, émanent des râles d'agonie.
       Les libérateurs aperçoivent les corps décharnés de ces vivants en sursis. Saint Marc est de ceux-là, gisant inconscient parmi les mourants dans cette baraque putride.
       23 ans, 42 kg, rongé par la dysenterie, il a perdu la mémoire et oublié jusqu'à son nom.
       30 survivants sur un convoi de 1000 déportés ; renvoyé chez lui, il n'en parlera plus.

       Et comme pour conjurer le sort il intègre l'école des officiers de St Cyr, et choisit de commander des régiments de la légion étrangère dont le gros des troupes est composé d'anciens de la Wehrmacht de la SS.

       Pas le temps pour la rancœur ou la haine. La légion est une patrie, où l'on pardonne presque tout !
       "Monsieur le Président ! Notre génération n'a pas connu de valeur fixe nous avons appris à nous fier à notre conscience seule ; cela avait conduit notre camarade en déportation en 43, cela le conduit aujourd'hui à la prison de la Santé. ".

       A la barre on évoque également l'Indochine et ses traumatismes, des mois à sillonner un pays, à former des partisans contre les Vietminh à se battre et à mourir avec eux.

       Et puis un jour fin de mission. Ordre d'évacuer la zone.

       " Jamais, jamais nous n'oublierons l'incompréhension et la peur sur les visages des villageois à l'annonce de notre départ. Le cauchemar des coups de crosse sur les doigts des irréductibles incrédules s'accrochant aux rebords des camions français.
       Des coups de crosses sur les doigts de nos frères d'armes, finissant par lâcher pour s'écraser dans la poussière ".
       " C'était les ordres ! ".


       Pour le Général Ingold membre du jury, chancelier de l'ordre de la Libération, déporté-résistant et Gaulliste de la première heure cette histoire a quelque chose de familier.

       Sollicité quelques jours plus tôt par des proches de Saint Marc, Ingold avait accepté d'intercéder en sa faveur à condition qu'il fasse pénitence et présente ses regrets.

       L'accusé avait remercié ses amis mais catégoriquement refusé. " Je ne regrette rien, j'ai agi en conscience, et je le dirai à l'audience ".

       Dans son coin, l'Avocat Général reste silencieux, il note méthodiquement ce qui est dit en attendant son heure.
       Jean Reliquet n'a pas été choisi au hasard ;
       Ancien procureur général à Alger, il a parfaitement en tête, les enjeux historiques liés à ce procès.

       L'Algérie. Une terre meurtrie, une terre qui mange ses enfants.

       Des attentats, dans les cinémas, aux terrasses de cafés, dans les salles de concert,

       On tue pour trois lettres,
       M.N.A.,
       F.L.N.,
       O.A.S.


       On tue pour venger Guelma, on tue pour venger Sétif, on tue pour la Nation, on tue pour être libre sur sa terre.

       On tue au nom du tout puissant du miséricordieux ; on guillotine, aussi, au nom de la France.

       Imagine une guerre où l'ennemi est sans uniforme agissant parfois sous le masque d'un vieillard, d'une jeune fille ou d'un enfant.
       La grande muette veut faire parler, elle torture.

       Pour Reliquet, cette pratique est indigne de la République, il alerte ses supérieurs, interpelle sa hiérarchie.

       Aucune réaction, l'homme est seul avec ses convictions, les impératifs sécuritaires l'avaient emportée sur ceux de la justice.

       L'épée l'avait emporté sur la robe.

       Retiens bien ! L'histoire finit toujours par condamner les peuples, qui sacrifient leur droit pour leur sécurité.

       Appelé pour rétablir l'ordre et la souveraineté nationale De Gaulle avait fait volte-face, pour lui l'égalité risquait d'entraîner un exode massif des algériens en métropole.

       " La France est un pays de clocher, hors de question de rebaptiser Colombey ".

       Seule solution rationnelle : l'indépendance.

       La métropole le soutiendra, elle a les yeux rivés vers l'Amérique et la consommation elle se désespère de voir sa jeunesse périr dans une guerre qui ne dit pas son nom L'Armée ne comprend pas.

       Depuis sa cellule, l'accusé lui, a préparé une déclaration

       " Monsieur le Président. Ce que j'ai à dire sera simple et court. Depuis mon âge d'homme, j'ai vécu pas mal d'épreuves : Résistance, Gestapo, Buchenwald, l'Indochine, Suez et l'Algérie.
       Saint Marc explique comment on en arrive là, comment on passe d'officier exemplaire à celui de soldat perdu.

       " Un jour, on nous a dit qu'il fallait envisager l'abandon de l'Algérie. L'angoisse a fait place au désespoir et nous avons pleuré en nous souvenant de l'évacuation de la Haute-Région, Diên Biên Phû, l'entrée du Vietminh à Hanoï, des villages abandonnés et des habitants massacrés.
       Nous pensions à toutes ces promesses solennelles faites sur cette terre d'Afrique, à tous ceux qui avaient choisi la France à cause de nous et qui, à cause de nous, risquaient une mort affreuse.

       Nous pensions à notre honneur perdu.

       On peut demander beaucoup à un soldat, en particulier de mourir, c'est son métier, pas de se dédire, de tricher ou de se parjurer. Oh ! je sais, Monsieur le président, il y a l'obéissance, il y a la discipline.
       Depuis quinze ans, je suis Officier de Légion. j'ai vu mourir pour la France des légionnaires, étrangers peut-être par le sang reçu, mais français par le sang versé. " C'est en pensant à mes camarades, à mes sous-officiers, à mes légionnaires tombés au champ d'honneur, que le 21 avril, j'ai fait mon libre choix.
       Terminé, Monsieur le président. "


       Patin reste impassible pas question d'accorder à cet instant une quelconque solennité

       Ironie de la scène la justice est aux ordres, le militaire lui, est libre.

       Les consignes sont presque dictées pas d'acquittement.

       L'Avocat Général Reliquet, l'homme qui s'est opposé à la torture et dressé contre l'armée tient peut-être sa revanche.

       Depuis des jours il est encouragé par sa hiérarchie, et par les plus hautes personnalités pour requérir une peine exemplaire.

       Dans cette pièce commandée par De Gaulle il joue le dernier acte.

       Messmer alors Garde des sceaux le convoque ; lui parle des intérêts de la Nation et du danger que représentent les fanatiques.

       Retiens ! On invoque toujours les intérêts de la nation pour insulter la justice

       On lui enjoint de requérir une peine de 20 ans

       20 ans pour punir, pour venger un affront
       20 ans pour effacer une cause et un nom


       Problème : Reliquet, croit au droit pour tous et en tout temps en Algérie contre le FLN et les communistes, en métropole contre les putschistes, il pense que Code pénal est suffisant et qu'on n'a pas besoin de loi d'exception pour satisfaire les puissants ou l'opinion publique.

       La peine envisagée contre Denoix de Saint Marc n'est ni juste ni adaptée.

       Puisque Reliquet s'entête Michelet Ministre des armées et Messmer lui ordonnent par courrier de requérir la peine évoquée. Pas d'objection possible les ordres sont les ordres et il faut obéir.

       Tant pis, l'Avocat Général se lève prend un bloc de feuille et s'approche du Président.

       " Article 33 du Code de procédure pénale le Ministère Public est tenu de prendre des réquisitions écrites conformes aux instructions qui lui sont données,
       Voici mes conclusions. "


       Posant le tas de feuille sous le nez du Président, il poursuit Immédiatement.

       " Elles sont fidèles aux consignes qui m'ont été données vous y trouverez la peine exigée… "

       " J'entends pourtant, au terme du même article conserver ma liberté de parole… et requérir autrement "

       " La plume est serve certes, mais la parole est libre "


       L'instant est rare et surprenant on n'a presque jamais vu ça. Les murmures de réprobation dans la salle laissent à présent place à un brouhaha.

       " Silence ! Silence dans la salle ! "
       Patin réprouve manifestement la démarche de Reliquet qui enchaîne : " La faute si lourde soit-elle, ne saurait effacer 20 ans d'héroïsme ".

       Il faut une peine juste et adaptée, juste et adaptée.

       " 4 à 8 ans de réclusion criminelle ".

       Et Reliquet de conclure " beaucoup plus que cette peine l'abandon du métier des armes sera une sanction bien plus terrible pour ce soldat héroïque ".

       A ce moment précis l'espoir est permis, Reliquet semble avoir entrouvert la porte et la défense tient quelque chose.

       Le mot acquittement se murmure dans la salle.

       L'instant est incroyable !!

       Au tour de la Défense de prendre la parole, les chances sont minces, mais il faut s'engager dans chaque interstices tout exploiter, ne rien laisser au camp d'en face.

       Cette plaidoirie je la connais par cœur !

       La procédure d'abord ! Un Tribunal spécial, c'est une marque de défiance envers le peuple.
       L'accusé comparait devant un Tribunal fantoche créé par l'article 16 spécialement pour punir et jeter l'anathème.

       Quelle différence avec Riom, ou les sections spéciales ?
       Par sa forme et par son but il est discrédité.

       De plus comment considérer ce jury comme impartial et ce procès comme équitable alors qu'on a déjà condamné Challe et Zeller quelques jours plus tôt pour les mêmes faits.

       Les faits ! La Vème
       République est un coup d'Etat née d'un coup d'Etat ; le pouvoir a sciemment laissé faire pour asseoir une légitimité qui lui faisait défaut et engager des réformes institutionnelles.

       Le putsch avorté a été instrumentalisé pour servir les intérêts du pouvoir en place.

       Les faits encore ! l'homme a agi par fidélité à un serment, redoutant nous dit-il un massacre à venir.
       L'histoire dira comment, la France aura traité les pieds noirs et les harkis.
       Un mot pour les juges enfin, leur rappeler que 20 ans plus tôt ces militaires, avaient eux-mêmes désobéis.

       Un mot pour l'homme peut être aussi enfin, la vie d'Hélie Denoix de Saint Marc est une tragi-comédie qui veut qu'au gré des caprices des puissants, on porte pour les mêmes faits, tantôt un uniforme d'officier et tantôt celui d'un bagnard.
       Mais rien de tout cela n'a été dit.

       Cette plaidoirie c'est la mienne.

       On avait laissé à l'accusé deux jours seulement pour choisir son conseil, deux jours pas plus.

       Jacques Martin-Sané un fidèle du Maréchal s'était proposé spontanément ; les proches de Saint Marc l'avaient pourtant mis en garde sur le profil de son avocat.
       Qu'importe, il avait donné sa parole d'officier.

       Me Martin-Sané n'a pas saisi la main tendue par le parquet, et s'est contenté d'une plaidoirie grandiloquente et un peu surannée pour réclamer l'absolution.

       Peut-être n'avait-il pas vraiment compris qui, était Hélie Denoix de Saint Marc.

       Oui je sais le soleil se couche, mais écoute encore un peu

       Imagine la Cour des Invalides, des hommes en Képi blanc au garde à vous, réunis autour d'un vieil homme.

       Cassée par les rhumatismes la silhouette a perdu de sa superbe, mais le regard lui, est resté le même.
       Ses grands yeux bleus, scrutent l'horizon.

       Déporté à 20 ans, dégradé, et emprisonné à 40, Hélie Denoix de Saint Marc a été successivement gracié, amnistié, puis réintégré dans son grade de commandant.
       Non par décision de justice, mais par décrets successifs ; des caprices de Prince.

       Aujourd'hui, 28 novembre 2011, il est fait Grand-croix de la légion d'honneur. " À titre militaire et au titre de l'Algérie ".

       Soudain tout le monde se fige.
       Aux morts !
       A quoi pense-t-il ?

       Quelques vers de Péguy que je t'ai récité sur les fils et sur la terre,
       Une peine de 10 ans prononcée à la hâte ce 5 juin 1961,
       A tous ces hommes morts pour la France, par la France

       Ministère Public contre Denoix de Saint Marc, c'est l'histoire d'un procès qui n'aura duré qu'une après-midi et le procès d'une histoire, une histoire d'homme aussi.

       Tu as raison c'est drôle un patronyme mais ça dit tellement de choses sur celui qui le porte.

       Je ne comprenais pas vraiment pourquoi mon père me contait ce récit, peut-être qu'avocat lui-même, il me donnait tout simplement une leçon d'homme et de justice.

       Peut-être aussi, parce que là-bas dans un vieux cimetière près de Constantine notre nom, est encore inscrit sur quelques pierres tombales laissées à l'abandon.

       Un nom enraciné dans une terre qu'il n'a jamais revue que je ne connais pas et dont je me souviens.

       Ce que je sais en revanche c'est que cette histoire tu la raconteras à ton tour, en lui donnant le sens que tu voudras.

       Il est tard, maintenant, dors mon fils.

Jérémie Nataf - 2017
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Voici la Prière intégrale de " Mère, voici vos fils qui se sont tant battus " de Charles Péguy (1873-1914), écrivain, poète et essayiste français mort sur-le-champ de bataille de l'Ourcq en 1914 également connu sous les noms de plume de Pierre Deloire et Pierre Baudouin.

       " Mère, voici vos fils qui se sont tant battus.
       Qu'ils ne soient pas pesés comme Dieu pèse un ange.
       Que Dieu mette avec eux un peu de cette fange qu'ils étaient en principe et sont redevenus.
       Mère, voici vos fils qui se sont tant battus.
       Qu'ils ne soient pas pesés comme on pèse un démon.
       Que Dieu mette avec eux un peu de ce limon qu'ils étaient en principe et sont redevenus.
       Mère, voici vos fils qui se sont tant battus.
       Qu'ils ne soient pas pesés comme on pèse un esprit.
       Qu'ils soient plutôt jugés comme on juge un proscrit qui rentre en se cachant par des chemins perdus.
       Mère, voici vos fils et leur immense armée.
       Qu'ils ne soient pas jugés sur leur seule misère.
       Que Dieu mette avec eux un peu de cette terre qui les a tant perdus et qu'ils ont tant aimée.
       Mère, voici vos fils qui se sont tant perdus.
       Qu'ils ne soient pas jugés sur une basse intrigue.
       Qu'ils soient réintégrés comme l'enfant prodigue.
       Qu'ils viennent s'écrouler entre deux bras tendus. Amen. "
Charles Péguy (1873-1914)


LE SOLDAT INCONNU D'APATHIE
Par Hugues Jolivet

             Grand "redresseur de torts" et "donneur de leçons,
            Lançant des anathèmes, sur les plateaux Télé,
            Contre ceux qui défendent l'honneur de la Nation,
            De la France, leur Patrie, de ses soldats zélés !

            Tel ne fut pas le cas de "l'appelé Apathie"
            Qui relate, dans un livre, ses manoeuvres peu glorieuses
            Pour être réformé, étale son apathie
            Au port de l'uniforme : attitude malheureuse !

            Emettant un doute sur la nationalité
            Du Soldat Inconnu, symbole des Français
            Tombés au Champ d'Honneur, pour que la Francité
            Survive à l'horreur de combats insensés,

            Jean-Michel Apathie profère un blasphème
            Et blesse tous les Français dont, au moins, un parent
            A fait don de sa vie, le sacrifice suprême,
            Pour que vive la France contre tout conquérant !

            Cet avis imbécile n'honore pas son auteur.
            Il souhaite justifier la Présence, sous l'Arc,
            De l'emblème de l'Europe : prendre de la hauteur
            Car notre Président en devient le "Monarque" !

Hugues JOLIVET
5 janvier 2022




FRANÇAIS SOUVIENS TOI ! Il Y A 60 ans
Par Monsieur Alain ALGUDO
" 1962 L'Exode d'un peuple trahi "

Les deux premières photos sont prises sur le pont de notre cargo au départ de Mostaganem.
Cette " fuite " entamée de nuit la veille du 5 juillet 1962 (massacre d'Oran) depuis le port de ma ville natale, s'est effectuée dans des conditions dantesques le ciel zébré de balles traçantes tirées par le FLN qui fêtait sa " victoire ! "



L'arrivée à Marseille de mes compatriotes avec un Maire, Gaston Deferre, disant " qu'ils aillent se réadapter ailleurs " et voulant les " rejeter à la mer ," des dockers communistes de la CGT trempant leurs pauvres affaires dans le port, me donne encore aujourd'hui la nausée.
60 ans après, je préfère ne pas la commenter davantage car je serais violent, mais à 87 ans mon opinion est faite quant au terme " Fraternité " de la République Française, cette fraternité qui aujourd'hui est beaucoup plus accueillante pour " toute la misère du monde ! "

Les autres photos prises en accompagnant ma famille le 16 juin 1962, sur le tarmac de l'Aéroport militaire de l'Aéroport de la Sénia à ORAN, représentent les conditions de " réception et d'organisation "de l'accueil de la France pour ses compatriotes parqués sous un soleil de plomb, des militaires s'occupant d'une intendance minimum mais avec beaucoup de ferveur et gentillesse, je le reconnais.

Illustration : Monique ALGUDO, mon épouse à droite en bleu avec nos 2 enfants Régis contre sa Mère et M.Claire accroupie !

Ma famille, avec d'autres, y est restée avec mes enfants en bas âges (4 ans et 2 ans) 36 heures, sans abris, avant d'embarquer sur un vol à destination de Marseille Marignane.
Là, une bonne âme, un laitier compatissant, avec sa camionnette a conduit les miens jusqu'à de la famille résidant à Marseille.

Pour conclure j'estime que cet épisode dramatique est une honte, une tache indélébile pour le gouvernement gaulliste de cette époque qui rejaillit sur la France d'aujourd'hui qui persiste et signe, repentante aujourd'hui que pour l'ennemi d'hier.

Illustration : Roseline ALGUDO ma belle sœur et un de ses enfants Paul Antoine
- à côté Christiane PUJOL

Seules l'histoire et la divulgation des archives nous rendront peut-être un jour justice et vérité sur cette forfaiture d'État.

Dernière minute : Macron reconnaît l'horreur des drames du 26 mars à Alger et du 5 juillet à Oran après nous avoir traité à Alger en 2017 de " criminels contre l'humanité, de barbares " La puanteur de cette déclaration électoraliste nous laisse sans voix !

" ….que les Français en grande majorité aient, par référendum, confirmé, approuvé l'abandon de l'Algérie, ce morceau de France, trahie et livrée à l'ennemi, qu'ils aient été ainsi complice du pillage, de la ruine et du massacre des Français d'Algérie, de leur familles, de nos frères musulmans, de nos anciens soldats qui avaient une confiance totale en nous et on été torturés , égorgés, dans des conditions abominables, sans que rien n'ait été fait pour les protéger : cela je ne leur pardonnerai jamais à mes compatriotes :
La France est en état de péché mortel. Elle connaîtra un jour le châtiment "
Maréchal Alphonse JUIN 1962
(nous y sommes !)

Alain ALGUDO
mise à jour le 29 Janvier 2022

Document dédié à tous mes compatriotes qui ont vécu le même drame

Couscous traditionnel et familial.
Envoi de M. Christian Graille

               L'écrivain français Montesquieu (1689-1755) rapporte l'anecdote suivante : " Plusieurs savants, docteurs grammairiens de l'Université de Paris, s'opposaient sur la prononciation des lettres " K " et " Q " peu usités en langue française. "
               La dispute s'échauffa si fort que le Parlement de Paris prit l'arrêté solennel suivant : Permission à tous les sujets du Roy de France de prononcer ces lettres à leur fantaisie. " (Lettres persanes CX datées de 1718).

               Il est vraisemblable : Que l'onomatopée " Kuskus " soit un mot de la langue arabe ou d'un autre dialecte sémite du Moyen Orient.
               Alphonse Daudet dans sa lettre sur le " kousskouss " estime que ce plat arabe pourrait bien être la manne de la Bible.
               Qu'il désigne un bouillon de viandes et de légumes accompagné d'un plat de semoule de céréales servi à part.

               Tous les littérateurs, semblant ignorer l'existence des très nombreux ouvrages relatifs aux Croisades, se chamaillent sur l'orthographe du terme couscous :
               - Couscoussou (Léon Roche, traducteur, secrétaire fidèle et particulier d'Abd El Kader)
               - Kouscous (général Margueritte),
               - Kousscouss (j. Tharaud et Alphonse Daudet,) ce dernier déclarant même avoir mangé du kouscouss à la vanille et aussi cuzcuz (graine de houlque, plante herbacée ou avoine.)


               Tout le reste n'est que fariboles.
               Seul Charles Auguste Cherbonneau, professeur d'arabe à l'École des Langues orientales déclare que l'onomatopée imite le bruit de la vapeur s'échappant par saccades du keskes au moment de la cuisson de la semoule.
               Le journal le Monde dans son numéro daté du 4 août 2004, préfère opter pour un battement de pilon plutôt que le chuintement de la vapeur.

               Les siècles s'écoulent et le couscous traditionnel et familial devient un important plat maghrébin.
               Il n'existe pas une recette unique mais autant de recettes que de cuisinières respectueuses des rites religieux ou traditionnels.
               Une opération préalable consiste à retirer du silo familial creusé dans le sol la quantité de céréales nécessaires.
               Suivent alors plusieurs séries de lavage et séchage au soleil, destinées à l'élimination des impuretés.
               Le grain est alors écrasé en gruaux moyen entre deux meules légères d'un moulin portatif puis enfermé dans une peau de chèvre parfois mal tannée.

               Des nécessités artistiques ont imposé une modification de l'ordre chronologique des opérations :
               - Le metred en forme de coupe antique servira à recevoir, in fine, une pyramide de semoule imbibé de beurre rance où s'encastrent :
               - pois chiches, raisins secs, amandes grillées et
               - petites boulettes de viandes aromatisées.
               - Le kanoun, fourneau de terre cuite plein de braises,
               - la marmite de bouillon (marga) où mijotent :
               - viandes très cuites de mouton, poulet ou poisson et
               - légumes de saison y compris le korchef (fleur d'artichaut sauvage),
               - légumes secs cuits,
               - ail, oignon, fèves et pois chiches et
               - quantité d'épices au choix :
               - felfel (Piment), harissa (purée de piment), clous de girofle, cumin, coriandre, safran, cannelle….


               Les fruits comme : tomates, poivrons, aubergines sont peu utilisés par les nomades à l'exception de la courgette et la saucisse merguez jamais.
               - Le keskes, vannerie en forme de cône renversé, sert de couvert peu étanche à la marmite, est empli de semoule humide salée, beurrée au lait de chèvre, ânesse ou chamelle.
               - Les céréales le plus souvent utilisées sont : le blé dur, l'orge ou l'avoine, et bechna remplaçant une céréale plus noble,
               - la guessàa de bois est employée pour rouler le blé concassé et humidifié en grains de semoule fine, moyenne ou grosse,
               - le tamis de bois au fond percé de trous (tabsi en tunisien) permet d'obtenir une farine fluide qui sera roulée à la main,
               - le couffin à provisions est là pour parer à toute erreur.


               Les corps gras utilisés sont :
               - l'huile et le beurre rance, le saindoux,
               - la graisse fondue de porc étant prohibée.

               Le mouton rôti (méchoui) n'est servi qu'à l'occasion de circonstances exceptionnelles.

               La revue " magazine pittoresque " a tenté en 1864 d'établir une classification des différentes sortes de couscous :
               - le herbouche à la farine brune du Constantinois,
               - le medjebour au blé tendre à la semoule grosse comme un plomb de chasse,
               - le mahwer à la semoule moyenne de la grosseur d'une tête de fourmi,
               - le harache fi harache à la semoule grossière et boulettes de viandes aromatisées à l'oignon,
               - le mesfoufe au froment agrémenté de grains de raisin et de grenades,
               - le mechroub peu apprécié lorsque les céréales ont été moisies dans le silo souterrain,
               - le mezeuil, très recherché, aromatisé par une croûte naturelle sucrée après un séjour de deux ans dans le silo,
               - le aïche, soupe de grumeaux de farine et d'abricots secs.
André Gille. " Mémoire vive "
Revue du Centre de Documentation Historique sur l'Algérie CDHA
N° 67 3e et 4e trimestres 2017.


Dans la cuisine juive, la table…un autel
Envoi de M. Christian Graille

               Dire que la table est le lieu par excellence de la convivialité est une évidence ou une banalité.
               Le rôle joué par les habitudes alimentaires dans la transmission des cultures à travers les générations et plus largement encore à travers le temps et l'espace est primordial.

               Ce rôle devient primordial dans le Judaïsme au regard des prescriptions et des interdits alimentaires qui constituent un véritable " corpus " rassemblant les règles de la " cacherout ", (ensemble de lois diététiques traitant des aliments autorisés à manger) lesquelles ne se réduisent pas à des principes :
               - d'hygiène,
               - de diététique ou
               - des recommandations médicales comme le souligne le professeur Raphaël Draï.

               Selon J. Soler la langue et la cuisine présentent une analogie formelle.

               De même en effet qu'une langue peut constituer son système phonétique retient quelques sons seulement parmi ceux que l'être humain peut accomplir, de même une communauté se donne un régime alimentaire en opérant un choix parmi tous les aliments possibles. " N'importe qui ne mange pas n'importe quoi et il ne suffit pas que l'aliment soit mangeable pour qu'il soit mangé. "
               Les bénédictions et actions de grâce dans le christianisme procèdent d'un même principe : " le repas servi, on ne se jette pas dessus. "
               On comprend que la part prise par l'alimentation soit prépondérante dans la transmission du judaïsme.

               La table est un autel disent certains commentateurs et la convivialité devient occasion d'étude et de réflexion.
               Le judaïsme connaît et pratique un " banquet " hebdomadaire, celui du Shabbat et celui du samedi midi, sont des moments de large partage familial et amical.
               La multiplicité des salades exposées donne goût et couleur à la table et chacun connaît " la choukchouka " (ratatouille de poivrons, de tomates, d'oignons et d'œufs) pièce maîtresse qui se décline avec toutes les nuances possibles, avec des variantes d'Alger à Tunis ou à Casablanca.

               Le couscous est de tradition mais ne s'impose pas toujours et là encore les accommodements sont innombrables….
               Sauf à respecter l'interdit absolu et relevant de la loi d'inclure du beurre puisque la consommation de laitage mêlée à la nourriture carnée est inconcevable en vertu de l'injonction biblique " tu ne feras pas cuire un chevreau dans le lait de sa mère. " L'interdit est élargi à la consommation des deux produits au cours d'un même repas et va jusqu'à l'exigence de vaisselles et d'ustensiles de cuisine réservés à chaque usage.

               Les multiples douceurs se substituent aux pâtisseries " pur beurre " qui ne peuvent coexister avec un agneau rôti ou un couscous aux boulettes de viande de bœuf dans le même repas.
               Les fêtes et cérémonies qui émaillent le calendrier hébraïque connaissent des recettes spécifiques qui perdurent même (et peut-être surtout) quand la pratique religieuse et la spiritualité s'estompent.

               Le nouvel an juif (Roch Hachana = tête de l'année) se situe en septembre et sa célébration se prolonge sur deux jours.
               Les repas du soir s'ouvrent sur une forte symbolique de douceur.
               Le sel est absent de la table et la bénédiction du pain qui s'impose systématiquement, avant d'en consommer, est par exception, prononcée en utilisant sucre ou miel et non du sel, appelant à une année douce.
               Avant tout, les convives se partagent des quartiers de pomme trempés dans le miel et d'autres fruits et légumes dont les noms hébraïques dévoilent un sens et une valeur pédagogiques dans leur traduction.
               Cette sorte de " dînette " donne lieu à commentaires, discussions et échanges entre les générations présentes.

               Le repas qui suit est un repas de " gala " :
               - bestels (viande hachée et oignons recouverts d'une feuille de brick),
               - viande d'agneau,
               - boulettes de bœuf qui se termine en apothéose avec la fameuse confiture ou pâte de coings.


               La sortie du jeûne de Yom Kippour (Grand Pardon) qui vient dix jours après se caractérise par une abondante consommation de volailles préparées sous de multiples formes :
               - bouillon de volailles,
               - poulet aux coings,
               - aux petits pois,
               - pâté de volaille au miel et aux pois chiches.


               La table au préalable a été garnie :
               - de pâtisseries au miel,
               - cigares aux amandes,
               - pains à l'anis,
               - suivis des salades de carottes au carouya (épice connue depuis fort longtemps) et autre kémia.

               A Pessah (pâques juive dont le nom signifie passage) et qui dure huit jours le lien entre :
               - la cuisine, rites et transmission, s'affirme très fortement.

               Les deux premiers soirs ont une importance liturgique et culinaire extrême.
               Au cours de ces deux repas, il est procédé à la lecture commentée de la Haggadah (récit de la sortie d'Egypte) et les symboles s'expriment dans la consommation de pain azyme (non levé), signe du départ précipité des Hébreux qui n'ont pas laissé le temps au levain d'accomplir son office, d'herbes dites amères :
               - raifort (plante cultivée pour sa racine qui se substitue à la moutarde),
               - endives,
               - salades romaines rappelant l'amertume de l'esclavage,

               Et d'une préparation d'un mélange :
               - de dattes mûres,
               - de noix,
               - de pommes,
               - de cannelle et
               - de vin rouge figurant le mortier que manipulait l'esclave hébreu.

               Bien entendu, l'agneau pascal occupe la place prépondérante du repas marquant peut-être en le consommant, la volonté de lui dénier un rôle de divinité du panthéon égyptien face au Dieu unique et abstrait.

               La célébration de Chavouot (pentecôte) vient ensuite qui rappelle la révélation du décalogue au mont Sinaï.
               Les aliments sont printaniers :
               - fèves fraîches,
               - petits pois nouveaux
               - et les laitages absents le plus souvent des autres repas l'emportent ici.


               Le couscous vient réconcilier la semoule saupoudrée de sucre avec :
               - le lait, le petit lait, le beurre.
               Les légumes frais adoucis de raisins secs complètent ce couscous au beurre exceptionnel !
               C'est le mets traditionnel qui suit la lecture solennelle des Dix Paroles à la synagogue accompagnée de récitatifs de source :
               - judéo-espagnole,
               - judéo-arabe et
               - ladino (langue dérivée du vieux castillan et de l'hébreu).


               D'autres festivités mériteraient aussi d'être évoquées mais ce serait déborder du cadre de cette modeste contribution… sauf tout de même à donner envie des fameuses galettes blanches recouvertes de sucre glace et de perles de bonbons multicolores confectionnées à Pourim (fête d'Esther inspiratrice de la fameuse Esther de Racine) signe de la joie d'avoir échappé à l'anéantissement programmé par le terrible Amman.
               C'est dire à travers ces rappels, la véritable fonction sociale dévolue à la cuisine et à l'art de la table, nappée de blanc et fleurie, dans la perpétuation de la mémoire multiséculaire et dans la communication familiale transgénérationnelle.

               La transmission millénaire de la foi, née des trois patriarches :
               - Abraham,
               - Isaac et
               - Jacob et de la révélation sinaïtique à Moïse, jusqu'à nos jours, est assurée certes par le rite et le culte mais pour une part tout aussi fondamentale par la cuisine œuvre première de la femme responsable du foyer.
               - La convivialité,
               - la joie d'un bon repas,
               - le savoir de l'ancien,
               - la curiosité de l'enfant,
               - le chant et
               - les bénédictions dites ensemble ont été, sont et resteront garants de la pérennité des cultures et des civilisations. Cuisiner pour la mère est expression d'amour et réunit les siens dans le partage du repas entretient les liens d'affection au sein de la cellule familiale large et ouverte.

               La restauration dite rapide, la barquette de salade et le sandwich absorbés debout en gesticulant avec dans l'autre main un téléphone mobile ne peuvent se substituer que par la réunion de commensaux rendant hommage à l'œuvre créatrice de la table familiale, apaisante et chaleureuse.
               Les sages de jadis, les penseurs les plus érudits n'ont-t-ils pas eu raison de qualifier la table de véritable autel où se sanctifient les mémoires ancestrales et les espérances inébranlables ?
               Nourritures terrestres et spirituelles ne font qu'un dans la pensée juive.
" Mémoire vive " Jacky Ayache
Revue du Centre de Documentation Historique sur l'Algérie.
N° 68 1er trimestre 2018



La fable du bénévole
Envoyé Par Elyette


          Un jour, un fleuriste se rendit chez le coiffeur pour se faire couper les cheveux.

          Après sa coupe, il demanda combien il devait. Le coiffeur répondit: "c'est gratuit, je fais du bénévolat cette semaine". Le fleuriste s'en alla tout contant.
          Le lendemain, en ouvrant sa boutique, le coiffeur trouva à sa porte une carte de remerciements et une douzaine de roses.

          Plus tard, c'est le boulanger qui se présenta pour se faire couper les cheveux. Quand il demanda à payer, le coiffeur lui dit : "Je ne peux accepter d'argent, cette semaine, je fais du bénévolat". Heureux, le boulanger s'en alla tout content.
          Le lendemain, il déposa à la porte du coiffeur une demi-douzaine de croissants, avec un mot de remerciements.

          Puis, ce fut le député du coin qui se présenta. Lorsqu'il voulut payer, le coiffeur lui répondit : "Mais non, cette semaine c'est gratuit, je fais mon bénévolat !"
          Très heureux de cette aubaine, le député quitta la boutique.

          Le lendemain, quand le coiffeur arriva pour ouvrir, une douzaine de députés et de sénateurs attendaient en ligne pour se faire couper les cheveux gratuitement. ..

          Voilà, la différence fondamentale entre les citoyens de ce pays et les politiciens qui nous gouvernent.
          Et il paraît que dans la file, il y avait même des chauves. Si, si !


Boire et produire l'anisette…
Envoi de M. Christian Graille

               L'anisette est aux Pieds Noirs ce qu'est :
               - la paëlla aux Espagnols,
               - la choucroute aux Alsaciens.

               Elle est un patrimoine.
               Pour les profanes, c'est une boisson anisée parmi d'autres, alors que pour la communauté Pied Noirs l'anisette est synonyme de convivialité, partagée en famille, ou dans les bars entre amis autour de la Kémia.
               L'anisette est de toutes les occasions et toutes les familles ont une histoire d'anisette qui peut revêtir un aspect extraordinaire, comme l'anisette géante organisée par la municipalité oranaise en 1952, toujours présente dans les mémoires.
               " Faire l'anisette " s'est imposé parmi les Pieds Noirs comme synonyme d'apéritif et est devenu un élément emblématique de la socialisation en Algérie française comme le rappelle Carmen, l'aînée des filles de la famille Hernandez :
               " Vous venez boire l'anisette avec mon père et ma mère et vous connaissez la famille. " (G. Baïlac, la famille Hernandez, édition de l'Atlanthrope. Versailles 1992, page 41).
               Boire l'anisette c'est faire partie d'une communauté qui s'étend au-delà du groupe des Européens, comme le montre l'anisette casher chez les Juifs ou les subterfuges utilisés par les Musulmans pour la consommer.

               Chez les " Indigènes " boire l'anisette en public était avant 1962 assez courant mais nécessitait quelques aménagements comme boire dans une tasse opaque.
               Boire l'anisette est un vrai rituel : elle est coupée à l'eau dans un verre de 15 cl.
               Mais la question du glaçon soulève un véritable débat : le mettre avant ou après ?
               L'anisette va au-delà de la simple boisson.
               Elle peut être utilisée dans la vie courante, pour soigner les maux du quotidien :
               - mal de ventre,
               - de dents…
               - ou encore pour lutter contre la canicule.


               Une origine méditerranéenne.
               Les récits de la communauté Pied Noirs font de l'anisette une boisson espagnole liée aux vagues migratoires issues de la péninsule.
               Néanmoins il semble que cette parenté soit plus complexe en relation avec les peuplements européens d'Algérie.
               L'anisette possède beaucoup de similitude avec les différentes boissons anisées du bassin méditerranéen. Nous citerons :
               - le Pastis,
               - la Sambucca, (liqueur italienne issue de la distillation de l'anis étoilé et de la réglisse à laquelle on ajoute de l'alcool et du sucre.)
               - l'Ouzo, (boisson alcoolisée grecque parfumée à l'anis).
               - l'Arak, (boisson obtenue de la fermentation de raisins et de breuvage, originaire du Liban ou alcool de riz ou de canne à sucre).


               Toutes ces boissons résultent d'un processus de distillation à la vapeur des grains d'anis étoilés et ou d'anis vert auxquels sont ajoutés des arômes végétaux, comme la réglisse pour le Pastis.
               L'anisette est donc une boisson méditerranéenne, liée à la civilisation des Européens d'Algérie où la Méditerranée rythme la vie des populations fait partie de la mythologie familiale car elle a permis aux populations de venir en Algérie et permet la circulation :
               - des hommes,
               - des biens, et
               - des cultures.


               Ainsi la consommation d'anisette résulte de pratiques publiques et privées, d'hier et d'aujourd'hui.
               Elle permet de saisir le multiculturalisme de l'Algérie française.
               Boire l'anisette en famille chez soi participe à la remémoration des origines familiales ; bue en groupe, elle permet de s'intégrer à la communauté et symbolise les temps de vie.

               Une production espagnole
               Les entrepreneurs à l'origine de la fabrication d'anisette sont issus des vagues migratoires successives originaires d'Espagne comme l'illustrent les grands noms des familles productrices d'anisette :
               - Liminana,
               - Gras,
               - Galiana.


               Arrivées en Algérie dans les années 1880, ces familles ont apporté avec elles un savoir-faire issu de la tradition espagnole.
               Ces hommes sont parvenus à établir un empire commercial en partant de rien, et selon les mythes familiaux de la production artisanale dans l'arrière-cour de bistros. Ces entreprises sont parvenues à résister aux évolutions politiques et sociales de l'Algérie participant à l'affirmation de la culture populaire Pieds Noirs.
               Avec la publicité, les fabricants d'anisette sont parvenus à mettre en avant une identité commune.

               Ainsi les affiches publicitaires insistent sur les origines espagnoles de cette boisson au travers de figures typiquement ibériques comme le chanteur de Tuna d'une des affiches de l'entreprise Liminana.
               Les entreprises d'anisette en Algérie française sont des entreprises familiales qui se démarquent des autres manufactures grâce à un financement exclusivement local voire espagnol et donc indépendant de la Métropole
               La production d'anisette résulte donc du transfert d'un savoir-faire traditionnel s'intégrant progressivement dans la vie locale.
               Ainsi en revendiquant une attache espagnole, ces hommes d'affaires sont devenus des figures publiques grâce à leur investissement quotidien :
               - V. Galiana a contribué au jumelage entre Alicante et Oran.
               - De son côté M. Liminana a patronné la pièce de théâtre de G. Baïlac la famille Hernandez.


               Ces entreprises ont connu une croissance considérable à partir des années 1930, leur permettant de s'implanter :
               - dans toute l'Algérie,
               - au Maghreb et
               - en Métropole.

               Initialement la fabrication d'anisette s'inscrit dans une production domestique grâce à l'utilisation d'un alambic espagnol présenté comme un gage de qualité.
               Progressivement ces sociétés ont connu une vraie modernisation de la production qui a permis un décollage des ventes.
               Le contexte économique de l'après 62 a permis à ces entreprises de rebondir en Métropole, comme le montre la constante production depuis le rapatriement.
               Aujourd'hui l'anisette cristallise toujours les passions, voire les clivages entre Oranais et Algérois revendiquant la même anisette.
               Cette boisson revêt depuis le rapatriement une tradition que les familles de Pieds Noirs s'efforcent de transmettre aux générations car l'anisette est devenue le symbole de la déchirure de 1962 et réactive un paradis perdu.
Margot Garcin. " Mémoire vive ".
Revue du Centre de Documentation Historique sur l'Algérie CDHA
N° 68. 1er trimestre 2018


Le vin en Algérie
Envoi de M. Christian Graille
L'histoire du Sidi-Brahim

               La culture de la vigne et l'élaboration du vin en Afrique du Nord remontent à la plus haute antiquité.
               Une mosaïque du musée de Cherchell nous montre des vendangeurs foulant des grappes dans une cave en pierre d'où le jus s'écoule dans deux grandes amphores en terre cuite.

               Au temps de l'Algérie française, la vigne s'étendait environ sur environ 300.000 hectares donnant des récoltes moyennes d'environ 15 millions d'hectolitres par an. Dans l'ensemble la culture de la vigne et l'exportation du vin d'Algérie, il s'exportait sur la France un million d'hectolitres en moyenne par mois, assuraient plus de 60% de l'activité totale du pays.
               D'où l'importance qu'avait pris le négoce des vins en Algérie.

               Un de ces négociants s'est fait particulièrement remarquer : André Vigna, fils de Paul Vigna, administrateur de commune mixte, il était né à Alger en 1898.
               Il fit ses études secondaires comme pensionnaire au lycée de Ben Aknoun.
               Puis continua à l'Ecole Supérieure de Commerce d'Alger d'où, il sortit premier de sa promotion en 1917.
               Mobilisé à la fin de la grande guerre il fit son service militaire au 20ème Dragons en occupation en Allemagne.

               De retour à Alger en 1920, il entre dans la vie active et fait ses premières armes dans la maison de vins de son beau-père Pierre Sorensen, pour monter ensuite sa propre affaire en 1929.

               Ses activités consistaient à acheter des vins à la propriété en sélectionnant les meilleurs,
               - soit dans le Sahel,
               - soit dans la Mitidja,
               - soit dans les vignobles de montagne réputés pour leur qualité, dans le département d'Alger, à Médéa et Miliana où les moines de Tibérine élaboraient un excellent vin, et
               - bien sûr à Mascara dans le département d'Oran.

               Il s'était investi dans ces vins de montagne.

               Il sélectionnait ceux qui, dans l'année même ou après plusieurs années de vieillissement pouvait constituer tantôt une bonne bouteille, tantôt la grande bouteille de tradition.
               C'est pour cette dernière grande bouteille de tradition, originaire de Mascara, qu'est né le Sidi Brahim en 1930 sous sa marque déposée.
               C'était bien sûr un rappel du combat héroïque, le 25 septembre 1845, d'une poignée de chasseurs contre les troupes de l'émir Abd-El-Kader au marabout de Sidi Brahim à quelques kilomètres au Sud de Nemours.

               Comment le Sidi Brahim fut-il commercialisé à ses débuts ?
               Il faut rappeler que les négociants algériens assuraient l'essentiel de leurs activités au près du négoce de gros en Métropole.
               Les vins algériens étaient exportés soit en vrac par tankers, soit en fûts pour les vins supérieurs.
               Le Sidi Brahim fut à ses débuts expédié en demi-muids auprès des négociants grossistes métropolitains qui les conditionnaient en bouteilles pour être revendu auprès des détaillants. La grande distribution n'existait pas encore.

               Survint alors la deuxième guerre mondiale avec toutes les difficultés de communication avec la Métropole que nous avons connues.
               Donc plus d'exportations de vins sur la France et comme il fallait survivre, les négociants d'Alger et d'Oran s'attaquèrent au marché local.
               Chacun proposait sa bouteille. Qui n'a pas connu :
               - les Royal Kébir,
               - Algériana,
               - Targui,
               - Sénéclause et bien sûr
               - le Sidi Brahim.


               Il était embouteillé et distribué dans toute l'Algérie par les établissements Marcel d'Alger, en même temps du reste que deux autres marques qu'André Vigna avaient mises dans le circuit :
               - Vieil Arpent et
               - Smalah.

               Lorsque la deuxième guerre mondiale prit fin, cette activité se poursuivit sur le marché local, tandis que le négoce des vins algériens reprenait son cours avec la Métropole, le tout jusqu'à l'indépendance.

               Entre-temps, et dès 1946, André Vigna avait organisé à Saint-Ouen un entrepôt de stockage et de distribution sur Paris et la région parisienne où le Sidi Brahim faisait ses premiers pas.
               Il avait pris la mesure des problèmes que posaient les évènements d'Algérie et il lançait dès 1957 un projet d'installation de chai de stockage et d'embouteillage à Chalon-sur-Saône en Bourgogne.

               Le chai de Saint-Jean-des-Vignes fut inauguré le 9 février 1959 entouré de ses deux fis Jacques et Philippe et de son gendre Claude Mercier.
               Toute la profession des vins en France y était représentée.
               Ce chai fut autofinancé sans aucune aide des pouvoirs publics et pas davantage quand il fallut, dès 1962 rapatrier le personnel et le répartir entre Chalon et Paris.

               C'est alors que commença la véritable aventure du Sidi Brahim.
               Le circuit des négociants grossistes allait se trouver dépassé par les grandes enseignes de distribution.
               Et c'est en 1963 que le coup d'envoi fut lancé par Carrefour à Sainte Geneviève des Bois.

               André Vigna avait compris l'intérêt du système qui allait montrer son efficacité auprès du consommateur.
               Secondé par ses deux fils et son gendre il fit référencer le Sidi Brahim de 1963 à 1970 auprès des principales grandes enseignes et l'on put se le procurer dans toutes les grandes surfaces de France.
               Nos compatriotes Pieds Noirs en furent les principaux clients.
               A paris et dans la région parisienne les restaurants à couscous fleurissaient et le Sidi Brahim aussi.

               Le chai de Chalon-sur-Saône, dirigé par son fils Jacques devint un centre d'embouteillage important. La source d'approvisionnement restait toujours l'Algérie par l'entremise de son organisme d'état.
               A partir de 1970 le chai de Chalon conditionnait entre 800.000 et 1 million de bouteilles par mois soit entre 10 et 12 millions de bouteilles par an.

               Le marché français représentait la plus grosse part des ventes mais le Sidi Brahim avait également des débouchés à l'exportation en :
               - Grande Bretagne,
               - Allemagne,
               - Suisse,
               - Autriche,
               - USA, et surtout en
               - Scandinavie où les monopoles d'état de Suède et de Finlande importaient entre 100 et 150.000 bouteilles de Sidi-Brahim, par an, chacun.

               Ce fut une belle réussite qui couronnait la carrière d'André Vigna récompensée aussi par la croix de chevalier de la Légion d'honneur.

               Retiré à Paris et amateur d'arts, il avait réuni une très belle collection de peintres orientalistes.
               Mais surtout il avait rassemblé une des plus prestigieuses collections de porcelaine de Meissen et de Vienne dans " le goût turc " qui n'avaient rien à envier aux mêmes porcelaines se trouvant au musée du palais de Topkapi à Istanbul.

               Il est décédé à Paris en février 1978 dans sa 80ème année.

               Voilà résumée en quelques lignes l'histoire du Sidi Brahim qui fut une formidable réussite de son fondateur, un autre pionnier de l'Algérie française.
Jacques Vigna " Mémoire vive "
Revue du Centre de Documentation Historique sur l'Algérie CDHA
Revue N ° 49 3ème et 4ème trimestres 2011



A méditer dans ces temps de folie
Envoyé par Mme A. Bouhier

         Quand un oiseau est vivant, il mange les fourmis mais quand il meurt, ce sont les fourmis qui le mangent. L'heure et les circonstances peuvent changer à tout moment. Par conséquent, ne dévaluez rien autour de vous.

         Vous avez peut-être du pouvoir aujourd'hui, mais rappelez-vous : le temps est tellement plus puissant que n'importe lequel d'entre nous !
         Sachez qu'un arbre fait un million d'allumettes, mais une seule allumette suffit pour brûler des millions d'arbres. Alors soyez bon ! Faites du bien !
         "Le temps est comme une rivière : vous ne pouvez jamais toucher deux fois la même eau, car l'eau qui a passé ne repassera plus jamais.
         Profitez de chaque minute de votre vie et rappelez-vous : ne cherchez jamais une belle apparence car elle change avec le temps. Ne cherchez pas des personnes parfaites, car elles n'existent pas. Mais cherchez avant tout quelqu'un qui connaît votre vraie valeur. "

         Avoir 3 amours :
         La vie ; La famille ; Et les amis.
         La vie parce qu'elle est courte ;
         La famille parce qu'elle est unique, et diminue tous les ans
         Et les amis car ils sont rares !!! Il faut savoir les garder
Auteur inconnu



Un aussi long silence
Envoi de M. Christian Graille

               Novembre 1940 : la vicomtesse Yvonne de Villiers de la Noue, membre de l'État -Major des Sections Sanitaires Automobiles qui s'est déjà illustrée depuis le début de la guerre par son énergie et son courage dans de nombreuses évacuations de zones de combats conçoit le projet de mettre à l'abri les enfants soumis à :
               - l'épreuve des bombardements,
               - des restrictions,
               - de la malnutrition
               - en les envoyant en Afrique du Nord.


               Sœur aînée de Georges Guynemer, elle crée une association portant le nom du célèbre pilote, ayant pour siège social l'aéroclub de Paris avec le soutien de la maréchale Pétain et du Nonce apostolique, la participation de plusieurs organismes dont la Croix Rouge et le Secours National, sous la présidence de l'épouse du général Weygand.
               De l'autre côté de la mer les bureaux du centre Guynemer à Alger sont installés place du gouvernement.
               Deux ou trois fois par mois, à partir de mai 1941, sur un appel radiophonique de Mme de la Noue, c'est par centaines que des familles viendront chercher au total 2.916 enfants de 5 à 14 ans arrivés de Marseille.
               Une opération similaire aura lieu en rade de Tunis.

               Du fait du débarquement allié, rendant impossible leur retour vers la Métropole, ceux qu'on appellera " les enfants Guynemer " partis pour des séjours de trois ou six mois, resteront presque tous jusqu'à la fin de la guerre dans les villes ou villages d'Algérie et de Tunisie où ils seront :
               - hébergés,
               - nourris,
               - vêtus,
               - soignés gratuitement,
               - scolarisés,
               - catéchisés,


               Mais par-dessus tout aimés et intégrés comme membres à part entière de leurs familles d'accueil. Plus de 100 d'entre eux, devenus orphelins du fait de la guerre, furent en outre adoptés.
               La guerre terminée, c'est comme si tout cela n'avait pas eu lieu, ce qu'explique en partie la personne même de la vicomtesse de la Noue.
               Alors que tous les témoins de l'époque la désignent comme la fondatrice et la cheville ouvrière de l'entreprise, sa signature ne figure qu'en, toute dernière ligne à titre de simple membre au bas des statuts de l'association.

               Manifestement, par élégance d'âme, cette femme exceptionnelle, décorée de la Croix de Guerre, a tenu à éviter les honneurs, la publicité, une fois son service et son devoir accomplis.
               Par ailleurs il n'existe pas d'archives à la Croix Rouge Française concernant le répertoire des enfants du Centre Guynemer pas plus qu'aux Archives Nationales.
               Un film amateur a été réalisé à l'époque mais il a disparu : On dirait une conspiration du silence.
               Il faudra attendre soixante ans pour que cette magnifique entreprise en soit tirée par une seconde entreprise non moins magnifique.

               En septembre 2007, une question est posée dans la chronique des chercheurs de la revue l'Algérianiste par un curieux qui a entendu parler de cette aventure ou qui en a été le témoin, enfant.
               Bien vite des réponses affluent, amplifiées par des avis de recherches dans différents journaux régionaux.
               C'est tout le mérite de Claude Sandra Raymond, décédée et de Pierre Anglade d'avoir voulu, au prix d'un long et patient travail " recoller les morceaux d'une histoire oubliée " en rassemblant les réponses des anciens hébergés et des enfants des hébergeants, les uns et les autres devenus octogénaires.

               Le livre qu'ils en ont fait est l'histoire des liens :
               - noués,
               - maintenus,
               - rompus,
               - renoués à la faveur de l'exode de 1962

               Livre modeste à première vue.

               Un choix de lettres d'inégales longueurs, classées sous trois rubriques :
               - l'aventure vue par les enfants,
               - puis par les accueillants,
               - puis le témoignage des bénévoles.

               Mais document :
               - brut, inestimable, irremplaçable.

               A travers le flot de souvenirs, c'est le portrait plus vrai que nature de notre communauté.
               C'est, de façon saisissante, notre manière, notre art de vivre pourrait-on dire, malgré les circonstances tragiques de la guerre.
               C'est plus encore, une tardive contribution rendue à la vérité et à la justice.
               Il faut imaginer le saut dans l'inconnu que représente le départ en train de ces enfants. Souvent, le père est prisonnier ou mort à la guerre.
               La traversée de la France est interminable.

               Enfin c'est l'embarquement à Marseille, une traversée d'un luxe inouï pour ces petits d'origine généralement modeste, le ballet des " marsouins ", le mal de mer, et puis en se rapprochant de la Tunisie, des barques ont entouré notre bateau et des Arabes sont montés à bord pour nous offrir des oranges ; au loin on distinguait la côte qui brillait au soleil. "
               Dans toutes les lettres les mêmes mots reviennent pour évoquer le moment de l'accueil :
               - gentillesse, chaleur, à bras ouverts, embrassades, copieux goûter.

               Bien vite les adultes se font appeler :
               - tonton, tata, parrain, marraine,
               - les enfants deviennent frères et sœurs.

               Il arrive que des cadeaux attendent les nouveaux venus dans leur chambre.
               Mais bien souvent, c'est dans un espace modeste qu'on partage tout, les tickets de rationnement et même " un lit de 105 cm de large. "

               Entre ces lignes une sociologie complète de l'Algérie coloniale se devine :
               - Du boulanger au riche et puissant colon (Borgeaud en personne) en passant par
               - le marchand de vin,
               - la couturière
               - le chef de gare,
               - le petit agriculteur,
               - le garde champêtre,
               - le professeur de piano,
               - l'officier et l'avocat,

               Toutes les professions et tous les milieux sont concernés.

               Ces lettres raniment notre géographie mentale de l'Algérie par la simple mention de lieux oubliés reconnus ou jamais entendus :
               - Maoussa à 10 km de Mascara ?
               - Ben N'Choud prés de Dellys ?
               - Abbo en Grande Kabylie…


               60 ans après tous ceux qui, enfants ont été hébergés " dans l'intérieur " évoquent un Éden.
               - L'un revoit " une treille exceptionnelle ",
               - l'autre a appris à jouer aux osselets,
               - a conservé dans un herbier les fameuses " gouttes de sang " séchées.
               - D'autres ont tapé sur des couvercles lors des invasions de sauterelles.

               Découverte de légumes, de fruits inconnus :
               - nèfles,
               - pignons de pin,
               - de gourmandises inconnues, ces galettes tièdes fourrées au résine et au miel.


               On est en pleine guerre mais :
               - c'est le pays de cocagne,
               - la liberté de se gaver d'abricots,
               - de se baigner dans les oueds,
               - de monter à cheval (ou à bourricot),
               - le plaisir de savoir jurer et insulter en trois langues.


               Et pour d'autres hébergés sur la côte, le bonheur des bonheurs, c'est la plage en bandes. " Il y en avait toujours un avec sa chambre à air en bandoulière, et on passait des heures et des heures à :
               - nager,
               - plonger,
               - à nous enfoncer mutuellement sous l'eau. "

               Bien sûr tout n'est pas souvenirs édéniques : Dès leur arrivée les enfants sont scolarisés.

               Arrive pour beaucoup l'épreuve avec un grand E. " Le 17 mai 1944 j'ai passé avec succès mon certificat d'études à Boufarik, à 8 km de Souma où j'étais hébergée.
               Pour cette occasion, en lieu et place du char à bancs, tonton avait sorti la voiture remisée au garage car l'essence était rare. "
               A la maison, quel que soit le milieu, on ne plaisante pas avec la tenue.
               - " Nous étions toujours propres,
               - il fallait avoir les mains sur la table,
               - parler quand on nous interrogeait.

               Cela m'a beaucoup marqué et je ne l'ai jamais oublié. Marraine était droite sur la politesse.

               Lorsqu'on parlait à une personne, il fallait retirer son béret. Et avec cela de solides principes :
               - le sens du devoir,
               - le respect de la parole donnée etc…..
               - Hors de question d'aller jouer avant d'avoir terminé ses devoirs scolaires et
               - appris ses leçons quotidiennes.


               Cette discipline m'a servi pour toute ma vie. "
               - Les nouveaux venus sont catéchisés avec les autres,
               - font leur Première Communion,
               - leur Confirmation dans leurs familles d'adoption.

               Images de fête en blanc sur une terre tranquillement christianisée.

               On aurait tort d'ailleurs de croire que ce parcours était imposé à tous les enfants car l'idée de départ de Mme de la Noue est que l'affectation familiale soit déjà faite à l'arrivée des enfants, de manière que chacun reçoive l'éducation qui lui convient :
               - enseignement primaire,
               - pratique ou
               - secondaire,
               - éducation morale et religieuse.

               Mais les jeunes réfugiés sont rattrapés par l'Histoire et leurs récits, d'une précision étonnante si longtemps après les faits, ravivent nos propres souvenirs d'enfance.

               Au matin du 9 novembre 43, en débouchant rue d'Isly, l'un voit la Grande Poste encerclée par la troupe, les dissidents étant à l'intérieur (les partisans du général Giraud).
               Un autre vit les bombardements à Aïn Taya, à l'hôtel Tamaris réquisitionné par la 6e Air Force des USA.
               A Sfax, apparaît le premier soldat italien avec son chapeau à plume.
               Et les soldats américains qui lançaient des friandises ! Mais il fallait être vif pour les attraper car de petits Arabes avaient découvert l'aubaine et s'élançaient pour les cueillir au vol devant nous.

               La guerre s'achève. Les enfants ont été séparés de leurs parents plusieurs années, presque sans nouvelles : seulement 25 mots sur une feuille de papier, émanant de la Croix Rouge Suisse qui parvenaient au bout de six mois.
               Mais sur place, les consolations, les compensations affectives n'ont pas manqué.
               Les anciens réfugiés, 60 ans après, unanimement parlent d'une expérience de vie extraordinaire de cinq ans de bonheur déclarent : " Dans ma vie il y a eu avant l'Algérie, pendant l'Algérie et après. "

               Les familles pouvaient garder les enfants ou les renvoyer au centre.
               En caractère gras, dans une lettre, " toutes nous ont gardés ! ".
               Elles auront donné le goût de l'esprit pionnier, qui inspirera beaucoup d'entre eux, devenus adultes et l'exemple de la générosité malgré les restrictions. " Je reçois toujours Mme C. aidant les petits Arabes à faire leurs devoirs sans publier de leur donner quelque chose à manger. "
               L'attachement est tel, de part et d'autre, que le départ définitif se fait dans les larmes et c'est " un arrachement douloureux ", on passe deux jours et deux nuits à pleurer.

               Mais on fait aussi la fête et, de même qu'il y a eu des discours à l'arrivée des petits réfugiés (à Dellys, " En cette petite fille venue de Troyes, c'est la France que nous recevons "), de même des maires organisent des bals d'adieu, comme pour remercier les partants : en somme en prenant soin de vous comme de nos propres enfants, nous avons bien mérité de la Mère Patrie. Grâce à vous…

               La suite ?
               Plus de nouvelles une fois franchie la Méditerranée. Humain trop humain.
               Ce qui frappe c'est l'absence d'amertume dans les témoignages de ceux qui avaient tant donné. Ou bien : des nouvelles parce qu'après la guerre, beaucoup d'enfants de Guynemer ayant conservé des liens avec leurs parents " de guerre " seront invités en Algérie et Tunisie pour les vacances.
               - Quelques-uns y feront leur vie,
               - s'y marieront,
               - connaîtront …le rapatriement.


               Quant à ceux qui n'avaient plus donné signe de vie, certains firent des recherches en 1962 pour :
               - retrouver leurs anciens parents adoptifs,
               - tenter de les aider, et
               - de renouer définitivement avec eux jusqu'à la fin.


               Le désir de témoigner n'est pas forcément manqué :
               " J'ai essayé durant ces années de faire savoir aux Français que les Pieds Noirs étaient loin d'être des exploiteurs de musulmans. J'ai été accueilli gracieusement par une famille d'avril 1942 à juillet 1945 qui m'aurait adopté si mes parents avaient été tués à Issy les Moulineaux. J'ai écrit :
               - à Historia,
               - à Pierre Bellemare,
               - à l'Echo de l'Oranie,
               - à notre temps….

               Silence.

               Ce livre est la preuve qu'on pouvait trouver des documents sur cet épisode qui auraient pu tenter les historiens de métier.
               On ne le sait que trop, il y a de bons et de mauvais sujets de recherches comme il y a Justes et Justes.
               En voici un né là-bas et enfant au moment des faits " : Si j'ai accepté d'écrire ces quelques lignes, ce n'est pas pour mettre ma famille en avant car je sais que mes parents étaient des gens de bien et cela me suffit, mais c'est pour dire aux enfants des Français d'Algérie d'être fiers de leurs ancêtres car ils le méritent. "
" Mémoire vive "
Revue du Centre de Documentation Historique sur l'Algérie CDHA
N° 67- 3e et 4e trimestres 2017.


Village d'El-Affroun
Envoi de M. Christian Graille


               C'est tout d'abord dans la plaine de la Mitidja que furent implantés dès 1835-1837 des camps militaires à :
               - Douéra,
               - la Chiffa,
               - Ameur El Aïn pour pacifier la région.


               Puis en 1848 des villages comme celui :
               - d'El Affroun,
               - Bou-Roumi,
               - Marengo,
               - Castiglione et
               - Téfeschoun furent finalement créés pour accueillir une partie des colons des convois de 1848.


               Dans ce contexte historique, c'est dès 1837 que mon arrière-grand-père maternel Jean-Baptiste David, boulanger de son état à Marseille, épousa une toulonnaise au son des tambours et quitta Hyères et la France définitivement pour s'installer tout d'abord à Douéra puis à El Affroun.
               Il faut savoir qu'en 1830, seulement 602 Européens émigrèrent dont environ la moitié furent des Français.

               Puis en 1841, il y eut 7.000 femmes pour 29.000 hommes environ une femme pour quatre hommes alors qu'en 1846 il n'y eut plus qu'une femme pour six hommes, compte tenu des conditions de précarité qui les attendaient.
               Seize ans plus tard ils étaient 109.400 hommes et femmes dont un peu plus de 47.000 Français à avoir décidé de tenter cette aventure.
               Cinq lots furent réservés pour les colons non subventionnés, cinq affectés aux services publics.
               Le camp retranché situé dans un milieu encore hostile avait la forme d'un rectangle. Les travaux d'installation et les projets furent établis par deux officiers : le chef de bataillon Ducasse et le capitaine de Ledinghen.
               Ils créèrent :
               - des fossés, des parapets,
               - 40 maisons doubles,
               - 13 simples et une avec étage suivant les plans du Ministère de la guerre.


               Ils réalisèrent également :
               - le nivellement des rues,
               - les plantations,
               - l'adduction d'eau,
               - la captation de la source de Saf-Saf dont le débit atteignait en période de sécheresse 1,51 à la seconde.


               Trois compagnies de zouaves effectuèrent donc ces travaux lorsque le convoi d'émigrants parisiens parvint enfin à El Affroun. Leur nouveau paradis !

               Ce convoi de 834 personnes, parti de Paris, quai St Bernard, le 23 octobre sur le " Montezuma ".
               D'après le correspondant du Ministère, le nouvel archevêque de Paris Mgr Sibour vint, mitre en tête et accompagné de ses vicaires généraux donner la bénédiction du drapeau de la commune d'El-Affroun, bénédiction qui fut précédé d'un discours empreint de sentiments de charité et de fraternité.
               Finalement l'Escorbille prit le large à une heure précise.
               Les plus vives acclamations saluèrent les colons qui répondirent par les cris de :
               - vive la France !
               - Vive l'Algérie !
               - Vive la République.


               Le premier centre d'El-Affroun avait une étendu de 735 ha et devait recevoir 99 colons dont 77 mariés et 22 célibataires.

               Malgré l'inaptitude de la grande majorité des nouveaux colons aux travaux de la terre, tous se mirent au travail avec ardeur, mais suite aux fortes fièvres (paludisme et choléra), en 1850, il ne resta que 52 colons sur 99 capables de réussir.
               Au 31 décembre 1851, l'effectif de la population fut en légère décroissance : 344 habitants puis en 1852 après un débordement nécrologique non négligeable.
               En 1853, la proportion des décès tomba à 18 pour mille et oscilla entre 23 et 45 les cinq années qui suivirent.

               Tous vinrent donc tout d'abord assainir ce territoire recouvert essentiellement de marécages dissimulés par une végétation palustre, infestée de moustiques et de bêtes sauvages, et quelques années plus tard, ayant réchappé à toutes sortes de maux comme :
               - le paludisme,
               - le typhus,
               - le choléra,
               - la dysenterie endémique,
               - les tremblements de terre et
               - les attaques des indigènes hadjoutes,

               Ils purent enfin cultiver leurs dix hectares de terre pour nourrir leurs familles.

               Ce fut donc le cas pour mon arrière-grand-père, David Jean-Baptiste qui, à la fin cultiva sa terre puis la revendit pour en acheter une autre plus grande qu'il fit fructifier de nouveau.
               Son fils, Jules David, né à Douéra en fit de même.

               C'est donc au village d'El-Affroun que Jules David trouva épouse, Vessière Louise, la fille d'un pionnier viticulteur originaire de Lunel (Hérault) qui était venu lui aussi s'installer au village dès les premières heures de la colonisation.
               Ils eurent cinq enfants dont le dernier fut mon grand-père.
               Ainsi ma famille maternelle David Vessière et Vidal Schoenenberger qui étaient quant à eux des descendants d'anciens communards de la révolution de 1848, furent finalement deux grandes familles pionnières, emblématiques de cette période de la création du village d'El-Affroun (la famille Vidal ayant eu un des premiers maires de la commune).

               C'est finalement sous la IIIe République que le village prit son essor et parmi ceux qui firent fortune, un membre de ma famille, Vessière Jean-Louis qui hérita de son père du domaine de St Jean (115 ha qui furent plantés de vignes à Ameur El Aïn).
               El-Affroun devint donc un grand centre viticole de la Mitidja et se développa autour du rectangle initial mais son extension fut vite limitée :
               - à l'Ouest par l'oued Djer,
               - au Nord par la voie ferrée et
               - au Sud par les premiers contreforts de l'Atlas.


               C'est pourtant vers cette zone que s'étendit la ville et son évolution fut étroitement liée à son développement économique.
               Les associations agricoles coopérèrent à toutes les réalisations sociales et ainsi 14 villas jumelées furent construites à l'Ouest de la ville en 1945 pour le personnel des coopératives agricoles.
               Peu après, au Sud, une cité musulmane fut implantée groupant 150 logements.
               Evolution des populations européennes et indigènes à El-Affroun
Années 1849 1858 1881 1901 1911 1921 1931 1948 1950 1961
Musulmans - - 863 946 1258 1760 2004 2604 3859 9167
Européens 365 371 444 595 850 996 1183 940 916 1014

Marcel Moulin. " Mémoire vive "
               Revue du Centre de Documentation Historique sur l'Algérie CDHA
               Revue N° 48 du 2e trimestre 2011



PHOTOS de MERS EL KEBIR
Envoyé par M. J.L. Ventura

FORT DE KEBIR


MONUMENTS AUX MORTS




FORT



BASE VUE DU VIEUX FORT




ECOLE SAINTE CLOTILDE




VUE AERIENNE




LE FOYER





L'ORCHESTRE




Castiglione, station d'aquiculture
Envoi de M. Christian Graille

                La station expérimentale d'aquiculture de Castiglione était un remarquable ouvrage conçu et élaboré par le Gouvernement Général de l'Algérie.
                L'établissement avait été construit pour améliorer l'industrie de la pêche par le moyen d'études biologiques portant sur la faune sous-marine environnante.

Une station moderne
                Situé à 45 kilomètres d'Alger, planté sur la dune littorale du charmant village de Castiglione, le site avait été choisi en raison de la présence de centres actifs de pêche au poisson bleu dans les petits ports des alentours et d'usines de conserves de poissons à proximité.
                Les bâtiments furent conçus et édifiés suivant les plans du docteur Bounhiol, professeur de zoologie générale à la faculté des Sciences d'Alger.
                La construction fut achevée en 1921 et dès l'année 1922 elle entra en fonction.
                La station disposait d'une douzaine de grands aquariums d'une capacité de un à trois mètres cubes pour l'étude des poissons de mer comestibles.
                Dans la cour un grand réservoir de 26 m3, approvisionné par un puits d'eau douce, alimentait plusieurs bassins dans lesquels les chercheurs s'appliquaient à élever d'une manière rationnelle divers poissons d'ornement ainsi que des espèces utiles à la lutte contre les moustiques.

Un immense château d'eau.
                La nécessité de faire vivre en aquarium les animaux à étudier impliquait l'obligation de restituer exactement dans ce milieu, limité en oxygène un renouvellement constant des eaux
                C'est pourquoi fut bâtie une installation spéciale alimentée par un immense château d'eau.
                L'immense tour se trouvait au pied du rivage presque sur la plage, et se voyait de très loin lorsque l'on arrivait par la route d'Alger.
                Elle abritait un moteur destiné à actionner une pompe à double effet :
                - aspiration de l'eau en mer pour la faire monter dans le bassin situé au sommet de la tour et de là,
                - écoulement dans les aquariums dans un continuel renouvellement des eaux.

L'inauguration
                A sa création, ce fut M. Boutan qui présida sur les destinées du centre de recherches.
                Pour son inauguration, des instruments spéciaux furent fournis gracieusement par la Direction des Recherches Scientifiques et des Inventions à la tête de laquelle se trouvait le célèbre commandant Charcot, celui du " pourquoi pas ".
                De nombreux ouvrages scientifiques furent également offerts par SAS le Prince de Monaco tandis que de toutes parts parvenaient des marques de sympathie.

Un personnel qualifié
                Les premiers temps, hormis quelques chercheurs venus d'Alger, le personnel sédentaire affecté à l'entretien et au fonctionnement de la station s'élevait à trois personnes mais rapidement on s'aperçut qu'il fallait leur adjoindre un marin pêcheur pour l'utilisation de la barque de service.
                En 1929, M. Boutan atteint par la limite d'âge fut remplacé par le professeur Seurat tandis que M. Gavard, biologiste de la station, quittait son poste pour être remplacé par M. Argilas, jeune zoologiste très averti qui s'était récemment fait connaître dans les milieux scientifiques par des travaux remarqués sur la crevette algérienne.
                En 1930 deux nouveaux pêcheurs professionnels, inscrits maritimes, furent adjoints à l'établissement tandis que le matériel existant, devenu vétuste, fut remis en état de grâce à une substantielle augmentation des crédits alloués à l'établissement.
                Des sorties en mer à grande distance permirent alors des observations intéressantes notamment sur les poissons de passage.

Vers une évolution des techniques de pêche
                Le biologiste de la station, M. Gavard, avait mis au point un filet spécial : " le ring-net ". Il fut expérimenté à Chiffalo et remplaça avec succès le " lampare ", filet tournant dont l'emploi avait soulevé beaucoup de polémiques.
                Il convient de préciser que la station ne se proposait pas " d'apprendre à pêcher aux pêcheurs ".
                Dès sa création elle allait s'efforcer de les inciter à transformer leur matériel ancestral dont le rendement était trop faible et le rayon d'action trop restreint.
                L'équipement des barques de moteurs semi-diesel sera la première étape d'une transformation de la pêche artisanale en véritable industrie.
                Parallèlement, le directeur de la station sera également amené à fournir nombres de conseils techniques pour l'amélioration de l'hygiène dans les usines de sardines. Sur un autre plan, un effort important sera donné dans le domaine de l'élevage des poissons d'ornement (cyprins dorés, va-japonaise à longue queue…).
                Des frairies seront aménagées avec succès dans les bassins en ciment établis dans les jardins.

Ostréiculture, mytiliculture
                Pour ce qui concerne l'ostréiculture et la mytiliculture, les résultats furent peu encourageants.
                Mais les recherches effectuées par le professeur Dauba se poursuivront sans discontinuer.
                Il s'agissait de trouver sur le littoral algérien des lieux favorables à l'élevage des huîtres et des moules. Les chercheurs s'y emploieront activement sans toutefois obtenir de résultats satisfaisants.
                Un radeau en bois de grandes dimensions avait été installé dans le port d'Alger pour étudier la croissance des huîtres dans les eaux algériennes, mais ces études se révèleront décevantes.

Commercialisation des excédents
                L'excédent de production de sardines et anchois à certaines périodes va poser le problème de l'exportation des produits de la pêche vers la métropole.
                Déjà en 1926 des essais de transport de poisson bleu préconisés par le laboratoire avaient montré qu'il était possible de maintenir les envois en bon état de fraîcheur après 48 heures de voyage, notamment en employant des caisses rafraîchissantes spéciales.
                Certaines expériences avaient démontré que cette procédure pouvait donner des résultats satisfaisants.
                Plus tard des recherches aboutirent à l'idée qu'il y avait place, à côté de l'emploi de la glace et des wagons isothermes, à d'autres procédés de conservation, intermédiaires entre une simple réfrigération et la conserve pratiquée par les procédés habituels.
                Il existait en particulier pour les poissons bleus et notamment les sardines, certaines recettes de conservation connues de longue date des pêcheurs sous le terme de " skabetche ".
                Plusieurs envois avaient été préparés par des traitements dérivés de ces procédés empiriques, arrivèrent en France dans des conditions jugées pleinement satisfaisantes par les négociants de la place de Paris.
                Des procédés analogues avaient également permis d'expédier sur les marchés métropolitains les fameuses crevettes rouges de fort taille très répandues sur le littoral algérien.
                En définitive il semble que ce mode de conservation temporaire, dont la durée est d'une dizaine de jours, facilitait l'exportation du poisson et des crustacés et la rendait plus rémunératrice.

Un courant d'échange international.
                Grâce à la notoriété de la station de Castiglione, va s'instaurer un efficace courant d'échange de bulletins sur les travaux des laboratoires, répartis dans le monde entier, qui vont ainsi profiter des résultats de ces travaux.
                Le centre d'aquaculture va se constituer une documentation de premier ordre mise à la disposition de tous les chercheurs de la Faculté des Sciences d'Alger.
                Son rayonnement fut reconnu par la communauté tant nationale qu'internationale.
                En 1929, le directeur de la station fut envoyé au Xème congrès national des pêches maritimes de Dieppe où il effectua de nombreuses communications relatives à la pêche sur les côtes d'Algérie, en insistant notamment sur la nécessité de limiter l'action des bateaux à trente mètres de profondeur.
                Le congrès suivit également avec grand intérêt son exposé sur la conservation des produits de la mer par le froid.

Les missions du centre de recherches
                - Étude méthodologique de la biologie et de la reproduction des espèces comestibles.
                - Expérimentation des procédés de capture les mieux appropriés à cette biologie particulière.
                - Introduction et vulgarisation des outillages ayant fait leurs preuves ailleurs.
                - Création d'un service de renseignements biologiques à l'usage des pêcheurs.


                Son but général restait la détermination des règles de l'exploitation rationnelle de la mer algérienne et l'accroissement des rendements économiques de la pêche.                 Cette station, seule du genre en Algérie, s'intéressait à tout ce qui avait trait à la mer et à ses richesses.
                Le centre était là pour donner :
                - des conseils aux industriels sur les filets de pêche à employer,
                - l'industrie des conserves ainsi que sur
                - l'utilisation des déchets des poissons.

Des études particulières
                Les études portèrent aussi sur le " gambusia " appelé au Mexique " mosquito fish ", un poisson originaire de l'Amérique du Nord qui offrait un intérêt particulier : fort avide de larves de moustiques, c'était un agent destructeur efficace de ce fléau. Ainsi faisait-on à la station un élevage soutenu de ce poisson pour alimenter la demande des agriculteurs de la région.
                Autre étude intéressante, celle du docteur Boutan sur le " centhophore granuleux " plus connu sous le nom de " galuchat ", petit squale dont la peau donne un cuir très apprécié dans la mégisserie (préparation des cuirs utilisés par la ganterie et la pelleterie), peau très en vogue dans les années 30.
                Parallèlement le centre travaillait sur l'organisation scientifique du transport du poisson en caisses frigorifiques vers les pays chauds.
                Grâce aux grandes embarcations dont le laboratoire avait été doté, des recherches actives purent être effectuées en haute mer.
                En revanche des pêches effectuées en eau profonde pouvant atteindre 500 mètres, permirent de fournir de l'huile de foie de morue mais surtout de nombreuses peaux de centophores à plusieurs industriels de la région qui envisageaient sérieusement l'industrie, sur la côte algérienne, de ce précieux poisson.

Le problème de la sardine
                Mais restait un problème fondamental qui préoccupait les chercheurs : celui de la sardine.
                - Comment se faisait-il que ce poisson si estimé, tantôt abondant, tantôt absent des lieux de pêche ?
                - Pourquoi des années de pléthore et d'autres de disette ?
                - Pourquoi certains jours la sardine apparaissait en bancs immenses, tandis qu'à d'autres les pêcheurs la cherchaient en vain ? Mystère !

                Mais mystère qu'il fallait percer. C'était le but que poursuivait la station depuis longtemps et la solution ne se découvrira que beaucoup, plus tard.
                Les recherches portaient sur toutes les causes possibles :
                - courants,
                - différence de températures,
                - salinité des eaux,
                - vents,
                - nébulosité … qui pouvaient avoir une influence sur le vagabondage des bancs.

De nombreux visiteurs
                Les viviers recevaient la visite de nombreux curieux qui pouvaient voir évoluer des spécimens de toute la faune marine de nos côtes.
                Tous les ans près de 5.000 visiteurs se pressaient derrière les vitres épaisses des aquariums. Dans une eau, constamment renouvelée évoluaient :
                - mulets, girelles, soles, rascasses, raies,
                - tchelbas (dorade royale), oblades, loups, daurades,
                - balistes (poissons des récifs coralliens), murènes,
                - serrans (poisson proche du mérou), torpilles,
                - mérous, cabots (poisson posé au milieu des roches, peu farouche),
                - congres, badêches (cousine du mérou),
                - anémones de mer … qui faisaient la richesse des fonds marins de notre Méditerranée.

                Des groupes d'écoliers étaient accueillis régulièrement accompagnés de leurs éducateurs.
                Ces visites suscitèrent-elles , peut-être, des vocations pour les métiers de la mer ? Le dernier directeur de la station fut M. Dieuezeide.
                Nous avons cherché à savoir ce qu'est devenue aujourd'hui cette station.
                Selon certains visiteurs elle serait encore en service, mais avec une activité plus que réduite.
Gérard Séguy


Alger avant la conquête (1)
Envoi de M. Christian Graille

               Les peuples n'ont pas de mémoire. Il ne manque pas de gens en France qui qualifient de spoliation la conquête d'Alger.
               Les pauvres musulmans sont bien à plaindre ; ce sont :
               - des Polonais,
               - des Irlandais,
               - des Vénitiens.

               Une pauvre nation subjuguée.

               Les Emile de Girardin (journaliste et député 1806-1881) et consorts s'amusent à ces rapprochements malencontreux et l'excellent public accepte naïvement ces paradoxes de l'esprit de parti.
               Nous recommandons à ces défenseurs bénévoles des nationalités absorbées, la lecture de l'intéressant recueil que vient de publier M. Albert Devoulx (conservateur des archives arabes de l'Algérie ; auteur d'ouvrages historiques sur l'Algérie. 1826-1876).
               Ils s'édifieront sur la situation politique et morale de ce peuple intéressant que la France a dépouillé de ses droits légitimes.

               Ils verront à l'œuvre les Algériens et leurs autorités constituées depuis le Chaouch jusqu'au Dey, et s'ils ont un peu de cœur à l'endroit où s'attache ordinairement la croix d'honneur, ils rougiront de ce que non seulement la France, mais même la chrétienté ait subi, pendant tant de siècles :
               - l'odieuse tyrannie,
               - les insultes grossières,
               - les forfanteries sauvages,
               - les exigences inouïes de ces petits chefs de brigands couronnés qui, du haut de la Casbah, présidaient impunément aux entreprises les plus audacieuses : de piraterie,
               - les exigences inouïes de ces petits chefs de brigands couronnés qui, du haut de la Casbah, présidaient impunément aux entreprises les plus audacieuses de piraterie, de pillage,
               - de dévastation dans toute l'étendue de la Méditerranée


               1) Cet article n'a pas été écrit spécialement pour notre publication.
               Il a paru le 12 mars 1865 dans le journal des colons dirigé par M. Alexandre Lambert.
               Nous avons cru devoir le reproduire ici parce qu'il dépeint d'une manière saisissante les humiliations infligées à la France et aux nations civilisées par le Gouvernement des Beys et que ce tableau de la piraterie algérienne est à la fois une justification de la conquête et une démonstration éloquente de la nécessité de ne point restituer l'Algérie aux musulmans, ainsi que certains écrivains arabophiles ont osé le proposer.


               Il me parait étrange que des États tels que :
               - la France, l'Espagne, l'Angleterre
               N'aient pas vingt fois détruit cette caverne de brigands et se soient toujours bornés à des répressions insuffisantes dont les Deys d'Alger se moquaient lorsque les vaisseaux chrétiens avaient tourné leur proue du côté de l'Europe.

               Pour expliquer cette longue longanimité, il faut se reporter aux guerres terribles qui ont presque perpétuellement divisé les principaux intéressés.
               Les luttes des nations civilisées facilitaient l'exploitation régulière de l'Europe par une horde de sauvages.
               Les petits États surtout avaient à souffrir parce qu'ils ne pouvaient pas montrer les dents, et l'on peut assurer que cela n'aurait pas encore cessé si la France n'avait pas, en 1830, décidé que cela ne pouvait durer plus longtemps.

               Quand nous disons que les petites nations avaient plus à souffrir que les grandes, nous citons une opinion de M. Devoulx ; car nous ne pensons pas, en vérité, qu'il soit possible d'inventer des vexations plus honteuses que celles qui étaient infligées à la France par les pirates d'Alger :
               - Pillage de notre commerce jusqu'au deux encablures de nos ports,
               - réduction en esclavage de nos nationaux,
               - emprisonnement de nos Consuls sous les moindres prétextes,
               - bastonnades infligées par caprice aux résidents,
               - exigences répétées de cadeaux, de sommes d'argent,
               - expulsions violentes en cas de refus,
               - violation flagrante des traités les plus solennels le jour même où ils sont signés,
               - menaces de guerres,
               - incendie de nos comptoirs.


               Voilà quelques-unes des petites aménités dont étaient gratifiés par les Deys d'Alger, les Consuls et les résidents français de la Régence.
               C'était une rude tâche que d'être Consul français à Alger.
               C'était un vrai martyrologe que l'histoire de ces représentants.
               - Le premier qui fut envoyé, en 1581, fut mis en prison par ordre du Pacha.
               - En 1683, le père Levacher, Consul à Alger, fut attaché à la bouche d'un canon.
               - En 1688, M. Pielle est arrêté et mis au bagne ; il subit aussi le supplice du canon comme le père Levacher.
               - En 1697, le Pacha El-Hadj Hamed menace le Consul de le faire mettre à la bouche d'un canon. Ce Consul prend l'épouvante et s'enfuit d'Alger.


               La position des Français était intolérable. Ils étaient menacés sans cesse pour leurs vies et leurs biens. Qu'importaient les traités à la soldatesque brutale et sanguinaire qui, sous le moindre prétexte, massacrait les chefs, même qu'elle s'était donnés.
               Les musulmans ne se souciaient nullement du droit des gens.
               Les chrétiens étaient des ennemis que l'on pouvait tolérer, qu'on ne renonçait jamais à humilier et à insulter.
               - En pleine paix des navires français étaient capturés en mer,
               - la cargaison était vendue,
               - l'équipage et les passagers étaient mis au bagne.
               - Les avanies les plus humiliantes étaient infligées à nos Consuls.

               Ainsi M. Delaume ayant refusé de déposer son épée, lors de sa présentation, le Dey menaça de la briser lui-même.
               Les Consuls étrangers baisaient la main de Son Altesse.

               Un Consul envoyé par l'Angleterre ayant décidé qu'il ne se soumettrait ni au baise main ni à l'obligation de déposer l'épée, le Dey lui fit dire que s'il se présentait l'épée au côté, il la lui arracherait lui-même et la lui casserait sur la tête.
               On subissait ces hontes parce que la guerre avec la Régence avait toujours pour résultat la ruine et la mort de nationaux, sans amener d'avantages sérieux ni durables.
               - En 1740, une galère espagnole ayant enlevé un bateau algérien dans les eaux de Toulon, le Dey accusa le gouvernement français d'avoir favorisé cette capture.
               - Le Consul M. Déjouville fut arrêté et mis aux fers ainsi que le vicaire apostolique et les prêtres de la mission.

               Le Dey fit arrêter les équipages de sept navires français qui se trouvaient dans le port d'Alger et envoya ces marins, enchaînés deux par deux, aux travaux les plus rudes. Puis il donna l'ordre au Bey de Constantine de faire incarcérer tous les Français qui se trouvaient à la Calle.

               Le Gouvernement français, craignant de compromettre la vie de ses nationaux et des intérêts considérables, céda aux exigences du Dey.
               Il paya 1.650 sequins (ancienne monnaie d'or de Venise utilisée aussi dans les pays du Levant) pour les onze prisonniers génois qui avaient été mis en liberté par suite de la capture du bateau algérien.

               En 1744, en pleine paix, le Dey fait ravager notre établissement de la Calle et massacrer ses habitants, sous prétextes que nous entretenions des intelligences avec Malte et les Tunisiens.
               Aucune satisfaction ne fut accordée pour cet acte de brigandage.

               En 1753, un navire français est attaqué dans le détroit de Gibraltar.
               Il se défend ; il est pris.
               - Son capitaine traîné devant le Dey d'Alger expire sous le bâton.
               - L'équipage est mis à la chaîne, deux à deux.
               - Aucune satisfaction n'est donnée.

               Malgré les menaces de guerre le Dey se borne à mettre l'équipage en liberté et nous étions la nation la plus favorisée !

               En 1757, le Dey Baba-Ali fait dire au Consul M. Lemaire que désormais il entend recevoir annuellement des présents du Roi de France.
               Cette injonction étant restée sans effet, M. Lemaire est saisi le 11 octobre et mis aux fers avec les esclaves.
               Un mois après, il fut permis au Consul de rentrer dans sa maison mais à la condition de garder les fers.

               En 1760 le Consul, M. Pérou, reçoit du Dey l'ordre de quitter immédiatement Alger, avec menace d'y être contraint.
               Redoutant la violence des Turcs à l'égard de nos résidents il cède et part pour la France.

               En 1763, sous un prétexte futile :
               - M. Vallière,
               - le vicaire apostolique,
               - le chancelier,
               - les missionnaires,
               - les équipages de quatre navires provençaux,

               En tout 53 personnes sont jetés aux fers, exposés aux insultes de la populace et employés aux travaux publics.
               Ce n'est qu'au bout d'un mois que M. Vallière obtient la liberté à force de présents.

               La même année le Dey fait arrêter tous les Français établis à Bône et à la Calle.
               Il interdit à M. Vallière de partir pour la France et le garde en otage.
               Il fallut une flotte pour mettre à la raison la bête sauvage qui régnait à Alger.

               En 1798, le Consul M. Moltide et tous les résidents français sont mis à la chaîne. Ils y restent un mois et demi.

               Nous n'en finirons pas à rappeler les actes de brutalité barbare dont les Deys d'Alger se sont rendus coupables envers la France.
               Les bagnes d'Alger furent remplis de Français jusqu'au dernier jour et lorsque M. Dubois-Thainville, en 1801, quitta Alger il n'avait pas retiré moins de 700 Français de l'esclavage.

               Cette patience d'une grande nation étonne quand il s'agit d'un petit roitelet :
               - sans armée, sans puissance, presque sans État,
               - qui l'abreuvent de mépris et d'insultes journellement pendant des siècles.

               Ose-t-on dire en présence de pareils faits, que la conquête d'Alger fut une iniquité ? Nous pensons que pour l'honneur de la France, cette réparation fut bien tardive.

               La question la plus importante dans les documents publiés par M. Devoulx, celle qui fut l'objet des constantes préoccupations :
               - des résidents,
               - des Consuls français et
               - des autorités turques, c'est la question des cadeaux, véritable tribut levé par l'avidité des pirates sur la peur qu'ils inspiraient aux gens que leurs affaires obligeaient de séjourner dans la Régence.


               De la part du Dey, chaque petite circonstance de la vie, depuis le premier jusqu'au dernier jour de son règne, était une occasion de recevoir des présents plus ou moins riches de la part de tous les Consuls européens sans exception.
               L'avènement au trône, occasion de rigueur.
               - Puis les mariages fort fréquents chez ces potentats turcs.
               - Puis la naissance des enfants,
               - leur circoncision aussi.
               - Le Dey avait remporté une victoire, il fallait donner en signe de réjouissance,
               - avait-il essuyé une défaite, il fallait donner pour montrer la part qu'on prenait à son malheur,
               - revenait-il du pèlerinage de la Mecque, il fallait encore donner,
               - envoyait-il par caprices quelques marins français au bagne, il fallait donner pour les en faire sortir,
               - délivrait-il par boutade quelques malheureux esclaves, il fallait donner par remerciements,
               - faisait-il étrangler son ministre, il fallait donner en matière de félicitation.

               Il fallait donner toujours.

               Ce qu'il y a de singulier c'est que les nations européennes, se jalousant jusqu'au sein de leur honte, faisaient de leur mieux pour s'éclipser les unes les autres, par la richesse des présents, afin d'obtenir les bonnes grâces du tyran.
               L'Angleterre avait-elle donné un caftan d'argent, vite le Consul de France assemblait tous ses nationaux pour offrir un caftan d'or, à seule fin de ne pas demeurer en reste de politesse.
               Le Dey encourageait cette lutte de bons procédés en envoyant au bagne ceux dont les cadeaux lui paraissaient insuffisants.

               Cette manière de recevoir des cadeaux s'était si bien établie à la cour du principicule turc que les serviteurs avaient fini par juger profitable de faire comme leur maître ; si bien que depuis le dernier chaouch du palais jusqu'au premier ministre, toute la bande de la hiérarchie administrative était, pour ainsi dire, à la solde des Consuls étrangers.

               Voici la liste de quelques-uns des fonctionnaires auxquels il était d'usage d'offrir, en temps et hors temps :
               - de l'argent,
               - des caftans,
               - des vestes,
               - des pièces de drap,
               - des armes


               Car ce qui est bon à prendre est bon à garder, avec l'indication des circonstances de ces dons :
               - Le casenadar (trésorier général) parce qu'il doit rentrer demain après une absence de 6 mois
               - l'écrivain des chevaux, simplement pour lui faire une honnêteté,
               - Sidi Ali, neveu du Dey,
               - Ali, chaouch du casenadar,
               - l'écrivain de la porte du Dey,
               - les écrivains de la douane,
               - le capitaine dont le vaisseau est en construction,
               - le vekilargi, intendant de la marine, à cause de son heureux retour de la Mecque,
               - Mehemet-Aga, ambassadeur de Constantinople et les musiciens de sa Hautesse qui sont venus montrer leur talent à Alger,
               - les commandants des vaisseaux qui doivent aller en course,
               - l'Amiral de la Régence parce qu'il n'est guère poli de faire un compliment sans y ajouter quelque chose,
               - le capitaine à l'occasion de son mariage etc., etc.


               Nous ne voulons pas fatiguer le lecteur de cette nomenclature grotesque.
               Ces misérables pillards rivalisaient d'insolence avec les Deys à l'égard des chrétiens qui étaient à leur merci.
               C'était une exploitation régulière dont nul traité ne nous garantissait.

               Les Deys possédaient une mine inépuisable de recettes.
               Leur orgueil leur avait si bien persuadé que ce tribut leur était dû par les nations européennes qu'ils avaient fini par exiger de chacune d'entre elles des sommes payées annuellement, sous peine de voir leur commerce ruiné, leurs rivages dévastés, tout trafic rendu impossible dans la Méditerranée.
               Nous en avons dit assez pour intéresser le lecteur à l'ouvrage de M. Devoulx.

               C'est là un travail :
               - vraiment sérieux,
               - vraiment utile,
               - vraiment profitable,

               Non seulement au point de vue scientifique et historique mais aussi à celui de la saine entente des choses dans le passé et dans le présent.

               La colonie n'est pas riche en littérature nationale, et les esprits qui s'intéressent à son progrès doivent saluer avec reconnaissance les travaux solides des hommes que la phraséologie ne séduit pas et que l'aridité de la science ne rebute pas.
               Que M. Devoulx poursuive avec courage son œuvre historique si nettement dessiné dès le début et nul ne pourra se glorifier d'avoir contribué plus que lui à l'émancipation intellectuelle de l'Algérie.

Adolphe Berthoud. Napoléon III en Algérie par Octave Tessier correspondant du Ministère de l'Instruction Publique pour les travaux historiques. Édition 1868.


JE VEUX VIEILLIR !
Envoyer par M. Hugues

       "Je ne changerai jamais mes amis fantastiques, ma vie merveilleuse, ma famille bien-aimée pour des cheveux moins gris ou un ventre plus plat. > En vieillissant, je suis devenu plus amical envers moi-même et moins critique envers moi-même.
       Je suis devenu mon ami ...

       Je ne me blâme pas d'avoir mangé des biscuits supplémentaires, de ne pas avoir fait le lit ou d'avoir acheté quelque chose de stupide dont je n'avais pas besoin.
       J'ai le droit d'être désordonné, d'être extravagant.
       J'ai vu beaucoup de chers amis quitter ce monde trop tôt, avant de réaliser la grande liberté du vieillissement.
       Qui m'en voudra si je décide de lire ou de jouer sur mon ordinateur jusqu'à quatre heures et de dormir jusqu'à midi?
       Qui me critiquera de rester au lit ou devant la télé aussi longtemps que je le souhaite?
       Je vais danser avec ces merveilleux tubes des années 70 et 80 et si en même temps je veux pleurer pour un amour perdu ...

       Si je veux, je marcherai le long de la plage en short trop allongé sur un corps en décomposition et plongerai dans les vagues avec abandon, malgré le regard pénalisant des autres .
       Ils vieilliront également.
       Je sais que parfois j'oublie, mais il y a des choses dans la vie qui devraient aussi être oubliées.
       Je me souviens des choses importantes. Bien sûr, au fil des ans, mon cœur s'est brisé.
       Mais les cœurs brisés nous donnent force, compréhension et compassion.

       Un cœur qui n'a jamais souffert est immaculé et stérile et ne connaîtra jamais la joie d'être imparfait.

       J'ai la chance d'avoir vécu assez longtemps pour avoir mes cheveux gris et mon rire juvénile gravés à jamais dans les sillons profonds de mon visage.
       Beaucoup n'ont jamais ri, beaucoup sont morts avant que leurs cheveux ne deviennent argentés.
       En vieillissant, il est plus facile d'être positif.
       Vous vous souciez moins de ce que les autres pensent.

       Je ne me remets plus en question.
       J'ai gagné le droit de faire des erreurs. Donc, pour répondre à votre question, j'aime être vieux.
       J'aime la personne que je suis devenue.
       Je ne vivrai pas éternellement, mais tant que je serai encore là, je ne perdrai pas de temps à regretter ce qui a pu être ou à s'inquiéter de ce qui sera.

       Et si je le veux, je mangerai un dessert tous les jours. Avec du Champagne.
                  



Le drame du Lamoricière
Envoi de M. Christian Graille

               Ils étaient quinze enfants des centres Guynemer, encadrés par deux infirmières, heureux de partir et pouvoir enfin retrouver leurs parents, deux seulement ont pu être sauvés.

               Mardi 6 janvier 1942. A 17 heures, le Lamoricière, paquebot de la Compagnie Générale Transatlantique, appareille d'Alger pour Marseille avec 272 passagers dont 88 militaires et un équipage de 121 hommes.
               Le commandement du navire est assuré par Joseph Milliasseau, âgé de 48 ans, c'est sa neuvième traversée.
               Parmi ces passagers des espions au service des alliés mais aussi le mathématicien polonais Jerzy Rosycki, qui avait réussi avec deux collègues à décrypter en 1933 le fameux code Emigma utilisé par l'armée allemande.
               Recherché par la Gestapo, il voyage sous un faux nom à bord du Lamoricière.

               Les conditions météorologiques sont très mauvaises, vent de Nord-Ouest, force 5. Mis en service en 1920, le paquebot n'est pas tout neuf. Il n'y avait plus de mazout en 1942. De ce fait les chaudières ont été reconverties au charbon, diminuant leur puissance.
               Des ouvertures avaient été réalisées de chaque côté de la coque pour l'approvisionnement des soutes et avaient été étanchées par une tresse de chanvre.

               Mercredi 7 janvier 1942. Le navire a emprunté le canal de Minorque, la mer est grosse, le vent se renforce pour atteindre la force 7.
               En fin de matinée une voie d'eau se déclare, inondant la soute à charbon. Celui-ci, de mauvaise qualité brûle difficilement.
               A 22h 54 le radio capte un SOS du cargo Jumiège, le commandant décide de se dérouter pour lui, porter assistance.

               Jeudi 8 janvier 1942. Arrivée sur zone vers 3 heures du matin, aucun signe du Jumiège qui a coulé avec ses 20 membres d'équipage.
               L'eau pénètre de plus en plus dans la chaufferie.
               Compte tenu de l'état de la mer et d'un manque de charbon pour atteindre Marseille la décision est prise à 15 h de virer de bord pour aller se mettre à l'abri sous Minorque.
               La pression baisse ce qui rend la manœuvre très difficile, le navire tombe en travers de la lame et roule. L'eau embarque par les portes de la soute bâbord.
               Les tresses de chanvre n'assurant plus l'étanchéité, elle envahit la chaufferie.
               A 17 h 10 le Lamoricière lance un message :
               - Ne pouvons plus faire route
               - ne sommes plus maîtres de notre manœuvre
               - chaufferies envahies par l'eau
               - demandons urgence présence navire capable remorquer
               - position approximative 40.38N 04.38E
               - estimons dériver 3 milles à l'heure dans le S.S.E. Milliasseau

               A 18 heures les machines sont stoppées.
               A 21 heures le navire est plongé dans l'obscurité.
               Une ancre flottante est fabriquée avec les moyens du bord pour éviter de trop dériver.

               Vendredi 9 janvier. 9 H 15 L'espoir renaît en voyant arriver le paquebot Gouverneur Général Gueydon. Malgré de multiples tentatives il ne parvient pas à prendre le Lamoricière en remorque.
               A 11 heures le commandant décide l'abandon du navire.
               Une trentaine de femmes et une vingtaine d'enfants se présentent sur le pont promenade. Parmi eux l'épouse du capitaine de corvette de Gransac et ses trois enfants.
               Ils embarquent dans le canot N°2 avec les 17 enfants du groupe Guynemer et les deux infirmières accompagnatrices, plus quelques autres femmes et enfants.
               Le commandant de la Marine nationale Lancelot et le second le capitaine Nougaret ordonnent au capitaine Gransac de les rejoindre.
               Lors de l'amenée du canot une vague énorme le soulève. Le garant arrière se décroche alors que celui de l'avant reste en place.
               L'embarcation bascule, frappe la coque, précipitant à la mer en furie ses passagers qui disparaissent dans les flots.
               Le commandant Lancelot saute par-dessus bord pour sauver la famille Gransac.
               On ne le verra plus ainsi que 15 des 17 enfants du groupe Guynemer et leurs deux infirmières.
               Les autres passagers affolés refusent d'embarquer dans les canots.
               Le commandant Milliasseau, impuissant, donne l'ordre du " sauve qui peut ".

               Passagers et membres d'équipage se jettent dans l'eau glacée. Agrippés aux :
               - radeaux,
               - madriers,
               - engins flottants,

               Ils tentent de rejoindre le Gueydon.

               A 11 h 45 le Chanzy est en vue. Le spectacle qu'il découvre est dantesque. Il aperçoit le Gueydon qui recueille 55 naufragés et en recueille à son tour 25.
               A 12 h 35 vendredi 9 janvier 1942 par 40° 00N-04°22E, le Lamoricière se retourne, se redresse verticalement la proue vers le ciel. Il restera quelques instants dans cette position, seule est visible la silhouette du commandant Milliasseau qui se découpe à tribord, sur la passerelle, puis s'enfoncera dans les flots par l'arrière.

               A 16 h l'aviso l'Impétueuse arrive sur les lieux et récupèrera une heure plus tard un radeau avec 15 passagers épuisés dont Maguy Dumont Coureau qui, à son retour, publia le récit de ce drame.
               Parmi ces 15 rescapés figurait un enfant.
               Elle recueille sur l'Impétueuse ce bref témoignage : " Dans la cabine voisine, je vois le jeune homme blond de notre groupe. Il a 16 ans et fait partie du groupe de l'œuvre Guynemer. Il est couché et n'a pas l'air très bien. J'ai nagé tellement longtemps avant de rallier le radeau explique-t-il. Tous ses camarades ont péri sous ses yeux dans une embarcation brutalement renversée.
               Maguy Dumont Coureau qui perdit son mari dans le naufrage décédera à l'âge de 101 ans.

Bilan

               98 personnes sur 395 seront sauvées. Les pertes se répartissent ainsi :
               - hommes : 88,
               - femmes : 35,
               - enfants : 26,
               - militaires : 68,
               - équipage : 80.

               Les membres d'équipage disparus ont été inscrits : morts pour la France, leurs enfants reconnus pupilles de la Nation.

Témoignage de Mlle Beaujan

               L'une des 23 personnes recueillies par le Chanzy :
               " Un brave marin, Charlot, avec une vaillance qui mérite d'être signalée, détacha la dernière barque …. Il était le bosco du bord.
               Avec une vingtaine d'hommes et femmes avec lui, nous partîmes et eûmes à lutter furieusement contre le courant qui tentait de jeter notre embarcation contre la coque du navire. A l'aide de nos rames nous pûmes éviter l'écrasement et nous éloigner du Lamoricière.
               Alors commença pour notre petit équipage la plus infernale des odyssées.
               La tempête jetait notre frêle esquif d'une vague à l'autre. Au loin, sur la crête d'une de ses montagnes monstrueuses, un radeau auquel s'agrippaient d'autres naufragés.
               Il faisait un froid épouvantable. A la tombée de la nuit nous n'étions plus que 5 sur 20. Le brave Charlot disparut à son tour.

               Soudain un cri m'échappe : un navire ! Le Chanzy. A ce qui pouvait nous rester d'énergie, nous hurlons. Nous faisons des signes désespérés. Quelques instants plus tard, le bâtiment s'approchait de nous, une corde nous était tendue.
               A peine à bord nous recevons les soins les plus attentifs du personnel sanitaire et des marins. "

La découverte de l'épave.

               En 2008 après plusieurs années de recherches grâce à la prouesse de l'équipe de plongeurs de la Pfeiffer Deep Divers venue d'Italie, l'épave du paquebot, au prix d'efforts exceptionnels a été retrouvée et photographiée.
               Localisée en deux parties majeures, une seule partie a pu être explorée à cause de la géographie des fonds sous-marins.
               En effet la proue du Lamoricière en bon état se trouve à 156 mètres de profondeur sur les bords d'un ravin.
               La poupe, qui n'a pas été repérée pour l'instant se trouverait au fond du précipice à 300 mètres ce qui, représenterai une profondeur d'environ 150 mètres de plus que pour la proue.
               L'épave de la proue, recouverte :
               - d'éponges grises et marrons,
               - de crevettes (sur les cordages),
               - de moules,
               - de méduses et
               - autres poissons a été écrasée vers la déchirure causée par la chute de la poupe dans le ravin.


               Les ponts se sont ainsi effondrés sur eux-mêmes ne laissant pas d'entrées possibles aux robots pour explorer la première moitié de l'épave.
               A l'aide de l'équipement télévisuel à bord du Pegaso III, l'équipe de la Pfeiffer Deep Divers a découvert de multiples équipements sanitaires (lavabos et autres ustensiles) ainsi que deux petits biberons dans le salon de 2ème classe endroit où les femmes et les enfants furent tous réunis pour l'évacuation.
               Les scientifiques ont également découvert les décors de style western du salon des 2e classes encore visible 70 ans après le naufrage.
               La coque renversée de la proue, avec ses hublots restés intacts, fait de l'épave du Lamoricière une tombe sous-marine à tous ceux qui ont péri à l'intérieur du navire.

Yves Marthot " Mémoire vive "
Publication du Centre de Documentation Historique sur l'Algérie (cdha)
N° 67 3e et 4e trimestres 2017



Pour avoir le sourire chaque Jour
Envoyé par Hugues.

             Lundi :


             Un homme a une très jolie concierge et il lui demande :
             " - Est-ce que je peux vous faire la cour ? "
             - Oui, bien sûr... Je vais vous chercher le balai !
**********

             Mardi :

             Toto est à l'école. La maîtresse lui demande de conjuguer le verbe marcher à tous les temps.
             Il répond :
             " - Je marche sous la pluie. Je marche sous la grêle. Je marche au soleil. Je marche dans la neige. "
**********

             Mercredi :
             " - Est-ce vrai papa qu'en Afrique un homme ne connaît pas sa femme avant d'être marié ? "
             Le père :
             " - C'est vrai dans tous les pays du monde mon garçon ! "
**********

             Jeudi :
             Une mère dit à son garçon :
             " - N'oublie pas que nous sommes sur terre pour travailler. "
             " - Bon, alors moi, plus tard je serai marin ! "
**********

             Vendredi :
             Le patient ouvre les paupières, reprenant tout doucement conscience après son opération, et voyant une tête penchée au dessus de lui, il bredouille :
             " - Alors docteur, l'opération s'est bien passée ? "
             " - Ah.. Je suis désolé mon fils. Je ne suis pas ton médecin, mais Saint Pierre "
**********

             Samedi
             À 21 heures, le téléphone sonne au domicile d''un médecin qui décroche.
             Un collègue lui dit :
             - " On a besoin d'un quatrième pour un poker ! "
             - " J'arrive dans 10 mn. "
             - " C'est grave ? demande sa femme. "
             - " C'est très grave, il y a déjà 3 médecins sur place ! "


Notice sur l'éclipse totale du soleil
du 18 juillet 1860
Envoi de M. Christian Graille
I
Sur les éclipses de soleil.

               De tous les spectacles célestes les plus frappants, celui d'une éclipse totale du soleil est, sans contredit, le plus remarquable à cause de sa rareté et de son caractère grandiose.
               Il l'est surtout lorsqu'au milieu du jour et dans la belle saison, l'obscurité de la nuit succède soudainement à la vive clarté solaire.
               Les plus grands esprits et les plus fermes ont avoué en avoir éprouvé une sorte de sentiment de crainte ; il n'y a donc nullement lieu de s'étonner de la terreur que les peuples sauvages ou les Barbares éprouvent à l'aspect d'un pareil phénomène.
               La combinaison des éléments divers qui concourent à la production d'une éclipse totale de soleil pour un lieu quelconque, même pour le globe entier, est excessivement rare.

               Ainsi à Paris pendant le XVIIIe siècle, il n'y eut qu'une éclipse de ce genre, celle de 1724 ; en pendant le XIXe siècle, il n'y en aura pas du tout.
               La dernière que l'on observa à Londres eut lieu en 1715 et celle qui l'avait précédée remontait à 1140.
               D'ici à la fin du siècle actuel, les habitants de l'Europe n'auront la chance d'en voir une demi-douzaine environ. Ce sont les suivantes :

               En 1860, le 18 juillet. Eclipse totale du soleil, visible :
               - au Nord des États-Unis d'Amérique, dans l'Espagne, l'Algérie, les régences de Tunis et de Tripoli, le désert de Lybie et l'Abyssinie.

               1861, 31 décembre :
               - Océan atlantique, Cap Vert, désert du Sahara, pays des Touaregs, Imalah, Redamès, Tripoli, Méditerranée, Grèce.

               1870, 22 décembre :
               - Açores, Sud de l'Espagne, Algérie, Sicile, Turquie.

               1887, 19 août :
               - Nord-Est de l'Espagne, Russie méridionale, Asie centrale.

               1896, 9 août :
               - Groenland, Laponie, Sibérie.

               La dernière du siècle aura lieu en 1900, 28 mai :
               - États-Unis d'Amérique, Espagne, Égypte.
               La dernière éclipse remarquable qu'on observa en France fut celle de 1842.
               Arago présidait aux observations. Nous aurons l'occasion d'y revenir.

Causes des éclipses du soleil.

               Nous rappellerons quelques notions élémentaires pour l'intelligence de ce qui va suivre et pour les personnes étrangères à l'astronomie qui peuvent cependant trouver leur part d'intérêt dans la contemplation de ce grand phénomène.
               Par exemple, quelle est la cause des éclipses ?

               Tout le monde sait que la lune tourne autour de la terre en 29 jours environ, et que, lorsque l'on dit qu'elle est nouvelle on veut exprimer qu'elle se trouve entre le soleil et la terre, et presque sur la même ligne qui joint ces trois corps.
               C'est dans cette position qu'il peut y avoir une éclipse de soleil.
               Comme il y a environ 12 lunaisons dans une année, on pourrait supposer tout d'abord qu'il devrait y avoir autant d'éclipses qu'il y a de nouvelles lunes.

               Mais je me hâte de dire que, pour qu'une éclipse de soleil soit possible, il faut que la lune approche tellement la ligne visuelle (que l'on peut supposer aller directement de la terre au soleil), qu'elle vienne cacher une partie du soleil aux habitants de la terre. Alors il y a une éclipse partielle.
               Quant au contraire la lune vient se placer sur la ligne même, de manière que cette ligne passe en même temps par le centre d'un point quelconque sur la terre, par le centre de la lune et celui du soleil alors il y a une éclipse totale pour le lieu ; le disque de la lune recouvre entièrement celui du soleil.

               On commettrait cependant une grave erreur si on concluait de là que le disque de la lune pouvant recouvrir celui du soleil, la lune doit être aussi grande que le soleil, sinon plus grande.
               Tout ceci n'est qu'apparent. En voici l'explication :
               La lune peut nous cacher le soleil entièrement parce qu'elle se rapproche assez de notre œil pour avoir un diamètre apparent de même ou de plus grande dimension que celui du soleil.
               Quand on considère que le soleil est environ 400 fois plus éloigné de nous que l'est la lune, et que la distance de la terre à la lune est variable, on peut déjà entrevoir comment le phénomène se passe :
               Si la lune est le plus rapprochée de nous et qu'elle se trouve exactement sur la ligne qui va directement de la terre au soleil, son diamètre apparent est plus grand que ce dernier et alors il y a éclipse totale.
               C'est ce qui aura lieu au mois de juillet prochain.

               Le 1er juillet à 8 heures 49 minutes du soir, la terre sera à sa plus grande distance du soleil ; et, vers le moment de l'éclipse du 18 juillet, cette distance n'aura presque pas varié.
               D'un autre côté la lune se trouvera à sa plus petite distance de la terre le 20. Elle nous apparaîtra donc sous son plus grand diamètre.
               Ces circonstances sont singulièrement favorables pour qu'une éclipse soit totale et pour que l'obscurité atteigne son maximum d'intensité.
               Quand, au contraire la lune est à sa plus grande distance de la terre et toujours sur la même ligne qui joint la terre et le soleil qui a un diamètre apparent plus grand que celui de la lune, il déborde alors de tous les côtés, formant un anneau lumineux, dont la lune occupe généralement le centre.
               Cet anneau est plus ou moins régulier ou parfait selon que le centre de la lune se trouve exactement sur la ligne qui va de la terre au soleil ou qu'il se trouve un peu au-delà.
               Il est facile de comprendre après cela que l'éclipse est partielle, lorsque la distance angulaire de la lune est un peu moindre que la largeur de son diamètre, n'y ayant alors qu'une partie du disque lunaire qui se trouve projeté sur celui du soleil.
               C'est ce qui arrivera pour l'éclipse du 18 juillet, vue de Paris ou de Marseille.

II
Description générale de l'éclipse totale de soleil du 18 juillet 1860.

               Le 18 juillet 1860, il y aura une éclipse totale du soleil qui sera visible depuis l'Oregon, dans l'Amérique du Nord, jusqu'en Abyssinie.
               Le cône d'ombre de la lune qui viendra toucher la surface de la terre entre ces deux points, formera une zone d'une largeur d'environ 50 lieues et parcourra la distance comprise entre ces deux points dans un intervalle de temps qui ne durera que cinq heures et quelques minutes.
               Toutes les villes qui seront comprises dans cette zone, auront le spectacle de l'éclipse totale ; celles qui resteront en dehors, à droite ou à gauche, ne verront que l'éclipse partielle.

               Nous diviserons cette zone en trois lignes :
               - Ligne centrale où la durée de l'obscurité atteindra son maximum,
               - ligne de la limite de totalité au Nord qui se trouvera au bord Nord de la zone,
               - ligne de totalité au Sud qui se terminera au bord Sud de cette même zone

Ligne centrale.

               La ligne centrale comme les deux autres lignes :
               - commence au Nord des États-Unis d'Amérique et à l'Ouest de l'Oregon ;
               - elle traversera toute la partie Nord de l'Amérique septentrionale par Fort-York, la baie d'Hudson et le Labrador
               - passera près du cap Farewell,
               - franchira l'océan atlantique boréal et
               - arrivera sur les côtes N O de l'Espagne entre Santander et Gijon,
               - passera par les villes de Reinosa, Calatayud, Daroca, Montalvan, Morelle et Oropesa,
               - quittera les côtes d'Espagne du S E pour passer sur l'île Ivice, une des Baléares,
               - Atteindra la côte de l'Algérie à 28 kilomètres à l'Est de Dellys, entre le cap Tedélès et le cap Corbelin. Mais la ligne centrale passera en ligne directe à 17 kilomètres de Dellys ;


               Et quelques instants avant le commencement de la grande phase, ou phase totale, si l'on a le soin de regarder dans cette direction, on pourra voir, si l'on est placé sur une hauteur, le cône d'ombre de la lune s'avancer rapidement sur la surface de la mer, vers le Sud-Est de l'horizon.
               De là, le centre de ce cône d'ombre se dirigera vers le Sud-Est de la Kabylie en passant au Nord-Est du Fort Napoléon,
               - traversera la province de Constantine du Nord-Ouest au Sud-Est en passant au Sud-Est de Sétif et de Batna presque sur le djebel Mhammet et
               - très près de Chellïa qui est à 2.312 mètres au-dessus du niveau de la mer.
               - Du Kaïdat de l'Aurès, l'éclipse, continuant d'être totale et centrale,
               - arrive dans les Kaïdat du Zab Chergui ,
               - dans le Kaïdat du djebel Chechar.
               - Entre la régence de Tunis au lac El-Granis, passe tout près de Nefta, c'est-à-dire à 5 kilomètres Sud-Ouest de cette ville et pas très loin de Tozeur,
               - longe le côté Ouest du chott Nifsaoua ou lac de Firaoun,
               - traverse la régence de Tripoli,
               - puis le Fezzan en passant assez près de Sokna,
               - le désert de Libye,
               - la Nubie,
               - passe sur Dongola et
               - vient aboutir en Abyssinie au Sud-Est à Arkeko au bord de la Mer Rouge.

Limite de la totalité au Nord.

               Toutes les villes qui se trouveront entre la ligne centrale qui vient d'être décrite et la limite de la totalité au Nord que je vais décrire, verront l'éclipse totale ; seulement la durée de l'obscurité sera d'autant plus grande que l'on se rapprochera davantage de la ligne centrale.
               Un peu en dehors de la limite Nord, l'éclipse commencera à être partielle, c'est-à-dire que le disque entier du soleil ne sera plus caché au Nord par la lune et qu'au bas de ce disque c'est-à-dire au Sud le disque de la lune débordera celui du soleil de la même quantité environ que le croissant lumineux qui se manifestera.

               En ne tenant compte que des villes qui se trouvent à notre proximité, celles d'Espagne, par exemple on trouve que la limite nord passera entre Bilbao et Saint-Sébastien ; Bilbao aura l'éclipse totale et la durée de l'obscurité y sera de 107 secondes ; à Saint Sébastien qui se trouve en dehors de la zone ou de son extrémité Nord, on verra une éclipse partielle, c'est-à-dire un croissant lumineux plus mince que celui qui sera observé à Perpignan.
               - A Pampelune, un croissant plus mince encore se fera voir.
               - A Tortosa, l'éclipse sera encore totale cette ville se trouvant dans l'intérieur de la zone ; et la durée de l'obscurité y sera à peu près la même qu'à Bilbao.
               - A Tarragone qui se trouve en dehors de la zone, un croissant lumineux très mince comme à Saint Sébastien sera visible.

               La limite de la totalité au Nord quitte l'Espagne et vient passer dans l'île de Majorque, une des Baléares, au Sud-Ouest de Palma et traverse la mer Méditerranée.

               En arrivant sur la côte de l'Algérie elle atteint l'embouchure de l'oued-Kebir, entre Djidjelli et Collo, passe à quatre kilomètres au Nord de Constantine.
               Un des sommets du djebel Ouabache, celui qui se trouve le plus à l'Est de Constantine s'élève d'environ 1.292 mètres au-dessus du niveau de la mer.
               De là on aura un point de vie magnifique :
               En regardant d'abord au Nord-Ouest on verra un côté du cône d'ombre de la lune s'approchant rapidement ; et ensuite sur Constantine et le paysage environnant, on pourra observer la ligne de démarcation entre l'obscurité et la lumière.

               Je ne saurais trop recommander aux photographes amateurs de s'y transporter et d'en rapporter de bonnes épreuves.
               A l'Ouest de Constantine, on trouve également un point très convenable, le Djebel Karkar dont un sommet est à 1.157 mètres au-dessus du niveau de la mer ; un peu plus au Sud-Ouest, un autre sommet offre une altitude de 1.322 mètres. De ces points culminants on pourra contempler le phénomène avec avantage, en ayant soin de regarder vers le Nord-Est et vers Constantine au moment où la phase totale sera sur le point de commencer. Si le premier contact a été observé, on a déjà pu régler sa montrer en consultant le tableau du commencement et de la fin de l'éclipse.
               Ainsi, ayant l'heure exacte du premier contact qui aura lieu à Constantine à 2 h 43 m 13 s on pourra se préparer un peu à l'avance sur l'heure indiquée dans le tableau de commencement de la phase totale pour Constantine à 3 h 48 m 4 s. Malheureusement Constantine se trouve trop au bord de la limite Nord ; et la durée de l'obscurité ne sera que de 19 secondes tout au plus. Cet exemple peut servir pour toutes les autres villes en faisant des calculs analogues.
               Limite de la totalité vers le Sud.
               Elle passe en Espagne, au Sud d'Oviedo et de Valencia.
               En Algérie c'est entre Koléa et Sidi Ferruch juste à l'embouchure du Mazafran. Koléa se trouvant un peu en dehors de la zone de totalité aura une éclipse partielle, un croissant lumineux très mince.
               De même pour Boufarik.
               A Rovigo elle sera totale ainsi qu'à l'Harrache ; mais la durée de l'obscurité ne sera pas longue.
               A Sidi Ferruch l'éclipse sera totale ; et du sommet du Bouzaréa à l'extrémité Ouest, au-dessus d'un ancien cimetière maure (Sidi Medjouba) où l'on aperçoit parfaitement Sidi Ferruch et au-delà on pourra jouir d'un très beau spectacle.
               Aux amateurs de Blida et de Médéa, il faut recommander le sommet du Mouzaïa : en regardant dans la direction de Koléa et de Boufarik on pourra voir à ses pieds un paysage magnifique à moitié éclairé dont la ligne de séparation d'ombre et de lumière sera une ligne droite.

               De là l'éclipse devrait passer à 16 kilomètres au Sud-Ouest d'Aumale, mais il faudrait être placé sur le Djebel Dira qui domine cette ville pour pouvoir observer complètement le phénomène.
               Et ce ne sera encore qu'après que l'obscurité sera dissipée pour ce point que l'on pourra suivre la marche du cône d'ombre de la lune, car avant l'obscurité il passe sur le sommet d'une chaîne de montagnes qui se dirige justement vers le sens de la marche de l'éclipse.
               Ce n'est donc qu'au-dessus de Sâad à l'Ouest du point indiqué ci-dessus, que l'on jouirait de toute la magnificence du coup d'œil.
               Cependant Aumale se trouvant en dehors de la zone aura l'éclipse totale mais la durée de l'obscurité ne sera que d'une minute vingt-huit secondes.
               L'éclipse se dirige ensuite vers un point qui est situé à environ 34 kilomètres Sud-Ouest de Biskra après avoir traversé le grand choot dans sa partie O-S-O.
               A Biskra l'éclipse sera totale ; et en profitant de la moindre éminence on pourra suivre facilement à la simple vue la marche du cône d'ombre jusqu'au-delà du chott Melrir.
               Les dernières villes qui se trouvent à la limite Sud de la totalité sont Redamès dans la régence de Tripoli et Temeça dans le Fezzan.

Où l'éclipse sera partielle.

               Elle le sera :
               - dans tout le Nord de l'Europe,
               - aux États Unis d'Amérique jusqu'au Sud du golfe du Mexique.

               En Afrique :
               - dans la Sénégambie,
               - le désert du Sahara et
               - le Soudan.

III
Description du phénomène pour Alger.

               Commencement de l'éclipse ou premier contact :
               2 h 18 m 43 s de l'après-midi.
               Le 18 juillet prochain si l'on regarde le soleil à la vue simple, à l'aide toutefois d'un verre coloré ou noirci, il sera facile de s'apercevoir qu'il commence à perdre sa forme circulaire, surtout si l'on dirige son attention vers un point de contour situé à l'Ouest ou vers la droite, un peu au-dessous d'une ligne horizontale qui passerait par son centre.
               Quelques instants après l'heure indiquée ci-dessus, on apercevra nettement une échancrure.
               La lune passe sur le soleil et va sortir deux heures dix-sept minutes, six secondes après à un point du disque solaire presque opposé à celui où elle était entrée.
               C'est la lune elle-même qui vient s'interposer entre nous et le soleil ; c'est le bord de son disque obscur que nous voyons projeté sur celui du soleil ; en un mot l'éclipse est commencée.
               C'est ce qu'on appelle le premier contact extérieur.
               Si à ce moment on compare le début du phénomène avec l'indication d'une montre quelconque on saura l'heure exactement et l'on pourra se préparer à observer le commencement et la fin de la phase totale en toute assurance.

               Commencement de la phase totale ou de l'obscurité. 3 h 29 m 43 s
               On sera entré dans la phase totale, c'est-à-dire que le moment où le soleil commencera à être entièrement caché par la lune sera venu.
               C'est alors que l'on pourra contempler un de ces phénomènes splendides comme peu de mortels sont assez heureux d'en voir seulement quelquefois dans leur vie.

Milieu de l'éclipse, 4 h 30 m 45 s

               Comme cette obscurité persistera environ 125 secondes, nous nous arrêtons un peu pour examiner ce qu'il y a à remarquer plus particulièrement. Les points à considérer sont :
               1° durée de l'obscurité pendant l'éclipse totale,
               2° obscurité en elle-même pendant les éclipses totales du soleil,
               3° effet que le passage subit du jour à la nuit produit sur l'homme et les animaux,
               4° vue du ciel pendant l'éclipse totale du soleil du 18 juillet 1860,
               5° couronne lumineuse,
               6° protubérances rougeâtres pendant les éclipses totales du soleil.


               1° de la durée de l'obscurité pendant l'éclipse totale.
               Pour un lieu quelconque elle dépend de sa position par rapport à la ligne centrale.
               Plus l'endroit de la surface de la terre est rapproché de cette ligne, plus la durée de l'obscurité est grande.
               Ainsi Alger n'est pas si favorablement situé que Dellys qui l'est aussi moins que Sétif ; Sétif l'est moins encore que Batna.
               Aucune de ces villes du reste, ne se trouve exactement sous la ligne centrale.
               A Alger avons-nous dit, l'obscurité durera 125 secondes c'est-à-dire que le soleil nous sera caché par la lune pendant cet intervalle de temps.
               Si Alger se fut trouvé sur le point de la ligne centrale qui est le plus rapproché de cette ville, la durée aurait été de 198 secondes ou 3 minutes 18 secondes.
               Dellys, Batna, Fort Napoléon sont, de toutes les villes de l'Algérie les mieux situées, mais seulement pour la durée de l'obscurité ; car pour Dellys, par exemple, son voisinage de la mer en fait une station douteuse au point de vue du beau ou du mauvais temps.

               2° De l'obscurité pendant les éclipses du soleil.
               Elle n'est pas, à beaucoup près aussi complète qu'il faudrait le croire, comme le dit fort bien Arago si l'on s'en rapportait à des relations évidemment empreintes de l'exagération qu'enfante toujours la frayeur.
               Les Historiens de l'éclipse de 1560, par exemple, ont été certainement au-delà de la vérité, en disant qu'après la disparition du soleil, on ne voyait pas assez pour poser le pied et que les ténèbres étaient plus profondes de celles de la nuit.
               Le meilleur moyen de caractériser l'obscurité qui a pu régner pendant les éclipses totales du soleil est certainement de citer le nombre et la grandeur des étoiles qui furent aperçues à l'œil nu.

               D'après ce critérium, l'éclipse d'Agathocle, celle qui eut lieu 310 ans avant Jésus-Christ aurait été d'une obscurité exceptionnelle car on rapporte que les étoiles apparaissaient de toutes parts.
               Dans une éclipse totale dont parle Plutarque le jour, suivant lui, avait si bien pris l'apparence de la nuit qu'on voyait les étoiles dans toutes les directions.
               Pendant l'éclipse totale de 1706, observée à Montpellier entre 9 et 10 heures du matin, Plantade (Compositeur Français 1764 -1839) et Clapiès (astronome, ingénieur 1670-1740) virent à l'œil nu :
               - Vénus, Mercure, Saturne,
               - Algebaran (étoile géante, orangée, la plus brillante de la constellation du taureau)
               - et d'autres étoiles qui ne sont point nommées dans le récit de ces observateurs.


               En 1715 Halley a perçu, à la simple vue et en regardant au hasard :
               - Vénus,
               - Mercure,
               - la Chèvre (ou Capricorne, constellation du Zodiaque)
               - et Aldebaran dans une direction particulière où l'atmosphère semblait moins éclairée.

               Il aperçut, à l'œil nu 22 étoiles.

               M. Galle à Frauernburg, n'aperçut, en 1851, au moment de l'obscurité que :
               - Vénus, Mercure et la Chèvre.

               M. Brunnow ne vit que :
               - Mercure et Vénus ;
               Il tenta vainement d'apercevoir :
               - Castor (étoile la plus brillante de la constellation des gémeaux)
               - et Pollux (étoile jumelle céleste avec Castor)

Des effets que le passage subit du jour à la nuit produit
sur les hommes et les animaux.


               Ricciloli (jésuite et astronome italien 1598-1671) rapporte qu'au moment de l'éclipse totale de 1415, on vit, en Bohême des oiseaux tombés morts de frayeur.
               La même chose est rapportée de l'éclipse de 1560.
               Les oiseaux, chose merveilleuses (disent des témoins oculaires) saisis d'horreur tombaient à terre.

               En 1706 à Montpellier disent les observateurs, " les chauves-souris voltigeaient comme à l'entrée de la nuit. Les poules, les pigeons coururent précipitamment se renfermer. Les petits oiseaux qui chantaient dans les cages se turent et mirent la tête dans l'aile. Les bêtes qui étaient au labour s'arrêtèrent. " Fontenelle rapporte qu'en l'année 1654, sur la simple annonce d'une éclipse totale, une multitude d'habitants de Paris allèrent se cacher au fond des caves.

               Grâce au progrès des sciences, l'éclipse totale de 1842 a trouvé le public dans des dispositions bien différentes.
               Une vive et légitime curiosité avait remplacé les craintes puériles.
               Les populations des plus pauvres villages des Pyrénées et des Alpes se transportèrent en masse sur les points culminants d'où le phénomène devait être le mieux perçu.
               Elles ne doutaient pas, sauf quelques rares exceptions que l'éclipse n'eût été exactement annoncée ; elle le rangeait parmi les évènements naturels, réguliers, calculables dont le bon sens commandait de ne point s'inquiéter.
               L'éclipse de 1842 est une éclipse mémorable ; plus de 20.000 personnes y assistaient et Arago présidait ces observations.

Vue du ciel pendant l'éclipse totale du soleil du 18 juillet 1860.

               D'après un célèbre météorologiste, un changement de temps aurait lieu le 13 juillet, à quelques heures près et devrait durer jusqu'au 18 ou 19.
               Si ce changement de temps est favorable et qu'il n'y ait point de vent l'observation pourra se faire facilement.
               Lors de l'éclipse prochaine, le ciel se sera assez peuplé de corps célestes, aux environs du soleil et on peut dire que les planètes s'y sont données rendez-vous ; on en comptera pas moins de quatre, toutes très rapprochées les unes des autres.
               A quelques degrés du soleil et au-dessous :
               - se trouve Vénus sous la forme d'un croissant (observé dans un télescope) que nous voyons en ce moment le soir,
               - Jupiter se trouve à gauche du soleil,

               Plus loin et toujours vers la gauche, s'échelonnent :
               - Saturne, Mercure et
               - Régulus (étoile la plus brillante de la constellation du Lion), une étoile de première grandeur dans la constellation du Lion.


               A droite du soleil éclipsé, un peu vers le haut, il y aura Castor et Pollux deux étoiles de 1re et 2e grandeur,
               - tout à fait en haut, plus encore vers la droite, apparaîtra la constellation de la Chèvre, dont Capella (constellation du rocher, située à 42,2 années-lumière de la terre) la plus belle étoile est de 1ère grandeur,
               - Plus bas, et toujours vers la droite on pourra remarquer une étoile rougeâtre. C'est Aldebaran, étoile de 1re grandeur.
               - Plus bas encore on trouvera la constellation d'Orion (constellation située sur l'équateur céleste) une des plus belles du ciel boréal.
               - En bas on verra Sirius, étoile de 1ère grandeur de la constellation du Grand Chien. (Étoile la plus brillante du ciel après le soleil ; l'une des constellations les plus anciennes).


               De là en se dirigeant vers Vénus on passera près d'une toile de 1re grandeur c'est Procyon (la huitième étoile la plus brillante du ciel nocturne) l'astre principal de la constellation du Petit Chien.
               Comme dans l'éclipse du 31 juillet 1851 et celle du 8 juillet 1842, les mêmes étoiles se verront cette fois puisque c'est dans le même mois et à quelques jours de différence que l'éclipse prochaine aura lieu.
               Mais les planètes n'occuperont pas les mêmes places que dans les éclipses précédentes. Aussi on pourra voir :
               - 4 planètes réunies dans la même partie du ciel,
               - la lune
               - et un grand nombre de belles étoiles.
               - Pour peu que l'on reste calme et que l'on regarde attentivement autour de soi et au-dessus de sa tête, on pourra en voir beaucoup d'autres.

La couronne lumineuse

               On l'aperçoit dans les éclipses totales du soleil mais c'est un phénomène qui reste encore inexpliqué jusqu'à présent.
               Sans elle le phénomène perdrait beaucoup de sa splendeur, il deviendrait même presque insignifiant ; l'obscurité serait plus complète et ce serait comme au milieu de la nuit.
               Cependant il n'y aurait pas compensation quant à la beauté du spectacle.
               Notre atmosphère joue sans doute aussi un grand rôle car il ne vient point de lumière du dehors qui ne subisse quelque modification.
               Arago a supposé que la lumière de la couronne blanchâtre était le résultat de la superposition de la lumière provenant d'un atmosphère diaphane dont la photosphère solaire serait entourée et de celle d'une couronne artificielle formée par voie de diffraction.

               Après avoir recommandé d'étudier les phénomènes de polarisation qui se rattachent à cette question, il n'avait pu en recueillir encore que des résultats peu nombreux et bien vagues
               Car c'est un phénomène à part ; et il faut, quand les observateurs ne sont pas assez nombreux le sacrifier pour d'autres observations plus urgentes.
               C'est enfin de pouvoir résoudre ces questions d'astronomie physique que les astronomes de tous les pays s'empressent tellement d'aller observer les éclipses totales, quelle que soit la distance à laquelle il faut qu'ils se transportent.
               Cette année des astronomes étrangers viendront en Espagne et en Algérie ; les Américains font une expédition au Nord de leur États.
               En 1851, les astronomes de tous les pays se dirigent vers la Norvège pour y observer la belle éclipse totale du soleil du 31 juillet.

               Des protubérances rougeâtres que l'on aperçoit sur le bord du disque du soleil pendant les éclipses totales.
               On peut classer ce genre de phénomène avec celui de la couronne lumineuse, en ce sens qu'on n'a pas encore rien déduire de concluant sur la cause de ces protubérances.
               Les astronomes qui les avaient étudiées en Norvège ne purent rien déduire de concluant.
               Le grand Arago, notre maître à tous, n'explique pas plus celle de 1851 que celles de 1842.

Observations à faire pendant l'éclipse totale du soleil
et recommandations générales.

               La première chose que chacun désirerait faire, tout naturellement, sera d'examiner l'aspect du soleil pendant la durée de l'éclipse.
               Il suffira, pour y réussir sans inconvénient, d'avoir des verres colorés ou simplement noircis d'un côté au-dessus de la flamme d'une bougie.
               Il faut avoir soin surtout de ne point mettre le côté noirci vers la figure ce qui arrive assez souvent en pareil cas.
               Le résultat immédiat de l'observation du premier contact, ou commencement de l'éclipse, c'est d'obtenir l'heure exacte, cet élément de première utilité, élément indispensable, et que toutes nos villes de l'Algérie n'ont point possédé jusqu'à présent.

               Elles l'auront toujours à leur disposition, aussitôt l'installation définitive de l'Observatoire astronomique d'Alger qui fonctionne déjà en grande partie, et qui a l'heure, par conséquent.
               Ce sera donc une bonne occasion pour les Algériens de savoir, une fois dans leur vie, l'heure qu'il est réellement :car jusqu'à présent, il faut l'avouer, malgré la qualité de certaines horloges de nos villes principales et les noms recommandables de certains constructeurs qu'elles portent gravées sur leur cadran, ces horloges n'indiquent point l'heure des endroits où elles sont situées, n'étant point dirigées par des hommes compétents, et aussi par suite de l'absence de chemins de fer et de télégraphes électriques fonctionnant également bien.

               Aucun désagrément grave, jusqu'à présent, n'en est résulté.
               Au reste ces temps de chaos chronométriques vont cesser et l'on ne verra plus désormais des erreurs de 10, 20, 30 et même 40 minutes d'avance ou de retard, ce qui nous reporte aux longitudes :
               - de Vienne,
               - de Stockholm et
               - des îles Canaries.


               Je le répète donc, on aura quatre bonnes occasions, le 18 juillet prochain pour avoir l'heure exacte :
               - D'abord celle du premier contact à Alger par exemple à 2 h 18 m 43 s,
               - la seconde au commencement de la phase totale à 3 h 29 m 43 s. quand le soleil disparaîtra tout à fait,
               - la troisième à la fin de la phase totale, quand le soleil commencera à reparaître, c'est-à-dire à 3 h 31 m 48 s,
               - la quatrième sera celle du dernier contact ou fin de l'éclipse à 4 h 35 m 45s.


               Là où les horloges publiques sont en avance, on pourra observer le premier contact ; si au contraire elles retardent cette observation sera la seule qui pourra être manquée, parce que n'étant prévenu par rien, on sera nécessairement surpris.
               Je ne pense pas non plus que beaucoup de personnes puissent tenir compte des secondes qui se trouvent dans les heures indiquées ci-dessus, ces sortes d'observation exigeant une habitude pratique et en outre le sentiment du temps et de sa divisibilité que, seuls les astronomes de profession possèdent généralement.

               Je ne m'étendrai pas davantage sur ce point ayant beaucoup à dire et trop peu de place par parler, et seulement en passant, des choses principales à observer.
               Les personnes qui possèdent des instruments de météorologie comparés ou comparables feront bien de faire des observations aussi souvent que possible, en ayant le soin, surtout, de noter exactement les heures auxquelles ces observations seront faites, et de faire la comparaison de l'horloge ou autre garde-temps dont on se sera servi avec les heures de contact.
               Autrement ce serait prendre une peine inutile.

               Les observations météorologiques perdent beaucoup de leur valeur ou la perdent même tout à fait, si l'élément fondamental, le temps y est inconnu ou seulement négligé.
               Les observations de variation de température le degré d'humidité relative, de pression atmosphérique de la vitesse du vent etc., etc., doivent aussi être consignées.
               Il serait important que les instruments, à l'exception du baromètre, qui est bien partout, fussent exposés çà l'air libre et non sur des terrasses auprès des cheminées, sur les parois des murs etc.
               Car des observations faites dans ces dernières conditions, essentiellement désavantageuses ne méritent pas les honneurs de la publicité, étant parfaitement inutiles pour les progrès de la science.
               Les observations auxquelles on pourra se livrer pendant l'obscurité sur les hommes et sur les animaux de toute espèce, si elles sont faites par des personnes :
               - consciencieuses,
               - attentives et
               - intelligentes ne seront pas sans quelque intérêt.

Fin de la phase totale : 3h 31 m 48 s

               La lumière commencera à reparaître. On pourra voir à l'Est, vers la droite ou à l'Ouest du soleil éclipsé et sur son bord, presqu'au même point où le premier contact avait eu lieu, un croissant lumineux extrêmement mince qui deviendra de plus en plus apparent, jusqu'à ce qu'enfin le disque obscur de la lune se soit encore avancé suffisamment vers la gauche pour laisser celui du soleil entièrement libre.
               A ce moment extrême aura lieu le dernier contact à 4 h 5 m 49 s et l'éclipse sera entièrement terminée.

Eclipse prochaine.

               Il se passera bien longtemps avant qu'une autre éclipse totale du soleil se fasse voir à Alger même.
               La prochaine, en 1900, suivra à peu près la même route que celle-ci, ne trouvera certes plus tous les observateurs de celle de 1860, dont un bien grand nombre auront quitté ce monde.
               Mais au lieu de nous laisser entraîner à des pensées un peu lugubres, peut-être, réjouissons-nous encore de la visite prochaine d'une éclipse totale qui aura lieu dans ces parages le 31 décembre 1861.
               Celle-ci sera visible :
               - au Sénégal,
               - au Nord-Ouest de Tombouctou,
               - dans le désert du Sahara,
               - près de Remadès,
               - Tripoli,
               - dans la Méditerranée et
               - finira en Grèce.

Revue africaine. Volume IV. 1860.



Les Juifs d'Algérie
Envoi de M. Christian Graille
Les origines des Juifs d'Algérie

               Selon les légendes populaires les origines remonteraient à plus de deux millénaires.
               - Les Juifs d'Algérie sont-ils comme le pensent certains historiens, les Gergéséens expulsés de Canaan par Josué au XIIe siècle avant J C ?
               - Sont-ils des colons issus des tribus d'Israël installés avec les Phéniciens fondateurs de Carthage (814 avant J C) ?
               - Enfin sont-ils des déportés, des esclaves, des exilés par Nabuchodonosor (roi de l'empire néo babylonien. 605-562 avant J C) destructeur du premier Temple au VIe siècle avant J C ?


               On peut dire que la présence des Juifs est attestée dès le V et VIe siècle :
               - en Égypte,
               - puis en Libye et
               - au Maghreb.

               Bien que les preuves manquent, il apparaît possible que des minorités juives soient représentées dans la Carthage punique.

               Les sources archéologiques et épigraphiques attestent vers 320 avant J C les premières grandes colonies juives sur les côtes d'Afrique du Nord.
               Après l'invasion de la terre d'Israël, Ptolémée Soter, fondateur de la dynastie des Lagides (royaume helléniste situé en Égypte) déporte 100.000 captifs juifs en Afrique, Égypte, Cyrénaïque.

               En 256 avant J C les Romains s'installent sur les côtes africaines et découvrent que dans les ports des colonies judéo-romaines étaient déjà constituées. Dans le cadre de l'Algérie actuelle, dès le 1er siècle après J C une présence se confirme dans diverses régions et cités :
               - Constantine,
               - Henchir Fouara,
               - Tébessa,
               - Sétif,
               - Cesarea (Cherchell),
               - Tafsa (Tipaza)
               - Ausia (Aumale)
               - Rouaiba (région de Tiaret).


               Dès lors on peut avancer que les origines géographiques des communautés présentes à l'époque romaine sont :
               - la Palestine,
               - l'Italie (Rome),
               - la Cyrénaïque et qu'elles remontent sans doute à la destruction du second Temple qui entraîne la déportation des premiers Juifs en Afrique du Nord comme prisonniers de guerre ou esclaves en 70 après J C.

               En revanche, pour les périodes précédentes on manque de données suffisamment crédibles.

La question berbère
               L'origine palestinienne des Berbères est une légende tenace même si l'on admet la profonde sémitisation du monde africain au cours du millénaire de la domination carthaginoise.
               Les autochtones au Maghreb, par leur langue et leurs mœurs étaient devenus des Phéniciens, des Sémites étroitement apparentés aux Hébreux de Judée.
               - Traqués,
               - poursuivis ou
               - expulsés beaucoup de Juifs ont trouvé refuge chez les Berbères auprès desquels ils se seraient livrés au prosélytisme, ce que dénonce au IIe siècle après J C, ce Berbère latinisé et converti au christianisme.


               A cette même époque, le christianisme se développe en Afrique du Nord.
               " Les Kabyles et les Berbères sont alors majoritairement juifs et latinisés. "
               On trouve des tribus plus ou moins gagnées au judaïsme, surtout :
               - en Tripolitaine,
               - dans l'Aurès,
               - dans le Touat (région du Sahara) et
               - dans les ksour du Sahara.


               Khaldoun décrit la vie de la Kahéna, cette reine juive berbère considérée par d'autres comme une simple légende.
               Certains historiens anciens avancent l'hypothèse d'une judaïsation massive alors que d'autres la récusent dénonçant des hypothèses fragiles.
               On a face à face deux mouvements complémentaires :
               " Berbères qui se judaïsent et des Juifs qui se berbérisent….
               Le judaïsme algérien s'est trouvé, dès son origine, à la fois spécifié par sa vieille option pharisienne et associé étroitement aux destinées des populations indigènes. "

Les Juifs d'Algérie face à la chrétienté et à l'islam
Les Vandales : Ve-VIe siècles
               En 406 les Vandales quittent l'Espagne et se répandent dans tout le Maghreb jusqu'en 533 en semant partout la destruction et l'anarchie, ce qui va donner une forte impulsion au nomadisme et à la puissance de tribus dont certaines sont judaïsées.
               La lutte fratricide des Vandales ariens contre le catholicisme romain en Afrique du Nord permet aux Juifs de connaître un peu de tranquillité.

Byzance (534-680)
               Au VIe siècle, l'Empereur byzantin Justinien (527-565) reprend l'Afrique aux Vandales et s'empresse de rétablir la puissance de l'église et d'éliminer les lieux de culte païens, hérétiques et juifs.
               C'est une période particulièrement troublée pour les Juifs d'Afrique du Nord.
               Les mesures libérales du code théodosien (recueil de décisions impériales romain promulgué par Théodose II) reconnaissant l'existence légitime du judaïsme et la protection de la personne et des biens juifs non supprimés.
               Il met les juifs et le judaïsme hors la loi.

La conquête arabe et la Dhimma
               Les Arabes sont les nouveaux conquérants dès le VIIe siècle. Le calife Al Malik conquiert le Maghreb et, en 711 Tarik Ibenzyad emporte l'Espagne wisigothique.
               Les vainqueurs réduisent brutalement la résistance berbère ainsi que celles des populations juives et chrétiennes.
               Rappelons la résistance (légendaire ?) de Dihya el Kahena (vers 674-704), reine de la tribu Zénète judéo-berbère des Djeraoua qui avait pris la tête des tribus des Aurès contre l'invasion arabe dirigée par Hassan Ben Amor et qui y trouva la mort.

               La reddition des tribus berbères est allée de pair avec leur conversion à l'Islam préparée par le prosélytisme juif et chrétien.
               Sous la domination arabe, les Juifs acquièrent une condition légale fondée sur la dhimma imposée à tous " les gens du livre " (juifs et chrétiens) en terre d'Islam.
               Ce statut discriminatoire de " protégés " régi par la charte dite d'Omar (calife, successeur de Mahomet) les relègue au rang de sujet de seconde zone.
               Le statut leur reconnaît :
               - la liberté du culte,
               - la sécurité,
               - la protection de leurs biens et
               - une réelle autonomie juridique en toute matière relevant du droit privé.


               En contre-partie il leur est interdit :
               - de critiquer le Coran,
               - de parler du prophète et d'Allah avec insolence,
               - de toucher aux femmes musulmanes,
               - de faire du prosélytisme,
               - d'ériger des lieux de culte plus élevés que ceux des musulmans,
               - de monter à cheval.
               - Ils doivent s'acquitter du paiement d'un impôt de capitalisation et d'un impôt foncier,
               - porter des signes vestimentaires particuliers.


               Mais ces règles ont été appliquées de façon plus ou moins rigoureuses :
               - selon les époques,
               - les lieux,
               - les souverains,
               - leur clémence ou
               - leur tyrannie.


               Malgré tout :
               - ils restent l'objet d'humiliations,
               - d'un profond mépris et
               - sont considérés comme inférieurs.

Apogée (IXe-Xe siècle) et déclin (XIe-XIIe siècle)
               Dans le Maghreb central du Moyen Age, de Babylone à Cordoue, les juifs sont fédérés par la Dhimma, le Talmud de Babylone (Babli) matrice culturelle et religieuse du monde séfarade et par la langue arabe…outil scientifique. Grâce à cet ensemble s'épanouit une civilisation séfarade.
               Alliée à la dimension berbère, l'identité séfarade constitue bien la matrice originelle des juifs d'Algérie et ce, bien avant 1492 et l'exil juif espagnol en Afrique du Nord.
               Le Maghreb joue bien un rôle prépondérant, dès le IXe siècle dans l'avènement de l'identité séfarade.

               Les IXe et Xe siècles sont une période de développement pour les juifs du Maghreb qui se trouvent géographiquement situés :
               - au carrefour de l'Orient,
               - le pourtour méditerranéen et
               - l'Espagne musulmane.

               En contact avec la ville de Kairouan, haut lieu :
               - culturel, scientifique, philosophique et religieux,

               Les communautés d'Algérie sont parmi les plus brillantes de la Diaspora à l'exemple de celle de Tlemcen et Tahirt, importants foyers rabbiniques.
               Parmi les lettrés citons Isaac Al Fasi, né dans la région de Constantine en 1013 et qui est devenu très célèbre pour avoir mis en forme la première codification du droit talmudique permettant aux communautés maghrébines et andalouses de s'émanciper des autorités babyloniennes.

               Des liens étroits avec la Terre Sainte unissent les communautés.
               L'âge d'or séfarade connaît son apogée avec la chute du califat omeyade de Cordoue en 1212 et la conquête de l'Andalousie et du Maghreb par les Almoravides (dynastie berbère) chassés eux-mêmes par la tribu berbère venant du Haut-Atlas, les Almohades (dynastie berbère qui gouverne le Maghreb entre le milieu du XIIe et le XIIIe siècle.)
               D'une orthodoxie rigoureuse et intolérante, les Almohades persécutèrent les Juifs et les forcèrent à la conversion dans l'ensemble de l'Afrique du Nord et de l'Espagne musulmane.

               Certains juifs maghrébins s'enfuient en Égypte ou en Sicile mais la plupart opte pour une acceptation de l'Islam, souvent en observant secrètement le judaïsme.
               Maïmonide (rabbin séfarade du XIIe siècle) installé à Fez (1161) après être parti de Cordoue occupé par cette dynastie, compose " un traité de la sanctification du nom " destiné aux musulmans judaïsant où il justifie qu'une conversion " simulée et provisoire " est permise car l'Islam est monothéiste et les musulmans n'exigent qu'une déclaration de conformité sans vraiment préciser l'abandon des pratiques juives au contraire des chrétiens.
               La situation s'aggravant, Maïmonide se réfugie en Égypte en 1165.

               Abraham Ibn Ezra, fin lettré andalou, réfugié en 1147 en Castille évoque dans une élégie le sort des communautés juives détruites en peu de temps.
               En 1146, c'est le massacre des juifs :
               - de Tlemcen, de Marrakech et de Fès.
               Maïmodine accentue le processus de conversion.
               La fin des Almohades (1230) permet aux communautés de se reconstruire.
               Elles ressuscitent grâce à l'arrivée des survivants de l'expulsion des juifs d'Espagne en 1391.

Les expulsions de 1391 et de 1492 par les rois catholiques
               1391 marque la fin de l'Espagne judéo-chrétienne.
               Meurtres et pillages frappent les judérias :
               - en Castille, en Aragon, en Catalogne et aux Baléares.
               Ils sont le fait des chrétiens et provoquent une forte émigration vers le Maghreb central et l'installation des réfugiés en Algérie à :
               - Honayn, Mostaganem, Oran, Alger, Bougie, Tlemcen, Miliana, Constantine.

               Ils se joignent aux Juifs autochtones appelés aussi (Tochavims).
               Parmi ces réfugiés espagnols (Megorashim), se trouvent des lettrés séfarades qui contribuent à la renaissance du judaïsme maghrébin. Ce sont :
               - Simon Bern Tsemah Duran,
               - Isaac Bar Sheshet à Alger,
               - Ephraim Ben Israël Enkaoua à Tlemcen et
               - la famille Najar à Constantine.


               En majorité les réfugiés sont originaires de Majorque ou de la région de Valence.
               Ces lettrés introduisent d'importants changements dans la vie sociale et religieuse des indigènes juifs.
               Tlemcen, perle du Maghreb appelée aussi " la Jérusalem occidentale ", devient un foyer spirituel dont le rayonnement se perpétuera grâce aux rabbins de la famille Duran.
               A la suite d'expulsion de juifs d'Espagne en 1492 par les rois catholiques, Isabelle et Ferdinand, l'Algérie est une destination secondaire par rapport au Maroc.

               De fait 1391 a plus compté que 1492. Ce n'était qu'une simple étape vers la terre sainte. En 1492, les juifs expulsés partent vers :
               - le Portugal, l'Italie, l'Afrique du Nord (Tlemcen).
               Exaspérés par les pirates barbaresques, les Espagnols occupent Oran de 1509 à 1708, de Bougie de 1509 à 1555.

               Quelques familles juives sont autorisées à s'y installer. Au Touat, porte d'accès maghrébine vers le Soudan, la communauté locale a été épargnée par les Almohades et a multiplié ses activités surtout aux XIVe et XVe siècles quand l'axe caravanier est devenu une des principales voies d'échanges du commerce transsaharien.
               La prospérité du Touat et de sa capitale Tamentit est telle qu'on en parle aussi bien en Orient qu'en Occident.

Face aux Ottomans : 1505-1830
               En 1520, les frères Barberousse placent sous la tutelle du sultan l'institution de la Régence d'Alger.
               A Alger et dans l'Empire, les populations sont diverses ainsi que les langues et les traditions.
               Une institution, le Millet, fondé sur le concept de dhimmi, est consacrée aux non musulmans de religion biblique.

               Le Muqqadem, chef de la nation juive, est nommé par le Dey.
               Il est toujours le représentant d'une des grandes familles livournaises (aristocratie juive d'Alger) chargé des prélèvements de l'impôt.
               Dans la ville les Juifs habitent deux quartiers : la Hara médiévale et le mellahim près de Bab-el-Oued.
               Population plus urbaine que rurale, on distingue les juifs de l'intérieur, descendants de Berbères convertis ou des migrants berbérisés, et les juifs des villes de la côte, d'origines variées.

               Tous les juifs sont tenus en basse estime mais on a besoin de leur puissance financière.
               Ils jouissent d'un droit de pétition et d'un droit de recours aux tribunaux musulmans. Ils bénéficient, semble-t-il d'une insertion plus grande et participent à de nombreuses corporations.
               Quelques-uns ont une grande audience.

               Cependant les persécutions se déchaînent et la dhimma se dégrade.
               Il faut relever l'aspect humiliant des vêtements que les juifs doivent porter.
               L'Alliance Israélite dénonce uns situation extrêmement dure.
               Fenton et Littman notent que, si la sécurité et la liberté sont supérieures à celles du Maroc avant la conquête française, les juifs subissent de nombreuses mesures discriminatoires et avilissantes de la part des musulmans.

               Les juifs craignent toujours un massacre : en 1805 éclate une émeute à Alger.
               En 1815, le Grand Rabbin d'Alger Isaac Aboulker est décapité.
               Prêt d'argent et change sont les activités traditionnelles des juifs.
               Cependant il faut noter " la dimension impériale ottomane du négoce juif " selon Nora Lafi pour qui il est difficile de saisir l'exacte réalité de la vie juive sous l'empire ottoman, aussi faut-il " relativiser le cliché d'une communauté juive algérienne arriérée et opprimée ". Néanmoins de nombreux témoins constatent l'extrême avilissement de la population juive. En 1827 Bacri et Busnach, juifs livournais en relation commerciales avec le Dey d'Alger ne peuvent se faire régler le blé fourni au Directoire.
               A l'occasion d'une entrevue, le consul français Deval reçoit le fameux coup d'éventail du Dey d'Alger.

               La conquête de la Régence d'Alger par les Français commence alors en 1830.
               Alger est conquise le 5 juillet. L'arrivée des Français est accueillie avec soulagement.
               A partir de cette date l'avenir du judaïsme algérien est étroitement lié à la France.
               La dhimma est supprimée et l'égalité de droit avec les indigènes musulmans est prononcée. La nature de la communauté juive va aussi changer.

L'émancipation : 1830 - 1845 - 1865 - 1870
               Les Juifs de France, ardents défenseurs de leurs coreligionnaires, veulent sortir les Juifs algériens de la situation d'abaissement dans laquelle les ont mis les Ottomans.
               L'origine orientale apparaît comme la cause principale de leur retard culturel.
               Ils sont également persuadés que les juifs d'Algérie ne peuvent se régénérer seuls.
               Le système consistorial voulu par les dirigeants du judaïsme est un élément déterminant dans l'accession des juifs à l'émancipation.

               Le 9 novembre 1845 le Consistoire central d'Alger est créé avec autorité sur les consistoires provinciaux d'Oran et de Constantine.
               Ceux-ci doivent veiller aux besoins culturels et aux devoirs d'obéissance et de fidélité aux lois françaises.
               Ce sont aussi les intermédiaires entre la puissance administrative et la société juive traditionnelle.

               Il faut aussi s'occidentaliser en portant le vêtement européen, en envoyant les enfants à l'école israélite française et en abandonnant les rites spécifiques.
               Les consistoires manquent de moyens et de pertinence dans le choix des chefs spirituels venus le plus souvent de France. De fait ce sont les membres laïcs " indigènes " des consistoires qui ont su être les plus efficaces.
               A Paris les membres du consistoire central s'efforcent d'obtenir l'émancipation.

               Ainsi le Sénatus-Consulte du 14 juillet 1865 permet aux indigènes musulmans et juifs désormais reconnus comme sujets français de demander la citoyenneté à titre individuel
               Le décret Crémieux du 24 octobre permet aux 35.000 juifs algériens d'obtenir collectivement le titre de citoyen français.
               Les juifs sortent définitivement de la dhiminitude de " l'histoire musulmane du Maghreb ".
               Ce décret est violemment attaqué par une partie de la communauté européenne.
               Adolphe Crémieux né en 1796 dans une famille de vieille souche comtadine est l'archétype distingué et parfait de l'israélite français du XIXe.
               " Il est l'apôtre infatigable de la naturalisation des juifs d'Algérie et de leur sortie d'Egypte. "
               En 1880 on pose la première pierre de la grande synagogue d'Oran.
               La population juive d'Algérie triple entre 1881 et 1931 et passe de 35.000 à plus de 100.000 habitants.

De l'affaire Dreyfus à Vichy : face à un antisémitisme violent
               En 1895, des incidents et des violences contre les juifs éclatent à Alger.
               En 1897 des manifestations se multiplient en France quand l'affaire Dreyfus reprend. Mais la situation est plus grave en Algérie.
               Des boutiques sont détruites à Oran et des violentes émeutes éclatent dans les principales villes de l'Oranie.

               Pour une partie de la communauté européenne, le juif est l'intrus qu'il faut rejeter.
               Ils craignent que ceux-ci ne s'expriment pour la gauche républicaine.
               Les anti-juifs ont peur de les voir occuper des postes dans l'Administration.
               Les causes de cette haine sont :
               - racistes, politiques, sociales, économiques.

               De plus le décret Crémieux qui peut inciter les musulmans à réclamer la même chose est au cœur du débat.
               Ils réclament son retrait. De graves émeutes ont lieu en janvier 1898.
               A cette même date, Max Régis, antisémite reconnu, prend la mairie d'Alger (mais doit démissionner) tandis que Ed. Drumont entre au parlement, d'autres antisémites sont élus à :
               - Oran, Constantine et Alger.

               La guerre de 1914-1918 est pour les juifs le moyen de montrer leur patriotisme.
               Ils font preuve de beaucoup de courage : 2.850 morts.
               L'antisémitisme persiste néanmoins dans les casernes.
               Les droits civiques ne sont pas respectés et les exclusions des listes électorales ont lieu à Alger et à Oran.
               Pour s'opposer à cet antisémitisme, le docteur Henri Aboulker crée le comité juif d'action économique et sociale.
               Mais des émeutes éclatent encore à Alger en 1929 tandis que les Jeunesse Patriotiques et les Croix de Fer se manifestent violemment.

               Le 5 août 1934 de nouvelles émeutes se produisent à Constantine avec des confrontations entre juifs et arabes (23 juifs assassinés et 3 musulmans tués).
               - Sentiment anti-juif,
               - propagande des ligues,
               - animosité 1930 est publié le décret-loi dit " Marchandeau " qui condamne toute incitation à la haine raciale et entretenue par une partie de la communauté européenne profitent de la passivité des autorités.


               Il est supprimé le 27 août 1940 et les antisémites vont se réactiver sous Vichy.
               Sans pression allemande, l'abrogation du décret Crémieux est prononcé en octobre 1940. Les juifs redeviennent indigènes et la mention " juif indigène " est portée sur la carte d'identité pour répondre à la promulgation du statut des juifs.

               En 1945, le service algérien des questions juives est créé. L'aryanisation de l'économie et de l'enseignement conduisent à l'exclusion des personnels et des élèves avec application d'un numérus clausus.
               Cette exclusion est ressentie très douloureusement par la communauté.
               Des camps d'internement pour soldats juifs sont également établis.
               Pour aider les troupes américaines à débarquer en Afrique du Nord l'opération Torch est lancée.
               Un groupe de résistants dont des juifs, organise et prépare le débarquement du 8 novembre 1942 sous l'autorité d'Henri d'Astier de la Vigerie. C'est une réussite.

               Le général de Gaulle arrive à Alger le 30 mars 1943. Par communiqué du Comité Français de Libération National (CFLN) le décret de libération nationale le décret Crémieux est rétabli le 20 octobre 1943

Les Juifs d'Algérie face au FLN :
Négociations et attentats 1954-1962
               Il est difficile en si peu de pace de traiter les évènements de la guerre d'Algérie.
               Ainsi c'est face au FLN et à ses actions qui commencent en 1954 que vont devoir se déterminer les juifs d'Algérie.
               Par le décret Crémieux de 1870, les juifs sont français depuis plusieurs générations. Ils sont très attachés à la nation française et n'imaginent pas qu'il puisse y avoir une nation algérienne indépendante de la France.
               Ils se rappellent que les nationalistes arabes ont accepté une alliance avec les puissances de l'axe ; ils ont aussi constaté que la solidarité arabe fonctionnait.
               De nombreux attentats éclatent. Le 20 août 1955 une insurrection générale dans le Constantinois fait de nombreuses victimes.

               Le 12 mai 1956 de nouveaux incidents graves ont lieu à Constantine.
               Parallèlement des contacts sont établis par le FLN entre 1954 et 1959.
               Quelles sont les dispositions d'esprit des juifs ?
               Ils ne veulent pas prendre position.
               Silencieux ils souhaitent l'égalité pour tous.
               D'un autre côté, ils sont traumatisés par les évènements de mai 1956. Camus écrivait déjà dans l'express du 21 octobre 1955 : " Ces populations juives coincées depuis des années entre l'antisémitisme français et la méfiance arabe… "

               Aux assises du judaïsme algérien Jacques Lazarus déclare : " Que pouvons-nous faire ? Etre vigilants, ne jamais provoquer, mais tout tenter pour éviter de subir."
               Dans le cadre des négociations et des prises de position le 20 août 1956, le FLN lance un appel à la communauté juive d'Algérie et adresse une lettre publique, datée du 1er octobre 1956, au grand rabbin d'Alger (lettre entrée dans l'histoire comme l'appel à la Soummam ") exigeant que la communauté se défasse de son attentisme " au-dessus de la mêlée " qu'elle condamne " sans rémission le régime colonial agonisant " et se déclare " pour la nationalité algérienne ".

               Henri Chemouilli s'interroge : " Indigènes allions-nous rejoindre la grande tribu des Berbères ? Français, allions-nous trahir la France ? "
               De son côté le comité juif algérien d'études sociales répond, fin novembre 1956, qu'il se veut neutre à la recherche de l'égalité entre les citoyens. Il est favorable à la paix et au respect des droits de l'homme.
               C'est une fin de non-recevoir vers la thèse de l'Algérie française.
               En 1958, André Narboni traduit la position de la communauté à ce moment :
               " Vous nous demandez de trahir une patrie dont nous sommes citoyens, la France, pour une patrie qui n'existe pas encore. Nous entendons rester fidèles aux idéaux de la justice et de la démocratie. "
               Les contacts entre 1954 et 1959 ont échoué et les nombreux attentats ont conduit au début de 1960 la communauté juive à rejoindre le camp favorable au maintien de l'Algérie française.

               Le 22 juin 1961 Raymond Leyris (cheik Raymond), célèbre chanteur et musicien est assassiné à Constantine.
               A la fin de la même année les violentes manifestations du FLN provoquent en quelques semaines le départ du pays. 130.000 juifs sont rapatriés en France.
               Leur intégration socio-professionnelle a été une réussite.
Guy Hazzan historien " mémoire vive "
Publication du Centre de Documentation Historique sur l'Algérie
N° 54 2ème trimestre 2013


SONORITÉS
De Jacques Grieu

MUR DU SON
       Qui n'entend qu'une cloche, aussi n'entend qu'un son ;
       Mais le sonneur ne peut en avoir la notion.
       On ne peut à la fois être celui qui sonne,
       Et à la procession se rendre en personne !

       Les sons de notre temps très souvent nous excèdent
       Et pires que leur mal sont parfois leurs remèdes.
       Pourquoi le téléphone arrête de sonner,
       À la seconde même où l'on va décrocher ?

       Jamais le son du blé n'a heurté une oreille ;
       Ni l'ingénieur du son le moulin ne surveille !
       La farine de luxe est-elle l'ultra-son ?
       L'infra-son serait-il rebut que nous jetons ?

       Pourquoi le mur du son reste-t-il invisible ?
       Si on le cache autant, serait-il si nuisible ?
       Certains l'ont entendu sans jamais l'avoir vu.
       Est-il trop dégradé ? Trop vieux, trop vermoulu ?

       Il a le plus beau son, le tambour le moins proche !
       Si les jours, un à un, sonnent comme des cloches,
       C'est bien le cœur des hommes qui leur sert de battant,
       Qui donne le tempo et mesure le temps…

       La nature est bien faite et soigne nos vieux jours :
       C'est petit à petit que le vieux devient sourd,
       S'habitue à un monde où peu de bruits l'effleurent ;
       Ainsi, il n'entend pas sonner sa dernière heure…
Jacques Grieu                  



Révolte ou résignation ?
Envoi de M. Christian Graille
Nous sommes des maudits !

               La révolte contre les images d'Epinal d'une certaine presse métropolitaine
               Lorsque fin 1955, début 1956, Albert Camus écrit une série d'articles sur le conflit en Algérie dans l'Express, il s'en prend à plusieurs reprises aux images d'Epinal sur les Français d'Algérie propagées par une certaine presse métropolitaine.
               Dans la bonne conscience, article paru le 21 octobre 1955, il écrit :
               " A lire une certaine presse, il semblerait vraiment que l'Algérie soit peuplée d'un million de colons à cravache et à cigare, montés sur Cadillac.
               Et il ajoute : 80% des Français d'Algérie ne sont pas des colons mais des salariés ou des commerçants. Le niveau des salariés, bien que supérieur à celui des Arabes est inférieur à celui de la Métropole. "


               Le 8 juillet 1955, Camus avait déjà vivement critiqué l'attitude laxiste de la métropole face au terrorisme du FLN :
               " Ce n'est pas à Paris que l'on a le droit de prendre à la légère la tragédie des familles assiégées dans leurs villages ou dans leurs fermes isolées.
               L'Algérie, on semble parfois l'ignorer, n'est pas peuplée d'un million et demi de colons.

               Les représentants de la réaction algérienne sont une poignée, et qui vivent dans les grandes villes, non sur leurs terres. L'immense majorité des Français d'Algérie qui peinent et travaillent, au contraire, dans une angoisse mortelle, ont droit, au moins, que nous ne fassions rien pour encourager ce qui les assiège ou les tue.
               (Terrorisme et répression dans l'Express, 9 juillet 1955).

               Jean Brune, lui, n'a pas mâché ses mots non plus.
               Dans la révolte, il s'en est pris, d'un ton acerbe, aux journalistes métropolitains :
               " Enfin des journalistes arrivaient tous les jours, plus attirés par l'écho des rafales de mitraillette tirées sur les gardes, qu'ils ne l'avaient été par le long calvaire que gravissaient depuis sept ans, les populations livrées à la terreur. Mais ceux-là ne venaient pas enquêter. Ils apportaient leurs propres certitudes et leurs propres querelles. Et ils ne cherchaient que des confirmations à leur coran, depuis longtemps arrêté dans l'immuable rigueur de son intransigeance.
               Ils ne se mêlaient pas aux foules que de toute façon, ils condamnaient.

               Ils avaient ouvert une bourse aux informations dans les bars des palaces qui restaient ouverts pendant les heures de couvre-feu, et où se côtoyaient :
               - des officiers supérieurs,
               - des policiers,
               - des noctambules inguérissables qui passaient la nuit appuyés au comptoir,
               - et des clients internationaux de passage, qui découvraient la faune des villes livrées aux guerres larvées, cette plaie du siècle, plus redoutable que les fléaux des âges passés. "
La Révolte Editions Atlantis 1999)

               Cette opposition à la métropole, qui est représentée :
               - parfois par des journalistes,
               - parfois par des militaires ou
               - des administrateurs,

               Se fait aussi lourdement sentir dans le premier homme de Camus.

               Lorsque le vieux colon Veillard reçoit l'ordre d'abandonner sa ferme,
               - il ouvre les cuves,
               - équipe un tracteur en défonceuse et, pendant trois jours,
               - arrache lui-même toutes les vignes de son domaine.

               A un jeune officier qui lui demande des explications, il dit d'un ton laconique : " jeune homme, puisque ce que nous avons fait ici est un crime, il faut l'effacer ! "
               Ensuite il s'adresse à ses ouvriers agricoles et leur conseille : " Si j'étais à votre Place, j'irais au maquis. Ils vont gagner. Il n'y a plus d'hommes en France. " Et tandis que le vieux Veillard s'installe à Marseille, son fils préfère mourir en Algérie.

               Il s'en explique à Jacques Cormery :
               " Oh ! Moi je reste et jusqu'au bout. Quoiqu'il arrive, je resterai. J'ai envoyé ma famille à Alger et je crèverai ici. On ne comprend pas ça à Paris.
               A part nous, vous savez ceux qui sont seuls à pouvoir le comprendre ? Les Arabes. Tout juste. On est fait pour s'entendre. Aussi bêtes et brutes que nous, mais le même sang d'homme.
               On va encore un peu se tuer, se couper les C… et se torturer un brin. Puis on recommencera à vivre entre hommes. C'est le pays qui veut ça. "


               Le métropolitain ne comprend donc rien à la situation en Algérie. Il ne sait pas qu'existe des relations secrètes entre les deux communautés que Jean Pélégri à nommées " histoire souterraine ".
               Camus va encore plus loin que Pélégri. Non seulement le métropolitain est-il exclu explicitement de cette relation intime entre colonisateur et colonisé, mais encore devient-il leur adversaire commun. Jean Brune

* * *

               Dans cette haine qui ressemble à l'amour de Jean Brune, le colon Durrieu s'en prend vivement à la propagande mensongère d'une certaine presse métropolitaine. Il n'admet pas que les Français d'Afrique soient considérés comme des boucs émissaires.
               Et la colère qui gronde dans la voix du colon éclate soudain, déferle et face au colonel, le torse penché en avant, les bras tendus, les paumes ouvertes il crie :
               " - Mais qu'avons-nous fait pour être maudits de génération en génération,
               - qu'avons-nous fait ?
               - Quel crime avons-nous commis pour lequel il ne semble ne pas y avoir de pardon,
               - pourquoi tant de haine contre nous,
               - pourquoi tant de rancunes,
               - pourquoi cette vengeance que rien ne peut assouvir ? …Proscrits il y a cent ans... Bagnards après, et maintenant suspects !... quatre fois déportés parce que trop rouges … Aujourd'hui condamnés parce que trop blancs !
               - Pourquoi sommes-nous des maudits ?"


               Une porte s'ouvre au fond du bureau. Harrau paraît dans l'embrasure. Il hésite, ébauche un geste pour se retirer. Durieu le rappelle ….
               " Non, dit-il, restez. J'ai fini ….que dire de plus ? …Nous sommes des maudits … chassés de France il y a cent ans … et pas encore amnistiés ! … des maudits !"
               Il prend congé, les yeux de nouveau mouillés …les lèvres agitées par un imperceptible tremblement. Des maudits !"

* * *

               Une sorte de délire s'est emparé de Durrieu, ses mains tremblaient.
               Il s'écria : " Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi sommes-nous maudits !
               - Nous avons tout construit sur cette terre, tout,
               - tout bâti à partir de rien,
               - tout édifié sur des ruines, sur un désert.


               Tout ce qui existe
               - est notre œuvre,
               - le fruit du sacrifice,
               - de la sueur,
               - des larmes et du sang …


               Si ce pays peut aujourd'hui se croire une nation, il nous le doit,
               - nous avons fondé les villes qu'il convoite ,
               - jeté les ponts sur les rivières,
               - les routes par-dessus les montagnes,
               - les voies ferrées à travers les gorges de l'enfer,
               - nous avons rendu aux semailles les paysages de pierre,
               - et transformés en vergers les marécages.


               Nous avons tout fait, et on nous reproche tous comme un crime …. Nous imaginions agrandir la France, on nous accuse de la ruiner… Et quand nous y rentrerons demain les mains nues, épuisés par la gigantesque aventure algérienne, nous y serons comme des étrangers. "

               Il frappa du poing sur la table. " Nous y serons comme ces Russes que la Révolution a poussés en France, des parias … On jugera que notre misère est un juste châtiment et l'on rira de notre désespoir. Mais pourquoi, nom de Dieu ! Dites-moi pourquoi nous sommes ces pestiférés ? Que veut-on nous faire payer et quand la dette sera-t-elle éteinte ? "
Extraits de Jean Brune. " Cette haine qui ressemble à l'amour
Algérie 1961. Éditions Atlantis. 16998.


Instituteurs en Kabylie
Envoi de M. Christian Graille

Alger 1920.

               La pacification terminée il fallait poursuivre la tâche civilisatrice et donner aux habitants de l'Afrique du Nord la possibilité de donner une éducation à leurs enfants. C'est ainsi que fut créé un établissement spécifiquement destiné à la formation des futurs instituteurs.
               Un enseignement aussi dense qui varié été prodigué à l'École Normale d'Instituteurs de la Bouzaréah.
               On y apprenait non seulement la pédagogie, ou les moyens de se placer à la portée des prochains élèves qui ignoraient tout de notre langue et de notre culture, mais on abordait aussi la sociologie ou tout au moins la manière de se comporter avec les autochtones pour ne pas heurter leurs coutumes ou leurs rites.

               Le secourisme et les premiers soins faisaient partie du programme, de même que :
               - les techniques d'élevage des animaux domestiques,
               - l'art vétérinaire et bien sûr
               - l'agriculture.


               Son diplôme en poche après avoir de sa belle écriture rempli de nombreux cahiers de cours et absorbé ce nouveau savoir, le jeune instituteur savait qu'un rôle exaltant l'attendait.
               - Avec ses collègues,
               - les ingénieurs et
               - les ouvriers du bâtiment,
               - les agriculteurs,
               - le personnel de santé,
               - l'armée,
               - avec l'aide aussi d'autochtones volontaires,
               - il allait participer à la création d'un pays neuf.


               En même temps que l'essentiel de son savoir d'enseignant, le nouvel instituteur avait acquis le minimum de connaissances pour surmonter les difficultés psychologiques de l'isolement et les problèmes de la vie matérielle dans le bled profond qu'il serait amené à habiter bientôt.
               Ses cahiers recouverts d'une belle écriture à l'encre violette, constituait son vade-mecum. Il les emportait vers son école lointaine, mêlés à quelques livres utilitaires fournis par l'administration et rédigés pour cet usage précis.

               Pendant ces quelques années, ses premières affectations le mènent dans divers villages où il est :
               - intérimaire,
               - remplaçant ou
               - adjoint, comme on disait pour faire la différence avec le directeur de l'école.


               Plus tard, c'est dans l'un de ceux-ci qu'il va, dans une pension de famille où il prend ses repas rencontrer une jeune fille aux yeux clairs institutrice elle aussi.
               Lorsqu'il l'épouse l'administration considère qu'elle a là une équipe idéale pour occuper les fonctions d'enseignants dans une école à deux classes comme c'est souvent le cas.

               En Kabylie ces établissements ne se trouvent que dans les mechtas au fin fond du pays, sur d'improbables collines sans routes, à des heures de toute civilisation. C'est ainsi que fin septembre 1928, elle, tenant dans ses bras Marie, leur jeune bébé d'un an, lui, portant les grosses valises de vêtements, ils s'approchent dans la nuit encore épaisse, de l'arrêt de l'autobus qui les emportera vers ce qui va être leur lieu de vie pour les neuf mois à venir.

               La malle cabine est déjà sur l'impériale et bientôt, au milieu des cris et des adieux le car s'ébranle dans les ombres de la nuit vers l'inconnu.
               A petite vitesse sur des routes de plus en plus rudimentaires, l'autobus va rouler jusque tard dans l'après-midi, pour les déposer finalement dans un gros village où une modeste chambre d'hôtel leur permet quelque repos troublé par d'indésirables punaises de lit.

               Au petit matin un jeune Kabyle vient frapper à leur porte :
               " Bonjour, je suis Mokrane le muletier. C'est le caïd qui m'envoie pour vous conduire à l'école. J'ai trois mules avec moi. "
               Les caïds étaient les acteurs importants des relations entre les communautés.
               Salariés par l'administration et favorables aux idées de progrès et de développement de leur pays, ces notables musulmans se comportaient toujours de manière fort affable avec les envoyés de la France en général et avec les représentants de l'enseignement en particulier.

               Les membres de notre petite famille, après une marche de plusieurs heures dans les collines quasi désertiques, parmi les petits champs clos de murs de pierre sèche, parfois :
               - entre deux haies de figuiers
               - de barbarie ou
               - sous les oliviers et les chênes lièges,

               Se dirigent vers l'école du petit village perdu au sommet d'une colline. Au cours du chemin, ils découvrent des paysages nouveaux aux senteurs particulières, comme celles que dispensent les figuiers au soleil, ou l'odeur âcre des olives perdues sur le chemin, mêlée à celle du crottin des animaux.

               Ils constatent, avec soulagement, la présence le long du sentier de poteaux supportant une ligne téléphonique.
               Mais dans le petit logement de fonction, ils ne trouvent ni eau courante ni électricité. Au-dessus des classes leur nouvel habitat se compose :
               - d'une salle à manger,
               - d'une cuisine,
               - de deux chambres et
               - d'un w c à la turque au bout du balcon.


               La cuisine comporte :
               - un réservoir qu'on doit remplir d'eau, au-dessus d'un évier de faïence,
               - une cuisinière,
               - une table et
               - un placard.


               Accroché au mur, l'indispensable garde-manger en fin grillage.
               Dans les autres pièces :
               - une cheminée,
               - un placard et
               - des lits rudimentaires dans les chambres.

               Lorsqu'on l'on tourne fort la manivelle, une magnéto produit du courant qui permet de faire fonctionner le téléphone.
               La sonnerie atteint la poste la plus proche où l'opératrice redirige l'appel vers son destinataire à l'aide de fiches qu'elle glisse dans les trous cuivrés d'un tableau électrique.

               Cet instrument est un lien précieux avec :
               - la civilisation,
               - le médecin ou
               - les secours éventuellement.


               Cet endroit rustique, calme mais isolé sera leur lieu de vie jusqu'en juillet prochain. Les voici sur le balcon, appuyés l'un contre l'autre pour se rassurer, le cœur empli de crainte et débordant d'attente, alors qu'ils laissent leur regard découvrir le paysage qui les entoure.
               Vers le Sud il est arrêté par les dents de scie du Djudjura tout proche.

               Plus près, autour d'eux, des collines se succèdent, portant sur leurs crêtes de minuscules hameaux qui distribueront bientôt leurs joyeuses troupes d'écoliers curieux.
               - Pendant que le bébé dort, les jeunes parents font le tour du propriétaire.

               Les classes sont claires, bien équipées.
               - Les murs portent les géographies de la France et de l'Afrique.
               - Le tableau noir repose sur un trépied semblable au chevalet d'un peintre.
               - Les placards contiennent le nécessaire pour faire travailler les élèves.
               - Il y a là la réserve de l'encre violette en comprimés,
               - les boites de craies,
               - les ardoises au cadre de bois,
               - les cahiers à la couverture glacée illustrée d'un coq chantant,
               - les porte-plume tout neufs à côté
               - des boites de plumes Sergent Major prévues pour permettre aux élèves de réaliser les " pleins " et les " déliés ".


               Dans un coin du placard, plusieurs petits fagots de lamelles de roseau, avec l'étiquette " bûchettes pour le calcul " écrite de la main du précédent enseignant. Elles sont destinées à être manipulées par les élèves lors de l'apprentissage des additions et des soustractions.
               Les deux classes donnent sur une petite cour entourée de murs et fermées par un portail.
               Derrière le bâtiment s'étend le jardin qui comporte une source, parfois un puits.
               Ce jardin a une double destination ; permettre aux instituteurs et à leurs familles de cultiver des légumes destinés à leur propre subsistance et constituer pour les élèves un lieu d'apprentissage d'agriculture raisonnée.
               Chaque jour, la dernière heure de la classe se passe au jardin où les élèves disposent chacun d'un petit carré à cultiver.

               Septembre se termine et voici venu le moment des inscriptions.
               Le père et parfois la mère sont là, un peu intimidés les papiers à la main.
               Les enfants prennent un air grave parce qu'ils devinent l'importance de l'aventure qui leur est proposée.
               Puis vient le jour de la rentrée, souvent autour du 1er octobre.
               Les enfants sont impatients, curieux et facilement dissipés.
               Mais ils ne tardent pas à reconnaître instinctivement l'autorité du maître d'école ou de la maîtresse qu'ils respectent bientôt sans hésitation.

               Bien avant l'heure ils s'agglutinent contre le portail rouillé, le polissant de leur présence impatiente et lui donnant à la longue l'aspect du vieux bronze.
               Pieds nus été comme hiver, ils sont vêtus, à même le corps, d'une simple gandoura de tissu, de couleur fade, parfois bordée d'un petit galon, blanc à l'origine.
               Lorsque le temps fraîchit, leur habillement se complète du fameux burnous de laine blanche filée bien irrégulièrement, souvent réalisé par les femmes de la famille sur un rudimentaire métier à tisser aux armatures mal équarries, polies par l'usage.

               Le burnous à la forme d'une cape. Parce qu'il est cousu au col, on doit l'enfiler, mais il est ouvert sur le devant, et comporte un capuchon qui sert de poche.
               C'est là qu'à midi l'enfant pêche un morceau de galette à l'odeur fumée et quelques figues sèches.
               L'un des deux pans est souvent jeté sur l'épaule opposée d'un geste large, laissant parmi les drapés du tissu, le passage pour les mains si nécessaire.
               Sur la tête l'inévitable chéchia souple feutre en rouge, avec un petit pétiole au sommet.
               Dans la petite Kabylie, elle disparaît sous les torons (assemblage de plusieurs gros fils tordus ensembles) d'un turban blanc, même chez les enfants. Mais habituellement ce sont les adultes qui portent cet attribut.

               Chez les nouveaux arrivants en cas de problème de santé, le bon sens et les circonstances voulaient que la famille se débrouille avec les moyens du bord.
               Dans l'armoire à pharmacie se trouvaient :
               - des bandages,
               - du permanganate de soude en comprimés violets,
               - de l'aspirine et
               - quelques autres produits de base.

               Un énorme dictionnaire médical avec planches en couleurs avait été édité pour répondre aux urgences dans ces endroits éloignés de tout secours.
               Un dernier ingrédient était indispensable pour assurer la permanence de la vie en ces lieux : le courage. Mais on ne le trouvait pas dans la pharmacie.

               Bien sûr un médecin était joignable à quelques heures de marche. Son officine se trouvait dans le plus proche village de colonisation et ses conseils par téléphone pouvaient rendre de grands services.

               Pour la vie de tous les jours, nos jeunes gens étaient secondés par le gardien de l'école, véritable homme à tout faire, qui les aidait aussi dans les relations avec les habitants.
               Ceux-ci étaient disséminés sur les sommets des collines avoisinantes, en de petits hameaux de maisonnettes d'adobe (brique rudimentaire mêlée de paille séchées au soleil) qui les abritaient dans la compagnie traditionnelle :
               - des poules,
               - de l'âne, et
               - de quelques ovins.


               Les logis étaient accolés frileusement les uns aux autres, séparés seulement par de minuscules ruelles tortueuses qui recueillaient aussi les eaux usées grisâtres à l'odeur écœurante.
               Les Kabyles sont des gens calmes qui, généralement, ont un grand respect pour la France et les écoles françaises.
               Ils tiennent à ce que leurs enfants soient instruits et sont très sévères avec eux s'ils ne sont pas appliqués ou s'ils ont commis une bévue.
               Lorsque c'est le cas, et que le père l'apprend, l'enfant peut alors recevoir une série de bastonnade.
               C'est pourquoi les instituteurs préféraient ne pas informer les parents des petits manquements de leur enfant. Puni à l'école, il n'était pas nécessaire qu'il subisse une double peine.

               Les petits Kabyles étaient pour la plupart du temps vifs et intelligents.
               Sans connaître un seul mot de notre langue, ils étaient capables, aidés en cela par la qualité et l'engagement des enseignants, de suivre le niveau d'un cours moyen 2 ou 3 ans plus tard.
               L'enseignement prodigué était en français et la langue était apprise " en cours de route ", pourrait-on dire.

               Pour les plus petits, c'était évidemment la lecture et l'écriture qui occupaient le plus les instituteurs.
               Le calcul était l'occasion d'apprendre de nouveaux mots, de même que les fameuses leçons de choses.
               - La bougie,
               - la casserole ou
               - la poule seront l'objet de la leçon du jour.

               En fin de journée ou le lendemain, on reviendra quelque peu sur le sujet pour une petite révision du vocabulaire.

               Des promenades de classes avaient lieu régulièrement. Elles étaient encore l'occasion d'enseigner de nouvelles connaissances sur :
               - la nature,
               - la flore ou
               - la faune.

               Cette forme de pédagogie plaisait beaucoup aux enfants qui semblaient libérés de leur timidité dans cet espace ouvert, et se disputaient pour être les premiers à donner une réponse à une question du maître.
               Et c'était pour ce dernier, un moment où il laissait aller sa curiosité pour la langue du pays par exemple en montrant un lézard : Comment l'appelle-t-on en Kabylie ? Zermoumouche ! Zermoumouche ! criaient les enfants.

               Ils venaient parfois de très loin, après une longue marche dans les sentiers où par temps de pluie les espaces entre leurs orteils nus fabriquaient de petites sculptures de boue qu'ils perdaient sur le carrelage de la classe un peu plus tard, alors que leur burnous trempé rendait perceptible l'odeur du mouton dont la laine rustique le compose.
               Pour les sustenter à Timengache (aujourd'hui Timenkache) dans le Guergour, une sorte de cantine était mise sur pied.

               Avec l'aide de l'administration qui envoyait des sacs :
               - de pâtes,
               - de riz ou
               - de légumes secs et qui salariait une femme du village pour faire la cuisine dans un recoin de l'école, les enfants avaient une copieuse collation à midi.


               Ils sortaient du capuchon de leur burnous une petite cuvette émaillée, bordée d'un liseré bleu, que d'une bonne louche, la femme remplissait de soupe pimentée où de grosses pâtes baignaient dans une sauce rouge.

               Un jour dans ce même village, arrivent à l'école des hommes qui portent dans leurs bras un enfant au visage baigné de larmes. Sa gandoura est tâchée de sang. Les hommes parlent tous à la fois à l'instituteur qui ne comprend pas tout.
               Mais voici le gardien de l'école qui va servir d'interprète.
               L'histoire est simple mais grave : l'enfant est tombé d'un arbre et sa chute a provoqué la blessure d'un testicule qui pend maintenant, mal en point, au bout de son cordon. L'instituteur impressionné :
               - tente de se remémorer ses cours de secourisme,
               - consulte les livres, puis muni de tout son courage et de ciseaux de couturière
               - il procède à l'exérèse (ablation) de la glande blessée, comme s'il coupait un cordon ombilical.


               Il désinfecte la plaie et la referme par une suture au fil à coudre.
               Le gamin est maintenant souriant, comme ses accompagnateurs, et tous ont espoir non formulé de voir sa descendance assurée.

               Une autre fois c'est à Mechtras (Amedras) près de Boghni que des hommes se sont battus et l'un d'eux a reçu un coup de hachette au front.
               Il est blanc comme un linge et vacille sur ses jambes soutenu par les autres, pas très farauds non plus.
               Le médecin le plus proche est à plus d'une heure de marche.
               On fait asseoir le blessé sur les marches de l'escalier. Lorsqu'on retire le chiffon sale imprégné de sang qui couvre la plaie, un jet noir et continu gicle à une distance invraisemblable.

               C'est une grosse veine qui est touchée constate l'instituteur.
               Une bonne désinfection et des pansements propres compressifs suffiront à guérir l'homme, comme tous les autres qu'il aura à soigner.
               Ces adultes qui ont survécu aux maladies de la petite enfance ont une résistance étonnante.

               L'institutrice, quant à elle sera plus d'une fois sollicitée pour aider les accouchements difficiles, et mettra en œuvre son bon sens et son calme pour résoudre les complications qui se présentaient parfois à cette occasion.
               Quelques vieux ou vieilles Kabyles d'aujourd'hui lui doivent certainement la vie.
               Encouragées à le faire par l'institutrice, les femmes du village, apprivoisées lui demanderont bientôt, avec insistance de recevoir des cours pour apprendre le Français, pour savoir écrire et compter.

               Le secret doit en être bien gardé, car le machisme régnant ne tolère pas que les fillettes ou leurs mères reçoivent la moindre éducation qui est réservée aux garçons. C'est une suggestion de l'institutrice qui permettra aux suffragettes kabyles de trouver le moyen de passer outre ces obstacles installés dans la tradition.
               Oui c'est bien ! On dira qu'on vient pour des cours de couture ou de tricot et sans rien dire aux hommes, tu nous apprends à écrire et à parler en Français. Ce qui fut fait bénévolement, chaque soir après la classe.
               - Les fillettes,
               - les adolescentes et
               - les mères qui piétinaient près du portail, attendaient que les enfants s'éparpillent dans les cris et les rires pour pénétrer avec émotion dans ce lieu un peu mystérieux, dans l'antre de la culture, un endroit qu'elles pensaient ne jamais pouvoir approcher. Timidement elles se glissaient sur les petites banquettes et commençaient avec la plus grande application, une page nouvelle de leur vie.

               L'administration n'en sut jamais rien. Et si des bruits sont parvenus aux oreilles des hommes du village, tant que cela n'entachait pas leur statut devant les autres, ils firent semblant de ne rien savoir.

               L'hygiène étant douteuse, certaines maladies persistaient à l'état endémique, comme :
               - le typhus,
               - le trachome,
               - la gale.

               L'administration envoyait une ou deux fois par an des équipes médicales qui vaccinaient tous les élèves contre le typhus en particulier.
               Les enfants résistaient stoïquement à la piqûre de l'aiguille préalablement plantée dans leur omoplate par une première infirmière, puis serraient les dents, des larmes plein les yeux à cause de la terrible douleur provoquée par la diffusion du liquide injecté par l'autre soignant, à l'aide de sa grosse seringue aux multiples doses.

               Le trachome une grave infection chronique des paupières pouvait entraîner une cécité irréversible.
               Les yeux presque fermés par l'infection, les petits malades ne participaient guère aux jeux de la récréation et, de retour à leur banc, collaient le nez sur le pupitre pour tenter de suivre la lecture.
               Les instituteurs disposaient de petits crayons de nitrate d'argent avec lesquels ils badigeonnaient chaque matin la face interne de leurs paupières.

               Comme on le voit le rôle des instituteurs du bled était fort varié tant les demandes étaient grandes, tant les besoins des habitants divers.
               Il arrivait parfois qu'un litige n'ait pas trouvé de solution auprès des sages de l'endroit, ou auprès du caïd.
               Le chir, le maître, était alors consulté, et souvent sa parole instaurait une paix mieux acceptée grâce à son indépendance évidente par rapport aux bisbilles locales.
               En contre-partie la population, à de très rares exceptions près, se montrait prévenante vis-à-vis des enseignants.
               Allant jusqu'à conseiller à l'instituteur de Mechtras de ne pas s'éloigner de la maison lors des évènements de Sétif qui n'en étaient qu'à leur prémices à ce moment précis.

               A Timengache, ce hameau proche de Guenzet, au début des années 30, le nombre d'enfants du village, augmenté de celui des mechtas voisines était trop important pour la capacité de la petite école.
               Les deux classes qui comprenaient des élèves de différents niveaux, étaient surchargées.
               Aux inspecteurs de passage, l'instituteur avait beau demander la construction de classes nouvelles, l'administration restait sourde.
               Finalement au bout de patience, il acheta un terrain près de l'école et construisit une classe.
               Il dépensa pour tout cela une somme qui équivalait au prix d'une automobile neuve. Le terrain seul qui appartenait au précédent directeur de l'école fut payé 5.000 francs.
               Vaincues les autorités lui envoyèrent :
               - le mobilier nécessaire,
               - un instituteur intérimaire, et
               - décidèrent de lui octroyer un loyer.

               Il accueillit cette nouvelle avec satisfaction.
               Mais le montant en restera définitivement fixé au tarif de 1933, dans une monnaie qui ne tarda pas à se dévaluer.

               Est-il nécessaire de signaler qu'après l'indépendance accordée à l'Algérie, ce bien presque informel ne donna lieu à aucune indemnité de la part de l'État malgré les multiples dossiers remplis ?
               La raison avancée était la destruction du bâtiment au cours des évènements.

               Lorsque fut décidée, par les autorités, l'instauration d'une élection dite du deuxième collège (élection de représentants spécifiques des autochtones), l'instituteur fut mandaté pour aider à organiser et à surveiller le bureau de vote du village.
               Ce jour-là les habitants de Mechtras et des environs qui ne connaissaient rien à ce type de consultation, mais qui avaient plus confiance dans l'intégrité de l'enseignant que dans celle des politiciens, ne cessèrent de lui demander de décider à leur place du candidat à élire.
               Notre héros eut beaucoup de mal à refuser de céder à ces demandes répétées et eut fort à faire pour tenter d'enseigner à ces hommes les premiers rudiments de la démocratie.
               Pendant que se déroulaient ces activités professionnelles les années passent.
               Les jours se suivent avec leurs tâches chaque fois répétées, mais chaque fois nouvelles.

               Dans leur métier, les enseignants étaient soumis à des règles strictes et à des contrôles de la qualité de leur travail.
               Ces inspections étaient redoutées par certains tant les conséquences pouvait être sévères pour l'avenir de leur carrière car une note était attribuée par l'inspecteur, une note qui pouvait freiner ou accélérer la progression de leur promotion.
               L'instituteur de notre récit, au fin fond de la Kabylie, exerçait son métier avec application et avec passion.
               Il préparait chaque soir ses leçons du lendemain d'une écriture serrée et appliquée. Les visites des inspecteurs si elles étaient protocolaires et formelles ne le dérangeait pas car il avait conscience de la qualité de son travail.

               Dans ses différentes affectations il vit passer :
               - plusieurs inspecteurs primaires,
               - des inspecteurs d'académie et même
               - des inspecteurs d'agriculture.

               Sa promotion ne fut jamais mise en danger, celle de son épouse non plus ainsi que le laissait déjà présager les rapports des inspecteurs.

               Dans l'un de ces rapports qui concerne l'institutrice de l'école de Mechtras, on peut lire la conclusion suivante : " Le rapport établi par M. l'inspecteur primaire S.. à la suite de sa visite dans votre classe du 3 avril dernier, signale la constance et l'intelligence de vos efforts ainsi que par voie de conséquence, la valeur des résultats qu'obtient votre enseignement.
               L'autorité que vous avez su gagner auprès de vos élèves est un bon point pour l'idée française que vous représentez.
               Je vous adresse des félicitations. "

               Inspecteur Académique d'Alger le 3 mai 1940 ".

               La situation de ce couple d'instituteurs au moment où leur progéniture avait atteint l'âge de continuer ses études dans l'enseignement secondaire se vit améliorer par une affectation dans une banlieue d'Alger, proche des lycées et des collèges.
               Mais cette école recevait principalement les enfants d'un village nouveau, spécialement construit par les pouvoirs publics pour y loger les familles de malfaiteurs punis d'une interdiction de séjour.
               En revanche, le temps écoulé avait adouci la rigueur des mentalités et les pères acceptaient maintenant que leurs filles soient scolarisées.
               C'est pourquoi l'école comprenait une partie réservée à ces dernières sous le contrôle d'une directrice.

               Notre instituteur, directeur de la grande école, dans ce contexte particulier, fut heureux de constater que son exercice se déroulait sans anicroche avec cette population un peu hors normes.
               Cet homme et cette femme ont été épuisés mais comblés :
               - par leur aventure,
               - par la noblesse de leur tâche,
               - par les retombées de leur effort.

               

               Ils ne se sont jamais plaints :
               - des difficultés de leur métier,
               - des insuffisances de leur logement,
               - de la rudesse des obstacles et
               - des embûches de leur vie quotidienne.


               Ils ont toujours honoré leurs engagements et en ont pris d'autres vis-à-vis de leur conscience qu'on ne leur demandait pas.
               Ils ont été dignes avec eux-mêmes, et respectueux avec les autres.
               Sans jamais attendre de reconnaissance ils ont magnifié la fonction multiple que le sort leur avait attribuée.

               Ils ont élevé quatre enfants dans la difficulté, mais dans l'amour :
               - Je les remercie pour ça.
               - Je les admire.
               - Je les aime.
               - Ils m'ont donné la vie.

               C'étaient François et Charlotte, instituteurs en Kabylie.
Dominique Charles Ottavi " Mémoire vive "
Revue du Centre de Documentation Historique sur l'Algérie
N° 63 2e trimestre 2016



Alors, ça gaze ...? Un peu de légéreté
Envoyé par M. Viot

         Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le pet, sans jamais oser le demander !
(Contribution à la recherche médicale !!!!!!!!!!!!!!!!)

         1) Qu'est ce que le pet, quelle est sa composition ?
         Du latin flatus signifie : souffle, chimiquement composé de nombreux gaz et expulsé par l'anus. Pour partie, il est composé de l'air que nous expirons, pratiquement uniquement d'azote et de gaz carbonique, l'organisme absorbant l'oxygène, et, les gaz produits par la réaction chimique entre l'acide gastrique, les fluides intestinaux et la flore microbienne produisent eux du dioxyde de carbone, de l'hydrogène et du méthane.

         2) Pourquoi les pets sentent-ils mauvais ?
         L'odeur des pets provient du mélange de petite quantité de sulfure d'hydrogène et de soufre. Plus il y a de soufre dans votre alimentation, plus les bactéries de votre intestin vont produire de gaz et plus vos pets seront puants....
         Des aliments comme l'oignon, les choux-fleurs, les oeufs, les champignons, sont reconnus pour être ceux qui produisent les pets les plus infects.
         Les haricots, par exemple produisent une grande quantité de pets pas nécessairement malodorants

         3) Pourquoi les pets font-ils du bruit ?
         Les bruits sont produits par l'ouverture anale, plus communément connue sous le nom de : " trou du c.. ". Le bruit dépend de la vitesse de l'expulsion des gaz et de l'étroitesse de l'ouverture des muscles du sphincter anal.

         4) Combien de pets produit une personne normale ?
         En moyenne, une personne produit environ un litre de pet par jour, ce qui donne à peu près 14 pets quotidiens. Il vous sera sûrement difficile d' évaluer le volume de vos pets quotidiens, mais vous pouvez évaluer le nombre de pets que vous lâchez tous les jours.
         Faites une petite expérience scientifique : notez scrupuleusement tout ce que vous mangez et le nombre de " caisses " que vous lâchez allègrement tous les jours.
         Prenez alors note de l'odeur de vos pets (l'odeur de ses propres pets ne dérange pas ...étonnant non ?) et vous découvrirez alors la relation entre l'odeur et votre nourriture du jour.

         5) Combien de temps faut-il pour que l'odeur de vos pets arrive jusqu'aux narines de vos innocentes victimes ?
         Cela dépend des conditions atmosphériques, de l'humidité, de la vitesse du vent et de la distance entre les personnes. Les pets se diluent dans l'air et cette dilution diminue leur potentiel nauséabond.
         Mais il y a des cas particuliers : Quand le pet est lâché dans un espace réduit et sans ouverture comme un ascenseur, une petite pièce, dans une voiture ou sous les draps, parce que ces conditions limitent la quantité de diluant (l'air) et le pet va rester dans une concentration qui permettra sa perception plus longtemps jusqu'à ce qu'il se condense sur les murs.

         6) Est-il exact que certaines personnes ne pètent jamais ?
         Faux ! Toute entité vivante pète. Certaines personnes, particulièrement vengeresses pètent encore quelques heures après leur mort.

         7)Les hommes pètent-ils plus que les femmes ?
         Faux ! Les femmes pètent autant que les hommes ( pet de femme infâme !), la différence c'est que les hommes en sont fiers.

         8) Quel est le moment le plus propice aux pets ?
         Le matin au moment du réveil, on appelle cela la " Cantate du matin " ou allegro ma non tropo. Si une personne en se levant va aux toilettes et force un bon coup, on peut entendre le pet dans toute la maison !

         9) Est-ce que les haricots font plus péter ?
         Le haricot contient des sucres que les humains ne peuvent digérer. Quand ces sucres arrivent à nos intestins, les bactéries les " bouffent " et en font des gaz. D'autres aliments qui produisent les pets sont, le maïs, le poivre, le chou, le lait et ...le vin. Ces aliments sont dits " carminatifs ".

         10) Le rôt n'est-il rien d'autre qu'un pet qui s'est trompé de porte de sortie ?
         Non ! La phrase " le rôt n'est qu'un pet qui a pris l'ascenseur ou le poème " un rôt bien lancé, n'est qu'un pet fatigué qui n'a pu arriver jusqu'au c.. " tout cela n'est que du folklore. Le rôt vient de l'estomac et possède une composition chimique différente de celle du pet. Les pets contiennent moins d'air d'origine atmosphérique et plus de gaz produits par la flore microbienne.

         11) Et les pets que nous retenons où vont-ils ?
         Combien de fois vous êtes-vous retenus de " larguer une caisse " ? En vous promettant de lâcher à la première bonne occasion et avez-vous découvert plus tard que ce salaud avait disparu ? S'est-il transformé en "louffe " inodore et silencieuse ? A-t-il été absorbé par la circulation sanguine? Que lui est-il arrivé bordel de merde ? Tous les médecins s'accordent à dire que le pet ne s'est ni " faufilé " ni n'a été absorbé. Il revient tout simplement dans les intestins et revient plus tard. Cela confirme que les pets ne disparaissent pas, ils sont tout simplement en retard...

         12) Est-il possible d'enflammer un pet ?
         La réponse est oui !!! Normalement les pets renferment du méthane et de l' hydrogène, gaz inflammables. C'est pour cela que vous devez faire gaffe avant d'essayer d'enflammer un pet. La flamme produite peut faire un rétro, et les vêtements ou tout ce qui est autour de vous peut prendre feu. Près de 25% des personnes qui en ont fait l'expérience se sont brûlé les fesses et les poils du c... Et bien que la flamme bleu que produisent les pets soit un spectacle inoubliable, chers amis, je vous recommande de ne pas essayer ou alors vous saurez ce que signifie l'expression " péter le feu "

Ne pas péter dans une combinaison de plongée !!!

         Voilà c'est tout.
Bernard VIOT



 A la recherche des enfants perdus
Envoi de M. Christian Graille

               Dans le cadre de l'aide à l'enfance déshéritée d'Algérie, organisée par Madame la Générale Massu, des centres et foyers de jeunesse avaient été créés afin de recueillir et d'orienter vers une vie meilleure les adolescents sans moyens d'existence avouables.
              Je dirigeais, rue Koechlin à Alger un centre qui hébergeait 80 garçons, enfants ou adolescents rencontrés :
              - dans les rue d'Alger,
              - les bains maures,
              - sous les tables des marchés etc…


              Ils recevaient dans ce centre ou dans le foyer une instruction générale allant jusqu'au niveau du cours moyen 2ème année et une préformation professionnel d'ajusteur ou d'ouvrier en bâtiment.
              Ces connaissances leur étaient dispensées par un groupe de moniteurs de l'armée et d'instituteurs de l'école publique.
              Les adolescents ayant acquis les connaissances nécessaires à l'accomplissement d'un métier allaient travailler chez des employeurs civils mais restaient sous le contrôle du centre qui continuait à les héberger.
La nuit dans la Casbah

              Tous les deux ou trois soirs, parfois plusieurs nuits de suite, lorsque la nuit était tombée depuis longtemps et que les rues d'Alger se faisaient désertes, nous partions en expédition.
              J'enfilais la tenue léopard, les guêtres, bouclais le ceinturon tandis que les moniteurs se préparaient de leur côté.
              A la troisième sortie nous n'emportions plus d'armes, elles étaient inutiles, notre commando pacifique ne voulant effrayer personne.
              Nous étions toujours au moins quatre et bien souvent, se joignait à nous un moniteur musulman et parfois un adolescent du centre, volontaire.
              Nous montions dans le fourgon Peugeot bleu du centre, je m'installais au volant et la ronde commençait.
              Au passage nous croisions les citadins qui sortaient des cinémas, dernière animation avant que la ville ne soit livrée aux seules patrouilles militaires qui arpentaient les trottoirs d'un air mélancolique, la mitraillette en bandoulière.

              Nous abordions la Casbah parfois par la cathédrale et la rue de Chartres ou de la Lyre, parfois à l'opposé, par le marché de la Lyre et la rue Marengo.
              Près du marché de Chartres ou du marché Randon, je stoppais la voiture et prenais la tête de la petite colonne, rapidement nous nous enfoncions dans les ruelles ténébreuses.
              Longeant les murs de part et d'autre, nous conservions entre nous quelques mètres de distance, par précaution.

              Les ruelles les plus importantes, on ne saurait les appeler des rues étaient vaguement éclairées. Les plus petites ne le sont pas.
              Leur enchevêtrement constitue un labyrinthe auquel on s'habitue.
              Tout est en pente et en escaliers glissants. De temps à autre nous nous arrêtions pour souffler.
              Il nous arrivait de rencontrer un musulman qui nous gratifiait d'un vague salut et se hâtait de rejoindre quelque gîte obscur, caché dans l'inextricable fouillis.
              Nous avancions en silence au milieu de détritus de toutes sortes.

              Parfois la ruelle devenait si étroite que nous étions obligés d'adopter la file indienne. Au-dessus de nous les maisons rapprochaient leurs fenêtres rapprochées et les toits se rejoignaient, formant voûte.
              Les chats filaient devant nos pieds nous faisant sursauter.
              Ici ils étaient dans leur royaume qui leur était toutefois disputé par les rats presque aussi gros qu'eux.
              L'eau polluée par les ordures, coule au milieu de la rue et les pavés sont traîtreusement glissants.

              Dans ce quartier étrange, à cette heure avancée de la nuit, plus de 80.000 habitants se sont retirés derrière leurs portes closes autour du patio que dominent trois à quatre étages de galeries, mais combien tentent de dormir à 10 ou 15 par pièce, sans place pour s'étendre ou dans les caves infectes.
              Le jour la Casbah offre son spectacle toujours renouvelé :
              - de lumière,
              - de bruit et
              - de fourmilière,


              Mais la nuit la misère :
              - suinte de tous les murs,
              - se glisse au-dessous des portes et
              - s'écoule avec l'eau tout au long des ruelles.

              Celui qui ne connaît pas les secrets sordides de la Casbah nocturne ne peut prétendre rien connaître Alger.

              Nous découvrons la porte d'un bain maure.
              Entre deux rideaux de fer abaissés un placage de faïences multicolores encadre une porte lourde aux ferrures finement travaillées.
              Au-dessus un écriteau en Arabe et en Français " bains maures du Cham ".
              Je lis : " Femmes 6 heures midi, hommes 13 h à 18 h ".

              Ces établissements traditionnels qui, le jour, reçoivent leur clientèle pour le bain et les massages se transforment la nuit en dortoirs.
              Coucher dans la promiscuité sur un mauvais grabat coûte 150 à 200 francs.
              Certains tenanciers disposant de 200 à 300 places se font ainsi de jolies fortunes.
              L'accès n'en est pas interdit aux mineurs pourvu qu'ils soient munis d'une pièce d'identité. Encore, bien souvent, n'en ayant pas, ils se glissent quand même le soir venu.

              Je frappe du poing sur la porte. Les coups résonnent longuement à l'intérieur et l'écho de la route silencieuse les amplifie. Je frappe à nouveau plus violemment.
              Une voix se fait entendre : " Achkoûn ? (qui est-ce ?) Hall el bab (ouvre la porte) contrôle militaire".
              Une grosse clé tourne deux fois, deux targettes qui se poussent, la porte s'ouvre, nous entrons aussitôt et elle se referme derrière nous. L'homme en cachabia, la tête coiffée d'une calotte ronde me salue : " Bonsoir mon lieutenant ". Il me précède.

              Déjà dans le couloir long d'une dizaine de mètres il faut enjamber des matelas et des corps. Nous entrons dans la pièce principale, vaste et carrée.
              Par principe je vérifie le cahier d'hébergement que me tend le gardien. Mais je ne m'y fies pas. Bien souvent les enfants ne sont pas inscrits.
              Nous commençons la visite. Le tour de la salle est vite fait. Il y a là une cinquantaine d'hommes couchés sur les matelas sales posés à même le sol et sur lesquels dans la journée les baigneurs nus se font masser.
              Sous l'éclat du faisceau de ma lampe, un énorme cafard noir file dans un angle du mur.

              Au-dessus des dormeurs de grandes serviettes pendent lourdes d'une humidité qui ne sèche jamais. Chaque porte ouvre sur :
              - un autre couloir,
              - un autre escalier,
              - d'autres pièces bien moins propres, ce qui n'est pas peu dire.

              Nous les visitons les unes après les autres.
              Des boîtes de chique traînent sur le sol à côté des dormeurs. Là une jambe de bois est appuyée contre un mur.
              Sans cesse il nous faut enjamber les corps, prenant garde de ne pas marcher sur une main ou un pied.

              Soudain je tombe en arrêt. Au milieu d'une vingtaine d'individus, une petite tête émerge d'une couverture crasseuse. Je m'approche.
              Il est hors de doute que cet enfant n'a pas quinze ans.
              Je me retourne vers le gardien : " Avec qui est-il ? " Haussement d'épaules.
              " Il est tout seul ".
              Je mets un genou à terre et je secoue l'enfant par l'épaule doucement.
              Il grommelle, se cache sous la couverture mais ne se réveille pas.
              Je glisse ma main sous sa tête et le tirant vers moi, je l'assois.
              Il finit par ouvrir des paupières lourdes de sommeil et les referme sous l'éclat de la lampe que j'abaisse.
              Il frotte ses yeux avec ses deux poings sales et finalement me regarde en penchant la tête. La conversation s'engage en arabe :
              - Comment t'appelles-tu ? Ahmed,
              - quel âge as-tu ? Treize ans,
              - où est ton père ? Mort,
              - et ta mère ? J'sais pas, accompagné d'un geste vague de la main.
              - Tu es seul ici ? Oui,
              - depuis combien de temps es-tu à Alger ? Quatre mois,
              - qu'est-ce que tu fais ? J'attends (littéralement je reste assis).
              - Tu ne travailles pas ? Si je porte. "

              Il n'y a pas de doute, c'est un client pour moi.

              Mais le moment difficile est venu. Je lui dis : " Écoute, lève-toi, habille-toi, prends tes affaires et viens avec moi. Mais n'aie pas peur je ne ferai pas de mal ".
              Il se lève sans murmurer, résigné et obéissant. Soulagement.
              Il a vite fait d'enfiler un vieux pantalon trop grand, une veste indescriptible et il ramasse derrière lui le couffin, sa fortune.

              Pour plus de sécurité je prends son portefeuille entouré d'une ficelle, caché dans une poche fermée par une épingle à nourrice :
              - Un calendrier arabe,
              - une petite glace de poche,
              - un dos d'enveloppe avec une adresse et
              - une carte de recensement.


              Né présumé en 1947 village des Ouadhias, Grande Kabylie.
              Maigres indices à partir desquels il nous faudra restituer toute son histoire.
              Au guichet nous retrouvons ceux qui nous attendent. Satisfaction ! Un client !
              Une main affectueuse se pose sur son épaule.
              Semonce au gardien et avertissement. Il écoute convaincu.
              Interdiction formelle de recevoir des enfants de moins de 16 ans seuls.
              Interdiction toute gratuite d'ailleurs et qui ne repose sur rien. Il faudrait un arrêté préfectoral et le Préfet a d'autres chats à fouetter.
              Tout cela a si peu d'importance…La misère des gosses ne coupe pas l'appétit des adultes. Ils ne sont pas nombreux ceux qu'elle empêche de dormir, mais j'en suis.

              Travail de fourmi mais travail nécessaire.
              Je décris comme je peux, avec mon maigre vocabulaire arabe :
              - la déchéance de ce gosse,
              - la misère de son existence et
              - la couleur sombre de son avenir.


              Je parle :
              - du Centre,
              - de la cuisine,
              - du dortoir,
              - des habits propres à l'école.
              - Plusieurs hommes assis hochent la tête et je sens une atmosphère d'approbation.

              Je n'aurai pas perdu mon temps.
              Je laisse l'adresse du Centre de Jeunesse et nous partons au milieu des bonsoirs.
              La porte se referme derrière nous et nous voici dans la rue avec le gosse un peu ahuri et son couffin. Il nous emboîte le pas, docile.

              Nous voici à nouveau lancés à monter et descendre des centaines de marches.
              Nous visitons sept bains maures aux noms ronflants :
              - Bain Abdelkader,
              - bain Esmeralda,
              - bain de Bagdad,
              - bain du lion …


              Le premier était relativement luxueux… mais certains sont réellement sordides.
              Privés de toute aération on y découvre ce qu'on ne peut appeler qu'alvéoles auxquelles on accède par une simple échelle et là, où cinq à six personnes tiendraient moyennement douze à quinze s'y entassent genoux contre genoux, tête contre l'épaule du voisin.
              Les gorges raclent, la tuberculose bat son plein.

              Mais le bouquet c'est encore l'asile de nuit du marché Randon, surnommé marché aux fleurs. D'énormes tes d'immondices encombrent la rue et l'odeur n'est pas précisément celle des fleurs.
              Nous nous glissons entre les tables, éclairant au passage le dessous des étalages car souvent les enfants s'y cachent.

              Nous descendons un escalier latéral glissant d'épluchures et au milieu d'autres tables atteignons le dessous du marché.
              Je frappe à une porte de fer. Derrière moi sur le mur, une plaque : Rue Saint Vincent de Paul. Pauvre Monsieur Vincent il est bien à sa place.
              Le gardien me connaît " Bonjour mon lieutenant ".
              Je descends un escalier encombré de corps. Ici on ne paye pas.
              A droite s'ouvre une salle très vaste, toute de ciment.

              Au bas mot, cent à cent-vingt vagabonds, hommes y couchent dans une saleté inimaginable au milieu d'un concert de raclements de gorge et de toux.
              L'odeur est insupportable.
              Mais l'avenir voudra que dans cette seule pièce, je ramasse au moins vingt gosses abandonnés.

              A gauche ce sont les salles des femmes. Il y en a deux. C'est le spectacle le plus poignant et le plus désolant :
              - Des femmes de tous âges,
              - des adolescentes,
              - des enfants,
              - des bébés.

              Il y a là des familles entières. Le gardien me montre un bébé aux yeux infectés.
              Je reviendrai le soigner demain.
              Quelques femmes éveillées me regardent d'un air hébété. Dans un coin une vieille psalmodie en dodelinant de la tête. Je suis effaré.

              Alger la Blanche, Alger parée du Prestige de la France ! …
              Je m'enfuis, j'ai envie de vomir.
              Nous rentrons au foyer avec trois gosses trouvés. Là leur visage s'éclaire.
              De la propreté de l'ordre et une trentaine d'autres enfants qui dorment du sommeil comme on dort lorsqu'on est en sécurité et qu'on a cet âge.
              Chaque fois que je rentrais au centre à deux ou trois heures du matin avec mon équipe :
              - je lançais à l'écart mes rangers puants.
              - Je me dévêtais à demi inconscient et
              - me jetais sur mon lit où je tombais aussitôt dans un sommeil de brute

              Mais le lendemain les éclats de rire de nos enfants m'apprenaient que, malgré tout, le soleil brillait encore, et la journée recommençait.
Médecin capitaine Guy-Marc Sangline


Toulon 1962 : l'accueil des enfants d'Algérie
Envoi de M. Christian Graille

               Entre le 1er juin et le 31 juillet, le port de Toulon a reçu près de 20.000 rapatriés en provenance d'Algérie, dont la plupart ont transité avant de repartir vers d'autres destinations en France.
              Début juin le Secours Catholique déclenche la Croisade de la Solidarité.
              Il ouvre des locaux au jardin du Roy au fond de l'impasse Mirabeau à Toulon.
              La permanence étant tenue par M. Pierre Claudel, l'objectif principal est de résoudre les problèmes d'urgence.

              Des antennes sont ouvertes à :
              - Hyères,
              - la Seyne sur mer,
              - Saint Tropez,
              - Saint Raphaël,
              - Draguignan,
              - Entrecasteaux.


              La coordination varoise est présidée par l'amiral de Maupéou assisté du colonel De Vedel et d'un trésorier Louis Amiot.
              Simultanément le président du Conseil général, M.Soldani demande la création de structures d'accueil à :
              - Toulon,
              - Draguignan,
              - Fréjus,
              - Saint Raphaël,
              - la Seyne sur mer,
              - Hyères.


              Toulon n'est pas encore considéré comme centre d'accueil, mais la municipalité a mis en place e un service pour la constitution de dossiers et le paiement des allocations de secours aux rapatriés.
              Enfin, toujours en ce début juin, plusieurs initiatives destinées à pallier les carences gouvernementales, donc préfectorales, et à aider les Pieds Noirs qui commencent d'affluer, mobilisent les énergies.
              Ainsi, outre la Croisade de Solidarité du Secours Catholique, plusieurs associations dont celle des Prisonniers de Guerre sous la présidence du général Fabre, lancent la Croisade de l'Amitié et de la Fraternité.
              Mais, sans conteste, la plus originale et la plus émouvante est la structure qui vise non seulement à accueillir mais aussi à aller chercher en Afrique du Nord des enfants orphelins ou que les évènements ont séparé de leurs parents : " L'accueil des enfants d'Algérie " tient sa promesse dans le hall du Palais de la Bourse.
              Cette association lance un appel dans la presse locale, demandant à des familles toulonnaises d'héberger des enfants….

              De nombreuses familles varoises répondent favorablement. Le 1er juin, cent enfants arrivent d'Alger. Cinquante familles toulonnaises répondent à l'appel.
              Cette initiative a un écho à Draguignan où dix-neuf enfants arrivent d'Algérie et où le sénateur maire a créé un comité d'accueil.
              A Toulon pour coordonner les actions de toutes ces structures disparates, le maire Maurice Arreckx crée un comité d'accueil qui, outre deux conseillers municipaux, MM. Chanard et Roubaud, rassemble :
              - le chef du bureau des œuvres sociales de la municipalité M. Bonavita,
              - la directrice de la croix rouge , Mlle Cantailloube,
              - le Président du Secours Catholique,
              - l'amiral Maupéou,
              - la directrice de la Ligue Féminine d'Action Catholique Mme Morazzani,
              - le président du Syndicat d'Initiative M. Morani,
              - le président de la Chambre de Commerce M. Gaillaud et
              - le président de la jeune Chambre Economique M. Hugues.


              Ce comité d'accueil municipal dont les services sont installés au Bureau d'Aide Sociale aménage dans ses locaux :
              - un foyer,
              - une salle de repos,
              - une salle de biberonnage.


              Le 9 juin il est annoncé par voie de presse que treize enfants en provenance d'Algérie sont attendus très prochainement.
              Le comité d'accueil des enfants pense alors à prévenir des centres de vacances où ils seront hébergés en juillet et en août.

              A titre d'exemple les Éclaireurs Neutres du Var décident d'organiser un camp d'excursion du 13 juillet au 13 août au Liechtenstein pour les jeunes rapatriés d'Algérie.
              D'autres structures se proposent d'aider les arrivants : La section départementale des Anciens Combattants ou encore les Secouristes de la Fédération Nationale de Sauvetage dont le siège est avenue du lieutenant Pianetti.

              Le 13 juin, alors que le préfet du Var, M. Berthet visite les installations de l'antenne du secrétariat d'État aux rapatriés, cent-trente-cinq d'Algérie sont attendus pour le lendemain ou le surlendemain. Ils arrivent en fait le 16 juin, sont hébergés momentanément au couvent Saint-Maur où ils subissent un examen médical avant d'être ventilés dans les familles.
              Six jours plus tard cinquante nouveaux enfants arrivent, qui sont hébergés à la caserne Grignan à Toulon.
              Entre temps une délégation du comité d'accueil des enfants d'Algérie est partie à Alger pour favoriser l'organisation et l'échelonnement des arrivées.
              Trois cents enfants sont encore attendus dans les jours qui viennent.

              Le 22 juin, le comité d'accueil qui avait épuisé une somme de 1.700.000 anciens francs somme apportée par de généreux donateurs lance un SOS.
              En même temps, dans les Alpes Maritimes, Cannes, grâce au dévouement de quelques dizaines familles, se proposent également d'accueillir, après échange de correspondance avec la Chambre Economique d'Oran, soixante-dix petits oranais.

              Début juillet, la Fondation Maréchal De Lattre lance un appel à la solidarité et se propose d'accueillir les réfugiés enfants de militaires morts pour la France.
              Elle propose soixante lits dans un de ses centres de Vendée.

              Que sont devenus ces enfants après l'été tragique de 1962 ? Le chercheur perd leurs traces. Mais cet article avait pour vocation de rappeler un évènement méconnu des rapatriements.

Gérard Crespo " Mémoire vive "
Publication du Centre de Documentation Historique sur l'Algérie CDHA
N° 67 3e et 4e trimestres 2017



La fable du bénévole
Envoyé par Mme Elyette
              
              Un jour, un fleuriste se rendit chez le coiffeur pour se faire couper les cheveux.
               Après sa coupe, il demanda combien il devait. Le coiffeur répondit: "c'est gratuit, je fais du bénévolat cette semaine". Le fleuriste s'en alla tout contant.
               Le lendemain, en ouvrant sa boutique, le coiffeur trouva à sa porte une carte de remerciements et une douzaine de roses.

               Plus tard, c'est le boulanger qui se présenta pour se faire couper les cheveux. Quand il demanda à payer, le coiffeur lui dit : "Je ne peux accepter d'argent, cette semaine, je fais du bénévolat". Heureux, le boulanger s'en alla tout content. Le lendemain, il déposa à la porte du coiffeur une demi-douzaine de croissants, avec un mot de remerciements.

               Puis, ce fut le député du coin qui se présenta. Lorsqu'il voulut payer, le coiffeur lui répondit : "Mais non, cette semaine c'est gratuit, je fais mon bénévolat !"
               Très heureux de cette aubaine, le député quitta la boutique.

               Le lendemain, quand le coiffeur arriva pour ouvrir, une douzaine de députés et de sénateurs attendaient en ligne pour se faire couper les cheveux gratuitement. ..

               Voilà, la différence fondamentale entre les citoyens de ce pays et les politiciens qui nous gouvernent.
               Et il paraît que dans la file, il y avait même des chauves. Si, si !



PHOTOS de MERS EL KEBIR
Envoyé par M. J.L. Ventura

ACTIVITES





















































RADE VUE DE SANTA CRUZ





LES QUATRE ARBRES SACRÉS DE L'ALGÉRIE
Envoyés par M. Louis Aymés
Pages Africaines
INVOCATION

        Arbres, fils de la terre, parure du sol, verdoyants manteaux des plaines fécondes, ou couronnes royales des monts altiers, je vois en vous les symboles de la tradition : en vous, je revois les passés glorieux, le travail libérateur, la tutelle des logis familiaux, les repos à l'ombre maternelle, la majesté des hautes solitudes et la fécondité de la Nature d'où jaillissent les sources de vie et d'inspiration.

        Je vous exalte, enfants de la terre, arbres sacrés, vous qui, au milieu des révolutions éphémères, des ambitions stériles, des hommes qui passent et des cités qui s'effondrent, demeurez immuables dans votre éternelle beauté...
        Vous seuls parez la ruine et vivez sur la mort...

        Nous communierons dans votre culte et nos enfants, à l'ombre de vos rameaux, retrouveront, parmi vous les âmes éparses de leurs aïeux.
        Arbres sacrés, je vous aime tous d'un égal amour. Mais, vers quatre d'entre vous vont et mon admiration et ma filiale piété
        Vers toi, Cyprès, arbre de la Maison.
        Vers toi, Figuier, arbre des divinités champêtres,
        Vers toi, Olivier, fils d'Amphitrite et d'Athénée,
        Vers toi, Cèdre, roi de la Montagne...

LE CYPRÈS

        Avec sa stature hiératique, son feuillage aux tons de velours foncé, d'où s'exhalent, comme de mille cassolettes, les arômes subtils, il est bien l'arbre sacré dont les hommes d'Europe ont fait l'image et le gardien de la mort... Le long des allées silencieuses de la nécropole, ils ont voulu placer, sous les ifs et les cyprès, les, dépouilles humaines et opposer à la fragilité des vies caduques la pérennité des arbres qui ne changent pas.

        Mieux avisés, les hommes d'Orient n'ont vu, dans le Cyprès, que l'arbre tutélaire qui protège le logis ou la coupole de la Koubba.
        O Maison du Cyprès, de laquelle s'éloignent les maléfices et les sorts, abrite la vieillesse de l'aïeul et les jeux de tous ceux qui naissent à la vie ! Donne l'asile à l'oiseau, sois le protecteur de la Maison !
        Avec un port majestueux et les belles reluisantes et son velours feuillu, à peine balancé par la brise qui vient du large, le Cyprès n'est pas le signe de la mort, de la fin et du deuil...

        Mais s'érigeant près de la blanche muraille, il demeure, dans l'harmonie des choses, le gardien fidèle de la vie qui naît, se transforme et rentre dans la Nature.

LE FIGUIER

        Les Nymphes, les Naïades, les Hamadryades, Pan et son cortège de divinités sylvestres et celles qui se plaisent à vivre auprès des sources fraîches, à la base des roches moussues; et ceux qui, sous les rayons de la lune, dansent au milieu des clairières perdues dans les bois mystérieux, tous demandèrent aux dieux puissants un arbre qui fût par la forme, la couleur et la feuille un hommage rendu à l'art... Et les dieux firent naître, sous les regards émerveillés des sylvains, un figuier : tronc et rameaux aux reflets d'argent, feuilles larges et dentelées, fruits savoureux dont la chair abondante et sucrée brisant l'épiderme, apparaît comme des gemmes noyées dans du miel.

        Tout ce que les artistes avaient pu concevoir, tout ce que l'art des abeilles de l'Hymette avait su accomplir fut dépassé par le Figuier, don de l'Olympe. Les peintres l'ont reproduit dans ses formes les plus capricieuses et les poètes l'ont chanté.
        Les sylvains reconnaissants le plantèrent à Cyllène, à côté d'un sanctuaire d'Aphrodite ; et Aphrodite a répandu le Figuier des côtes de l'île de Chypre jusqu'aux rivages de la Méditerranée occidentale...
        Aujourd'hui, ici même, il mêle ses feuilles d'argent au feuillage plus sombre de l'Olivier.

L'OLIVIER

        Fils de l'Attique, du Péloponnèse et de l'Ionie, don de Pallas Athénée, il est la tradition et le passé. II nous relie aux pays de la légende fabuleuse et nous ramène aux sources de la poésie.
        Il devient l'évocateur des grands mythes, des théories religieuses qui montaient vers la source pure de Costalie, des luttes olympiques de la vallée de l'Alphée, des naïves croyances, des anciennes religions, des labeurs rythmés, pareils à des rites sacrés.

        Il semble que, quelles que soient leur origine et leur religion, dans les pays que baigne la Méditerranée, les hommes voués à la culture de l'arbre méditerranéen, s'inclinent devant le même culte et obéissent aux mêmes rites..
        Vieux oliviers, aux troncs crevassés, aux bras décharnés, vous avez étendu votre ombre sur le Nazaréen; vous avez été les témoins des gestes antiques... Je vous salue !
        Partout où je vous ai vus, dans la plaine d'Isée, au pied du Parnasse ; sur le sol italien et sur les terres d'Afrique, j'ai senti que, frères de la même race, vous avez apporté d'Orient aux Méditerranéens d'Occident, la poésie et la fécondité dont vous êtes les symboles.
        Des branches d'oliviers à la main, éphèbes et jeunes filles gravissaient les pentes du Parnasse, pour aller rendre hommage à Phébus Apollon.

        Avec le même rythme et le même geste, femmes kabyles ou femmes grecques cueillent les fruits qui vont être écrasés sous le pressoir. Et lorsque l'huile, ambre liquide, coule dans les bassins, la joie entre dans la maison.
        En Grèce, l'athlète vainqueur, le corps frotté d'huile, recevait la palme que lui offraient les Hellanodices. Ailleurs, la mère, tremblante de joie, offre à l'onction le front du nouveau-né ; comme si l'huile, également sainte, devait donner aux muscles la force, à l'âme la pureté.
        Flots de la mer Egéenne, vagues de la Méditerranée, d'une cadence rythmée, continuez à battre les rives où la brise marine chante à travers les oliviers.

LE CÈDRE

        O Cèdre, Arbre-Roi, je te dois les émotions que l'on ressent au contact de la Nature, d'où s'épandent, en vibrations, les sensations d'art et de beauté.
        Pour vivre et t'épanouir, en sereine harmonie, il te faut la montagne, au pied de laquelle viennent mourir les bruits et l'agitation de la fouie humaine. Tu domines les rocs éboulés, le val profond et la plaine sans fin.
        Ton nom signifie beauté et grandeur.
        Jeune encore, plein d'ambition, tu sembles vouloir baigner ta cime aiguë dans l'éther où plane l'aigle. Ta stature est superbe comme celle d'un jeune roi asiatique plus haut, toujours plus haut !
        Devenu vieux, ancêtre de la forêt, tu cesses de porter ta cime vers les nues. Tu étends, sur tout ce qui est à tes pieds, tes rameaux puissants, dans l'attitude austère du protecteur divin. C'est le geste auguste de la robuste Beauté et de l'inlassable Bonté...

        Suivant la parole de l'Ecclésiaste, tu parfumes la hache qui te frappe.
        Tu protèges les êtres et les plantes frêles autour de ton tronc semblable au fût massif de la colonne d'un temple assyrien. Des gazons, des fleurs, des insectes, de tout ce bruissement de vies, qui s'agitent et se confondent, monte vers toi un hymne d'amour.
        Sur ta parure teintée de bleu les aubes mettent leurs opales, et le soleil couchant une pourpre royale.
        Tu es vraiment l'Arbre-Roi !

        Quand les grandes voix passent à travers la forêt, il semble que tu nous parles du Liban lointain et du faste de l'Asie.
        Puis, quand après des siècles et des siècles, la sève nourricière a cessé de vivifier tes branches ou, lorsque l'ouragan t'a abattu, Arbre Géant, sur les mousses fleuries, de ton bois mort monte, comme l'encens des autels, au moment des cérémonies funèbres, le parfum de ton âme qui va se dispersant parmi l'air embaumé.
Charles de GALLAND.
Bulletin de la Société de Géographie d'Alger
(101 trimestre 1922, n° 87).


LES LOISIRS
Par M. Bernard Donville
                Chers amis,

            Nous arrivons à NOS activités de détente et d'abord en plein air sans installation pour gouter la nature. Et c'est l'appel de la mer, heureux les cotiers.
            Mais c'est aussi la convivialité à certains moments comme par exemple le lundi de Paques. Alors là c'est une compétition de mets aux saveurs disparates de la Méditerranée. Bon appétit !

            Avec le "loisirs 3", je vous convie cette fois-ci à suivre nos anciens dans une activité de plein air généralisée dans tous les villages de colonisation : la musique !
            Qui dit musique dit évidemment kiosque et vous pourrez constater, comme moi, que c'est pour nos villages de civilisation le troisième édifice de base avec mairie et église. Voyage dans toute l'algérie vous ne m'accuserez plus de n'être qu'algérois.
            Bonne lecture!
            Amitiés, Bernard
Cliquer CI-DESSOUS pour voir les fichiers

LOISIRS 2

LOISIRS 3

A SUIVRE


COLORISATIONS
De Jacques Grieu

GOUTS ET COULEURS
       La couleur, apprend-on, n'est que " distribution " :
       Celle des longueurs d'onde choisies pour l'occasion.
       Couleur " chaude " ou bien " froide " est une autre chanson ;
       Celle des amateurs qui discutent des tons.

       On dit que " la couleur symbolise la joie ".
       Mais laquelle, couleur ? Ce n'est pas une loi !
       Le violet n'est pas gai, le verdâtre non plus ;
       Le rose est l'exception et le noir est exclu.

       Pendant longtemps ce noir fut couleur de la mort ;
       Maintenant tout est noir : la mode et le folklore…
       Tableau noir, boudin noir, humour et humeurs noirs,
       Nous voyons tout en noir. Est-ce par désespoir ?

       Mais le noir, après tout, est-il une couleur ?
       Et le blanc, son contraire, a-t-il bien cet honneur ?
       Un " homme de couleur ", est bien un homme noir !
       Alors, CQFD, la couleur, il faut croire…

       " Blanc clair et noir foncé " sont des aberrations ;
       C'est donc que ces couleurs sont bien des exceptions !
       Car le mariage blanc n'est rien qu'une illusion,
       Comme le tir à blanc n'a pas de munition.

       La couleur des voyelles est chose indiscutable,
       Nous a dit le poète en des vers admirables :
       Mais alors, les consonnes ? Elles seraient… en blanc ?
       Pour, avec les voyelles, engendrer des enfants ?

       Les pieds-noirs sont-ils blancs ? De la couleur des temps ?
       De toutes les couleurs, ils en ont vu, pourtant !
       Qu'elle soit rose ou bleue, ou bien encore verte,
       La couleur politique, alors, nous déconcerte…

       La couleur d'un grand vin est bonne indication
       Mais dont la bête noire est l'oxygénation.
       L'éclat est aux couleurs ce qu'écho est aux sons.
       C'est une résonance, une confirmation.

       Pour tous les astronomes, la nuit n'est jamais noire ;
       Mais de voir tout en noir leur tendance est notoire :
       Trous noirs, matière noire, énorme énergie sombre,
       Ils aiment les noirceurs, les traquent et les dénombrent.

       " Des goûts et des couleurs, il ne faut discuter " :
       Oui, mais de noir et blanc, on doit pouvoir parler ?
       Dans les familles en deuil, personne ne défend,
       D'aller au cinéma si c'est en noir et blanc !

       Si parfois la nuit blanche apporte une idée noire,
       Pour autant, la nuit noire, au sommeil donne espoir…
       C'est l'espoir qu'un beau jour, la couleur de nos yeux,
       Nous importera plus que peau et que cheveu.

Jacques Grieu                  




24 janvier 1960:
Alger et les barricades

Envoyé Par M. P. Barisain
Le dernier vrai sursaut de l'Algérie française.

          Pour moi, les barricades me rappellent l'attaque du Capitole par les partisans de Trump, récemment. C'est le dernier combat des “petits blancs” que nous étions, balayés par la mondialisation qu'instaurait De Gaulle, bien avant qu'on en parle. La finance internationale avait décidé d'éliminer un peuple qui ne l'intéressait plus, ainsi que les Arabes qui s'obstinaient à rester fidèles . Il fallait refermer la "boite à chagrin " et De Gaulle avait été mis au pouvoir pour cela. Le seul intérêt de l'Algérie, c'était pour elle , le pétrole du Sahara dont Debré avait inauguré le terminal à Bougie en 1959, protégé par le 18 ème RCP. Ce que nous ne savions pas, c'est ce que Delouvrier a avoué bien après: De Gaulle payait le FLN pour ne pas saboter le pipe line.

           Aux USA, la défaite de Trump signe l'invasion migratoire massive, la victoire des métropoles côtières apatrides, face aux héritiers des Pilgrim Fathers de 1620, ceux qui ont fondé l'Amérique qui nous a sauvés en 1917 et en 1944.

           L'insurrection spontanée du Capitole à Washington, inorganisée, quasi folklorique, même s'il y a eu 2 morts vrais ( les autres sont des infarctus) n'a rien d'un 18 Brumaire. C'est l'exaspération de classes marginalisées de plus en plus par la conjonction de Wall Street, le Marché sacro-saint,, et la lie intellectuelle et gauchiste des grandes métropoles.

           C'est la fin des USA ! Place à la Chine totalitaire ! Les 330 millions d'Américains devenus obèses et mélangés vont baisser culotte devant le milliard 400 millions de Chinois que plus rien n'arrête. La Russie elle même plus grand pays du monde avec 150 Millions d'habitants et une économie du niveau des Pays bas, va se faire bouffer par les petits Chinois.

           Quand à l'Europe qui ne veut plus travailler ni transmettre ses gènes, son patrimoine ni sa culture, pourrie par le socialisme et la dette que ses acquis sociaux impliquent, elle va disparaitre sous l'immigration africaine entre autres. On aura la pax chinoise après la pax américana qui n'aura duré qu'un siècle.

           Le jour où Truman a limogé le plus grand général de la guerre 39-45 : Douglas Mac Arthur qui voulait clore la guerre de Corée en attaquant la Chine, les USA étaient condamnées à disparaitre.( 11 avril 1951 ! jour de deuil de l'Occident blanc)

           Et De Gaulle dans tout ça ? Mis au pouvoir pour liquider l'Algérie, il s'est pris , après son mauvais coup, pour le phare du tiers monde, le héros des peuples opprimés ! De Pnom Penh à Mexico ( marchamos mano a mano) en passant par le Quebec "libre". Blousé par Adenauer avec son préambule au Bundestag ( “Horrible chapeau” !) qui ruinait le Traité de l'Elysée, il a fini par être liquidé en mai 1968 par Cohn Bendit, Alain Geismar et Sauvageot, poussés par la finance et , paradoxe, il se réfugia à Baden, chez celui dont le limogeage en 1960, provoqua ces barricades inutiles. Dernière pantalonnade d'un parjure..

Source ?



LA BARRICADE : 24 JANVIER 1960
Par M. Robert Charles PUIG

          Ce jour d'espoir transformé en jour de sang. le premier mort fut Roger Hernandez puis, il y en eut d'autres.

          Le peuple d'Algérie, européen et musulmans fidèles au drapeau de la nation eurent ce jour la preuve que le patriotisme serait vaincu par le pouvoir gaulliste, les socialo-communistes, les libéraux catholiques et la franc-maçonnerie, avec l'Allemagne pro FLN et les USA pourvoyeurs d'armes aux terroristes

La Barricade ! Protectrice et éphémère…
L'image d'une population en colère,
Qui se refusait à croire que le destin
De cette terre promise, au bord de l'Afrique,
Ne soit plus un jour, que souvenir lointain.

La Barricade ! Une fragile barrière
Coupant la rue Michelet comme une frontière
Qu'elle défend, coûte que coûte, l'arme au poing !
Un "Non" aux ordres et aux décisions politiques
Résolus à brader le pays contre… rien !

La Barricade ! Bouclier de fer et de pierres
Où vont se rassembler civils et militaires !
Ils espèrent, à ce prix, délivrer l'Algérie
Du terrorisme, des mensonges où elle se meurt
Et par-dessus tout… des singeries de Paris.

La Barricade ! La Basilique en prière,
Ne pourra pas stopper les balles meurtrières,
Aveugles… qui assassinent soudain Alger…
Le Pouvoir, pour en finir, sème la terreur
À l'âme, au cœur, au corps d'un peuple consterné.

La Barricade ! C'était hier… Du passé…
Le sang des morts, au soleil d'hiver a séché,
Mais il restera toujours dans notre mémoire,
La trace de ces luttes et de cette passion
Où nous attendions mieux qu'une fuite sans gloire !

La Barricade ! Sur du papier, quelques lignes…
Mais il faut le crier ! Cette défaite indigne
Fut l'œuvre d'un État sans foi et sans pudeur
Et d'un gouvernement sans âme ni raison.

Ils préférèrent à Evian… la honte à l'honneur.

Robert Charles PUIG       


Les crimes inexcusables
De M. M. Gomez,
Envoi de Mme A. Bouhier
Les crimes inexcusables des communistes et du FLN en Algérie  

                2022 – Il ne s’agit nullement de commémorer la date du 19 mars 1962 et des « Accords d’Evian » qui, en aucun cas, ne peuvent être considérés comme la fin de la guerre d’Algérie mais uniquement comme « le cessez-le-feu » de notre côté, et non pas de nos ennemis, le FLN et l’ALN qui, eux, ont poursuivi les enlèvements, les exécutions, les assassinats, de civils innocents de de jeunes militaires, alors que nos forces armées restaient « l’arme au pied ».
                Et surtout si ces commémorations sont proposées sous les conseils de ce soi-disant historien, Benjamin Stora.


                Cette année sera fêtée, en France, le 60e anniversaire de « la fin de la guerre d’Algérie » et non pas de « l’indépendance de l’Algérie », laissons ce souvenir aux Algériens, NOUS n’en n’avons rien à foutre !

                Il y aurait, paraît-il, un « dossier mémoriel » qui causerait bien des soucis au président de la République, Emmanuel Macron, et à son gouvernement, surtout en pleine campagne présidentielle : Qu’on le rassure, qu’on les rassure « On s’en bat les « lucioles » de vos repentances mémorielles.

                Après la méprisante « génuflexion » d’Emmanuel Macron, lors de sa déclaration « La colonisation fut un crime contre l’humanité », le président a beaucoup à se faire pardonner, bien que, en ce qui me concerne, il n’aura jamais mon pardon car, depuis son élection, il n’a cessé de donner des gages de repentance aux Algériens :

                La responsabilité de l’armée française dans la mort du militant communiste Maurice Audin, complice de nos ennemis et traître à sa patrie.
                Les crimes inexcusables, comme lors de la manifestation du 17 octobre 1961, ce « mensonge d’Etat », cette mascarade organisée de toutes pièces par le Parti Communiste en accord avec le FLN.
                Jamais un mot, une seule parole, pour honorer les dizaines de milliers de victimes du FLN et de l’ALN depuis le 1er novembre 1954 et jusqu’en juillet 1962.

                Que nous importe la mort de l’avocat Ali Boumendjel, celle de l’écrivain Mouloud Feraoun ou encore les neuf morts de la répression policière, lors d’une manifestation du FLN, le 8 février au Métro Charonne !

                Que nous importe l’hommage national souhaité pour l’avocate du FLN, Gisèle Halimi, que certains voudraient même accueillir au Panthéon, quelle honte !

                Nous n’attendons, ni ne souhaitons, aucune reconnaissance de l’Etat actuel, ni des précédents d’ailleurs. Le « conflit des mémoires » est le cadet de nos soucis.

                Nous savons la responsabilité de la France de l’époque concernant la fusillade du 26 mars 1962, rue d’Isly à Alger, ordonnée par le ministre de l’Intérieur Christian Fouchet, sur ordre de De Gaulle.

                Nous savons la responsabilité de la France de l’époque concernant le « massacre des innocents » dans la première semaine juillet 1962 à Oran et le déshonneur de l’armée française « aveugle et invisible » par ordre du général Katz !

                Nous savons qui furent les responsables de cette première « fracture » entre la métropole et les départements d’Algérie, concernant l’envoi des « Appelés » du contingent afin de « défendre ces colons milliardaires » : Guy Mollet et son gouvernement socialiste.

                Vos « repentances mémorielles » vous pouvez les ranger « Où je pense », monsieur le président et messieurs les ministres, nous n’en n’avons que faire…mais nous nous souvenons de tout !

MANUEL GOMEZ LE 19 JANVIER 2022
https://www.dreuz.info/2022/01/les-crimes-inexcusables -des-communistes-et-du-fln-en-algerie-258351.html


Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Manuel Gomez


AFRIQUE SEPTENTRIONALE.
Gallica : Revue de l'Orient 1845(1) pages 158 à 166
ALGERIE -CORRESPONDANCE.
EXCURSIONS A BLIDA, MEDEA,
CONSTANTINE, BATNA, ETC.


         Un des membres de la Société orientale, explorant en ce moment l'Algérie, a adressé à deux de nos honorables confrères les lettres suivantes que nous mettons avec empressement sous les yeux de nos lecteurs.
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A M. Jouffroy d'Eschavannes.
Alger, 7 mai 1845.

         Mon cher Édouard, je saisis le moment d'un retour d'excursion à Médéah, et l'instant où les impressions sont encore fraîches, pour vous donner quelques nouvelles de l'Algérie. Ces impressions sont bien variées, car elles naissent du mélange et du contraste incessant de races et de civilisations opposées et en lutte continuelle. Je vous dirai d'abord que j'ai trouvé Alger bien changé, européanise aux trois quarts. Une ville nouvelle surgit à côté de l'ancienne, dont les constructions mauresques se démolissent peu à peu pour faire place à d'assez pauvres constructions européennes. Le vieil Alger a perdu du côté pittoresque, mais le commerce et l'industrie y ont gagné, et quelques rues de la basse ville se développent sur un plan assez régulier.

         Le faubourg de Bab-Azoun, devenu partie intégrante de la ville par la construction d'une vaste enceinte de Fortifications, se couvre de maisons importantes; la rue et la place d'Isly s'y étalent largement, et ce qui frappe le plus est un mouvement et une activité incessante et même fiévreuse des hommes et des choses et comme le flot des émigrants se porte sur Alger seul avec plus de puissance que partout ailleurs, tout se peuple, s'anime et se loue à des prix extraordinaires qui dépassent ceux de Paris, et on se porte déjà en masse, hommes et maisons, dans la vaste plaine de Mustapha, qui est couronnée d'une sublime ceinture de coteaux, de maisons mauresques et de cette belle et puissante végétation qu'enfantent le soleil et l'eau sur les bords méditerranéens. Le massif d'Alger se peuple assez et se cultive fort bien dans un rayon peu étendu il est vrai, mais qui se prolonge dans les directions des routes principales. Les nouveaux villages marchent assez bien, quoique les cantines y fassent en général de meilleures affaires que tes fermes, et la Mitidja est envahie de jour en jour. Plusieurs villages ont été créés au pied de l'Atlas dans des conditions plus favorables que ceux du Sahel, et quelques mois les ont plus avancés que quelques années ne l'avaient fait pour leurs aines.

         L'accroissement du Blidah tient du prestige : il n'y avait presque rien en 1842, que quelques masures arabes délabrées par un tremblement de terre; il y a aujourd'hui 4,000 Européens et 6,000 indigènes; 800 maisons se sont élevées sur un plan régulier, avec belles places a arcades, plantations de platane et d'orangers, fontaines partout, canaux d'irrigation, etc. La ville a perdu une partie de ses jardins d'orangers, de citronniers et d'oliviers arrachés malheureusement au temps où ils servaient de repaire aux Arabes pour tirailler sur la garnison. Mais sa position, la richesse de son sol déjà défriché, la proximité de la plaine, l'abondance des eaux, de nombreuses routes qui s'y croisent, en font un point d'avenir des plus beaux de l'intérieur. Tout s'y installe merveilleusement et sur un pied respectable ; ainsi, à l'hôtel de la régence, on a carte de restaurant, chevaux de main et cabriolet aux ordres du touriste ; deux bataillons de milice africaine ont surgi en même temps que la ville elle-même.

         La route de la Chiffa, qui mène de là à Médéah, n'est pas encore terminée ; c'est un travail gigantesque et digne des Romains; la Chiffa traverse tout l'Atlas par une gorge ardue, pittoresque et difficile, et il a fallu tailler des lieues entières de chemin dans le roc ; trois bataillons y étaient naguère employés, mais l'expédition de l'ouest en a enlevé deux. Cette expédition a pour but de soumettre quelques tribus du Dahra et de l'Ouarenseris, environs d'Orléansville, qui ont refuse leur impôt ou même massacré leurs kaïds.

         On dit le maréchal disposé à une rigueur nécessaire, mais on craint que sa bonté naturelle ne le fasse fléchir devant un châtiment terrible. Les crêtes élevées de l'Atlas présentent encore quelques neiges, leurs flancs et les petits vallons escarpés qu'ils présentent offrent à la fois le climat et la végétation de la France méridionale ; le noyer, le cerisier, le pommier, s'unissent aux pins, aux oliviers et aux chênes verts pour en parer les flancs, et il y a beaucoup plus de culture et de population que je ne l'aurais imaginé ; car en général, et c'est ce qui trompe en Algérie, la population fuit les grandes voies de communication et les points facilement abordables. La population s'est constituée en raison de l'état de guerre éternelle du pays et du système d'exaction des Turcs, tandis qu'en Europe la population s'est constituée par et pour la paix.

         Médéah, sur le haut des plateaux qui servent de contre-forts méridionaux a l'Atlas, présente tout à fait le caractère du climat et de la végétation de l'Europe centrale. J'ai été émerveillé d'y avoir frais et même froid sur les crêtes j'ai passé deux jours dans des nuages et dans les brouillards qui se résolvaient en pluies assez froides. La vigne bourgeonnait à peine, et de vertes campagnes étaient entourées de haies d'ormeau et d'aubépine. Autour de la ville, placée sur un mamelon qui domine de vastes plateaux, se groupent des montagnes sur montagnes dans toutes les directions, sauf vers le Cheliff, au-delà duquel on voit poindre encore d'autres chaînes bleuâtres non moins élevées. M y a un magnifique aqueduc romain qui mène encore les eaux à la ville, et 800 Européens s'y escriment à relever les ruines de la ville, tandis que la garnison y construit des murs, des casernes et des hôpitaux. Médeah est encore tout militaire, malgré la présence de 800 civils, comme on dit ici, et le citoyen civil, comme le soldat citoyen, y boivent à qui mieux mieux.

         A propos d'habitants, j'y ai fait connaissance avec un lion, un vrai lion, haut comme un âne, portant crinière naissante, je l'ai caressé en toute liberté de la tête à la queue, j'ai même mis ma main dans sa gueule, enfin j'ai joué avec le lion du général Marey. Il a été pris tout jeune, élevé et civilisé au point de venir chercher du sucre au dessert et d'assister paisiblement aux bals du général voire même à caresser les danseuses qui s'y trouvent. Heureusement que ce n'est pas un lion de Paris, susceptible d'abuser des caresses qui lui sont prodiguées il n'abuse parfois que de quelques gazelles, poules ou corbeaux qu'il trouve sous sa patte et qu'il happe de bon appétit; car vous saurez qu'il dîne souvent avec une trentaine de livres de viande, ce qui serait fort cher en tout autre pays où il n'existe pas de parc d'administration pour les bestiaux. Enfin je suis enchanté de ma connaissance léonine, d'autant que je lui ai vu montrer des crocs de 4 pouces de longueur à quelques Arabes, qu'il déteste généralement comme tous les porteurs de burnous. De Médéah, je suis revenu en droiture à Blidah, par les crêtes mêmes de l'Atlas, dont j'ai traversé péniblement quatre échantillons de 3 à 4,000 pieds de hauteur, le tout avec un simple Amrawa (Kabyle de ces parages), et à travers vents, nuages, pluies, neiges et rochers.

         Le sentiment que j'ai du pays est grandiose et plein d'avenir. Tout ici est largement taillé, hommes et choses; tout est hérissé de hautes difficultés et cependant plein de richesses et d'espérances. C'est un nouveau monde pour l'Europe que le continent africain. Ce ne sont plus les vastes plaines d'Amérique, arrosées de fleuves immenses et navigables ; ce ne sont plus des Indiens pacifiques, ignorant le fer et se brûlant avec un peu d'eau-de-vie. Il faut voir le Kabyle, dur et sobre, infatigable et guerrier, relever sa tête dans la montagne et vous montrer un marabout ruiné en disant "Ce sont les Français (el Francis) qui sont venus là ! " et plus loin des gourbis de pierre, aussi ruinés, en répétant encore "Ce sont les Français"

         Ces gaillards-là sont aussi robustes que tenaces ; c'est une vieille race attachée à la carcasse et aux entrailles du sot en comparaison desquels les Arabes ne sont rien. Ils ne démordront pas du sol qu'ils occupent de tout temps, et rien n'a prise sur eux que le gain. Aussi ils commencent à vendre quelques propriétés aux environs de Blidah, parce que le voisinage de la civilisation les gêne comme la bête brute qui est refoulée par le contact de l'homme. Les chacals, si nombreux, sont devenus rares dans le Sahel il en sera de même de leurs farouches concitoyens, d'autant que le climat des montagnes et des plateaux élevés (celui de Médéah par exemple) est tout à fait convenable à l'Européen, et que la fièvre y est inconnue. L'aspect même du pays, des champs verdoyants, entourés d'ormeaux, la neige qui y persiste plusieurs mois, tout y rappelle l'Europe, et renouvellera un jour la vigueur du colon venu du nord et affaibli par la chaleur continue de la Mitidja et du Sahel.

         Nous avons eu ici une fête du roi demi-arabe et demi-franque côte à cote, le saltimbanque et le mat de cocagne avec le gambadeur marocain, la chanteuse poète (femelle arabe décorée de voiles et de haillons), et sa musique guimbardée de tambour de basque, la castagnette de fer du nègre à côté des airs d'opéra italien qu'exécutaient les musiques militaires des régiments, enfin toute espèce de danses sauvages drôlatiques et lascives du centre de l'Afrique. Le tout a été couronné par un bal resplendissant chez le gouverneur, où les canons et les obusiers de la guerre se mêlaient aux branches d'olivier toujours vert de la paix. Rien n'est plus varié que mes excursions. On suit un sentier arabe bordé de cactus et d'aloès, on trouve bientôt une voie romaine dont les dalles ont porté les légions vers l'Atlantique ; on revient par une route ferrée par le génie en 1845 ; on goûte une tasse de café arabe dans un ravin solitaire, et on vient diner à l'Épée grand Vatel avec des filets à la Soubise et une omelette soufflée. On rencontre le commis marchand accroupi sur sa selle turque et ses grands étriers, et à côté une calèche ornée de femmes mauresques que l'eau-de-vie a par trop égayées.
         Tel est le salmigondis des deux civilisations.
Fortin d'YVRY.
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A M. Horeau.
Batna, province de Constantine 20 mai 1845.

         J'ai visité une assez grande partie de la province d'Alger, et j'en ai trouvé la domination complète et la colonisation assez active quoique encore peu avancée. Alger seul marche à pas de géant, et prend hardiment les allures de la capitale future de notre empire africain. Les travaux, des fortifications nouvelles, du môle, des édifices publics et des maisons particulières y sont gigantesques, et Blidah voit s'élever de nombreuses lignes de constructions nouvelles au milieu de ses jardins d'orangers. La route de la Chiffa perce les rochers de l'Atlas jusqu'à Médéah & travers des précipices et des obstacles terribles; et si les Romains ont tourné la dif6cult6 en construisant leur grande voie par le col de Tenia, nous l'avons attaquée de front et enlevée d'emblée. Telle est la roideur des escarpements de la coupure de la Chiffa, que les premiers travaux ont dû être faits par des pionniers suspendus par des cordes en certains endroits. La mine de cuivre de Mouzaïa sur le revers méridional est déjà en exploitation 200 ouvriers y travaillent, on commence un village de mineurs, et le minerai composé de cuivre, d'antimoine, d'arsenic, etc., offre par son abondance et sa richesse un vaste champ à l'exploitation. Un grand nombre de filons ont déjà été reconnus, et quelques-uns ont des galeries de 20 à 50 mètres de profondeur. Une route nouvelle en construction descendra par une gorge à celle de la Chiffa.

         Médéah, au-delà de l'Atlas, domine un pays encore montagneux jusqu'au Cheliff, et dont les champs, souvent couverts de neige en hiver et garnis d'ormeaux et d'arbres du Nord, rappellent entièrement la végétation européenne. C'est à sa hauteur( 700 mètres environ au-dessus de la mer )que le pays doit ce climat si favorable à la population européenne; mais Médéah est encore tout militaire, et la ville offre à peine quelques maisons au milieu d'une masse de croulantes masures Les tribus intermédiaires sont si bien soumises, que j'ai pu revenir à Blidah en traversant quatre crêtes successives de montagnes avec un simple guide, et que j'ai rencontré des commis voyageurs (en nouveautés) allant seuls et partout à cheval jusqu'aux avant-postes.

         La vue de la province de Constantine donnerait même conviction, quand on ne l'aurait pas; car, en vérité, j'ai été, malgré tous les dires louangeurs, frappé de la beauté, de l'importance, de la sécurité et de l'étendue de cette province. C'est un vrai royaume peuplé et cultivé, composa de montagnes et de quelques vallées au bord de la mer, et a l'intérieur d'un pays montueux d'abord, quoique très-fertile et cultivé, et ensuite de vastes plaines entourées ou découpées par d'autres chaînes, ramifications du grand Atlas, qu'on nomme ici à l'ouest monts des Ouled-Sultan, et à l'est monts Aurès.
         Le pays va s'élevant successivement de plateaux en plateaux jusqu'à la coupure du grand Atlas entre ces deux massifs de monts, et c'est dans cette coupure, vallée située à 1100 mètres au-dessus de la mer, qu'est située Batna, d'où je vous écris.

         Toute la côte d'Afrique, d'Alger à Philippeville, est superbe bien qu'inhospitalière, hérissée de montagnes sauvages et de Kabyles plus après encore. Le massif de montagnes de la Kabylie, où les crêtes escarpées et rocheuses s'entassent les unes sur les autres, donne à songer quant aux projets de conquête ; et cependant tout le monde paraît convaincu ici aussi bien de sa réussite que de sa nécessite. Il paraît qu'on la fera par parties.

         Constantine est une admirable position naturelle; c'est un triangle de rochers découpés pic presque partout, produit d'une immense déchirure dans une large crête montagneuse. Le Rummel se précipite dans cette coupure, sous un pont romain, sous deux ponts naturels, et y forme des cascades de 60 mètres de hauteur. On y compte déjà 1800 Européens.
         Il fait ici une chaleur d'été le jour, et il y gèle même à glace la nuit; car je viens de voir des haricots sortis de terre et gelés de l'avant-veille. Aussi n'y a-t-il plus de fièvre à cette hauteur.

         De Batna, on descend toujours jusqu'à Biscara au désert (60 mètres seulement au-dessus de la mer) au travers de gorges, de plaines et de vallons interrompus seulement par une chaîne transversale, où une coupure à pic laisse un passage resserré A la rivière de Biscara. Le génie a ouvert à la mine une route dans cette gorge et profité d'un pont romain parfaitement conservé; de telle sorte que du Sahara à la mer la route forcée et inévitable est celle-ci, dont Batna occupe le point culminant, près du partage des eaux. Vous sentirez maintenant toute son importance, et comme point militaire commandant le Tell (pays à grains) et t'entrée du désert, surveillantes montagnes des Ouled-Sultan et des Aurès, massifs très-importants et très-peuplés, commandant enfin la route des caravanes et située au point d'échange de toutes les productions essentielles et d'absolue nécessité aux deux contrées. Aussi y a-t-on établi et baraqué dans un camp un régiment entier; l'établissement civil compte une douzaine de maisons faites et une trentaine en construction.

         Les monts d'alentour sont abondamment pourvus de chênes verts et de cèdres, les versants nord surtout, et je viens d'en visiter les exploitations. J'ai gravi en même temps un pic de 1628 mètres de hauteur, d'où la vue, sur une soixantaine de lieues de pays, sur une demi-douzaine de lacs et sur plusieurs chaînes de montagnes, est, vous pouvez le penser, on ne peut plus belle et intéressante. J'ai visité ce matin les ruines de Lambaesa, à deux lieues et demie d'ici. Les Romains, qui s'entendaient surtout en fait de conquêtes et d'établissements, y avaient une ville d'une centaine de milliers d'âmes, comme on peut en juger par un cirque immense qui pouvait contenir 25 à 30,000 personnes, par une belle basilique de 27 mètres sur 21 environ, entourée, en outre, de portiques, par plusieurs temples, notamment un temple dédié A Esculape, dont les quatre colonnes doriques du portique sont parfaitement conservées, par plusieurs vastes édifices, une demi-douzaine de portes indiquant dans différentes directions la vaste enceinte de la ville, et enfin par une multitude de tombeaux importants et d'ondulations qui indiquent la place des voies principales. Lambaesa occupe la naissance d'une belle vallée latérale à la gorge principale de Batna ; les eaux y sont maintenant peu abondantes, mais des aqueducs dans les vallées voisines, y en amenaient abondamment.

         Plusieurs monuments sont bien conservés et d'assez bon style, autant que leur époque et t'éloignement de Rome l'ont permis. Ces ruines sont presque vierges encore; on y trouve une quantité d'inscriptions publiques ou particulières deux d'entre elles ont été rapportées au camp, et sont à l'entrée du petit jardin du colonel commandant. Ce qu'il y a de remarquable, c'est que ce sont, l'une la dédicace de la fondation de Lambaesa par la cent onzième légion, et l'autre l'accomplissement d'un vœu fait au génie de Lambaesa par un officier de cette légion. Qu'elles soient d'un bon augure pour notre établissement à Batna ! Car on ne peut mieux commencer ici comme ailleurs, en fait de conquête et de colonisation, qu'à l'exemple et en suivant les traces des Romains.

         Je n'ai pu rien deviner, mais je vous envoie copie de ces deux inscriptions, n'étant pas assez savant en us pour les traduire parfaitement.
         Il a fallu des escortes pour aller dans les montagnes et surtout à Lambaesa, située du côté des Aurès, où la colonne expéditionnaire accomplit en ce moment, sous les ordres du général Bedeau, la difficile mission de soumettre les Chouia, qui les habitent, et qui sont d'autant plus récalcitrants à l'impôt qu'il n'en ont jamais payé. Cependant les soumissions et tes tributs arrivent à mesure que les colonnes rayonnent chez eux, à partir d'un camp (Médina) que nos troupes occupent sur les ruines d'un autre emplacement romain. Il y a eu quelques tués, une vingtaine de blessés, avec quelques-uns desquels je pars demain pour Constantine après quarante-huit heures de séjour.
F. D'Y.
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A M. Jouffroy d'Eschavannes
Constantine, 24 mai 1845.

         Mon cher ami, j'ai vu tant de belles et intéressantes choses que je ne puis m'empêcher de les communiquer à un ami tel que vous, et je vous prie d'excuser la hâte avec laquelle je vais le faire. J'ai conté à Horeau, dans une lettre du 20, quelques détails sur Batna ; j'en suis revenu par une route différente de celle que j'avais prise en y allant, apercevant de loin les ruines d'un vaste tombeau pyramidal, généralement dit tombeau de Syphax, d'une manière un peu hasardée. Les contrées qui s'étendent au pied des monts Aurès et Ouled-Sultan (parties du grand Atlas) ont en général cette beauté Grandiose et sauvage qu'on aime tant par contrastes avec nos palais et avec nos campagnes, découpées et polies par la culture et l'habitation ; d'immenses solitudes couvertes d'herbes aromatiques et coupées de lacs saumâtres et de chaînes rocheuses de montagnes, s'étendent perte de vue avec quelques sources d'eau pure et quelques douars de tentes. De temps en temps on voit un cercle de points noirs qui varie de quatre à douze et même jusqu'à vingt-quatre habitations de poils de chameaux (comme on dit en arabe); c'est sous cette voilure sombre que j'ai reçu l'hospitalité, du couscoussou, du lait et du tapis; et là, rafraîchi par la brise du soir, à côté du cheval attaché au piquet, on goûte, je vous assure, un repos délicieux, on respire un air pur, et on se délasse bien de la fatigue et de la chaleur du jour.

         J'ai fait quelques courses avec des Saharis, habitants du désert aux environs de Biskara, hommes secs et nerveux, à la figure basanée et aux juments blanches; ils émigrent en ce moment vers les plaines au nord des montagnes, là où leurs troupeaux peuvent brouter ces herbes aromatiques dont le vent apporte le parfum salutaire à l'odorat du voyageur. Le pays va toujours en montant de Constantine ou plutôt de la mer à Batna, de telle sorte que dans cette gorge on se trouve au pied de montagnes élevées, et cependant à 3,300 pieds au-dessus de la mer. Il y avait de la neige il y a huit jours autour du camp; j'y ai vu moi-même geler à glace les 19 et 20 mai, et cependant ta chaleur du jour y montait jusqu'à 20 et 24 degrés Réaumur. De telle sorte qu'on a l'hiver au lever du soleil, le printemps deux heures après, l'été à midi; cependant le climat y est très-salutaire aux Européens doués de bonnes poitrines.

         L'expédition commandée en ce moment dans les Aurès par le général Bedeau, a souffert des neiges et du froid une vingtaine de soldats ont eu les pieds gelés; il y en a en ce moment deux l'hôpital qu'on s'occupe de dégeler, et je suis revenu à Constantine avec un sous-officier de spahis parisien qui en a encore les pieds malades et gonflés. Les habitants de ces montagnes sont des Chouia, espèces de Kabyles moins mélangés d'Arabes que dans les plaines, durs, sobres et intraitables, surtout quand on leur demande la bourse ou la vie comme le font actuellement nos colonnes. Plusieurs tribus en voyant arriver tes troupes avaient parte de se soumettre, mais comme c'est une habitude de payer en paroles pour le moment, on a commencé par en razzier sévèrement quelques-unes, et les soumissions avec impôt commencent à arriver à mesure que les colonnes rayonnent vers leur résidence à partir de la redoute de Médina ancien emplacement romain, où un camp est établi.

         J'ai, mon cher Edouard, passé huit jours à Constantine, et c'est tout ce qu'il faut pour la bien connaître comme voyageur. Son abord est frappant de grandeur et de bizarrerie sauvage. Figurez-vous un triangle de rochers formant plateau, incliné et découpé des montagnes voisines, par de profondes déchirures qui l'environnent presque de toutes parts. D'un côte, un rocher à pic dominant à 1,000 pieds de hauteur une gorge encaissée dont le fond est occupé par des jardins à la verdure brillante des grenadiers en fleurs le haut du rocher couronné par un immense hôpital et par une caserne, accompagnement inévitable de nos établissements, et par des restes de tours romaines carrées et aux massives assises ; des deux autres côtés, une déchirure naturelle des monts Sidi-Mered et Mansourah, de quelques 100 mètres de profondeur, et une vallée encaissée et rapide qui s'élève jusqu'à une crête étroite où est la principale entrée de la ville; le tout dominé de tous côtés par des sommités plus élevées, et vous aurez quelque idée de la structure importante et forte de l'antique Cirta. Les ruines romaines y abondent, mais éparses ça et là, sauf aux murailles de la ville; ce sont ailleurs des citernes immenses; il y en a trente-quatre à la Cassauba de 17 mètres de longueur sur 4 de largeur chacune, et la façon en est si bonne qu'on construit en ce moment au-dessus une caserne de quatre étages comme sur le roc. Ce sont d'anciennes colonnes tantôt employées de champ à surélever les murs d'enceinte de la Cassauba, tantôt à soutenir les noirs arceaux des rues de la ville; c'est un magnifique pont romain jeté sur le ravin et de 300 pieds de hauteur environ, en outre des ruines de trois autres ponts plus petits que j'ai reconnues.

         Constantine moderne est un encombrement irrégulier et sale de maisons et de masures qui présentent à l'œil un aspect triste, grisâtre, peu caractérisé mais la population y fourmille dans les bazars et anime un peu ces prosaïques murailles toutes couronnées de toiles. J'ai fait hier, avec nombre d'officiers et d'autorités, une visite à un lieu nommé Constantina-el-Gedima (Constantine la Vieille), dit aussi emplacement de l'ancienne Cirta ; ce sont des rues situées à cinq lieues d'ici sur un sommet assez sourcilleux, entouré en partie par le Rummel dont la déchirure à l'entrée d'une montagne voisine de la Kabylie est très-profonde, mais moins abrupte que celle d'ici. La vue en est bien plus belle parce que le pic est moins dominé. Nous y avons trouvé de nombreuses murailles, des égouts, des tours de construction romaine avec des débris d'autres constructions plus anciennes, numides, et des monuments du genre druidique. Ces monuments sont attribués aux Numides et peut-être aux Gaulois qui servaient dans les armées romaines.

         J'y ai trouvé une inscription intéressante que je vous envoie avec deux autres du camp de Batna et venant de Lambaesa. Au total, ce lieu était bien digne de servir de station aux armées du peuple dominateur dont on foule ici les traces à chaque pas sur les routes de l'intérieur aussi bien que sur la côte.

         J'ai partagé avec les autorités françaises, au pied de la montagne de Constantina-el-Gedima, et au bord du Rummel, une collation homérique, tout à fait Orient et Occident, et composée d'un mouton entier rôti, de force plats de couscoussou dans de vastes sébiles de bois, de jarres de lait aigre et doux, de tous les fruits secs du pays, de tartes européennes, et enfin arrosé de Bordeaux et de Champagne. J'ai regrette le coup d'œil et le menu pour vous.
F. d'IVRY.

Impayable
Envoyés par Mme. Eliane

         Le patron d'une grande firme est déterminé à débarrasser la compagnie de ses employés peu productifs.
         En visitant l'usine, dans une pièce remplie d'employés il remarque un gars appuyé contre le mur, les bras croisés.
         Il demande au gars :
         - « Combien gagnes-tu par semaine ?
         Un peu surpris, le jeune homme lui répond
         - Je gagne 400 euros par semaine, pourquoi ?
         Le président lui dit alors :
         - OK, ne bouge pas de là !
         Il retourne dans les bureaux, revient deux minutes plus tard, donne 1600 € comptant au gars en lui lançant :
         - Voici 4 semaines de salaire, maintenant fiche le camp et ne reviens plus.

         Content de son geste, le président regarde autour de la pièce et demande :
         - Est-ce que quelqu'un peut me dire ce que cet incompétent faisait ici ?
         À l'autre bout de la pièce, une petite voix répond :
         - C'est le gars qui attendait d'être payé pour la pizza qu'on avait commandée.



2022. La dernière étape ?
Par M. Robert Charles PUIG

       Les " souhaits " d'Emmanuel Macron, hors son satisfecit de star mondialisée, n'ont rien apporté au peuple de France, sinon ce besoin de le voir se glorifier et vanter son quinquennat 2017 / 2022. Pourtant le président plie sous ses erreurs, à commencer par ce spectacle du jour de son élection où il a montré son côté progressiste et franc-maçon avec cet " Hymne à la joie " dont nous avons manqué tout au long de ses années de pouvoir.
       Il oublie ses dérapages et les deux ans de Gilets Jaunes ; ses défauts de réalisation et d'entrepreneuriat avec la crise et les grèves et d'être redevable à l'Europe de fonds à taux zéro qui nous ont permis de survivre à l'effondrement économique avec une inflation de plus en plus galopante, un endettement à 120 % de notre PIB dû à ses distributions astronomiques de fonds aux quatre vents et depuis deux ans à cette pandémie qu'il n'a pas su gérer, avec un hôpital en détresse, des soignants épuisés et un manque total des outils nécessaires à soigner nos malades.

       Encore aujourd'hui à quelques mois de l'échéance présidentielle, il y a une pénurie de vaccins et nos élus tergiversent sur les mesures à prendre qui varient d'un jour à l'autre en fonction de la progression du Omicron. Jean Castex, Olivier Véran et Jean-Michel Blanquer ne savent plus où donner de la tête et émettent des avis contradictoires sur l'ampleur de la pandémie nouvelle, sur l'ouverture ou la fermeture des écoles et la protection des enfants. Rien n'est définitivement arrêté et les parents d'élèves ne savent plus à quel saint se vouer pour que leur progéniture soit protégée ! Nous sommes une fois de plus dans la gadoue, l'improvisation et toujours dans la récupération électorale pour tranquilliser le peuple d'un côté ou l'inquiéter de l'autre dans un jeu à trois entre Macron qui joue l'optimisme tandis que Castex et Véran brandissent le pessimisme et la politique du pire avec la pandémie. Le président, toujours candidat non déclaré, marche sur des oeufs et craint le moindre faux pas qui régulariserait enfin ces sondages qui sentent la pression d'" En marche ", la médisance des ministres critiquant tous les opposants par médias interposés en faussant les pourcentages réels des estimations de votes pour tous les candidats, à l'échéance d'avril 2022.

       S'ajoute à cela, pour Macron et son gouvernement les erreurs sur le plan international : une prétention démesurée à se prendre pour le nombril du monde avec ses critiques de la France lorsqu'il est à l'étranger ; ce bras d'honneur de l'Afrique, du Mali et du Sahel qui renient notre protection et la défense de la démocratie ; cet affront des américains et des anglais qui enlèvent sous notre nez le contrat du siècle des sous-marins avec les Australiens et enfin ce mépris du président algérien Tebboune à recevoir une délégation menée par le Premier ministre Jean Castex. En résumé, une politique de l'hésitation à l'intérieur et une politique de la soumission ou du camouflet à l'extérieur... Pourtant nous approchons d'une date importante : avril 2022. Qui ce jour là ?

       En attendant les dérapages du gouvernement continuent. Mme Agnès Buzin ancienne ministre de la santé reçoit la Légion d'Honneur alors qu'elle est mise en examen pour sa mauvaise gestion de la Covid en 2020... puis nous avons cette prétention macroniste de mettre sous l'Arc de Triomphe le drapeau de l'Europe sans l'accompagner de notre drapeau national. Une erreur vite réparée, mais le mal est fait. Le peuple de France doit se rendre compte combien Macron est plus européen et mondialiste que patriote et français. N'a-t-il pas critiqué l'œuvre de la France en Algérie ; trouver que nous n'avions ni culture ni " Histoire " qu'il faudra réviser à sa manière et surtout celle de l'Algérie, avec Stora ?

       Demain la Nation aura besoin d'une personne qui soit responsable de la France avec son passé, son histoire, ses drames et ses réussites. Un ou une élu (e) qui redonne au peuple le goût de la Nation, de son drapeau national, de son passé et de son avenir dans le respect de ses lois. Demain je l'espère, sera un jour de victoire et non d'enlisement dans l'effacement de nos frontières et de notre pays ouvert à un envahissement incontrôlé par le sud et des zones de non-droit sur notre territoire.
       En attendant, il faut suivre les candidats déclarés et celui qui retarde sa présence sur le terrain du combat politique. Il se fait attendre, mais il doit se douter que la droite est plus présente que jamais dans ces diverses composantes et que le résultat final n'est plus gagné d'avance... C'est ce que nous allons observer durant ces cent jours ou ces 144 000 minutes d'avant le premier tour de l'élection présidentielle du dimanche 10 avril 2022.

Robert Charles PUIG / 1er janvier 2022       
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Quelques lignes
Par M. Robert Charles PUIG

       Saint Augustin, dans un de ses nombreux propos, émet cette vérité contre les hérésies : " Il ne faut pas confondre l'institution avec les personnes qui agissent en son sein". Cette évidence n'a pas été retenue par le Pape et les chrétiens ont tendu le cou aux médias gauchisants qui ont monté en épingles les folies de certains prêtres aux moeurs condamnables. En effet, est-ce la chrétienté qui était coupable ou seulement des individus qui profitaient de la religion ?

       Cette même évidence a perturbé le grand meeting de Zemmour lorsque les débordements de la droite ou de la gauche extrême lui ont été directement imputées, sans excuse. Il fallait tout faire pour qu'il soit coupable. C'est un effet de cette France du Woke USA qui veut imposer une ligne de conduite que l'on retrouve dans l'idéologie de certaines institutions comme Sciences-Po qui cherche à pourrir le réel pour l'illusion et le terrorisme intellectuel. C'est la nouvelle règle qui est soutenue par le macronisme progressiste de plus en plus partisan d'un pays délayé dans le multiculturalisme et l'antiblanc.

       Le plus de Macron ? Le drapeau européen sous l'Arc de Triomphe est aussi la preuve de cette envie du pouvoir de dissoudre l'identité de la Nation dans une mayonnaise ou une salade algérienne du mélange des races, des us et coutumes et de la fin d'une histoire plus que millénaire. Macron n'a-t-il pas dit que nous n'avions pas de "Culture" et que notre "Histoire" devait être modifie, changée comme principalement celle de la Saga pied-noire ?

       Bien entendu nous devons nous méfier de ses propos car il sait faire, il sait embrigader le peuple comme avec les Gilets Jaunes et le peuple qu'il met en avant pour mieux le gruger. Son "emmerde" est le signe qui fait croire au peuple qu'il est avec lui. Sa vulgarité ne choque pas et beaucoup y adhèrent. Il est peuple, il est avec nous ! Comme dirait Knock de Jules Romains, il chatouille à Marseille en promettant des millions puis il gratouille les jeunes, l'Algérie de Tebboune et joue le peuple contre les antivaccins pour gagner la partie.

       Peut-on le laisser faire, dire et conserver 25 % d'avis favorables face aux autres prétendants ? Il est l'homme sournois qui méprise et ment. Il est démoniaque et prétentieux mais avec sa façon d'agir il reste maître du jeu. Il sait que ses adversaires ne s'entendent pas malgré 70 % d'adhésions aux propos de la droite car il n'y a pas d'entente cordiale.

       Alors j'ai des doutes. Je crains sa réélection. Le peuple se doute-t-il de l'arnaque ? Cela s'accompagnera du grand remplacement et d'une nouvelle histoire d'un pays qui aura perdu son âme et sa grandeur passée. Le chant coranique remplacera le tintement des cloches et le voile salafiste couvrira l'ex-France.
      
Robert Charles PUIG / 7 janvier 2022       
      


Le traître Macron a transféré....
- Résistance Républicaine (resistancerepublicaine.com)
Par CONAN 11 janvier 2022
Le traître Macron a transféré toutes nos archives de l'Algérie au FLN, sans réciprocité !

            MACRON IRRESPONSABLE pour avoir transféré -avec quinze ans d'avance- toutes nos archives du FLN à l'Algérie, sans que celle-ci n'ouvre les siennes, transférant ainsi, notamment, tous nos dossiers d'enquêtes judiciaires et policières, ceci sans demande de réciprocité, ni garantie de confidentialité, les livrant ainsi sans état d'âme aux éventuelles vengeances de fous furieux.
            La ministre de la Culture Roselyne Bachelot a annoncé vendredi la prochaine ouverture des archives sur " les enquêtes judiciaires " de la guerre d'Algérie (1954-1962). En mars, Emmanuel Macron avait déjà décidé de " faciliter l'accès aux archives classifiées de plus de cinquante ans ", couvrant la période du conflit.
            Un nouveau geste d'apaisement après des mois de tensions entre Alger et Paris ? La ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, a annoncé vendredi 10 décembre la prochaine ouverture des archives sur " les enquêtes judiciaires " de la guerre d'Algérie (1954-1962).
            " J'ouvre avec 15 ans d'avance les archives sur les enquêtes judiciaires de gendarmerie et de police qui ont rapport avec la guerre d'Algérie ", a-t-elle annoncé sur le plateau BFMTV. Une déclaration qui intervient deux jours après la visite à Alger du chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian.
            Le 9 mars 2021, poursuivant sa politique de " petits pas ", le chef de l'Etat avait annoncé une simplification des accès aux procédures de déclassification des archives classifiées de plus de 50 ans, permettant d'écourter les délais d'attente liés à cette procédure.
            https://www.france24.com/fr/info-en-continu/ 20211210-guerre-d-alg%C3%A9rie-la-france-va-ouvrir-avec-15-ans -d-avance-ses-archives-sur-les-enqu%C3%AAtes-judiciaires
            Dans ce pays aux mains d'une clique qui continue de justifier, assumer, revendiquer et se glorifier des pires massacres auxquels elle s'est livrée dès 1954 sur les pieds noirs, les musulmans pro-français, les supplétifs de l'armée française, comment ne pas redouter les règlements de compte qui risquent de survenir après la divulgation de certains renseignements sur des témoins et acteurs dont certains sont encore en vie.
            Je rappelle qu'une fois l'Algérie donnée à cette clique en 1962, alors que le FLN avait été complètement défait, des tueurs du FLN montaient une opération pour éliminer le Lieutenant Ben Brahim du Commando Georges qui s'était retiré en Dordogne… Fort heureusement c'est ce dernier, toujours sur ses gardes, qui mit au tapis les cinq assaillants… Ceci se passa quelques années après que ces " vaillants djounouds " eurent obtenu leur indépendance…Comment ne pas redouter le renouvellement de ce genre d'action, après la diffusion d'informations Secret/Défense qui pourraient concerner, par exemple, des Français-musulmans qui avaient infiltré le FLN ou l'ALN pour le compte de notre Sécurité Militaire ou du SDECE et des rapports d'enquête sur des personnes qui militaient à l'époque dans l'OAS etc…etc…
            Mais notre enfant-roi n'en n'a cure, il se devait d'obéir aux injonctions contenues dans le rapport stora. Certains y verront une sorte d'incohérence, alors qu'au contraire nous sommes toujours dans la même constance de complaisance, masochisme, soumission, méconnaissance et indifférence à l'histoire de France chez un macron instrumentalisé par les stora de tous poils et, de l'autre côté, un FLN campé sur sa " rente mémorielle " depuis soixante ans. Il n'est que de lire les journaux algériens et d'écouter les commentateurs radio et télé pour se rendre compte que nous avons, outre-Méditerranée, un ennemi farouche qui, hélas, bénéficie de sympathies jusque dans les plus hautes sphères de notre Etat.
            Je trouve ce comportement bien plus irresponsable que celui des réfractaires au vaccin rendus inquiets par les indications de sommités scientifiques de premier plan sur celui-ci… Si irresponsabilité entraîne déchéance de citoyenneté, que dire de son impact sur le mandat de Président des français !
            CONAN inspiré d'un article d'Alain Sanders paru dans Présent du 30 décembre 2021
11 janvier 2022 Conan


Énigme en prophétie. Chapitre 58
Envoyé par M. P. Barisain

A lire en cette période préélectorale qui, avec le virus, rend les "pauvres humains" fous, ces vers de François Rabelais qui ont une saveur particulière… ( GARGANTUA 1534)

              Pauvres humains, qui bon heur attendez
              Levez vos cœurs, et mes dits entendez.

              S'il est permis de croire fermement
              Que par les corps qui sont au firmament,
              Humain esprit de soi puisse advenir
              À prononcer les choses à venir ;
              Ou si l'on peut par divine puissance
              Du sort futur avoir la connaissance,
              Tant que l'on juge en assuré discours
              Des ans lointains la destinée et cours,
              Je fais savoir à qui le veut entendre,
              Que cet hiver prochain sans plus attendre
              Voire plus tôt en ce lieu où nous sommes
              Il sortira une manière d'hommes,
              Las du repos, et fâchés du séjour,
              Qui franchement iront, et de plein jour
              Suborner gens de toutes qualités
              À différend et partialités.

              Et qui voudra les croire et écouter :
              (Quoi qu'il en doive advenir et coûter)
              Ils feront mettre en débats apparents
              Amis entre eux et les proches parents.
              Le fils hardi ne craindra l'impropère
              De se bander contre son propre père,
              Même les grands de noble lieu saillis
              De leurs sujets se verront assaillis.
              Et le devoir d'honneur et révérence
              Perdra pour lors tout ordre et différence,
              Car ils diront que chacun à son tour
              Doit aller haut, et puis faire retour.
              Et sur ce point aura tant de mêlées,
              Tant de discords, venues, et allées,
              Que nulle histoire, ou sont les grands merveilles
              A fait récit d'émotions pareilles.

              Lors se verra maint homme de valeur
              Par l'aiguillon de jeunesse et chaleur
              Et croire trop ce fervent appétit
              Mourir en fleur, et vivre bien petit
              Et ne pourra nul laisser cet ouvrage.
              Si une fois il y met le courage,
              Qu'il n'ait empli par noises et débats
              Le ciel de bruit, et la terre de pas.
              Alors auront non moindre autorité
              Hommes sans foi, que gens de vérité :
              Car tous suivront la créance et étude
              De l'ignorante et sotte multitude.
              Dont le plus lourd sera reçu pour juge.
              Ô dommageable et pénible déluge,
              Déluge (dis-je) et à bonne raison,
              Car ce travail ne perdra sa saison.

              Ni n'en sera délivrée la terre :
              Jusqu'à tant qu'il en sorte à grand erre
              Soudaines eaux, dont les plus attrempés
              En combattant seront pris et trempés,
              Et à bon droit : car leur cœur adonné
              À ce combat, n'aura point pardonné
              Même aux troupeaux des innocentes bêtes
              Que de leurs nerfs, et boyaux déshonnêtes
              Il ne soit fait, non aux dieux sacrifice
              Mais au mortels ordinaire service.
              Or maintenant je vous laisse penser
              Comment le tout se pourra dispenser.
              Et quel repos en noise si profonde
              Aura le corps de la machine ronde.
              Les plus heureux qui plus d'elle tiendront
              Moins de la perdre et gâter s'abstiendront.

              Et tâcheront en plus d'une manière
              À l'asservir et rendre prisonnière,
              En tel endroit que la pauvre défaite
              N'aura recours qu'à celui qui l'a faite.
              Et pour le pis de son triste accident
              Le clair soleil, ainsi qu'être en occident
              Lairra épandre obscurité sur elle
              Plus que d'éclipse, ou de nuit naturelle.
              Dont en un coup perdra sa liberté,
              Et du haut ciel la faveur et clarté.
              Ou pour le moins demeurera déserte,
              Mais elle avant cette ruine et perte
              Aura long temps montré sensiblement
              Un violent et si grand tremblement,
              Que lors Etna ne fut tant agitée,
              Quand sur un fils de Titan fut jetée.

              Et plus soudain ne doit être estimé
              Le mouvement que fit Inarimé
              Quand Tiphoeus si fort se dépita,
              Que dans la mer les monts précipita.
              Ainsi sera en peu d'heure rangée
              À triste état, et si souvent changée,
              Que même ceux qui tenue l'auront
              Aux survenants occuper la lairront.
              Lors sera près le temps bon et propice
              De mettre fin à ce long exercice :
              Car les grands eaux dont oyez deviser
              Feront chacun la retraite aviser.
              Et toutefois devant le partement
              On pourra voir en l'air apertement
              L'âpre chaleur d'une grand flamme éprise,
              Pour mettre à fin les eaux et l'entreprise.

              Reste en après ces accidents parfaits
              Que les élus joyeusement refaits
              Soient de tous biens, et de manne céleste
              Et d'abondant par récompense honnête
              Enrichis soient. Les autres en la fin
              Soient dénués. C'est la raison, afin
              Que ce travail en tel point terminé
              Un chacun ait son sort prédestiné.
              Tel fut l'accord. Ô qu'est à révérer
              Cil qui enfin pourra persévérer.

              La lecture de cettui monument parachevée,
              Gargantua soupira profondément, et dit ès assistants :

              " Ce n'est de maintenant que les gens réduits à la créance évangélique sont persécutés. Mais bienheureux est celui qui ne sera scandalisé et qui toujours tendra au but, au blanc, que Dieu par son cher fils nous a préfix, sans par ses affections charnelles être distrait ni diverti ".
              Le moine dit. " Que pensez-vous en votre entendement être par cet énigme désigné et signifié ?
              - Quoi ? Dit Gargantua, le décours et maintien de vérité divine.
              - Par saint Goderan (dit le moine), telle n'est mon exposition. Le style est de Merlin le prophète. Donnez y allégories et intelligences tant graves que voudrez. Et y ravassez, vous et tout le monde ainsi que voudrez : de ma part je n'y pense autre sens enclos qu'une description du jeu de paume sous obscures paroles. Les suborneurs de gens sont les faiseurs de parties, qui sont ordinairement amis. Et après les deux chasses faites, sort hors le jeu celui qui y était et l'autre y entre. On croit le premier qui dit si l'éteuf est sur ou sous la corde.
              Les eaux sont les sueurs. Les cordes des raquettes sont faites de boyaux de moutons ou de chèvres. La machine ronde est la pelote ou l'éteuf. Après le jeu, on se rafraîchit devant un clair feu et change l'on de chemise. Et volontiers banquette l'on, mais plus joyeusement ceux qui ont gagné. Et grand chère.
François Rabelais        



L'INDOCHINE FRANÇAISE.
Envoyé Par M. P. Barisain
Dans la tourmente (1940-1950) :
De Gaulle l'Assassin (déjà) (forumsactifs.net)
GARDER LA SOUVERAINETÉ DE LA FRANCE

 Amiral-Decoux2                  L'AMIRAL Decoux, commandant des forces navales d'Extrême-Orient, fut investi par le Maréchal le 20 juillet 1940 des pouvoirs de Gouverneur général de l'Indochine. La situation était alors des moins confortables. L'Empire du Soleil levant aurait occupé sans état d'âme nos protectorats et colonies, si l'Amiral n'y avait mis obstacle en négociant un accord avec Tokyo, le 30 août 1940, par lequel le Japon s'engageait à respecter la souveraineté française et l'intégrité territoriale de l'Indochine, moyennant quelques compensations, somme toutes assez légère.
  L'amiral Decoux

          L'arrêt des barbares nippons aux portes de l'Indochine est incompréhensible si l'on ne tient pas compte du sacrifice sauveur du maréchal Pétain en France. Un gaulliste, Claude de Boisanger, conseiller diplomatique du Gouverneur général dès novembre 1941, admet que "la tâche [de l'amiral Decoux] était de maintenir la souveraineté française sur l'Indochine et qu'il ne pouvait y parvenir qu'en demeurant ouvertement, publiquement fidèle au gouvernement du maréchal Pétain". Cette fidélité était, aux yeux des Japonais, la garantie "de la neutralité du Gouvernement général dans la guerre du Pacifique". Si l'amiral avait adopté un ton nettement plus réservé vis-à-vis de Vichy, plus mesuré vis-à-vis des Alliés et de la "France libre", "les Japonais, le soupçonnant de mener un double jeu, n'auraient pas, devant la perspective d'une rupture, tergiversé pendant quatre ans" (On pouvait éviter la guerre d'Indochine, Souvenirs 1941-1945, Paris 1977, p. 34).

Carte_victoire_navale-Koh-Chang
          À Koh-Chang, la Royale a remporté sa seule victoire du 20e siècle.
          La Péninsule indochinoise conserva pendant toute la durée de la guerre une paix relative. Et lorsque le Siam, l'actuelle Thaïlande, ambitionna de nous rafler quelque portion de territoire, la marine française s'offrit le luxe d'envoyer sa flotte par le fond. C'était à Koh-Chang, le 17 janvier 1941. (…)

          Comment se faire le bouclier protecteur de 24 millions d'Indochinois et de 40 000 Européens, quand on ne dispose que d'une petite armée mal équipée, face à 90 000 soldats japonais aguerris et déterminés, sinon par des négociations ? L'amiral Decoux les mena avec une prudence et une détermination remarquables, dans l'allégeance au Maréchal, son chef légitime, reconnu comme tel par le monde entier. En agissant ainsi, jamais il ne perdit la face, ce qui est essentiel en Extrême-Orient, et conserva ce que les Indochinois appelaient "le mandat du ciel". Perdre la face ou le mandat du ciel, c'eût été perdre toute légitimité.

UNE RÉVOLUTION NATIONALE ET COLONIALE

          L'allégeance au gouvernement de Vichy ne fut pas seulement une nécessité diplomatique du moment. Elle exprimait l'adhésion de toute une communauté historique, Annamites et Européens liés par un même destin, à un programme d'unité et de civilisation, "pour qu'au jour de la défaite du Japon, la France ne perdît pas l'Indochine" (Grandjean, p. 70).

          Indochine : Au plan politique, l'amiral consolida l'unité de la Péninsule. Il créa la "fédération indochinoise", mettant l'accent sur le rôle fédérateur que la France avait à remplir entre les cinq États formant cette Fédération (Cochinchine, Annam, Tonkin, Laos, Cambodge), fortifiant les patriotismes locaux de façon à évincer tout "nationalisme" antifrançais.
Carte_Indochine
          Les Français d'Indochine avaient en outre le devoir d'oublier leurs préférences personnelles pour opposer aux Japonais un bloc sans fissure. La Légion des anciens combattants était le signe de leur discipline, de leur cohésion.

          L'amiral s'appliqua aussi à renouveler le système colonial. Il imposa l'égalité de traitement et de considération pour les fonctionnaires français et indochinois. De 1940 à 1944, le nombre des Vietnamiens occupant des emplois dans l'administration française passa du simple au double. Le climat des relations entre Français et Indochinois s'améliora singulièrement. Les Français étaient tenus à être exemplaires dans l'exercice de leurs fonctions. On écarta les fonctionnaires trop âgés, malhonnêtes ou incapables. On interdit les vexations comme l'emploi du mot "indigène". C'est ainsi que la Garde indigène, composée d'autochtones chargés de la sécurité du territoire, devint la Garde indochinoise.

          Composée d'une vingtaine de milliers de gardes civils, encadrée par des officiers français et placée sous le commandement de l'amiral gouverneur, elle se montra très efficace, en particulier contre les communistes, les "vietminhs", qui se comportaient en véritables barbares. (…)

          Dans sa Revue indochinoise, qui parut tous les mois, de 1940 à 1945, on retrouve les principes d'une vraie colonisation française, débarrassée de tout anticléricalisme, ouvertement favorable à l'Église catholique.

          Oui, seule la politique coloniale du Maréchal, relayée par l'amiral Decoux, pouvait non seulement tenir tête à l'occupant japonais mais aussi venir à bout du péril communiste. Encore fallait-il pour cela "tenir bon" jusqu'à la victoire des Alliés, en restant unis contre les ennemis de l'extérieur et de l'intérieur.
 Amiral-decoux-revue
L'amiral Decoux (photo Archives MEP)

LE CRIME GAULLISTE

          Tous les historiens sérieux admettent que la politique suivie par l'amiral Decoux était de loin la plus réaliste. Or, cette politique n'était autre que celle du Maréchal.
          Preuve que c'était la seule efficace.
 Cfln-d-Alger
Comité Français de Libération Nationale d'Alger

          Dans sa paranoïa, de Gaulle refusa cette politique réaliste. "Il était essentiel, écrit-il dans ses Mémoires, que le conflit ne s'achevât pas sans que nous fussions, là aussi, devenus des belligérants. Si nous prenions part à la lutte, fût-elle près de son terme, le sang versé sur le sol de l'Indochine nous serait un titre imposant." (…)

          À Alger, en 1943, le CFLN bâtit le mythe d'une guérilla de résistants qui, en Indochine, accueilleraient les Forces expéditionnaires françaises. 65 000 hommes dont 15 000, disait-on, seraient prêts dès l'automne 44, interviendraient dans le cadre d'un débarquement massif sur la Péninsule indochinoise, avec l'appui aérien de la 14e US Air Force basée à Kumming dans le Yunnan (Chine). La "Résistance" indochinoise devait appliquer le même schéma qu'en métropole: un Service Action pour collecter du renseignement et créer un climat d'insécurité sur les arrières de l'adversaire, par destructions, sabotages, coups de main, embuscades, à partir de zones refuge en Annam ou des régions montagneuses laotiennes et chinoises. Il fallut pour équiper nos apprentis "résistants" parachuter postes radio, armes, munitions, explosifs, mais aussi des instructeurs, opérateurs radio, cadres… La section Indochine FFL, forte de cinq cents hommes, basée à Ceylan sous les ordres du commandant de Langlade, en liaison avec les Britanniques de Calcutta, devait constituer le "fer de lance de la Résistance en Asie". Voilà comment s'édifiait sur du sable le mythe d'une "résistance indochinoise".

          À partir du dernier trimestre 1944, les largages de matériel se multiplièrent. Au 4 mars 1945, ils s'élevaient à plus de deux cent vingt. Tout le monde était au courant, à commencer par les Japonais… Des résistants venus de l'extérieur tentèrent de rallier des militaires. Plusieurs se laissèrent prendre, en particulier des officiers de renseignements en poste à la frontière chinoise, qui communiquèrent des informations aux Alliés, en désobéissance formelle aux ordres de Decoux.
          Les résistants déployèrent une active propagande dans le milieu civil, en particulier chez les lycéens et les étudiants. (…) Sur les deux mille volontaires, seulement trois cents s'engagèrent…
          Des émissions en langue française de la BBC ou d'All India Radio exaltaient la résistance. (…) Cette même radio annonça l'imminence d'un débarquement US, ce qui acheva d'affoler les esprits.

MISES EN GARDE JUSTIFIÉES

Amiral-Decoux3           Amiral Decoux en grande tenue
          L'amiral Decoux, craignant la remise en cause du statu quo dont jouissait l'Indochine, sévit durement jusqu'à l'été 1944 contre les gaullistes qui furent poursuivis pour trahison, excitation à la désertion et atteinte à la sûreté de l'État. Mais, après le 25 août 1944, quand de Gaulle prit le pouvoir à Paris, l'amiral se vit contraint de faire une déclaration publique pour affirmer "sa volonté de maintenir, en toutes circonstances, l'état d'allégeance de la Fédération indochinoise à la France". Façon discrète de reconnaître le nouveau gouvernement de la France sans éveiller les soupçons du Japon, contre lequel de Gaulle et sa "France libre" étaient entrés en guerre dès 1941.

          Le 31 août, l'amiral Decoux, Roland de Margerie, notre chargé d'affaires à Pékin, et Henri Cosme, ambassadeur de France à Tokyo, adressaient au Gouvernement provisoire un télégramme, dit "télégramme à trois", dans lequel ils rappelaient que l'Indochine n'était pas à reconquérir, la souveraineté française y étant respectée. Ils insistaient sur les graves périls que toute absence, même provisoire, d'autorité risquait de soulever, principalement au Tonkin, en cas d'immixtion chinoise.
          Ce télégramme ne reçut jamais de réponse. Mais le délégué du GPRF en Chine tenait les propos suivants: "Nous ne pouvons accepter la politique du Gouverneur général telle qu'elle est définie par le télégramme à trois. La conception toute vichyssoise suivant laquelle l'évacuation de l'Indochine pourra être négociée pacifiquement avec les Japonais est un mythe. D'ailleurs, même si elle ne l'était pas, étant donné les conditions dans lesquelles l'Union a été occupée, nous devons reconquérir son territoire sur l'ennemi […]. (…)??"

          De Gaulle, sans même prévenir Decoux, nomma le général Mordant délégué général du GPRF. Or, il était de notoriété publique que ce Mordant était un incapable. L'amiral Decoux, voulant éviter tout affaiblissement de l'autorité française face à l'ennemi, prit le parti de couvrir Mordant en le nommant inspecteur général des forces de terre, de mer et de l'air. Ces remaniements ne contribuèrent pas à apaiser les Japonais, qui devinrent de plus en plus nerveux.

LE COUP DE FORCE DU 9 MARS 1945

          Le 9 mars 1945, à 21 heures 15, les Japonais déclenchaient un sauvage coup de force, qui abattit l'administration française en quelques heures. L'amiral gouverneur et son entourage furent emprisonnés ou consignés sur place. Du Nord au Sud, tous nos postes, casernes, services administratifs furent attaqués par surprise par 65 000 Nippons. La plupart de nos troupes ne purent tenir plus de vingt-quatre heures. Le fort Brière-de-l'Isle par exemple, près de Langson au Tonkin, se rendait le 10 mars. Le lendemain, ses défenseurs étaient attachés les uns aux autres par le poignet avec la drisse du pavillon, puis conduits sur les superstructures du fort, où ils furent sauvagement massacrés. Le général Lemonnier, commandant la place, fut décapité au sabre.

          D'autres groupements réussirent à s'échapper dans la forêt, telle la brigade Alessandri, et tentèrent de résister en liaison avec le Vietminh, comme l'avait ordonné de Gaulle, mais l'attitude des communistes devenant rapidement hostile, ils n'eurent que la ressource de se réfugier en Chine après avoir été dépouillés et désarmés aux postes frontières, à la demande du commandement américain !

Alessandri           Général Alessandri
          Sur les deux mille "résistants" civils, seules quelques dizaines participèrent aux combats. Les autres se débarrassèrent de leurs armes dans les quatre lacs d'Hanoï. "Il n'est pas surprenant que l'armée nippone ait écrasé l'armée d'Indochine, écrit Grandjean. Car c'est justement l'évidence de sa supériorité qui avait déterminé la politique indochinoise de la France depuis cinq ans. Tous les soldats étaient conscients de cette situation. Leurs chefs [pas tous ! ] ont cru naïvement qu'au jour du choc avec les Japonais, les Alliés allaient débarquer des troupes, en tout cas, écraser l'ennemi de leur supériorité aérienne." La désillusion fut cruelle.

          Pour la colonie française, ce fut tragique. Tout ce qui détenait une autorité, au Gouvernement général, dans l'administration, l'armée, la police, l'Église, fut arrêté, interné ou exécuté. Ce jour-là, les premiers martyrs de la guerre d'Indochine versèrent leur sang. Au Laos, Mgr Ange Gouin, un Breton, fut massacré avec tous les Français de Thakhek. À Langson, au Tonkin, Mgr Hedde était jeté en prison. Dans cette même ville, mère Marie de sainte Jeanne d'Arc, ses sœurs et d'autres femmes qui s'étaient réfugiées auprès d'elles, échappèrent au viol grâce à une protection miraculeuse de la Sainte Vierge. (…)

          En 1947, l'état-major du Corps expéditionnaire français dressera le bilan des victimes du coup de force du 9 mars 1945 : 2 119 tués sur 12 000 militaires, soit 20 % de l'effectif engagé, sans compter les blessés, les réfugiés en Chine, les prisonniers des camps de la mort, ainsi que les centaines de civils qui tombèrent entre les mains de la féroce Kempetaï, la "Gestapo japonaise".

          De Gaulle pouvait être satisfait, le sang avait coulé en Indochine… et ne devait plus cesser.

LES VRAIS RESPONSABLES

          Comment expliquer un tel revirement de la part de l'état-major impérial nippon ? Les travaux de deux universitaires japonais (cités par Grandjean, p. 240) permettent d'analyser les étapes de la décision japonaise:

          1° De 1941 à 1944, les Japonais sont favorables au statu quo. Écartons l'interprétation primaire des gaullistes selon laquelle ce statu quo, servant les intérêts du Japon, trahissait par le fait même les intérêts français.

          2° Le 14 septembre 1944, de Gaulle ayant pris le pouvoir à Paris le mois précédent, Tokyo continue à envisager le statu quo, mais à condition que les Français le respectent loyalement. Sinon, l'Indochine sera placée sous administration militaire nippone.

          3° En décembre 44 et janvier 45, les Japonais sont défaits aux Philippines par les Américains. Dans le même temps, en Indochine, parachutages et messages radiophoniques s'intensifient; enfin, le 12 janvier, quarante navires japonais sont détruits par l'aviation US, guidée par des officiers de renseignements ralliés à de Gaulle. C'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase.

          4° Le 1er février 1945, la Conférence suprême, à Tokyo, décide le coup de force, pour le 9 mars suivant.


          Il résulte de ce calendrier que l'état-major japonais n'a cru que très tardivement à l'éventualité d'un débarquement allié sur la Péninsule indochinoise. La thèse gaulliste selon laquelle c'est l'approche des Alliés qui a déclenché le coup de force est fausse. "Il suffit à un profane, écrit Grandjean, de regarder la carte du Pacifique pour comprendre que, maître des Philippines au début de 1945, Mac Arthur, commandant en chef des forces US dans le Pacifique, n'a que faire de diversions vers l'Ouest et qu'il ne peut que foncer, droit au Nord, sur le Japon pour y régler directement le sort de la guerre. On sait que, dans la réalité, c'est bien ce qu'il a fait, sans jamais penser à l'Indochine." (p. 245)

          Il a fallu toute l'agitation suscitée par de Gaulle en Indochine pour faire croire aux Japonais, de plus en plus fébriles, que les Américains allaient débarquer. En réalité, ni de Gaulle ni son gouvernement n'ont jamais rien su des intentions stratégiques des Alliés dans le Pacifique: dans quel secteur, chinois ou américain, avait été placée l'Indochine et, par conséquent, à qui il fallait s'adresser pour préparer un débarquement. Quand de Gaulle se rendit à Washington, en juillet 1944, il aurait cru déchoir en interrogeant sur ce point les Américains. On a donc fait des plans à Paris à partir d'une hypothèse fausse.

          Si le sacrifice de nos soldats était tellement nécessaire pour les négociations futures, pourquoi la France ne fut-elle pas conviée à la Conférence de Potsdam en juillet 1945, où la question d'Extrême-Orient fut traitée par les trois "grands", Staline, Truman et Churchill.

          L'entrevue que le général Sabatier, de retour d'Indochine, eut en juin 1945 avec de Gaulle est révélatrice de l'état d'esprit de ce dernier: "Le chef du GPRF fume cigarette sur cigarette. Il écoute le récit de ce qui s'est passé en Indochine sans manifester la moindre réaction […]. Demandant des détails sur les pogroms de l'agression du 9 mars, de Gaulle dit négligemment qu'il avait été prévenu de l'attaque. Sur le coup, Sabatier n'y prête pas attention. Mais, un peu plus tard, en vieil officier de renseignements qu'il est, il fera le recoupement: le 5 mars, les écoutes radio de l'état-major australien captent un message japonais annonçant l'attaque. L'attaché militaire français en Australie, le colonel Renucci, transmet aussitôt l'information à Paris, qui ne la retransmettra pas. Pourtant le général Juin dit avoir transmis le message "à qui de droit". Ainsi de Gaulle savait !

De_Gaulle           "Quand Sabatier s'étend sur les erreurs de la résistance en Indochine, le chef du GPRF l'invite en souriant d'un petit geste de la main à glisser sur ces "détails". Il n'a pas un mot de gratitude pour les hommes qui ont combattu et souffert, ni pour ceux qui sont morts massacrés ou tués par les Nippons…" (cité par Pierre Quatrepoint, De Gaulle face à l'Indochine, Perrin, 2004, p. 57)

          De Gaulle est coupable non seulement d'avoir excité les esprits pour imposer son mythe de la résistance, mais aussi d'avoir provoqué un sanglant coup de force, entraînant la mort de milliers d'hommes, et d'avoir ainsi fait le lit de la Révolution. Cela aurait dû suffire à le conduire en Haute Cour pour trahison et complot contre la sûreté de l'État et l'intégrité du territoire!

LE CONFLIT S'ENVENIME

          De Gaulle, auquel la situation en Indochine échappait totalement, n'en resta malheureusement pas là. Le 24 mars 1945 à Paris, il lançait son projet d'Union française qui devait remplacer ce qui existait déjà sous le nom d'Empire français.

          Cette "déclaration du 24 mars" ne sera jamais remise en cause. Contradictoire dans les termes, - on ne peut d'un côté exalter le principe des "libertés démocratiques" et de l'autre maintenir l'autorité française -, elle ne fera qu'aggraver l'incapacité du régime à traiter de manière française la question coloniale.

          De Gaulle était acquis à l'idée d'indépendance des peuples. Porté par le mythe de la "Libération", il voulait s'en faire le guide éclairé. (…)

          Hô Chi Minh ne s'y trompait pas. Le 3 septembre 1945, il déclarait à un gaulliste, François Missoffe : "Vous êtes les nouveaux Français, des Français qui nous comprennent, et puis vous êtes des gaullistes, et il y a eu Brazzaville."

LE VIETMINH PREND LE POUVOIR

          Qui était Hô Chi Minh? Né en 1890 dans le Nord-Annam, de son vrai nom Nguyen Ai Quoc, cet ouvrier imprimeur avait appris les idées communistes en France. En 1941, poursuivi par la Sûreté, il créait en Chine une "?Ligue pour l'indépendance du Vietnam", Vietnam Doc Lap Dong Minh, en abrégé Vietminh, dont le programme était de chasser la France impérialiste et d'instaurer une démocratie de type stalinien.

          Après le 9 mars 1945, la France ayant perdu la face, l'Indochine se trouva tout à coup dégagée de toute tutelle française. Il y avait là une opportunité formidable pour le Vietminh. Les Japonais tentèrent de confier le pouvoir à Bao-Daï, l'empereur d'Annam, mais l'autorité de ce dernier sur son peuple était quasi nulle. Comprenant que le Japon capitulerait bientôt, Hô Chi Minh voulut imposer à ses compatriotes l'idée d'indépendance, par la persuasion ou par la terreur. Il fit récupérer les armes des Français pour équiper "?l'armée de salut national" commandée par son lieutenant, Vô Nguyen Giap. Puis, se tournant vers les Américains, il se présenta comme le seul homme capable de réaliser l'unité de son pays. Très peu de gens comprirent sur le moment quels étaient les véritables desseins d'Hô Chi Minh. (…)
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Le parcours d'Hô Chi Minh

          Au printemps 1945, Hô Chi Minh s'installa à Hanoï et proclama la fin de la période française. À ses côtés, grenouillaient des agents de l'OSS (Office of Strategic Service), le service de renseignements US. Roosevelt, qui appelait de ses vœux l'indépendance de l'Indochine, lui fournit des conseillers, des mitraillettes, des postes radio, moyens qu'il refusait dans le même temps à l'armée française! Le Vietminh profitait aussi de l'aide nippone qui laissait s'instaurer le désordre, en fournissant aux rebelles les armes prises aux Français.

          Rusé, Hô Chi Minh fit même parvenir à Sainteny, délégué sur place par de Gaulle, un mémorandum sur "l'Indochine française future", préconisant l'élection d'un parlement et la constitution d'un cabinet dirigé jusqu'à l'indépendance par un gouverneur français.

          Quand le Japon, mis à genoux par le bombardement d'Hiroshima et de Nagasaki, capitula le 14 août 1945, Hô Chi Minh comprit que l'heure était venue pour lui d'agir. Le 17 août, le Vietminh rassemblait vingt mille manifestants sur la place du théâtre d'Hanoï. Avec la complicité de la Kempetaï japonaise et des officiers américains, les chefs vietminhs apparaissaient au balcon, hissant le drapeau rouge à étoile d'or. En dix jours, ils s'emparèrent de tous les leviers de commande.

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Hô Chi Minh et Giap en compagnie des agents américains de l'OSS, en juin 1945


          Le 2 septembre, jour de la commémoration des martyrs d'Annam, - Hô Chi Minh avait choisi cette date pour rallier les catholiques à sa cause -, le chef vietminh proclamait à Hanoï l'indépendance du Vietnam, avec, à ses côtés, toujours le même major Patti. (…)

L'ÉPURATION DES "TRAÎTRES"

Ho-chi-minh-jeune           Hô Chi Minh

          L'épuration suivit de peu la "libération". En Indochine, vietminhs et gaullistes rivalisèrent pour épurer leurs concitoyens. Hô Chi Minh, sans négliger les villes, agit surtout dans les "communautés villageoises". Ordre fut donné d'éliminer les Indochinois francophiles et d'exterminer tous les notables des villages, coopérateurs irremplaçables des Français. Au cours de la seule année 1948, plus de douze mille assassinats furent ainsi perpétrés. Le 21 août 1949, les ondes viets félicitaient leurs soldats d'avoir supprimé 95 % des notables du pays! Terrorisé, le reste de la population se rallia au Vietminh, tout en gardant le secret espoir que les Français se montreraient plus forts que les forts.

          En septembre 1945, débarquaient à Saïgon des Français de Métropole. Ces "nouveaux Français", hautains et intolérants, ignoraient tout du pays. Ils ne savaient pas mais, en débarquant, ils apprirent que la conférence de Potsdam, tenue au mois de juillet précédent, avait confié le désarmement des Japonais aux Britanniques au Sud et aux Chinois au Nord. Dans ces conditions, comment rétablir la souveraineté de la France sur l'Indochine?

          Autre difficulté majeure: pour ces " résistants " venus de France, explique Rodolphe-André Benon, lieutenant en Indochine de 1941 à 1946, "le problème indochinois s'identifie au concept métropolitain "collaboration-résistance" et s'interprète comme la lutte du peuple contre le fascisme et l'oppression. (…) Les représentants du peuple indochinois (…) ne peuvent qu'accueillir comme des frères les "résistants" venant de France pour les "libérer". Tel est le raisonnement! " Tel est le mensonge importé de métropole.

          À Saïgon, le commissaire de la République Cédile laisse consignés dans leurs casernes les 5 000 soldats français, jugés trop vichystes. Mais, le 23 septembre 1945, il fait libérer les 1 200 criminels annamites arrêtés par la Sûreté, sous le gouvernement de l'amiral Decoux. La suite était prévisible: il y eut, dans la nuit du 24 au 25 septembre, un massacre atroce de 276 Français dans la cité-Héraud… La "libération", c'est cela: la mise en liberté des criminels!

          Dans ce climat épouvantable, les "anciens Français" n'attendaient qu'une chose: l'arrivée d'une armée qui remettrait de l'ordre. Elle débarqua enfin, commandée par le général Leclerc, accompagné de l'amiral Thierry d'Argenlieu, nommé Haut-Commissaire par le chef du gouvernement provisoire. De Gaulle avait déclaré: "Il faut faire du neuf." D'Argenlieu et Leclerc appliquèrent la consigne à la lettre et épurèrent à tour de bras.

Leclerc_Argenlieu           Le général Leclerc et l'amiral Thierry d'Argenlieu

          Le lieutenant Benon en constata l'effet immédiat sur les populations: "(…) Les cadres et employés administratifs, les militaires autochtones qui ont servi loyalement sous le régime Decoux comprennent qu'on ne peut pas faire confiance à la France. Ils seront désormais sensibles à la propagande vietminh." Voilà le beau travail des " épurateurs " !

          Le renvoi honteux de l'amiral Decoux en Métropole fut considéré par la population indochinoise comme un désaveu de la confiance qu'elle lui avait témoignée. Après passage devant une commission d'épuration, des Français d'Indochine furent rapatriés, de façon souvent brutale et humiliante, par avions et bateaux entiers. Tous nos réseaux d'amitiés furent détruits; nous n'avions plus de contacts avec la population, donc plus de renseignements pour identifier les terroristes. Hô Chi Minh pouvait agir sans difficulté. La cause militaire de notre échec à venir est dans cette épuration.

L'ÉGLISE SE RALLIE À HÔ CHI MINH

          Hô Chi Minh tenta de tuer l'âme de la Chrétienté indochinoise en jouant un double jeu. Officiellement, c'était la politique de la main tendue, mais les consignes données à ses agents de propagande étaient claires:

          "L'ennemi numéro 1 du communisme, c'est le christianisme; mais il faut faire preuve de beaucoup d'adresse. D'abord, séparer les missionnaires étrangers du clergé vietnamien, ce n'est pas difficile: colonialisme, espionnage. Il faudra ensuite séparer les chrétiens du clergé vietnamien, en représentant ce dernier comme l'agent de l'étranger. Enfin, assimilation des chrétiens, ce qui sera alors tout simple."

          On vit le drapeau rouge flotter sur les tours de la cathédrale d'Hanoï. Dans certaines églises, on enleva les statues des "saints français": sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus, sainte Jeanne d'Arc… Toutes les vieilles calomnies du temps des persécutions ressortirent perfidement. Les églises furent détruites, des hosties répandues à terre et souillées, des crucifix percés de flèches, des religieuses chassées de leurs écoles ou de leurs hôpitaux, avec interdiction de porter l'habit religieux…

          À Nam Dinh, le Père Vacquier vit ses collaborateurs se retourner haineusement contre lui. Comme il avait été aumônier d'un régiment de tirailleurs tonkinois, on l'accusa d'avoir fait " de la politique"; on parla de "déportation" à propos des coolies déplacés avec leurs familles. Il fut arrêté en septembre 1945, et disparut. On ne retrouva que son bréviaire, où il avait souligné la phrase de saint Paul aux Colossiens : " Souvenez-vous de mes chaînes…"

          À Saïgon, Mgr Cassaigne dut affronter lui aussi la Kempetaï, la terrible police japonaise, puis le Vietminh. Sa tête fut mise à prix, une première fois 5 000 piastres, quelques jours plus tard 20 000 : "Les enchères montent ", remarquait-il en souriant, sans rien changer à ses habitudes. Plusieurs de ses collaborateurs furent assassinés, dont le vicaire de la cathédrale de Saïgon, le Père Tricoire.
Mgr-Cassaigne-1941
Mgr Cassaigne, entouré de ses anciens Montagnards en 1941


          Mais le plus douloureux pour Mgr Cassaigne fut de voir certains membres du clergé vietnamien et de nombreux dirigeants d'Action catholique profiter du désordre politique pour prendre avec passion le parti de l'indépendance et soutenir le Vietminh ! Les jeunes gens s'engageaient dans les rangs du Vietminh, au seul mot magique de Dôc lâp, indépendance! Un groupe de prêtres se réunit même autour d'Hô Chi Minh, avec la caution de l'inquiétant évêque de Phat-Diem, Mgr Lê Hüu Tü, qui se prenait pour le saint Remi des temps nouveaux "passant aux barbares", l'évêque fondateur d'un Vietnam "débarrassé du joug des affreux Français colonialistes".

          Cette déplorable désorientation des esprits, qui divisait les Chrétientés du Tonkin, d'Annam et de Cochinchine, était le fruit empoisonné du nouvel esprit missionnaire imposé par Benoît XV et de l'Action catholique de Pie XI, qui avaient voulu dissocier, à l'encontre de la tradition séculaire de l'Église, mission et colonisation. Pie XII lui-même suivait la doctrine de ses immédiats prédécesseurs. (…)

          À ce stade de la guerre, qui n'est pas encore officiellement déclarée, mais que Hô Chi Minh est décidé à mener, le chef vietminh a moralement vaincu la France car les piliers de la Chrétienté d'Indochine sont sapés: plus d'administration coloniale traditionnelle mais des "nouveaux Français" acquis à la libération des peuples, plus de missionnaires français pour rappeler les intérêts et la doctrine de l'Église mais un clergé autochtone qui aspire à l'indépendance nationale.

RECONNAISSANCE DE LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU VIETNAM

          À Paris, le drame indochinois était loin d'être la préoccupation essentielle du gouvernement. Le 20 janvier 1946, de Gaulle démissionnait à l'occasion d'une dispute autour de la Constitution et livrait ainsi la France au tripartisme, le parti communiste étant majoritaire.

          Thierry d'Argenlieu, ne recevant aucune instruction du gouvernement, resta alors figé sur la Déclaration du 24 mars prescrivant l'Union française. Pendant ce temps, Leclerc enrageait de ne pouvoir aller de l'avant, afin de libérer Hanoï et d'en finir avec cette Indochine qu'il n'aimait pas. Profitant d'une absence de son rival, il signa en février 1946 de sa propre initiative un accord avec l'armée chinoise. Puis, estimant qu'il ne pourrait débarquer au Tonkin qu'avec l'assentiment d'Hô Chi Minh, il le prit comme "interlocuteur valable" et conclut avec lui le 6 mars un nouvel accord: en échange d'un débarquement de nos troupes à Haiphong, la France reconnaissait la "République démocratique du Vietnam" et promettait de se retirer dans les cinq ans!

          Ce jour-là, Hô Chi Minh avait atteint l'un de ses principaux objectifs: la reconnaissance officielle de son propre gouvernement par la France républicaine, ce qu'aucun pays jusqu'alors n'avait encore fait, même pas l'URSS. C'était la légitimation a posteriori de sa révolte.

          À son retour, d'Argenlieu voulut orienter cet accord insensé dans la ligne de la "Déclaration du 24 mars". Il offrit le 25 mars à Hô Chi Minh une entrevue sur le croiseur Émile-Bertin en baie d'Along. Après avoir quitté son hôte, le chef du Vietminh confiait en aparté à Leclerc: "il a essayé de m'avoir, je l'aurai ! " Comprenant qu'il lui fallait agir maintenant depuis Paris, celui qu'on appelait "l'oncle Hô" accepta l'invitation de son vieil ami Marius Moutet, ministre socialiste de la France d'Outre-Mer et vieux militant anticolonial (!), afin de négocier directement avec le gouvernement français.

 Ho-chi-minh_France           Reçu en France avec tous les honneurs en juin 1946, il surveilla de près les travaux de la conférence réunie à Fontainebleau pour régler la question de l'Indochine. Nos missionnaires s'indignaient d'une telle confiance accordée au chef communiste. (…)
          La conférence de Fontainebleau fut un échec, bien que Moutet réussît à faire signer par le chef du Vietminh un modus vivendi qui laissait à ce dernier un certain répit. En Indochine, les plus lucides s'attendaient au pire. Le 19 décembre 1946, à 20 heures, Hanoï fut brusquement plongée dans l'obscurité. Bientôt, on entendit le crépitement des armes et des cris de personnes qu'on égorge. Cette nuit sanglante marquait le début officiel de la guerre d'Indochine…

L'INCAPACITÉ DU RÉGIME

          Grâce à l'armée française, le Vietminh échoua à prendre le pouvoir en décembre 1946, et se dispersa alors dans tout le pays, principalement dans les campagnes. Le Delta du Tonkin, correspondant au triangle Hanoï-Haïphong-Nam Dinh, était pour lui une source inépuisable de recrutement en hommes et d'approvisionnement en riz. C'était là aussi qu'étaient regroupées les missions catholiques les plus florissantes d'Indochine. Par leur organisation et leur grande force morale, ces missions constituaient un fer de lance puissant contre le communisme, à condition que le clergé le veuille… Hô Chi Minh décida de s'attaquer en priorité à elles. Quand elles seraient ralliées ou anéanties, le terrain serait libre.

          Le Père Seitz (1906-1984), surnommé le " Don Bosco" de la ville d'Hanoï, fonda en 1943 un centre d'accueil pour les enfants abandonnés qu'il plaça sous le patronage de sainte Thérèse. En 1945, les réquisitions japonaises et le blocus américain ayant provoqué une famine qui fit près de deux millions de victimes au Nord et au Centre Vietnam, les orphelins affluèrent par centaines à l'orphelinat du Père Seitz. Celui-ci révéla alors sa pleine mesure d'apôtre et d'organisateur. (…) Beaucoup de ces adolescents sans religion demandèrent le baptême. À plusieurs reprises, il fallut faire appel à l'Armée française pour protéger l'orphelinat (photo Archives MEP).
Abbe-Seitz

          Les années 1947, 1948 et 1949 furent marquées par trois tentatives successives du commandement français pour prendre l'avantage sur le Vietminh. "Cette entreprise aurait pu être couronnée de succès, écrit le général Navarre ,si une ligne politique nette avait été suivie, si la stabilité et l'unité de commandement avaient été assurées, et surtout si des moyens militaires suffisants avaient été mis en œuvre d'entrée de jeu. Aucune de ces conditions ne fut remplie, car l'atmosphère politique française s'y opposait absolument. Juridiquement, nous n'étions pas en guerre et les communistes, qui avaient dès lors pris fait et cause pour le Vietminh, étaient un parti de gouvernement, auquel il ne fallait faire nulle peine." (L'Agonie de l'Indochine, Plon, 1956, p. 17)

          1947. Le général Valluy commande en chef: forte personnalité, proche de ses hommes dont il est très aimé, il fait partie des officiers débarqués avec Leclerc. Il comprend dès les premiers mois qu'il faut "frapper à la tête", c'est-à-dire abattre Hô Chi Minh sans rien lui concéder. Il donne donc l'ordre à Salan, commandant les forces du Tonkin et excellent connaisseur du pays, de préparer un plan pour le mois d'octobre. Salan propose d'encercler les unités vietminh basées dans les montagnes du nord-est tonkinois et de les réduire en lançant sur elles des troupes aéroportées.

          Bollaërt, nouveau Haut-Commissaire, approuve ce plan, mais ce radical-socialiste inclinerait plutôt à négocier avec Hô Chi Minh. Sans même en informer Valluy, il se prépare à faire au Vietminh une proposition officielle d'indépendance! Averti à temps, le commandant en chef prend l'avion pour Paris, afin d'en référer au nouveau président de la République, Vincent Auriol. Comme d'habitude, une demi-mesure est adoptée par l'État : Bollaërt pourra prononcer son discours, dans lequel il invitera "toutes les familles politiques, spirituelles et sociales" à conclure une trêve et à s'entendre pour la construction d'un nouveau Vietnam; de leur côté, les militaires pourront monter leurs opérations, mais, dans le même temps "le gouvernement diminuait son effort militaire et ne proposait plus aucun objectif stratégique au corps expéditionnaire" (général Y. Gras, Histoire de la guerre d'Indochine, Plon, 1979, p. 213).
          Le résultat de ces opérations fut décevant. Hô Chi Minh réussit à se glisser hors du dispositif. C'était la première occasion perdue pour l'armée française.

          1948. En remplacement de Valluy et de Salan, désavoués pour s'être plaints au gouvernement du manque d'effectifs, le général Blaizot est nommé commandant en chef. Comme ses prédécesseurs, il considère que le nœud du problème se trouve au Tonkin.

          Une nouvelle opération est conçue, qui consiste à s'étendre vers l'ouest et au sud-ouest du Delta, de façon à couper les liaisons que le Vietminh entretient avec le sud du pays. Mais, à la veille du déclenchement des opérations, Bollaërt rentrant à Paris au terme de son mandat déclare au président Auriol : "Notre situation est excellente. Nous touchons au but si Bao-Daï rentre." Cette vantardise a pour conséquence que le lendemain même, Ramadier, ministre de la Défense, invite le commandant en chef à limiter les opérations, étant donné "notre excellente situation".

          Prétendre que la situation était excellente était un mensonge: ceux qui étaient sur place savaient que le Vietminh se montrait de jour en jour plus entreprenant. En conséquence de l'intervention ministérielle, les opérations "Ondine" et "Pégase" n'eurent aucune portée sur le Vietminh et se limitèrent à étendre notre contrôle sur le Delta. Deuxième occasion perdue de gagner la guerre.

          1949. Pendant ce temps, l'ennemi a réorganisé ses troupes et adopté une stratégie de guerre longue: guérilla dans les campagnes, harcèlement de nos troupes réparties en petits postes isolés. D'autre part, le commandement français sait que le temps presse, car en Chine, Mao Tsé Toung va bientôt l'emporter sur le nationaliste Tchang Kaï Chek ; si le communiste l'emporte, c'est lamasse chinoise qui déferlera au secours du Vietminh. Dans cette perspective peu réjouissante, le général Blaizot monte une opération, qu'on pourrait dire "de la dernière chance", pour le mois d'octobre 49.
          Mais trois événements la font avorter.

LES SCANDALES DE LA RÉPUBLIQUE

Bao-dai           Hô Chi Minh et Bao-Daï

          En politique d'abord: après l'échec des négociations avec Hô Chi Minh en 1946, la France s'était tournée vers l'ex-empereur Bao-Daï. Les négociations avec lui furent laborieuses, car ses exigences relatives à l'indépendance n'étaient pas moindres que celles du Vietminh ! Bao-Daï consentit néanmoins, en avril 1949, à prendre la tête d'un "État national du Vietnam", créé de toutes pièces, auquel nous reconnaissions la souveraineté politique et militaire, sans avoir cependant prononcé le mot d'indépendance. Toujours l'équivoque de l' "Union française" imaginée par de Gaulle.

          Pour mettre en œuvre cette politique, Auriol nomma au poste de Haut-Commissaire Léon Pignon, qui avait été le promoteur de la solution Bao-Daï dans l'entourage de Thierry d'Argenlieu. Pignon voulait offrir à Bao-Daï une Cochinchine pacifiée; il donna l'ordre au général Blaizot de reporter son effort militaire dans le Sud.

          Plus grave: on avait calculé que Mao ne l'emporterait qu'à la fin de l'année 49. Or, le 23 janvier 1949, Pékin tombait entre les mains des communistes qui, à marche forcée, foncèrent vers le Sud. On pouvait craindre désormais que la victoire de Mao ne galvanisât le Vietminh et lui permît de se former et de s'équiper sur le territoire chinois tout proche.

          Enfin, une mission d'inspection fut confiée au général Revers, chef d'état-major des armées, en vue d'une réorganisation de notre dispositif. Dans son rapport, Revers estimait que pour redresser la situation, il fallait reporter tout notre effort sur le Tonkin, mais en abandonnant la Haute Région (Cao-Bang, la RC 4), et en appuyant notre dispositif de défense sur le Delta.

          Ce rapport, reproduit en quelques exemplaires, aurait dû rester confidentiel. Or, voici qu'à Lyon, on découvrit dans la serviette d'un vietnamien le rapport du chef d'état-major général. Le scandale fut énorme. Ce fut le début de ce qu'on appela l' "affaire des généraux", ou "affaire des fuites". Une enquête pleine de rebondissements révéla que Revers avait confié un exemplaire de son rapport "confidentiel" à son ami le général Mast, ancien comploteur à Alger en novembre 1942 contre Vichy, lequel l'avait remis à un certain Peyré, trafiquant louche et franc-maçon notoire. Ce Peyré l'avait ensuite vendu à un Vietnamien en relation avec le délégué d'Hô Chi Minh à Paris.

          En toile de fond de toutes ces négligences et corruptions, il y avait l'argent. Depuis 1945, année de la surévaluation de la piastre par de Gaulle, - on se demande pour quelle raison -, Saïgon était devenue une sorte de no man's land financier. Petits malfrats et grands capitalistes français, américains, britanniques, et bien sûr vietminhs, y faisaient des affaires colossales: près de 250 % de plus-value sur les transactions ! Il est inutile de s'étendre sur ces scandales, mais les conséquences étaient là: Hô Chi Minh savait exactement ce que le commandement français envisageait pour la fin de l'année 1949 et pour 1950.

SUBVERSION DE L'OPINION FRANÇAISE

          (…) Les journaux communistes menaient le bal et influençaient les autres: socialistes, démocrates-chrétiens ou gaullistes. (…) Les Français cessaient d'être effrayés par un communisme qu'ils avaient pris l'habitude de côtoyer. Conséquence: nos soldats étaient systématiquement diffamés. L'Humanité rendait compte des "victoires" de l'armée démocratique du Vietnam. (…)

          Un certain Tran Noc Danh avait lancé la Revue du Vietnam, sorte de journal officiel du Vietminh, envoyé à tous les parlementaires et diffusé dans le monde entier, qui tenait ses lecteurs informés des défaites de la France, jamais de ses succès, ainsi que de l'évolution de l'opinion française en faveur de la paix.

          Témoignage chrétien n'était pas en reste. (…) Après les campagnes de presse, les communistes français en vinrent aux insultes directes, aux attaques de trains de blessés revenant d'Indochine et à des actes caractérisés de sabotage. (…)

          Un jour, au cours d'une perquisition, on découvrit des documents mettant gravement en cause des députés communistes, Duclos en particulier, qui avaient donné comme mot d'ordre: "Travailler pour la défaite de l'armée française au Vietnam, en Corée et en Tunisie." Pleven, alors ministre de la Défense nationale, demanda à l'Assemblée la levée de l'immunité parlementaire de ces députés, pour participation au crime de démoralisation de l'armée et de la nation prévu par l'article 79 du code pénal. Mais la Chambre entière, tous partis confondus et solidaires, refusa la levée de l'immunité.

L'ÂME DES DÉFENSEURS

 Le-pivain           Philippe Le Pivain, sergent au 9e tabor marocain (trois citations en Indochine). "Vous savez combien je déplore cette absence de foi qui nous assure à plus ou moins longue échéance une royale défaite. " (Photo familiale)

          Des livres ont été écrits sur cette trahison de l'arrière. Dans l'un d'eux, "Soldats de la boue", Roger Delpey écrit: "Il faut posséder une âme de fer pour ne pas renier une patrie qui sacrifie ses enfants après les avoir laissé insulter. Et pourtant, si la France survit demain au-delà des mers, ce sera grâce encore à une poignée de défenseurs…"

          Le sergent Yves Gignac, futur président des anciens sous-officiers d'Indochine, a décrit l'âme de ces défenseurs d'empire: "On ne dira jamais assez quelle fut la pauvreté, pire, la grande misère du corps expéditionnaire. On est bien loin du mercenaire et du trafic des piastres!… Cette armée de chevaliers a tenu. Mieux encore, elle a tenté l'impossible. En effet, très rapidement après les opérations de dégagement du début, on s'aperçut qu'il fallait non seulement tenir le terrain, mais conquérir la population. Ce fut toute la longue histoire de la "pacification" […]. Alors, là, se produit un autre miracle. Ce jeune soldat va tout naturellement retrouver la grande tradition de la France coloniale. Dans cette guerre de pacification où la conquête des âmes est plus importante que celle du terrain, le rôle du poste est essentiel. Car, par son action en profondeur, c'est lui qui doit nous rallier les villageois et, en renforçant notre influence, priver les rebelles de leur soutien naturel. C'est dans ce rôle tutélaire que nos garçons de vingt ans font des merveilles. Seuls, livrés à eux-mêmes, ils retrouvent la grandeur de leur mission et l'exercent avec un amour et une compréhension qui, le plus souvent, manquent à ceux qui dirigent la guerre." (…)

EN PREMIÈRE LIGNE

          La présence des aumôniers et des missionnaires donnait à tous ces sacrifices de nos soldats leur sens véritable. C'est leur œuvre qu'Hô Chi Minh voulait anéantir. Partout où elles passaient, ses bandes persécutaient les chrétiens, calomniaient, arrêtaient ou tuaient les missionnaires, les catéchistes. La plupart des missions gravirent un dur calvaire. (…)

          Ne se trouvait-il donc personne dans le clergé de France pour soutenir ces défenseurs de Chrétienté ? Si ! il y en avait un. L'abbé Georges de Nantes… (…)

          Ce combat était avant tout celui de la Sainte Vierge, qui monta "en ligne" elle aussi, au cours de l'été 1950. Débarquée à Haiphong le 9 juillet, la statue de Notre-Dame de Fatima, Reine de la Paix, "nu Vuong Hoa Binh " en vietnamien, parcourut tout le Delta, avant d'arriver le 15 août à Hanoï, où une procession fut organisée en son honneur. Dans la foule qui se pressait sur son passage, il n'y avait pas que des catholiques, mais on voyait aussi beaucoup de païens, attirés par les fastes de la cérémonie. Bien des membres du Corps expéditionnaire, militaires de tous grades, étaient disséminés dans la foule, les uns stupéfaits, les autres enthousiasmés de se retrouver en Chrétienté à des milliers de kilomètres de la mère patrie. Beaucoup d'entre eux découvraient ce jour-là cette jeune Église, œuvre des missionnaires, leurs compatriotes. (…)



Novembre 1954
Par M. Robert Charles PUIG

       Novembre 1954. Nous connaissons l'histoire... C'est une révolte, des meurtres d'innocents et une France non préparée à faire face aux attentats, aux crimes d'assassins.
       Que de temps s'est écoulé, que d'années depuis les drames, la tragédie qui reste présente aujourd'hui pour ceux qui connaissent l'histoire de la Saga pied-noire, qui sont nés sur cette terre assainie, cultivée, valorisée par des migrants venus du nord, de l'Europe il y avait 132 ans.

       Que reste-t-il de notre histoire ? Que reste-t-il de nos amours, dit la chanson ? Un mirage, un instant un faible instant où nous avons cru à la fin d'un cauchemar et comme à une résurrection, renaissance...

       C'était en 1958. Ce fut bref ! Déjà au-dessus du G.G. flottait la trahison de l'armée et du peuple et les attentats devinrent plus meurtriers. Le sang coula et les civils européens et musulmans subirent des enlèvements, des tortures et la mort, la mort affreuse des disparus sans sépulture. Juste une disparition sans une prière. Tout cela parce qu'un homme, à Paris, un général-président voulait la fin de l'Algérie française.
       Son objectif était notre FIN. Pour cette raison, il libera des prisons française des terroristes, laissa libre le FL "haine" de kidnapper et tuer des gens d'un peuple patriote, provoqua avec ses valets du Rocher noir le massacre du 26 mars et au nom de la "liberté des peuples à disposer d'eux-mêmes", sans broncher ni s'y opposer permit le massacre des oranais le 5 juillet 62.

       Nous sommes le 1er Novembre 2021. Qui se souvient ? Nous les Pieds-Noirs et seulement nous. Pour l'Etat et ses institutions, nous n'existons plus. Bien entendu, nous conservons vivante notre épopée algérienne et française à la fois mais elle gène une certaine élite, elle demeure interdite des médias de gauche dans leur propagande d'une nouvelle France où nous ne pouvons pas nous reconnaître.

       Depuis 2017 nous avons des élus de la République qui jouent l'indifférence sinon pire, le mépris ou la haine de ce temps qu'ils ne connaissent même pas.

       Depuis 2017 les propos du président sont une honte qui déshonneur la Nation. Il n'en est même pas conscient, enfermé dans son progressisme aveugle, l'étroitesse de son horizon et sa haine d'un temps qu'il na pas connu et dont il veut ignorer la grandeur, enfermé dans son idéologie progressiste qui veut nous perdre avec cette philosophie "Woke, venue des USA et qui cherche à réduire l'homme et les Nations à n'être rien. Juste un élément modulable qui faut changer, transformer, surtout s'il est blanc et occidental. Novembre 1954, le début d'une longue bataille...
       Novembre 2021, l'indifférence de professionnels de la politique qui vendront la France à l'Orient, après avoir perdu l'Algérie.

       Est-ce cela que le peuple français souhaite en 2022 ?
Robert Charles PUIG / novembre2021       
      


LA SAGESSE
Envoyé par M. J.P. Ferrer
           Actuellement, nous avons deux virus à éradiquer.
           Le premier " l'Amacron " pourra se faire par les urnes très bientôt.
           Le deuxième avec covid 19, " l'Omicron " pourra être combattu aussi avec de la sagesse comme le dit raisonnablement le docteur Henry.


           Le Dr Henry est l'agent de santé provincial de la Colombie-Britannique, la première femme dans cette position.
           Elle est également professeure agrégée à l'Université de la Colombie-Britannique. Elle a une formation en épidémiologie et est spécialiste de la santé publique et de la médecine préventive.
           La sagesse du Dr Bonnie Henry en 16 points :

           1. Il se peut que nous devions vivre avec le COVID-19 pendant des mois ou des années. Ne le nions pas et ne paniquons pas. Ne rendons pas nos vies inutiles. Apprenons à vivre avec.

           2. Vous ne pouvez pas détruire les virus COVID-19 qui ont pénétré les parois cellulaires, en buvant des litres d'eau chaude, vous irez tout simplement plus souvent aux toilettes.

           3. Se laver les mains et maintenir une distance physique de deux mètres est la meilleure méthode pour votre protection.

           4. Si vous n'avez pas de patient COVID-19 à la maison… il n'est pas nécessaire de désinfecter les surfaces de votre maison.

           5. Les marchandises emballées, les pompes à essence, les caddies et les guichets automatiques ne causent pas d'infection. Si vous vous lavez les mains, vivez votre vie comme d'habitude.

           6. Le COVID-19 n'est pas une infection alimentaire. Il est associé à des gouttes d'infection comme la "grippe". Il n'y a aucun risque démontré que le COVID-19 soit transmis par les aliments.

           7. Vous pouvez perdre votre odorat avec de nombreuses allergies et infections virales.
           Ce n'est qu'un symptôme non spécifique du COVID-19.

           8. Une fois à la maison, vous n'avez pas besoin de changer vos vêtements de toute urgence et d'aller vous doucher ! La pureté est une vertu, la paranoïa ne l'est pas !

           9. Le virus COVID-19 ne reste pas longtemps dans l'air. Il s'agit d'une infection respiratoire par gouttelettes qui nécessite un contact étroit.

           10. L'air est pur, vous pouvez vous promener dans les jardins et dans les parcs, mais juste en gardant votre distance de protection physique.

           11. Il suffit d'utiliser un savon normal contre COVID-19 et non un savon antibactérien . C'est un virus, pas une bactérie.

           12. Vous n'avez pas à vous soucier de vos achats de nourriture. Mais vous pouvez tout réchauffer au micro-ondes, si vous le souhaitez.

           13. Les chances de ramener le COVID-19 à la maison avec vos chaussures, c'est comme être frappé par la foudre deux fois par jour. J'ai travaillé contre les virus depuis 20 ans - les infections par goutte ne se propagent pas comme ça !

           14. Vous ne pouvez pas être protégé du virus en prenant du vinaigre, Ni du jus de canne à sucre, ni du gingembre etc…! Ce sont des produits pour l'immunité mais pas un remède.

           15. Le port d'un masque pendant de longues périodes interfère avec votre respiration et les niveaux d'oxygène. Portez-le uniquement dans les endroits où il y a de la foule.

           16. Le port de gants est également une mauvaise idée le virus peut s'accumuler dans le gant et être facilement transmis si vous touchez votre visage. Mieux vaut se laver les mains régulièrement.
           L'immunité est grandement affaiblie en restant toujours dans un environnement stérile. Même si vous mangez des aliments stimulant le système immunitaire, (vitamine D etc…) s'il vous plaît sortez de votre maison régulièrement à n'importe quel parc / plage.
           L'immunité est augmentée par L'EXPOSITION AUX PATHOGÈNES, pas en restant assis à la maison et en consommant des aliments frits / épicés / sucrés ou des boissons gazeuses.
Soyez intelligent et restez informé !
Vivez la vie raisonnablement et au maximum.
Soyez gentil, soyez calme et soyez prudent !
Sincèrement, Dr. Bonnie Henry



Michel Onfray :
sur la repentance compulsive
et chronique de Macron

(extraits) Envoyé par Mme A. Bouhier

           "Emmanuel Macron a la fâcheuse habitude de se mettre en position de soumission dans des pays étrangers qui furent jadis colonisés par la France.
           En Algérie, où c'est mettre de l'huile sur le feu, mais également en Côte d'Ivoire où il a récemment fait savoir que la colonisation était "une erreur profonde, une faute de la République".

           Or, si l'on veut vraiment examiner le passé de la France, il ne suffira pas de dire que le colonialisme fut "une erreur profonde", ou que Vichy fut "une erreur profonde" !
           On va devoir, en effet, reprendre tout de zéro et affirmer aussi que l'assassinat de Louis XVI, Marie-Antoinette et leur enfant de dix ans, organisé par les Jacobins, a constitué "une erreur profonde, une faute de la République".
           Il faudra également dire que la Terreur, avec ses quarante mille morts, a été "une erreur profonde", que le génocide vendéen, avec ses cent cinquante mille morts, a été "une erreur profonde", que les guerres de 14-18 avec leurs dix-huit millions de morts ont été "une erreur profonde".
           Ou bien que les Croisades, avec leurs trois millions de morts, ont été "une erreur profonde, une faute de la République monarchique…".
           Que les guerres napoléoniennes avec leurs trois millions de morts également, ont été "une erreur profonde, une faute de la République-impériale…".

           On n'en sortira plus car l'Histoire, cher Manu, y compris l'Histoire de France, est faite de bruit et de fureur, de sang et de larmes, de cadavres et de charniers, c'est comme ça depuis le début du monde et ce sera ainsi jusqu'à la disparition des hommes.
           Ne pas oublier que certes, les Blancs furent de fieffés méchants avec la traite négrière, mais que celle-ci fut inventée par des musulmans.

           Or, cette traite orientale a duré du VII° siècle, sous Mahomet (voir le Coran) jusqu'à 1920, soit pendant treize siècles, elle a concerné dix-sept millions de Noirs et un grand nombre de Blancs.
           La traite négrière occidentale a commencé au XV° siècle pour se terminer au XIX° - soit pendant quatre siècles, quatre fois moins longtemps.

           Il faudrait éviter de croire que les Arméniens et les Juifs sont les seuls génocidés de l'Histoire.
           Ce serait oublier que l'empereur mongol Gengis Khan a exterminé un cinquième de la population mondiale au XII°siècle.
           On lui doit, en effet,... quarante millions de morts ! Et Tamerlan, le chef de guerre musulman, dit aussi Timour le Boîteux, qui a tué vingt millions de personnes ? Ses troupes faisaient des pyramides de crânes pour terroriser ses ennemis : 70 000 à Ispahan, 90 000 à Bagdad, 100000 à Delhi. Sur ses ordres, 400 Arméniens ont été enterrés vivants en Anatolie.
           Et que dire de la conquête des Indes par les musulmans, qui a provoqué le massacre de l'Hindou Kush, soit quatre-vingts millions de morts sur plusieurs siècles ?

           Si l'on veut dire que le colonialisme français a été sanglant, on le peut. Mais, pour faire l'histoire de la guerre d'Algérie et non de l'idéologie, il faut dire aussi que :
           - sur les 150 000 combattants musulmans morts, 12 000 ont été tués par les musulmans eux-mêmes, à cause de leurs luttes internes.

           - 25 000 soldats français sont morts. - 70 000 harkis ont disparu, massacrés par leurs coreligionnaires. - 6 000 civils européens ont été rayés de la carte. - que les crimes de l'OAS ont engendré 100 morts.

           Or, un demi-siècle plus tard, l'heure n'est pas aux comptages, mais à la paix, SURTOUT PAS À L’HUILE SUR LE FEU VERSÉE PAR UN PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE QUI N'A AUCUNE NOTION DE L' HISTOIRE !

           La repentance est la maladie de l'ignorant qui méconnaît l'Histoire et ne pense qu'en termes de moralité - qui triomphe en fausse morale d'une époque sans morale.

           Le rôle d'un président de la République n'est pas d'exciter les citoyens, mais de les calmer, non pas de monter les peuples, les pays et les nations les uns contre les autres. Ce n'est pas d'opposer les Gilets jaunes ou les grévistes à une partie des Français, mais de pacifier les mécontents, de les tenir, de les retenir, de les empêcher de se lâcher.
           Il y a, pour cela, le langage diplomatique qui est l'instrument par excellence.
           Or, cet homme se tait quand il faudrait parler, et parle quand il devrait se taire. Il est à l'inverse de Jupiter !

           Ce jeune homme au sang vif met le feu partout où il passe. A croire qu'il ne cherche que ça, comme le pompier pyromane qui aspire à l'incendie afin de se présenter en soldat du feu dévoué ! (Aucune allusion à Notre-Dame de Paris. NDR)
           Pourquoi, sinon, demander au rappeur Vegedream qui avait écrit dans l'une de ses chansons "J'vais niquer des mères. J'vais tout casser… Sale pute, va niquer ta race !" … de l'accompagner en Côte d'Ivoire ? "

           Un président de la République constitue la délégation qui l'accompagne afin qu'elle soit représentative du pays qu'il incarne :
           Est-ce là le message culturel à faire passer à la Côte d'Ivoire ?
Michel Onfray


On est pas dupe mais il nous prend
vraiment pour des billes

Envoyé par M. Ventura
1962 - 2022 : paroles, paroles MAIS actes OUALOU !

         25 01 2022 Dans un communiqué publié ce mardi 25, la présidence de la République française a annoncé que « le président Emmanuel Macron va faire un geste mémoriel mercredi 26 janvier 2022, envers les rapatriés d'Algérie qui portera sur la fusillade de la rue d'Isly à Alger, dans laquelle des dizaines de partisans de l'Algérie française furent tués par l'armée en mars 1962 ».

        Cette version est également contestée par des parlementaires français, dont Eric Ciotti ou Valérie Boyer, qui présentèrent en 2019 une proposition de loi demandant "reconnaissance de la Nation des massacres de la rue d'Isly".

        "Sans sommation, à 14h50, la troupe du 4ème régiment de tirailleurs ouvrit le feu, s’acharnant sur ceux qui s'étaient jetés à terre afin de se protéger. La version officielle dira que des coups de feu avaient été tirés d'un toit vers les militaires. Mais ceux-ci, au lieu de riposter vers le toit où devrait se trouver le prétendu tireur, ont tiré à l’arme automatique dans la foule, frappant dans le dos des manifestants qui tentaient vainement de s'enfuir", pouvait-on lire dans leur exposé des motifs.

        "Il est grand temps aujourd'hui que l'Etat français rompe définitivement avec le silence et reconnaisse officiellement les crimes commis le 26 mars 1962 lors de cette manifestation pacifique", poursuivait l'exposé des motifs, en demandant "que l'ensemble des archives soit ouvert" et le massacre reconnu.
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        25 01 2022 Macron va faire un geste mémoriel envers les Pieds-Noirs ; Pierre Desorgues , AFP

        Macron va faire un geste mémoriel mercredi envers les rapatriés d'Algérie qui portera sur la fusillade de la rue d'Isly à Alger, dans laquelle des dizaines de partisans de l'Algérie française furent tués par l'armée en mars 1962.

        Le chef de l'Etat va porter "une parole de reconnaissance" lors d'une rencontre avec des associations de rapatriés d'Algérie, communément appelés les "Pieds-Noirs", à l'Elysée, a indiqué mardi la présidence française.

        "Un des points saillants du propos du président de la République tournera autour de ce qui s'est passé le 26 mars à Alger, rue d'Isly", a ajouté la présidence, sans plus de précisions.

        Une semaine après la signature des Accords d'Evian et le cessez-le-feu, le 19 mars 1962, en Algérie, des manifestants civils partisans de l'Algérie française qui tentaient de forcer le passage vers le quartier de Bab El-Oued, dans le centre d'Alger, étaient mitraillés à un barrage tenu par l'armée française.La fusillade qui dura plus d'un quart d'heure fit, selon différentes sources, au moins une cinquantaine de morts, tous civils, parmi les manifestants.

        Le 20 septembre 2021, le chef de l'Etat a demandé "pardon" aux harkis, supplétifs de l'armée française, qui furent "abandonnés" par la France. Un projet de loi, actant ce "pardon" et tentant de "réparer" les préjudices subis, est en cours d'examen en Parlement

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        NON Monsieur Emmanuel MACRON ce n’est pas l’Armée Française qui est responsable du massacre de la rue d’Isly à Alger le 26 mars 1962.
        Ce ne sont pas 14 soldats français mais bel et bien 14 anciens fellaghas, repentis ou ralliés qui ont été délibérément choisis par le pouvoir gaulliste pour leur passé de tueurs professionnels aguerris.

        Ces 14 assassins, qui étaient dans un état de frénésie sauvage et qui ont tiré pendant douze longues minutes sur des Algérois désarmés, avaient revêtu l’uniforme du 4ème Régiment de Tirailleurs.
        Le général GOUBART, commandant ce régiment a donné la liste nominative de la section du 4ème RT ayant ouvert le feu (F.D. page 487).
        La voici/



" Pétain et les juifs " :
Le rabbin Alain Michel, dont s'inspire Zemmour,
tranche la question

Publié par DREUZ INFO LE 20 OCTOBRE 2020
Envoyé par M. P. Barisain

        Le 12 mars 2020, le rabbin Alain Michel écrivait à Noémie Madar, présidente de l'UEJF, concernant la polémique née des propos d'Eric Zemmour sur Pétain, que nous republions.

         Préambule - Il est important de faire une distinction, selon nous, entre la dimension historique, c'est-à-dire la recherche historique sur un sujet qui ne fait pas consensus entre les historiens, et l'usage politique des propos émis par Zemmour sur Pétain. Si historiquement, Pétain a fait une distinction entre les juifs vivant en France, selon qu'ils furent français ou étrangers, l'amalgame politique consistant à innocenter la France, Pétain ou les Français qui ont collaboré, dénoncé les juifs à la police française et participé à leur déportation, est irrecevable. A ce titre, les propos de Zemmour, à supposer qu'ils soient un jour historiquement non-disputés, sont et seront toujours politiquement inacceptables, et Zemmour est fautif de ne pas le relever. - Jean-Patrick Grumberg.

         Chère Madame, c'est bien sûr en tant qu'ancien membre de l'UEJF dans les années 1970, ainsi qu'ancien proche du Rabbin Léon Askenazi, Manitou, président de l'UEJF au début des années cinquante, et dont j'ai dirigé le centre d'études à Jérusalem pendant 4 ans, que je vous écris.

         Mais c'est surtout en tant qu'historien, spécialiste de la Shoah, ainsi qu'amoureux de la vérité et de la liberté. Je viens d'apprendre que vous avez attaqué en justice le journaliste Eric Zemmour pour avoir affirmé que le gouvernement du Maréchal Pétain avait sauvé les Juifs français.

         Cette décision de l'UEJF est doublement scandaleuse :
        1. Même si les propos d'Eric Zemmour étaient erronés, ce qu'ils ne sont pas, en quoi cette affirmation est-elle une négation de la Shoah ? Eric Zemmour a-t-il dit que des Juifs qui habitaient en France n'avaient pas été déportés et n'avaient pas été gazés à Auschwitz ? Pas du tout. J'ai attentivement écouté l'émission de CNEWS, et il a même parlé de "l'extermination et des camps nazis", ce qui paraît étrange pour qui est accusé de négation de crime contre l'humanité par l'UEJF.

         En réalité, l'UEJF a une attitude liberticide qui consiste, en détournant une loi anti-négationniste, d'interdire tout débat historique et d'imposer une vérité historique concernant une question importante, l'attitude de Vichy vis-à-vis des Juifs, mais question qui n'a rien à voir avec la réalité de l'existence de la Shoah.

         Lorsque dans les années 1970, l'historien israélien Yéhuda Bauer a affirmé que le nombre de victimes au camp d'Auschwitz-Birkenau était beaucoup moins important que les 4 millions qui étaient affirmés à l'époque, de nombreux historiens ou encore porteurs de mémoire, notamment au Mémorial de la Shoah à Paris, se sont levés pour dénoncer les propos de Bauer qui réduisaient soi-disant l'importance de la Shoah.

         Tout le monde sait très bien aujourd'hui qu'il y a eu au plus un million 200.000 victimes à Auschwitz-Birkenau. Si la loi Gayssot avait existé à l'époque, l'UEJF aurait-elle traînée le Professeur Bauer devant les tribunaux ? Voilà pourquoi, au nom de la défense de la liberté, il faut dénoncer la démarche de l'UEJF.

         2. Dans son livre "Le Suicide français*", Eric Zemmour, affirmait que Pétain avait sauvé les Juifs français.
        Remarquons tout d'abord que l'UEJF, qui faisait déjà du confusionnisme en étendant la loi contre le négationnisme à toute forme de débat historique, en remet une couche, puisqu'il semble qu'elle reproche dans sa plainte au journaliste d'avoir "réaffirmé sa théorie selon laquelle Pétain aurait sauvé les Juifs de France". Or ce n'est pas ce qu'affirme Eric Zemmour et j'ai noté dans le débat sur CNEWS que celui-ci a tout de suite précisé "les Juifs français", et non les Juifs étrangers qui étaient alors en France.

         On peut être choqué par l'affirmation de cette différence, mais c'était la décision du Vichy de 1940, pas celle des commentateurs et historiens de 2020.

         Dans son livre, Zemmour résume mon propre ouvrage "Vichy et la Shoah*" sur deux pages et dès la première présentation de son livre, dans l'émission "on n'est pas couché", le journaliste s'était "défendu" face aux attaques de la journaliste Léa Salamé en se plaçant sous mon "autorité" d'historien qui, par ailleurs, a travaillé avec Yad Vashem depuis 1987, et avec la Marche des Vivants depuis 1990 (et même avec l'UEJF jusqu'à la parution de mon livre).

         Si affirmer que le gouvernement de Vichy (c'est plus exact que Pétain) a protégé les Juifs citoyens français, en en sauvant ainsi un grand nombre, est une affirmation négationniste, je demande donc à l'UEJF de bien vouloir également me traîner devant les tribunaux, ainsi que d'autres historiens français actuels, comme le professeur Antoine Prost ou le professeur Jean-Jacques Berlière, et que l'UEJF demande également que l'on brûle les ouvrages de Léon Poliakov, qui affirmait la même chose dans le "Bréviaire de la haine*" dès 1951, ou encore ceux de l'Historien américain Raul Hillberg, qui écrivait la même chose dès le début des années soixante. Si l'UEJF agit comme l'inquisition, qu'elle le fasse jusqu'au bout.

         Au nom de la défense du libre débat sur la vérité historique, il faut dénoncer la démarche de l'UEJF.
Les palais de justice ne sont pas les lieux
où l'on peut trancher de la vérité historique
et de sa complexité

        Avec tout le respect que j'ai pour les tribunaux, français ou autres, les palais de justice ne sont pas les lieux où l'on peut trancher de la vérité historique et de sa complexité.

        Les magistrats ne sont pas formés pour cela, et ils n'en ont pas la compétence professionnelle. Le jour où l'Union des Etudiants juifs de France le comprendra, elle pourra peut-être commencer à admettre qu'on ne peut à la fois combattre pour la démocratie et la liberté, et en même temps refuser le débat sur l'histoire et la mémoire.
© Alain Michel - Dreuz

         Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Alain Michel - Dreuz pour Dreuz.info.
         https://www.dreuz.info/2021/10/petain-et-les-juifs- le-rabbin-alain-michel-soutient-zemmour-et-attaque-luejf-208571.html



Lettre d'information - Janvier 2022
www.asafrance.fr
Envoi de l'ASAF 15 janvier 2022
« En 2022, aimons la France !»


       Alors que dans quelques mois, chaque citoyen français va se déterminer quant au choix du futur président de la République, il est un point qui peut nous rassembler tous : c’est l’amour de notre pays, la France.

       On ne sait pas fixer la date de naissance de la France, ainsi on peut la qualifier d’éternelle. Son ancêtre, la Gaule romaine, s’est émancipée dans la brume glacée de la chute de l’Empire romain. Les temps étaient obscurs, les chemins incertains. Puis, ont suivi des heures terribles où l’Europe, qui d’ailleurs se confondait alors avec la chrétienté, a vu naître un petit royaume qui, après des siècles de patiente édification, de tumultes guerriers, de tractations de palais est devenu la France. Au cours du Moyen Âge, les territoires qui devaient la constituer ne se formèrent que lentement. Ce n’est qu’au début du XIVe siècle que l’on parle, pour la première fois, de nation de France, même si Philippe Auguste, fort de sa victoire de Bouvines, a pu légitimement revendiquer le titre de roi des Francs, c'est-à-dire des Français, et c’est surtout au cours de la Guerre de Cent Ans que se forge le sentiment national français que Jeanne d’Arc a su si bien exprimer. Ce territoire de France, à la forme hexagonale, mais que longtemps après Vauban, son génial défenseur et l’inventeur de la formule, on qualifiera paradoxalement encore de pré carré, est « aimable » par sa géographie. La France a le tempérament tempétueux de la Méditerranée, la robustesse de ses massifs montagneux, le calme de ses volcans endormis, la langueur de l’Atlantique. Elle a acquis aussi, dans un passé plus récent, des départements et collectivités d’Outre-mer qui lui ont offert la calme beauté du Pacifique, celle colorée des Antilles et de l’océan Indien ou encore les panoramas sauvages des territoires glacés de l’Atlantique Nord.

       La France a conquis sa place aux yeux du Monde par les armes, par ses discours, par sa science, par sa culture et même par sa gastronomie. Pour servir ces différents domaines, elle a vu jaillir de son peuple des hommes d’exception - souverains, chefs d’État, grands soldats, savants, penseurs, philosophes, poètes, écrivains, artistes - qui tous ont exprimé, à travers le regard qu’ils portaient sur elle, l’idée qu’ils s’en faisaient. Ce furent Clovis, Saint-Louis, Napoléon ou encore Turenne, Foch et Leclerc, mais aussi Lavoisier, Buffon et Pasteur sans oublier Diderot, Condorcet, Baudelaire, Verlaine, Zola, Hugo, Delacroix et les frères Lumière. Ce furent aussi des femmes de même facture comme Jeanne d’Arc, Olympe de Gouges, Louise Michel, George Sand, Sophie Germain, Marie Curie, Irène Joliot-Curie, Charlotte Delbo, Simone Weil, Germaine Tillon ou Geneviève de Gaulle-Anthonioz.

       Cette profusion d’intelligence, de talents et de courage aussi ne constitue pas une diversité, mais, au contraire, une unité. Chacun de ces éminents personnages était particulier, mais la France ne bâillonne pas les particularismes ; en France, au contraire, chacun d’entre eux a sa place, mais, en revanche, la France ne saurait céder sa place à aucun. En France, les Français veulent pouvoir reconnaître partout la France !

       Nombre de ces intelligences et de ces talents ont su décrire aussi les blessures de la France. Ils savaient que les taire aurait été pire que de les dire. La véritable grandeur de la France, c’est de dire aussi ses plaies et ses erreurs pour les inscrire dans l’universel humain. D’aucuns, aujourd’hui, se complaisent dans la repentance au prétexte que la France a colonisé, a pratiqué l’esclavage, a collaboré avec le régime nazi. On parle alors des heures sombres de notre Histoire. En vérité, ce furent là les conséquences d’humaines décisions, de chemins tortueux empruntés ou de directions prises jugées mauvaises aujourd’hui dans un contexte radicalement différent. Et c’est parce que son Histoire est pleinement humaine que la France ne doit pas en rougir. Elle est riche de conquêtes, de fêtes, de douleurs, de famines, de festins et de chansons. Elle est l’une des plus belles, des plus riches histoires qui soient.

       Il y a donc mille façons de dessiner les contours de la France puisque l’on peut se référer aux hommes, à la langue, à la religion, aux fleuves et aux rivières, aux montagnes et aux collines, aux pâturages et aux vignobles, aux châteaux, aux églises, à toutes les vieilles pierres qui témoignent de l’œuvre et, souvent, du génie de nos pères, bref, à tout ce qui constitue l’Histoire de notre pays. Une Histoire qui, soit dit en passant, est une. On ne peut la découper en rondelles ; il faut la prendre tout entière ou la laisser. C’est Marc Bloch qui disait[1] : « Il est deux catégories de Français qui ne comprendront jamais l’histoire de France : ceux qui refusent de vibrer au souvenir du sacre de Reims ; ceux qui lisent sans émotion le récit de la fête de la Fédération.»

       Il faut aimer la France parce que, précisément, son histoire collective en fait un lieu de cœur, un lieu de partage d’un présent et d’un projet d’un futur, symbole d’une identité ancienne, transmise par la langue, le folklore, la gastronomie. « On aime la maison qu’on a bâtie et qu’on transmet » dit Ernest Renan[2]. C’est notre Patrie.

       Aimer la France c’est avant tout un acte de foi. Foi en l’humanité, foi en la civilisation. Foi en un destin commun et en une vocation particulière. C’est aussi un acte de tolérance : tolérance envers ses différentes communautés humaines, philosophiques, religieuses ou culturelles.

       Qui aime la France ne peut la trahir. Aujourd’hui les citoyens français amoureux de ce si beau pays doivent prendre garde à se doter d’élites qui ne trahiront jamais la France.

       [1] En 1940, dans son livre L’Étrange Défaite.
       [2]Lors d’une conférence prononcée à la Sorbonne le 11 mars 1882 et intitulée : Qu’est-ce qu’une Nation ?



INFOS DIVERSES
Mgr Jean-Paul Vesco, nommé archevêque d’Alger
Envoyé Par Mme. Nicole Marquet
        
         Dominicain, successeur de Pierre Claverie, Mgr Vesco était évêque d’Oran depuis 2012.
         Nommé par le pape François, cet ancien avocat succède à Mgr Paul Desfarges, touché par la limite d’âge.
         La Croix, 29 décembre 2021

         https://www.la-croix.com/JournalV2/Mgr-Jean-Paul-Vesco -nomme-archeveque-dAlger-2021-12-29-1101192192

         Ce lundi 27 décembre, le pape François a nommé Mgr Jean-Paul Vesco archevêque métropolite d’Alger. Il succède à Mgr Paul Desfarges, qui y siégeait depuis 2016. À 77 ans, celui-ci est touché par la limite d’âge. C’est ainsi un dominicain qui succède à un jésuite, dans le plus important des quatre diocèses d’Algérie. Un nouvel archevêque avec la fraternité pour programme : « Cette fraternité choisie ne se construit pas seul, elle nous appelle tous à un dépassement de nous-mêmes. »

         L’Église d’Alger compte 31 prêtres et une cinquantaine de religieuses et religieux. Elle se veut inscrite dans la société civile pour « faire route avec le monde », rappelle Mgr Vesco. Autant de pistes d’une « Église confessante et non prosélyte » développées dans sa lettre pastorale adressée au diocèse d’Oran en mai.

         Né le 10 mars 1962 à Lyon, cet ancien avocat d’affaires est entré chez les dominicains en 1995. Un lien indéfectible à l’Algérie a marqué sa vocation. Ordonné prêtre en 2001 dans l’ordre des prêcheurs, il passe par l’École biblique de Jérusalem, avant d’être envoyé à Tlemcen, en Algérie. « Notre raison d’être dans ce pays, c’est de nous enraciner », déclarait-il à l’époque. C’est aussi le signe d’une présence dominicaine dans le diocèse d’Oran, qui fut dirigé par Mgr Pierre Claverie, dominicain assassiné le 1er août 1996. Nommé vicaire général du diocèse en 2005 au côté de Mgr Alphonse Georger, évêque d’Oran, Jean-Paul Vesco quitte l’Algérie en 2010, étant élu prieur provincial des dominicains de France. Une responsabilité qu’il exerce peu de temps, étant nommé en décembre 2012 évêque d’Oran par le pape Benoît XVI.

         Mgr Vesco a notamment été la cheville ouvrière de la cérémonie de béatification à Oran en 2018 des 19 martyrs d’Algérie, religieux et religieuses assassinés durant les années noires, parmi lesquels les sept moines de Tibhirine et Mgr Claverie. Simple et chaleureux, homme d’écoute et de dialogue, il a publié en 2015 un livre intitulé Tout amour est indissoluble. Plaidoyer pour les divorcés remariés (Éd. du Cerf). Le pape François l’avait invité à participer au Synode sur la famille en 2015. Il sera installé en la cathédrale d’Alger le 11 février 2022 et restera administrateur apostolique du diocèse d’Oran jusqu’à la nomination de son successeur.
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NOMINATION
Envoyé Par M. Daniel Bonicori

        
         Le 15 janvier 2022, sous les auspices d'Alphonse Juin, en tout cas place d'Italie à Paris au pied de sa statue et devant le monument commémoratif honteusement vandalisé trois ans auparavant presque jour pour jour, et depuis restauré, le Contrôleur général des armées Jean Tenneroni a reçu de son camarade le Contrôleur général des armées Daniel Bonocori les insignes d'Officier de la Légion d'Honneur.

         Tous deux étant Bônois comme l'illustre Maréchal de France. C'est d'ailleurs sous sa conduite du Corps expéditionnaire français en Italie que le père de Jean Tenneroni (Jean Tenneroni du 3e Régiment de tirailleurs algériens) et l'Oncle de Daniel Bonocori (Charles Marino Costaglioli du 67e Régiment d'artillerie d'Afrique, mort pour la France à Monte Cassino ) participèrent en mai 1944 à la victoire déterminante du Garigliano qui permit de percer la ligne Gustav et de libérer Rome.

         Alphonse Juin était aussi un compagnon d'armes (campagne du Rif 1925) et un ami du grand-père de Jean Tenneroni, le commandant Léon Tenneroni.
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2 PHOTOS DE CLASSE
Envoyé Par M. SCHEMBRI Henri

ECOLE ORANGERIE 51/52 et 52/53



Pour nos chers Amis Décédés
Nos Sincères condoléances à leur Familles et Amis


Envoyé par Mme Danielle Alary
Décès de Fabien ALARY

ADIEU à un AMI


"Chers(es) amis (es),

        Fabien ALARY, né le 06/02/1942 à Bône (algerie) est décédé le 1er janvier 2022, à la clinique du cap d'or, et incinéré le 10 janvier 2022 au crématorium de la Seyne sur mer.... Pour avis à sa famille que je n'ai pas pu contacter (Sportiello - Boyer - Boldireff - Bergeret - Teuma) -
        Notre fille Bénédicte s'est beaucoup occupée de lui les derniers temps, son cœur a laché. Il avait beaucoup aimé son petit cabanon plage TOCHE et avait reporté son amour de la mer dans une petite île de l'océan Indien aux Seychelles (la Digue) où il allait souvent avant son AVC.
        Il était beaucoup dans la spiritualité et la musique, la musique, et l'humour il faisait toujours des jeux de mots, des contrepeteries, et il faisait rire tout le monde, cela avant sa maladie.
        Un hommage musical lui a été rendu au crématorium "un sega" et nous avons tapé des mains... Le séga est une fusion ou un mélange de plusieurs peuples, esclaves ou migrants venus vers les îles Mascareignes et l'Océan Indien.
        Fabien était technicien informatique à la DCAN toulon - maintenant DCN (Direction Construction Armes Navales)...
        Nous n'étions pas nombreux - mes sœurs et mon frére venu de bordeaux - 10 personnes.
        - Danielle Béna-Alary

        Sincères condoléances à sa Famille
              J.P.B.



LIVRE D'OR de 1914-1918
des BÔNOIS et ALENTOURS

Par J.C. Stella et J.P. Bartolini


                            Tous les morts de 1914-1918 enregistrés sur le Département de Bône méritaient un hommage qui nous avait été demandé et avec Jean Claude Stella nous l'avons mis en oeuvre.
             Jean Claude a effectué toutes les recherches et il continu. J'ai crée les pages nécessaires pour les villes ci-dessous et je viens de faire des mises à jour et d'ajouter Oued-Zenati, des pages qui seront complétées plus tard par les tous actes d'état civil que nous pourrons obtenir.
             Vous, Lecteurs et Amis, vous pouvez nous aider. En effet, vous verrez que quelques fiches sont agrémentées de photos, et si par hasard vous avez des photos de ces morts ou de leurs tombes, nous serions heureux de pouvoir les insérer.

             De même si vous habitez près de Nécropoles où sont enterrés nos morts et si vous avez la possibilité de vous y rendre pour photographier des tombes concernées ou des ossuaires, nous vous en serons très reconnaissant.

             Ce travail fait pour Bône, Aïn-Mokra, Bugeaud, Clauzel, Duvivier, Duzerville, Guelaat-Bou-Sba, Guelma, Helliopolis, Herbillon, Kellermann, Millesimo, Mondovi, Morris, Nechmeya, Oued-Zenati, Penthièvre, Petit et Randon, va être fait pour d'autres communes de la région de Bône.
POUR VISITER le "LIVRE D'OR des BÔNOIS de 1914-1918" et ceux des villages alentours :

    
CLIQUER sur ces adresses : Pour Bône:
http://www.livredor-bonois.net

             Le site officiel de l'Etat a été d'une très grande utilité et nous en remercions ceux qui l'entretiennent ainsi que le ministère des Anciens Combattants qui m'a octroyé la licence parce que le site est à but non lucratif et n'est lié à aucun organisme lucratif, seule la mémoire compte :
http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr
                         J.C. Stella et J.P.Bartolini.
 

NOUVELLES de LÁ-BAS
Envois divers


Terres agricoles

Envoyé par Ella
http://www.lestrepublicain.com/index.php/annaba/item/9033042 -des-autorisations-d-exploitation-accordees-a-berrahal


Est Républicain / B.Salah-Eddine par 16 Jan 2022

Des autorisations d’exploitation accordées à Berrahal

         Apparemment, la directive du Premier ministère instruisant les responsables locaux de l’impérative nécessité de préserver les terres agricoles et les domaines forestiers ne semble pas concerner les terres agricoles de la wilaya d’Annaba.
         En effet, selon des sources dignes de foi, des facilités ont été accordées au profit des personnalités ayant roue libre sur rue, dans la commune de Berrahal, pour le lancement de leurs activités sur des terres agricoles.
         Bénéficiant de fortes capacités d’irrigation, ces terres sont classées, puisqu’elles présentent des potentialités agricoles élevées. Pire, les installations qui devaient être mis en service sur ces terres ne possèdent, ni les permis, encore moins les conformités, requises par l’administration. «Il s’agit de l’octroi d’autorisations d’exploitation pour des projets, qualifiés de polluants et dont les activités n’ont aucun lien avec l’agriculture.
         Même le périmètre du Lac Fetzara, pourtant protégé, car classé zone « RAMSAR », a été violé, à l’occasion » dénoncent nos sources. La classification, en 2006, de ce site naturel est intervenue, à l’issue des visites sur ce site, effectuées il y a quelques années par des experts en la matière et qui ont jugé cette étendue d’eau naturelle « d'excellent site d'accueil, en période hivernale, d'une avifaune nicheuse composée souvent d'espèces rares et protégés ».
         Ce plan d’eau, est une zone de transhumance et de refuge d’oiseaux migrateurs. Selon une récente étude, plus de 100.000 oiseaux voyageurs, dont 65.000 de différentes espèces, avaient été recensés sur les lieux durant la période de niche.
         Le comble, il s’agit des terrains qui devaient donc être exclues de tout déclassement au profit des investisseurs, et ce, pour quelque projet que ce soit.

         Faut-il rappeler que la commission de l’agriculture de l’APC d’oued-El-Aneb avait, il y a quelques mois seulement, rejeté dans le fond et dans la forme des demandes de déclassement de ces terrains, au profit de plusieurs particuliers, estimant que « ce genre de projets ne devraien pas être implantés dans ces zones à hauts rendements agricoles et ne faire même pas l’objet d’une enquête ».
         Complicité aidant, les dépassements à la réglementation régissant les terres agricoles sont constatés non seulement à Berrahal, mais aussi à travers pratiquement toutes les communes de la wilaya d’Annaba. Mieux encore, des opérateurs économiques ont tenu à dénoncer la politique de deux poids deux mesures en matière d’octroi de permis de construire.

         Alors comment peut-on accorder des autorisations d’exploitation à certains sans permis de construire, ni conformité, d’une part et de l’autre procéder à la démolition de bâtisses dotées déjà de permis et dont des permis modificatifs sont déposés ?Aujourd’hui, des voix s’élèvent pour dénoncer et attirer l’attention des plus hautes autorités du pays, pour qu’ils mettent un terme à une situation aux conséquences désastreuses, qui menace des terres des plus fertiles de la wilaya d’Annaba.
B.Salah-Eddine           


Gare maritime de Annaba

Envoyé par Arnaud
https://www.elwatan.com/regions/est/annaba/ reception-de-la-nouvelle-gare-maritime-de- annaba-en-janvier-2022-17-10-2021

elwatan.com - Par MOHAMED FAWZI GAIDI 17 OCTOBRE 2021

Réception de la nouvelle gare maritime de Annaba en janvier 2022

          Dans trois mois, au plus tard, la nouvelle gare maritime de Annaba sera réceptionnée. Actuellement, le taux d’avancement des travaux est de 94%.

          C’est ce qu’a annoncé Mohamed Khaireddine Boumendjel, président-directeur général de l’entreprise portuaire EPAn, lors d’un point presse tenu récemment au siège de la direction. «Nous avons reçu la passerelle amovible, il y a un mois, qui va relier le navire à la gare maritime. Composé de deux étages, l’espace réservé au traitement des passages est finalisé à 100%. Quant à la partie dédiée au commerce, elle sera exploitée par la Société d’investissement hôtelier (SIH) dans le cadre d’un accord d’exploitation par concession, signé avec l’entreprise portuaire de Annaba», a affirmé le même responsable.
MOHAMED FAWZI GAIDI                  

          

          


Antique Basilique d’Hippone

Envoyé par Julien
https://www.elwatan.com/regions/est/annaba/il-sera-accompagne -du-premier-ministre-aimene-benabderrahmane-le-president-italien-a-lantique -basilique-dhippone-le-president-italien-a-lantique-basilique-dhippon-04-11-2021


 elwatan.com - Par : MOHAMED FAWZI GAIDI 04 NOVEMBRE 2021


           Il sera accompagné du premier ministre Aïmene Benabderrahmane : Le Président italien à l’antique Basilique d’Hippone

           C’est le branle-bas de combat au sein de la Basilique Saint-Augustin tout autant qu’au niveau de la wilaya de Annaba. Même M. Giovanni Puglies, l’ambassadeur de l’Italie en Algérie, est depuis hier à Annaba pour préparer la visite, samedi prochain, du président italien, Sergio Mattarella, qui sera accompagné du Premier ministre, Aïmene Benabderrahmane, à ce lieu de culte chrétien.

           Si l’actuel programme est maintenu, Kurian Mathew Vayalunkal, l’ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire du Vatican en Algérie, animera, à titre de nonce apostolique, une messe à laquelle prendra part le président italien. La communauté chrétienne nationale et internationale, notamment latine, s’attend à une importante déclaration.

           Selon des indiscrétions, le président italien pourrait annoncer la restauration d’«Hippone», la basilique antique où officiait, effectivement, Augustin d’Hippone. En effet, il a longtemps été établi que Saint Augustin avait vécu et priait au sein de l’actuelle basilique, rénovée et rouverte en octobre 2013 après plus de deux ans de travaux, dont l’enveloppe avait coûté cinq millions d’euros. Selon le père Abdellah Raphaël, l’un des anciens recteurs de Lalla Bouna, «l’idée de construire une basilique et de la dédier à ce saint homme remonte au temps colonial, vers 1848, lorsque l’une de ses reliques sacrées (le cubitus droit) fut transférée d’Italie par le premier évêque d’Alger».

           Le lieu retenu était le sommet de la colline, pensant que Saint Augustin y avait fait édifier son monastère. Ce qui avait motivé la communauté à engager des fouilles archéologiques. Opérées au pied de cette colline, celles-ci avaient pu mettre au jour les traces d’une vaste basilique. Certains indices avaient permis de penser que l’on se trouvait bien en présence de la «Basilica Pacis» (Basilique de la paix), dans laquelle avait réellement vécu Saint Augustin. Quarante ans après sa conception, soit en 1881, le projet avait finalement été concrétisé. Cinq années plus tard, la première messe y avait été organisée. Et c’est en 1909 que la basilique avait été totalement achevée et dédiée à la mémoire du «saint des saints». Berbère par sa mère, Sainte Monique, Saint Augustin est l’un des théologiens les plus influents du christianisme : un des quatre pères de l’Eglise latine.

           En effet, c’est sur ce site que fut posée la première pierre de l’église Saint Augustin, des siècles avant l’édification de l’actuelle basilique éponyme. Et c’est justement le côté latin du philosophe et théologien chrétien romain qui pourrait influencer M. Sergio Mattarella, le président italien, à l’effet d’engager une opération de rénovation des vestiges de cette vieille église dont les pierres romaines sont toujours visibles.
MOHAMED FAWZI GAIDI                      


Ces blés algériens convoités par les étrangers

Envoyé par Romeo
https://www.tsa-algerie.dz/ces-bles-algeriens-convoites- par-les-etrangers/#:~:text=Le%20Biskri%2C%20cette%20vari%C3% A9t%C3%A9%20de,productives%2C%20mais%20aussi%20plus%20fragiles.

Par TSA - Par: Djamel Belaid 20 Janv. 2022


           « Si seulement j’avais une poignée de semences de Biskri, je pourrais faire des merveilles« , confie à TSA un agriculteur dans l’Est algérien.

           Le Biskri, cette variété de blé dur très présente dans les années 1970 et aujourd’hui remplacée par les Waha, Vitron, GTA d’origine étrangère, certes plus productives, mais aussi plus fragiles. La création récente d’une banque nationale de gènes devrait permettre de veiller sur les espèces locales aujourd’hui objet de convoitises européennes.

           Réchauffement climatique, l’enjeu des blés sahariens
           Avec la menace du réchauffement climatique, les blés sahariens algériens font l’objet d’un intérêt grandissant de la part des généticiens européens.

           Ces blés sont adaptés aux conditions extrêmes. Leurs gènes de résistance à la sécheresse pourraient être introduits par croisement dans les variétés cultivées par les pays de l’hémisphère nord.
           Des experts s’inquiètent même du risque de disparition de ce matériel unique. Dans la 25e édition du rapport du Déméter, un think tank consacré aux affaires agricoles, ces experts lancent un appel à « la création d’un consortium« .
           Celui-ci pourrait regrouper « des institutions agronomiques nationales de pays sahariens en charge de sélection variétale de blé tendre et de blé dur, ainsi que des expertises complémentaires apportées par des organisations publiques et privées« .

           Relance du projet de banque de gènes
           Fin octobre, lors d’une visite de terrain, le ministre de l’Agriculture et du Développement durable a confirmé la relance du projet de banque nationale de gènes en Algérie qui est à l’arrêt depuis 2007. Il a indiqué que ce programme avait reçu le soutien du Premier ministre et qu’il visait à la conservation des espèces animales et végétales locales.
           La banque de gènes devrait être rapidement opérationnelle et notamment permettre le rapatriement d’exemplaires d’espèces algériennes actuellement répertoriées dans des banques à l’étranger.

           Dans la communauté scientifique, l’échange de matériel génétique est courant. Les stations de recherche de l’Institut technique des grandes cultures (ITGC) reçoivent régulièrement des échantillons de variétés nouvelles de blé, de pois chiche ou de lentilles qu’envoient les organismes internationaux de recherche auxquels adhère l’Algérie.
           À cette occasion, le ministre a rappelé l’importance de posséder une banque de gènes pour contribuer à plus de sécurité alimentaire. À part la pomme de terre, en matière de maraîchage, l’agriculture locale utilise dans sa presque totalité des semences importées.

           L’Algérie, zone de diversification des blés
           L’Algérie est une zone de diversification des blés. Au cours du temps, les plantes sont l’objet de mutations génétiques. Seules les mutations leur conférant un avantage adaptatif survivent.
           La nature aurait ainsi « sélectionné en quelque sorte ses propres OGM pour disposer de plantes résistantes à des conditions extrêmes« , comme l’explique un expert.
           Se maintiennent également les plantes présentant des mutations intéressantes. C’est par exemple le cas de la clémentine apparue naturellement en Oranie dans un verger de mandarine et aujourd’hui cultivée dans de nombreux pays.
           De par la diversité de ses terroirs, l’Algérie dispose de nombreuses variétés apparues au cours des temps. C’est le cas des célèbres blés Oued Zenati, Biskri, Bidi, des olives Chemlal, Sigoise ou des figues de Mahouche aujourd’hui labellisées. C’est également le cas avec les races animales dont le mouton Ouled Djellal.

           Des espèces algériennes cultivées en Australie
           L’Algérie est également riche en variétés de fourrages de type médicago, ce qui n’est pas le cas de l’Australie. Aussi, il y a une cinquantaine d’années, quand les agronomes australiens ont cherché des espèces fourragères pour leur élevage de moutons, ce sont des espèces originaires d’Algérie qu’ils ont sélectionné.
           Et quand, au milieu des années 1970, le ministère algérien de l’Agriculture a cherché à développer les fourrages, une société australienne leur a proposé un programme de développement dans lequel figuraient des semences de médicago originaires d’Algérie.
           Que ce soit pour le médicago ou d’autres espèces, des universitaires algériens, dont le professeur Aïssa Abdelguerfi, ont réalisé des prospections sur le territoire national. Mais les faibles moyens des laboratoires universitaires n’ont pas permis la conservation dans les meilleures conditions des graines collectées.
           Comme pour les blés sahariens et le médicago, à travers le monde de nombreuses espèces sont convoitées. Si la Californie est devenue un grand producteur de pistaches qui concurrence aujourd’hui la production iranienne, elle le doit aux prospections réalisées en 1929 par un botaniste américain. Celui-ci ramena d’un voyage en Iran une dizaine de kilos de pistaches qui furent immédiatement plantées.

           Semences locales, le risque d’érosion génétique
           La biodiversité algérienne est sous la menace d’une érosion génétique. Celle-ci ne provient pas seulement de l’introduction de variétés étrangères. L’urbanisation et les préférences des consommateurs peuvent avoir un effet négatif. C’est le cas des dattes avec la demande croissante en Deglett nour qui marginalise les autres variétés. À terme, cette diversité génétique pourrait être perdue. C’est là que la banque de gènes pourra intervenir par la création de vergers et la sauvegarde des semences.

           La Tunisie a adopté une stratégie originale afin de sauvegarder la diversité génétique locale des blés. Depuis 2010, la banque de gènes offre un sac de 50 kilos de semences locales aux agriculteurs qui s’engagent à restituer à la récolte la même quantité de grains. Ce programme est soutenu par la FAO qui lui a fourni une aide de 132 000 euros.
           Actuellement, ce sont près d’une centaine d’agriculteurs tunisiens qui cultivent 38 variétés autochtones. Il est apparu que les variétés locales de blé dur avaient un taux de protéines de 17 % contre seulement 12 % pour les variétés importées.
           Ce type d’approche devrait permettre à la future banque de gènes d’Algérie la conservation d’un patrimoine inestimable utilisable pour les agriculteurs et les générations futures.
Djamel Belaid                    


Récolte algérienne de céréales

Envoyé par Romain
https://www.tsa-algerie.com/recolte-algerienne-de-cereales -les-raisons-de-la-degringolade/

  - Par TSA - Par Djamel Belaid 15/01/2022

les raisons de la dégringolade

           Novembre dernier, à Belassel (Relizane), Bouabdallah Houmari est satisfait de l’arrivée de la pluie. Il peut enfin semer du blé. Sur la parcelle de cet agriculteur, un tracteur retourne le sol, aussitôt suivi de plusieurs ouvriers qui sèment manuellement le blé à la volée.

           En Algérie, les techniques rudimentaires persistent et les importations comblent le manque à gagner.
           Les chiffres de la dernière campagne sont décevants, seulement 13 millions de quintaux de blé contre 39 millions de quintaux auparavant. Les meilleures années, la production de céréales de l’Algérie atteint 60 millions de quintaux ; selon les experts, le potentiel local est de 100 millions de quintaux.

           Au ministère de l’Agriculture et du Développement rural, ces piètres performances sont attribuées au seul manque de pluie. Or, l’Algérie n’est pas l’unique pays à souffrir de ce handicap naturel. Un pays au climat semi-aride comme l’Australie arrive à de meilleurs résultats.
           Céréales, faiblesse des marges bénéficiaires

           L’agriculteur algérien n’est pas moins capable d’innovations que ses homologues étrangers. Les résultats obtenus au niveau de la culture de pastèque irriguée au goutte à goutte ou de la tomate primeur l’attestent. Pour ces cultures, l’innovation mise en œuvre est impressionnante et les marges bénéficiaires suivent.

           En mai 2016, un investisseur de M’Zirâa (Biskra) révélait au mensuel Le Monde Diplomatique avoir dégagé un bénéfice net de 600 millions de DA, ajoutant : « En une saison, j’ai quasiment remboursé mon investissement. » Un autre ajoutait : « On peut y gagner vraiment beaucoup d’argent. L’Etat propose des aides, et en plus il ne réclame aucun impôt. »
           Pour les services agricoles le challenge est donc de susciter le même engouement pour les céréales. Dans ce but sont utilisés prêts à taux réduit, semences certifiées, engrais et matériel agricole subventionné.

           Manifestement cela ne suffit pas. Les céréaliers se plaignent du prix élevé des engrais et du manque de disponibilité des semences d’orge, d’avoine et de blé.
           Dans les bonnes terres à blé de la région de Constantine, un agriculteur fait remarquer qu’il lui faut produire un rendement minimum de 20 quintaux par hectare pour commencer à dégager des bénéfices.

           Tout miser sur l’irrigation?
           Les services agricoles misent tout sur l’irrigation. Ainsi, en 2020, face au retard des pluies automnales sur 3,5 millions d’hectares, le directeur de l’Institut National des Sols de l’irrigation et du Drainage (Insid) suggérait tout simplement aux agriculteurs d’avoir recours à l’irrigation. Mais irriguer ne s’improvise pas.

           Le grand sud est vu comme un nouvel eldorado céréalier. D’immenses pivots irriguent en continu les cultures. Bénéficiant de subventions sur le matériel d’irrigation et de tarifs préférentiels pour leurs factures d’électricité, de gros investisseurs y déploient des moyens considérables.
           A Timimoune, sous pivot, une partie des semis se font avec un semoir géant à distribution pneumatique. L’engin équivaut à 4 semoirs ordinaires et ne se rencontre habituellement que dans les grandes plaines céréalières du Canada ou d’Australie.
           Cette débauche de moyens nécessite cependant un savoir-faire face à l’aridité du climat, faute de quoi les rendements plafonnent à 40 quintaux par hectare contre le double attendu. Les sols sableux ne retiennent ni l’eau ni les engrais dont les doses doivent être doublées.

           Un encadrement insuffisant
           Avec l’arrivée des pluies de novembre, à Belassel, Bouabdallah Houmari confie à Ennahar TV que tous ses voisins se sont mis à semer : « celui qui avait prévu de semer un hectare en sème quatre. »

           Mais les pluies tant attendues ont continué à tomber en décembre et les semis ont pris un retard considérable. Un technicien témoigne : « les blés semés en novembre sont bien installés, mais ceux de décembre sont chétifs et auront du mal à supporter l’actuelle période de froid ».
           Des semis en sec auraient permis de pallier à cette incertitude des pluies. Sur les blés de novembre, le désherbage permettrait de réduire les mauvaises herbes qui ont levé avec les pluies. Mais le retard technique est tel que les services agricoles en sont encore à devoir justifier aux agriculteurs de l’intérêt du désherbage. Seuls 25% des surfaces sont désherbées. C’est à dire les réserves de productivité existantes.

           A Belassel, l’agriculteur ajoute : « il pleut, on est confiant. On sème en s’en remettant à Dieu ». En Algérie, sur les 8 millions d’hectares de terres à blé, seule la moitié est travaillée. Le reste est laissé en jachère et sert au pâturage pour les moutons. Ils rapportent plus que le blé.
           Certes, d’autres agriculteurs ont un bon niveau technique et adoptent un itinéraire cultural intensif. Ils sont souvent suivis par des techniciens de firmes de produits phytosanitaires ou de l’Institut des Grandes Cultures (ITGC). Au sud sous pivot, avec force de produits chimiques, la société Profert propose un itinéraire technique clé en main aux nouveaux venus dans le métier. A Constantine, la société Axium développe la culture de lentilles en alternance avec le blé et prodigue un suivi de qualité aux agriculteurs sous contrat.

           Si à Guelma, les semis de lentilles progressent, à Mila en décembre dernier ils étaient au point mort. Les agriculteurs ne trouvaient plus de semences. Pour la CCLS locale, la faute incombait aux agriculteurs n’ayant pas fait part de leur intention de semis.
           Différentes approches s’affrontent donc : dynamisme commercial contre conformisme administratif. L’équation est d’arriver à semer plus de céréales dans un laps de temps limité tout en intensifiant le mode de culture. Le système actuel des Coopératives de Céréales et de Légumes Secs suffira-t-il à assurer seul ce challenge ?
Djamel Belaid                    


           NDLR:


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De M. Pierre Jarrige

Chers Amis
Voici les derniers Diaporamas sur les Aéronefs d'Algérie. A vous de les faire connaître.
    PDF 150                                                     N° 153
     N° 154                                                  N° 154A
    PDF 155                                                  PDF 156
    PDF 157                                           N° 157A
    PDF 158                                                     PDF 158A
Pierre Jarrige
Site Web:http://www.aviation-algerie.com/
Mon adresse : jarrige31@orange.fr

Lettre à mon père qui n’aurait pas supporté cette époque !

Par Jean-Paul Pelras
Envoyé par Annie
 
    Tu étais ouvrier agricole. À onze ans, tu labourais déjà avec un cheval. À 80, tu descendais de ton dernier tracteur. Et, voici quelques années, alors que tu venais de souffler tes 91 bougies, tu partis pour trop longtemps de l’autre côté du chronomètre. Ne connaissant pas ta nouvelle adresse, je ne t’écris pas souvent. Le vent, le chant des oiseaux et la course des étoiles étant mieux qualifiés que moi pour te donner des nouvelles du monde. Mais aujourd’hui et peut-être car j’aimerais pouvoir compter encore un peu sur toi, je viens te parler de ce monde qui, justement, n’y est plus tout à fait.
    Nous voilà pilotés par quelques jeunes godelureaux qui font fureur dans la maladresse et le mépris, qui croient savoir ce qui est bien pour nous, car ils savent avant tout ce qui est bien pour eux. Depuis le mois de mars nous avançons, un masque plaqué sur le visage. Pendant 6 mois les enfants ne sont pas allés à l’école. D’ailleurs, en parlant d’école, ceux de ta génération faisaient moins de fautes et savaient mieux compter avec un simple certificat d’études que la plupart de nos bacheliers.
    Que je te dise aussi, parce que certains font déjà semblant de l’oublier, au début de l’été, quelques élus zélés avaient installé des corridors sur le sable pour que nous puissions aller voir la mer. Oui, oui, tu peux me croire, nous n’avions même plus le droit d’aller voir la mer, ni la montagne d’ailleurs ! Et puis, plus rien, peut-être parce que les échevins de faction à Lutèce avaient compris qu’il ne fallait pas pousser le bouchon trop loin.

   Avant cela, ils nous ont aussi interdit de rendre visite à nos anciens dans les maisons de retraite où beaucoup sont morts sans avoir vu une dernière fois leurs épouses, leurs maris, leurs enfants. Il était interdit de marcher dans la rue, de nous déplacer d’un village à l’autre, d’aller débusquer la morille dans le bois d’à côté, pas moyen de se faire couper les cheveux, le coiffeur avait baissé son rideau, plus de dentiste, idem pour les rendez-vous médicaux. Les mariages aussi étaient interdits, aux enterrements pas plus de 10 personnes. “Interdit” : je répète souvent ce mot parce que, désormais, ici, c’est le plus couramment employé.
    Pour aller chez le boucher, chez l’épicier, “faire de l’essence” ou se dégourdir les mollets, il fallait se munir d’un laisser passer. Un bout de papier contrôlé par les gardes du cardinal de service que l’on nous obligeait à remplir nous-même, c’est dire le degré de soumission. Avec, comme en temps de guerre, çà et là, planqués derrière les volets, le relent des délations.
    Interdit de nous rassembler, interdit de danser, il n’y a pas eu de bal au village cet été. Interdit de jouer aux boules, au ballon, au loto dans la salle des fêtes, à la belote dans les bistrots. De toutes façons les bistrots étaient fermés et, d’ici quelques temps, ils le seront peut-être à nouveau. Figure-toi qu’ils envisagent même de nous prendre la fièvre à l’entrée des restaurants.
    Tous les soirs, à la télévision, nous devons écouter la parole des savants. C’est comme ça, on ne nous demande plus notre avis. Sauf, parce que ça c’est important et qu’il faut bien nous occuper, pour voter par téléphone et désigner celui qui aura le mieux chanté dans les émissions de téléréalité. D’ailleurs, à la télé, il n’y a plus que des séries policières, ça tire de tous les côtés, des meurtres en veux-tu en voilà. Tu sais même plus si c’est les informations ou du cinéma.

    Je te jure, ce ne sont pas des conneries…
    J’ai entendu dire aussi qu’il n’y aurait bientôt plus de pièces ni de billets, seulement des instructions sur des boites vocales et des chiffres sur des écrans d’ordinateurs. L’argent, c’est trop sale. Même avec ça, ils arrivent à nous faire peur pour mieux contrôler nos économies.
    Je te jure, ce ne sont pas des conneries. Arrête de rigoler, tout est vrai. Et attends, tu vas voir ce que nous réservent les “forces de progrès”. Si tu revenais, tu ne reconnaîtrais pas ces garrigues où tu taillais la vigne entre deux bourrasques de tramontane gelée. Là-haut, les écolos ont planté leurs grands tourniquets blancs pour brasser du vent aussi futile que leurs idées. Et des idées, ils n’en manquent pas. Tiens, récemment l’un d’entre eux a supprimé le sapin de Noël, une autre veut “éliminer” les hommes, certains veulent interdire le Tour de France. D’ailleurs cette année il a eu lieu en septembre, sans demoiselles pour embrasser le champion. De toutes façons, on ne s’embrasse plus, on ne se serre plus la main. Pendant ce temps, dans les villes, les vandales (ce mot me vaudra peut-être un procès…) continuent de tout péter. Dans les campagnes, d’autres abrutis crèvent les yeux des chevaux, leur coupent les oreilles, massacrent les génisses, éventrent les petits veaux. Un peu partout, les églises flambent, mais il ne faut pas en parler. Des détraqués s’en prennent à la République, mais il n’est pas certain qu’ils le fassent exprès.

   Bientôt nous ne pourrons plus rouler en voiture. Pour désherber, même sur les coteaux il va falloir reprendre la pioche. Un philosophe, qui sait certainement ce que travailler veut dire, préconise d’arrêter l’utilisation des moteurs pour avoir recours à l’énergie musculaire “animale ou humaine”. Ils sont allés chercher des ours dans les Carpates pour les installer dans les Alpes et les Pyrénées. Ils protègent les loups pendant que les troupeaux sont décimés. Et ils tirent des citoyens au sort pour imaginer le futur de nos paysans. Parce que ceux-là ont une “opinion”, tu comprends. Ils ont des idées. Même si certains ne savent pas faire la différence entre une aubergine et un navet.
    Les chasseurs aussi en prennent plein la gueule, les cirques n’auront bientôt plus d’animaux. Et, tiens-toi bien, parce que celle-là il fallait la trouver, la viande sera remplacée par des steaks végétaux fabriqués dans des labos.
    Comment expliquer ça à un gars comme toi qui descendais les rangées de vigne avec un sac de 50 kilos d’engrais coincé sous chaque bras, qui célébrait l’entrecôte et honorait le gigot, qui n’étais même pas rassasié après une centaine d’escargots ? Toi l’épicurien qui me conseilla un jour, alors que je sillonnais une parcelle longtemps restée en friche, de changer de sens parce que je ne suivais pas la bonne pente. Celle que l’eau devait emprunter naturellement. Celle que seuls les anciens connaissaient et que l’on ne pouvait distinguer à l’œil nu.
    Parce qu’il en va, je le crois, de l’eau et du cours des rivières comme de celui de l’histoire. Si nous perdons les repères, si nous oublions la réalité, si nous ne transmettons pas le savoir avec cette part consubstantielle de sensibilité qui demeure la part la plus profonde de l’homme, les sources vont se tarir. Et les chemins qui sont parfois ceux de nos libertés, risquent de se refermer sur la misère et le chaos.

   Allez Papa, je te laisse. Et surtout ne regrette rien. Ici-bas, Mad Max est en train de remplacer Don Camillo !
Jean-Paul Pelras
6 octobre 2020


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